Travail forcé des Ouïghours: l'industrie textile peine à montrer patte blanche

H&M avait annoncé cesser toute relation avec un producteur de fil chinois dénoncé par l'ONG australienne, et évoqué « une enquête dans toutes les fabriques de vêtements avec lesquelles il travaille en Chine » (Photo, AFP)
H&M avait annoncé cesser toute relation avec un producteur de fil chinois dénoncé par l'ONG australienne, et évoqué « une enquête dans toutes les fabriques de vêtements avec lesquelles il travaille en Chine » (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 19 janvier 2021

Travail forcé des Ouïghours: l'industrie textile peine à montrer patte blanche

  • L'enjeu est énorme: 20% du coton utilisé dans le monde est cultivé en Chine, essentiellement dans la province du Xinjiang peuplée d'Ouïghours
  • Début janvier 2021, le britannique Marks & Spencer - qui utilise 40 000 tonnes de fibres de coton par an - s'est engagé à ne pas utiliser de coton du Xinjian

PARIS: Accusée d'utiliser du coton issu du travail forcé des Ouïghours en Chine, l'industrie textile a dû passer au crible ses filières d'approvisionnement, une gageure face à des sous-traitants en cascade mais une nécessité face à des consommateurs de plus en plus regardants. 

L'enjeu est énorme: 20% du coton utilisé dans le monde est cultivé en Chine, essentiellement dans la province du Xinjiang peuplée d'Ouïghours, une minorité musulmane réprimée et exploitée par Pékin selon les défenseurs de droits humains, ce que nie le régime communiste.  

« A la saison des récoltes, des travailleurs arrivent en train d'autres provinces. Et au sein du Xinjiang, il y a aussi des travailleurs ruraux de tous les groupes ethniques qui ramassent le coton parce qu'ils le veulent, parce qu'en un mois ils peuvent gagner plus de 10 000 yuan (1 270 euros). Désormais, la cueillette est majoritairement mécanisée donc nous n'avons pas besoin d'un grand nombre de ramasseurs », a affirmé la semaine dernière un porte-parole officiel de cette province, pour balayer les accusations. 

Mais pour l'ONG Projet pour les droits de l'Homme des Ouïghours (UHRP), basée à Washington, « les chaînes d'approvisionnement de la plupart des grandes marques de vêtements sont salies par le travail forcé des Ouïghours ». 

Elle a appelé l'industrie du textile à cesser de se fournir dans le Xinjiang, jugeant que si « les grands groupes affirment ne pas tolérer le travail forcé chez leurs fournisseurs, ils n'apportent pas d'explication crédible sur la manière dont ils remplissent cette condition en continuant de faire des affaires dans une région où le travail forcé est répandu ». 

Le Royaume-Uni et le Canada ont décidé d'interdire les importations de marchandises soupçonnées d'être issues du travail forcé. De leur côté, les Etats-Unis avaient pris en décembre des mesures restrictives concernant les importations de coton du Xinjiang. 

En 2020, les rapports d'ONG et de think tanks se sont succédés pour dénoncer l'exploitation des Ouïghours dans des champs, ateliers et usines fournissant des matières premières ou des produits finis. 

Gap, Nike, Adidas, Calvin Klein, H&M, Zara, Puma, Uniqlo, Ralph Lauren, Tommy Hilfiger, Abercrombie & Fitch, Uniqlo, Fila, Victoria's Secret ou encore Lacoste ont notamment été accusés, en mars, par l'ONG Australian Strategic Policy Institute de s'être approvisionnés « potentiellement directement ou indirectement » - entre 2017 et 2019 - auprès de structures utilisant de la main-d'oeuvre ouïghoure provenant de « camps de rééducation ». 

Certaines de ces marques n'ont jamais réagi, d'autres ont démenti. Rares ont été celles qui ont annoncé des changements dans leur chaîne logistique. 

Tracer l'origine du coton 

Début janvier 2021, le britannique Marks & Spencer - qui utilise 40 000 tonnes de fibres de coton par an - s'est engagé à ne pas utiliser de coton du Xinjian. 

Adidas a également affirmé avoir dès 2019 « explicitement donné instruction à ses fournisseurs de ne pas s'approvisionner en fil » dans cette province. 

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La marque au crocodile s'est engagée «à cesser toute activité avec des sous-traitants qui seraient impliqués dans le travail forcé des Ouïghours» (Photo, AFP)

En septembre dernier, H&M avait annoncé cesser toute relation avec un producteur de fil chinois dénoncé par l'ONG australienne, et évoqué « une enquête dans toutes les fabriques de vêtements avec lesquelles il travaille en Chine ».  

Le géant suédois a toutefois reconnu, dans le cadre d'une commission parlementaire en Grande-Bretagne, qu'« au vu de la complexité des chaînes d'approvisionnement, du travail à la ferme avec l'égrenage (du coton) et son filage jusqu'au tissage et la confection, il n'y a aujourd'hui aucune solution disponible pour tracer intégralement l'origine du coton ». 

Même constat pour Gap, qui souligne que comme « une quantité significative du coton mondial est cultivé et filé au Xinjiang », il va faire en sorte de « mieux comprendre comment sa chaîne d'approvisionnement globale peut être indirectement impactée ». 

Maîtriser chaque maillon de la chaîne de production est « une lourde tâche qui se heurte parfois aux difficultés d'obtenir des informations fiables sur le terrain », a dit le PDG de Lacoste, Thierry Guibert, interpellé par l'eurodéputé de gauche Raphaël Glucksmann, engagé dans la défense des droits des Ouïghours. 

La marque au crocodile s'est engagée « à cesser toute activité avec des sous-traitants qui seraient impliqués dans le travail forcé des Ouïghours » et indique avoir réalisé « 337 audits sociaux en 2019 » pour débusquer d'« éventuels fautifs ». 

De la part d'une marque, « assumer qu'on ne sait pas, c'est déjà un grand pas. Mais tant que les donneurs d'ordre délègueront leurs responsabilités aux fournisseurs, on n'avancera pas », met en avant Rym Trabelsi, co-fondatrice de l'application indépendante Clear Fashion qui note les engagements des enseignes. 


Chalhoub Group célèbre 70 ans de croissance et d’innovation à Dubaï

Le groupe Chalhoub, acteur majeur du luxe au Moyen-Orient, a célébré son 70ᵉ anniversaire lors d’une réception organisée au Museum of the Future, son siège mondial et symbole de son ambition tournée vers l’avenir. (Photo fournie)
Le groupe Chalhoub, acteur majeur du luxe au Moyen-Orient, a célébré son 70ᵉ anniversaire lors d’une réception organisée au Museum of the Future, son siège mondial et symbole de son ambition tournée vers l’avenir. (Photo fournie)
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  • La célébration, organisée sous le thème Symphony of the Future, a mis à l’honneur les deux piliers du groupe : ses collaborateurs – plus de 16 000 dans la région, dont 7 300 aux Émirats – et ses partenaires internationaux
  • Patrick Chalhoub, président exécutif, a souligné que la réussite du groupe repose sur « une symphonie collective » et sur une culture d’entreprise fondée sur l’audace, l’entrepreneuriat et la résilience

DUBAI: Le groupe Chalhoub, acteur majeur du luxe au Moyen-Orient, a célébré son 70ᵉ anniversaire lors d’une réception organisée au Museum of the Future, son siège mondial et symbole de son ambition tournée vers l’avenir.

À cette occasion, le PDG Michael Chalhoub a rappelé l’importance stratégique des Émirats arabes unis dans le développement du groupe, où se réalise aujourd’hui 40 % de ses activités. Il a réaffirmé la volonté du groupe d’évoluer d’un rôle de partenaire vers celui de « House of Brands », en développant notamment ses propres créations tout en renforçant ses marques existantes. Parmi les projets phares : l’ouverture prochaine de Level Shoes aux États-Unis, une première pour une marque née à Dubaï.

Une « Symphonie du futur » portée par l’innovation et le capital humain

La célébration, organisée sous le thème Symphony of the Future, a mis à l’honneur les deux piliers du groupe : ses collaborateurs – plus de 16 000 dans la région, dont 7 300 aux Émirats – et ses partenaires internationaux.
Patrick Chalhoub, président exécutif, a souligné que la réussite du groupe repose sur « une symphonie collective » et sur une culture d’entreprise fondée sur l’audace, l’entrepreneuriat et la résilience.

 


Genève mise sur l'excellence horlogère pour renforcer ses liens économiques avec le Moyen-Orient

À travers l’exposition itinérante du Grand Prix d’Horlogerie de Genève (GPHG), Genève Tourisme a présenté à Dubaï les créations les plus innovantes de l’année, confirmant le rôle stratégique du marché du Golfe pour la croissance du secteur. (Photos fournies)
À travers l’exposition itinérante du Grand Prix d’Horlogerie de Genève (GPHG), Genève Tourisme a présenté à Dubaï les créations les plus innovantes de l’année, confirmant le rôle stratégique du marché du Golfe pour la croissance du secteur. (Photos fournies)
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  • Les pièces maîtresses exposées, comme la Breguet Classique Souscription — lauréate de l’« Aiguille d’Or » — ou la Möbius de Fam Al Hut, ont rappelé le poids économique de l’horlogerie suisse
  • La participation de Genève à la Dubai Watch Week 2025 a mis en lumière non seulement l’excellence horlogère suisse, mais aussi les ambitions économiques de la ville dans une région devenue essentielle pour son industrie du luxe

DUBAÏ: La participation de Genève à la Dubai Watch Week 2025 a mis en lumière non seulement l’excellence horlogère suisse, mais aussi les ambitions économiques de la ville dans une région devenue essentielle pour son industrie du luxe. À travers l’exposition itinérante du Grand Prix d’Horlogerie de Genève (GPHG), Genève Tourisme a présenté à Dubaï les créations les plus innovantes de l’année, confirmant le rôle stratégique du marché du Golfe pour la croissance du secteur.

Les pièces maîtresses exposées, comme la Breguet Classique Souscription — lauréate de l’« Aiguille d’Or » — ou la Möbius de Fam Al Hut, ont rappelé le poids économique de l’horlogerie suisse, qui représente plus de 26 milliards de francs suisses d’exportations annuelles, dont une part croissante est destinée aux Émirats arabes unis, au Qatar et à l’Arabie saoudite. Le Moyen-Orient demeure l’un des marchés les plus dynamiques pour les montres haut de gamme, soutenu par une clientèle jeune, fortunée et férue de pièces d’exception.

Pour Adrien Genier, directeur général de Genève Tourisme, l’événement constitue un levier majeur pour renforcer la visibilité et les relations commerciales de Genève :
« Le Golfe est aujourd’hui un marché stratégique pour Genève. Présenter notre savoir-faire ici, là où la demande pour le luxe et l’artisanat d’exception ne cesse de croître, permet de consolider notre attractivité économique et d’encourager de nouvelles collaborations. »

Raymond Loretan, président du GPHG, souligne l’importance de Dubaï dans l’écosystème mondial de l’horlogerie :
« La Dubai Watch Week joue un rôle clé dans le développement du marché régional. Y présenter nos créations permet de renforcer la présence suisse dans un hub économique qui façonne les tendances et les investissements du secteur du luxe. »

Genève, qui abrite des maisons prestigieuses telles que Patek Philippe, Rolex et Vacheron Constantin, combine tradition artisanale et innovation technologique pour alimenter une industrie qui représente un pilier essentiel de l’économie suisse. La ville attire également des talents et investisseurs internationaux, séduits par son écosystème horloger et son cadre économique stable.

Au-delà de son industrie phare, Genève s’appuie sur un art de vivre haut de gamme — gastronomie, nature, culture, shopping — pour renforcer son positionnement auprès des voyageurs du Golfe, dont le pouvoir d’achat et la fidélité constituent un moteur important pour le tourisme suisse.

Avec cette nouvelle édition de la Dubai Watch Week, Genève réaffirme sa volonté de renforcer ses liens économiques avec le Moyen-Orient, un marché incontournable pour l’avenir du luxe, du tourisme et des investissements liés à l’horlogerie.


Climat: l'UE face aux pays pétroliers et émergents, la COP30 dans l'impasse

Vue des camions de pompiers depuis l'extérieur de la COP30 à Belém au Brésil, le 20 novembre 2025, après qu'un incendie s'est déclaré dans un pavillon. (AFP)
Vue des camions de pompiers depuis l'extérieur de la COP30 à Belém au Brésil, le 20 novembre 2025, après qu'un incendie s'est déclaré dans un pavillon. (AFP)
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  • Les négociations de la COP30 à Belém sont dans l’impasse, l’Union européenne se retrouvant isolée face aux pays pétroliers et émergents qui refusent d’inscrire la sortie des énergies fossiles dans l’accord final
  • Les pays en développement exigent davantage de financements pour la transition et l’adaptation, tandis que les Européens menacent de quitter la conférence sans accord

BELEM: La conférence de l'ONU sur le climat à Belém (Brésil) est entrée en prolongation samedi, avec un face-à-face entre Union européenne d'un côté et des pays pétroliers et émergents de l'autre, en désaccord frontal.

Les négociations se sont poursuivies dans la nuit de vendredi à samedi, alors que la COP30 devait s'achever vendredi soir, après deux semaines de travaux. Où en est-on au petit matin?

"Nulle part", répond la ministre française de la Transition écologique, Monique Barbut, en arrivant à une réunion avec les Vingt-Sept tôt samedi. De nombreux négociateurs n'ont pas dormi de la nuit, alors que des parties du site à Belem commencent à être démontées.

Que doit dire la déclaration finale de cette COP30? La question divise les délégations venues jusqu'en Amazonie.

Une séance de clôture est programmée à 10h00 (13h00 GMT), mais l'horaire pourrait changer.

Pour les Européens, l'avenir passe obligatoirement par un message pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et les énergies fossiles. Celles-ci sont responsables de la grande majorité du réchauffement.

Des pays comme la Chine, la Russie, l'Arabie saoudite ou l'Inde sont désignés par la France comme menant le camp du refus.

Mais une partie du monde en développement ne soutient pas non plus la bataille contre les fossiles.

Ils expliquent que de nombreuses économies, pauvres ou émergentes, n'ont pas à l'heure actuelle les moyens d'une transition vers une consommation et une croissance moins denses en carbone, ou tout simplement de s'adapter à un climat déréglé. Ils réclament des pays les plus riches des engagements financiers supplémentaires pour aider les nations qui le sont moins.

- Européens "isolés" -

La présidence brésilienne de la conférence a consulté tout le monde vendredi sur une proposition d'accord qui ne contient plus le mot "fossiles". Et encore moins la création d'une "feuille de route" sur la sortie du pétrole, du charbon et du gaz, réclamée par au moins 80 pays européens, latino-américains ou insulaires, et soutenue par le président brésilien Lula lui-même.

L'Union européenne a évoqué vendredi la perspective de partir "sans accord". Ce serait un échec retentissant pour l'hôte, le Brésil, et pour une conférence organisée dans l'une des régions emblématiques des questions environnementales posées à la planète, l'Amazonie.

Mais cela pose un dilemme. Les Européens se retrouvent "isolés" dans leur refus du texte, selon une délégation d'un des 27. Ils hésitent sur l'attitude à adopter: claquer la porte pour marquer la gravité de la situation, ou chercher encore une conciliation par "peur (...) d'endosser la responsabilité" de l'échec du sommet.

Le projet d'accord de la présidence brésilienne demande des "efforts" pour tripler les financements pour l'adaptation des pays pauvres au changement climatique. Or les État appelés à contribuer appelés sont réticents, un an après une COP29, à Bakou, qui les a déjà engagés sur dix ans.

"Concentrons-nous sur l'essentiel: l'accès à l'énergie pour les plus pauvres, la sécurité énergétique pour tous et la durabilité énergétique pour la planète", dit à l'AFP l'Indien Arunabha Ghosh, émissaire de la COP30 pour l'Asie du Sud.

- "Nous mettre d'accord" -

Selon plusieurs observateurs et délégués interrogés par l'AFP, les débats se concentrent sur des modifications à la marge des trois principaux points de friction: l'ambition de réduction des énergies fossiles, l'aide financière due par les pays développés, et les tensions commerciales sur les taxes carbone aux frontières.

"Ceux qui doutent que la coopération soit la meilleure chose à faire pour le climat seront absolument ravis de voir qu'on n'arrive pas à nous mettre d'accord", lançait le président de la COP30, le diplomate André Corrêa do Lago.

L'idée d'une "feuille de route" pour accélérer la sortie du pétrole, du charbon et du gaz, est née de la frustration face au manque de concrétisation de l'engagement à leur abandon progressif pris à la COP28 il y a deux ans.

Peu comptaient sur le retour de cette question au menu, jusqu'à ce que le président brésilien la remette au centre du jeu au début du sommet.

Premier producteur de pétrole au monde, les États-Unis sont eux-mêmes absents de cette COP30, le président Donald Trump jugeant ces négociations inutiles.