Le schisme onusien éclipse les victimes d'armes chimiques en Syrie

Un véhicule des Nations Unies transporte les inspecteurs de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) à Damas, en Syrie. (Photo, Reuters/Archives)
Un véhicule des Nations Unies transporte les inspecteurs de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) à Damas, en Syrie. (Photo, Reuters/Archives)
Short Url
Publié le Jeudi 04 février 2021

Le schisme onusien éclipse les victimes d'armes chimiques en Syrie

  • C'est la 88ème fois que le Conseil de sécurité se réunit pour discuter de la question des armes chimiques en Syrie
  • En octobre 2013, la Syrie a soumis à l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) une déclaration initiale officielle sur son programme d'armes chimiques, en particulier un plan de destruction de ses stocks

NEW YORK: C’est à peine si les victimes d'attaques chimiques en Syrie ont été mentionnées lors d'une réunion du Conseil de sécurité de l'ONU mercredi pour discuter du régime d'Assad qui ne respecte pas une résolution ordonnant la destruction de toutes ces armes.

Une fois les victimes reléguées au second plan, les États membres se sont engagés dans des querelles internes, trop familières, ponctuées d’accusations et de calomnies.

C'est la 88ème fois que le Conseil de sécurité se réunit pour discuter de la question des armes chimiques en Syrie. Les membres ont été informés par Izumi Nakamitsu, Sous-Secrétaire général de l'ONU et Haut-Représentante pour les affaires de désarmement, sur la mise en œuvre de la résolution 2118.

La résolution a été adopté à l'unanimité en septembre 2013, à la suite d'une enquête de l'ONU qui a confirmé l'utilisation d'armes chimiques contre des civils dans une banlieue de Damas le mois précédent. Les images de personnes, notamment d'enfants, étouffant après avoir inhalé l'agent neurotoxique ont provoqué l'indignation dans le monde entier.

La résolution a exhorté le régime syrien à détruire tous ses stocks d'armes chimiques avant le milieu de 2014, et a dressé une liste de mesures punitives en cas de non-respect. La résolution interdit de surcroît à la Syrie d'utiliser, développer, produire, acquérir, stocker ou conserver des armes chimiques, ou de les transférer à d'autres États ou à des acteurs non étatiques.

En octobre 2013, la Syrie a soumis à l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) une déclaration initiale officielle sur son programme d'armes chimiques, en particulier un plan de destruction de ses stocks.

Nakamitsu a révélé mercredi au Conseil de sécurité que, plus de sept ans plus tard, la déclaration «ne peut être considérée comme exacte et complète, conformément à la Convention sur les armes chimiques (CAC)».

«Des lacunes, des incohérences et des divergences» ont été identifiées au sein de la déclaration, ce qui jette un doute sur l'étendue réelle de l'élimination des armes chimiques pendant la guerre civile, a-t-elle ajouté.

Bien que «certains progrès» aient été accomplis, aboutissant à la clôture de trois questions relatives à la déclaration initiale, Nakamitsu a souligné que 19 questions restent en suspens au moment où les enquêtes se poursuivent sur les allégations d'utilisation d'armes chimiques dans «un nombre d’incidents».

L'un de ces problèmes concerne une installation qui n'aurait jamais été utilisée pour produire des armes chimiques, selon les dires des autorités syriennes. Cependant, les informations et les preuves recueillies par l'OIAC depuis 2014 indiquent qu’une production d'agents neurotoxiques ou d’armes chimiques a effectivement eu lieu dans cette installation, assure Nakamitsu. L'organisation a ordonné au gouvernement syrien de divulguer les types et les quantités d'agents chimiques produits ou transformés en armes sur le site, mais le gouvernement syrien n'a pas encore répondu à cette requête.

«Je dis cela tous les mois car ça mérite d'être répété», insiste Nakamitsu. «Il est urgent non seulement d’identifier, mais de tenir pour responsables tous ceux qui ont utilisé des armes chimiques en violation du droit international. Sans une telle action, nous donnons carte blanche à leur utilisation en toute impunité».

Nakamitsu a également rappelé aux membres du conseil la nécessité de remédier aux disputes géopolitiques et de trouver un terrain d'entente dans les meilleurs délais.

«Pour faire face aux menaces actuelles contre la paix et la sécurité, nous devons trouver un moyen de recouvrer le bon sens», a-t-elle insisté. «Nous avons besoin d’un Conseil de sécurité uni».

Mais malgré le plaidoyer émouvant de Nakamitsu, les membres du conseil ont fait preuve de tout sauf d’unité.

La Russie est venue à la rescousse du régime d'Assad dans une tentative de discréditer le rapport de l'OIAC et ses «19 problèmes incroyables».

«Ce pays vit sous l’épée de Damoclès à cause des accusations de non-respect de la Convention sur les armes chimiques. Aujourd’hui, on décide de parler des questions en suspens liés à la déclaration initiale», a signalé Vassily Nebenzya, représentant permanent de la Russie auprès de l’ONU.

Nebenzya a averti les États membres que «faire pression sur la Syrie» pourrait démotiver le régime du pays de coopérer avec l'OIAC, avec laquelle il affirmé que le gouvernement syrien agi en «partenaire responsable… mais plus il fait de concessions, plus il est accusé».

Nebenzya a aussi critiqué l'OIAC et ce qu'il a appelé «la nature illégitime» de son équipe d'enquête et d'identification (EEI). Il a mentionné «d'autres faits, sur lesquels nos collègues occidentaux préfèrent garder le silence».

Il a aussi accusé les délégations occidentales de négliger les propositions de son pays pour enquêter sur certains sites en Syrie. Si ces enquêtes avaient eu lieu, toutes les questions du conseil auraient leurs réponses, selon lui.

Nebenzya a accusé ses «collègues occidentaux» de ne jamais s’exprimer lorsque le régime syrien fait un geste positif. Il décrit leur insistance sur les 19 questions liées à la déclaration initiale de la Syrie comme «une claire hypocrisie, et d’intérêts à géométrie variable». 

Il a accusé l’OIAC de partialité et exhorté le Conseil de sécurité à maintenir son objectivité, déclarant: «Nous entendons souvent des appels urgents à la Syrie pour qu'elle «coopère davantage». En réponse à cela, nous pouvons nous demander: qu’entendez-vous par «plus»? Il semble que la seule chose pour répondre à ces exigences serait que la Syrie «reconnaisse sa culpabilité» et confesse publiquement tous ses terribles péchés».

Nebenzya demande de plus «quel sera l'intérêt pour Damas de continuer à coopérer avec l'organisation? Après tout, quel est votre objectif: «anéantir» la Syrie comme vous l’avez fait avec l’Irak sous des prétextes farfelus, ou faire en sorte que le sol syrien soit exempt d’armes chimiques?».

Richard Mills, l'ambassadeur américain par intérim auprès de l'ONU, a déclaré: «Le régime d'Assad a utilisé à plusieurs reprises des armes chimiques contre le peuple syrien, et a ensuite tenté de se décharger de la responsabilité en faisant obstacle aux enquêtes indépendantes et en sapant à la fois la responsabilité et le travail de l'OIAC».

L’envoyé a accusé la Russie de protéger cette dictature en «répandant de la désinformation, en attaquant le travail professionnel de l'OIAC et en cherchant par ailleurs à affaiblir les efforts des nations pour tenir le régime d'Assad responsable de son utilisation des armes chimiques».

Les États-Unis ont soumis avec 45 autres parties un projet de décision à la Conférence des États membres de l’OIAC en réponse au non-respect par le régime syrien des mises en demeure demandées par le Conseil exécutif de l’OIAC, exigeant que le régime syrien prenne des initiatives pour remédier à la situation.

«Sans surprise, la Syrie n'a été capable de faire aucune des mesures énoncées dans la décision», affirme Mills. L’ambassadeur a appelé la Conférence des États membres à prendre les mesures appropriées lors de sa reprise au printemps, «afin que nous envoyions un message fort au régime d’Assad et ses partisans, à savoir que l’utilisation d’armes chimiques est en violation directe de la Convention (…) et elle aura certainement des conséquences».

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


La reconnaissance de la Palestine, message à Israël sur «les illusions de l'occupation» 

La prochaine reconnaissance de la Palestine par plusieurs Etats dont la France en marge de l'Assemblée générale de l'ONU adresse un message claire à Israël sur les "illusions" de l'occupation, a déclaré mercredi à l'AFP la ministre des Affaires étrangères palestinienne Varsen Aghabekian.(AFP)
La prochaine reconnaissance de la Palestine par plusieurs Etats dont la France en marge de l'Assemblée générale de l'ONU adresse un message claire à Israël sur les "illusions" de l'occupation, a déclaré mercredi à l'AFP la ministre des Affaires étrangères palestinienne Varsen Aghabekian.(AFP)
Short Url
  • "La reconnaissance n'est pas symbolique. C'est quelque chose de très important car cela envoie un message très clair aux Israéliens sur leurs illusions de [vouloir] continuer leur occupation pour toujours"
  • Cela envoie aussi "un message clair aux Palestiniens : 'nous soutenons votre droit à l'autodétermination'" et "cela nous donne un élan pour l'avenir, car nous allons construire dessus"

RAMALLAH: La prochaine reconnaissance de la Palestine par plusieurs Etats dont la France en marge de l'Assemblée générale de l'ONU adresse un message claire à Israël sur les "illusions" de l'occupation, a déclaré mercredi à l'AFP la ministre des Affaires étrangères palestinienne Varsen Aghabekian.

"La reconnaissance n'est pas symbolique. C'est quelque chose de très important car cela envoie un message très clair aux Israéliens sur leurs illusions de [vouloir] continuer leur occupation pour toujours", a déclaré Mme Aghabekian, en référence à l'occupation de la Cisjordanie et de la bande de Gaza par Israël.

Cela envoie aussi "un message clair aux Palestiniens : 'nous soutenons votre droit à l'autodétermination'" et "cela nous donne un élan pour l'avenir, car nous allons construire dessus", a-t-elle ajouté.


Les groupes de défense des droits exhortent le Liban à protéger la liberté d'expression dans la nouvelle loi sur les médias

Le Parlement libanais devrait s'assurer que le projet de loi sur les médias qu'il examine respecte le droit à la liberté d'expression, ont demandé mardi 14 organisations libanaises et internationales de défense des droits de l'homme. (AFP)
Le Parlement libanais devrait s'assurer que le projet de loi sur les médias qu'il examine respecte le droit à la liberté d'expression, ont demandé mardi 14 organisations libanaises et internationales de défense des droits de l'homme. (AFP)
Short Url
  • Les amendements proposés risquent de saper les efforts de réforme, selon les critiques
  • Les ONG demandent au Parlement d'abolir la diffamation criminelle et de mettre fin à la détention préventive

BEYROUTH: Le Parlement libanais devrait s'assurer que le projet de loi sur les médias qu'il examine respecte le droit à la liberté d'expression, ont demandé mardi 14 organisations libanaises et internationales de défense des droits de l'homme.

Il s'agit notamment de décriminaliser la diffamation, le blasphème, l'insulte et la critique des fonctionnaires, d'interdire la détention provisoire en cas d'infractions liées à la liberté d'expression et de supprimer les restrictions onéreuses imposées à la création de médias.

Ces appels interviennent alors que la commission parlementaire de l'administration et de la justice doit reprendre mardi l'examen du projet de loi.

Le 31 août, les membres du Parlement ont reçu des propositions d'amendements au texte du projet de loi qui, selon les organisations, comprenaient la réintroduction de la détention préventive et des dispositions qui criminalisent l'insulte et la diffamation.

Les groupes de défense des droits, dont Amnesty International, le Comité pour la protection des journalistes, Human Rights Watch et Reporters sans frontières, ont prévenu que les amendements proposés limiteraient davantage le travail des organisations de médias qui font l'objet d'une plainte en leur interdisant de publier des documents sur le plaignant tant que la procédure judiciaire est en cours.

Les lois libanaises sur la diffamation criminelle ont été utilisées à maintes reprises pour cibler et réduire au silence les critiques du gouvernement, les activistes et les journalistes au Liban, ces derniers étant régulièrement convoqués devant les agences de sécurité pour leur travail.

"Le Parlement devrait veiller à ce que ces pratiques cessent en adoptant une loi sur les médias qui soit entièrement conforme aux normes internationales en matière de droits de l'homme, notamment en ce qui concerne le droit à la liberté d'expression et à la liberté des médias", ont déclaré les organisations dans un communiqué.

"Le Parlement libanais devrait adopter une loi sur les médias qui inclue les protections des droits pour lesquelles les groupes de défense des droits et des médias libanais se battent depuis longtemps", ont-elles ajouté.

Les groupes de défense des droits, qui ont examiné les amendements proposés, se sont opposés à la réintroduction de la détention provisoire, y compris "dans des circonstances aggravées, telles que l'atteinte à la dignité ou à la vie privée des individus".

La détention provisoire n'est autorisée au Liban que pour les délits passibles de plus d'un an de prison. Elle est expressément interdite pour les délits liés aux médias dans les lois libanaises existantes sur les médias.

"S'il était adopté, cet amendement constituerait un recul significatif pour la protection du droit à la liberté d'expression et à la liberté des médias au Liban", ont déclaré les organisations.

Elles notent que l'amendement proposé ne précise pas ce que signifie "porter atteinte à la dignité ou à la vie privée des individus".

"Une loi vague qui laisse les gens dans l'incertitude quant à l'expression qui peut la violer a un effet dissuasif sur la liberté d'expression, car les gens peuvent s'autocensurer de peur de faire l'objet d'une convocation, d'une détention provisoire ou d'éventuelles poursuites judiciaires", ont-elles ajouté.

"Les dispositions vagues laissent également la loi sujette à des abus de la part des autorités, qui peuvent les utiliser pour faire taire les dissidents pacifiques.

Une telle interdiction législative générale constituerait "une atteinte grave au droit à la liberté d'expression".

Les amendements proposés obligeraient les stations de télévision titulaires d'une licence à fournir au ministère de l'information et au Conseil national de l'audiovisuel des rapports réguliers, y compris des informations détaillées sur la programmation des émissions, et impliqueraient que les médias électroniques soient soumis à un régime d'autorisation préalable plutôt qu'à un régime de notification.

"Si elles ne sont pas élaborées avec soin, ces exigences en matière d'autorisation risquent de permettre une prise de décision arbitraire quant à l'établissement et à l'exploitation des médias et pourraient faciliter les violations du droit à la liberté d'expression et à la liberté des médias", indique la déclaration.

Le Parlement libanais a commencé à discuter d'une nouvelle loi sur les médias en 2010 après qu'un ancien membre du Parlement, Ghassan Moukheiber, et la Fondation Maharat, une organisation non gouvernementale basée à Beyrouth et spécialisée dans les questions relatives aux médias et à la liberté d'expression, ont soumis une proposition visant à modifier la loi sur les publications du Liban, qui est dépassée.

En janvier 2023, le Parlement a créé une sous-commission chargée d'étudier et de modifier le projet de loi sur les médias, dont la version finale a été soumise à la Commission de l'administration et de la justice le 27 mai.

Le projet de loi soumis à la commission en mai comprenait des avancées dans la protection du droit à la liberté d'expression au Liban, notamment l'abolition de la détention provisoire et des peines de prison pour toutes les violations liées à l'expression. Il abroge également les dispositions relatives à la diffamation et à l'insulte du code pénal libanais et de la loi sur le système judiciaire militaire.

La commission de l'administration et de la justice a entamé les discussions sur le dernier projet de loi sur les médias le 29 juillet et a tenu trois réunions sur la question.

Cependant, les amendements proposés, présentés aux membres du Parlement le 31 août, ont été largement contestés par les groupes internationaux de défense des droits pour des dispositions considérées comme restreignant la liberté des médias.

Les groupes de défense des droits ont demandé à la commission de rendre ses discussions publiques afin de garantir la transparence des débats législatifs et de faciliter la participation effective du public.


L'Arabie saoudite, le Qatar et la Chine condamnent l'attaque terrestre israélienne à Gaza

De la fumée s'élève de Gaza après une explosion, vue d'Israël le 17 septembre 2025. (REUTERS)
De la fumée s'élève de Gaza après une explosion, vue d'Israël le 17 septembre 2025. (REUTERS)
Short Url
  • L'Arabie saoudite a critiqué la communauté internationale pour son incapacité à mettre fin à l'escalade
  • Le Qatar a réitéré son soutien à la création d'un État palestinien indépendant

RIYADH : L'Arabie saoudite, la Chine et le Qatar ont condamné mercredi l'extension des opérations militaires israéliennes à Gaza, avertissant que l'assaut violait le droit international et menaçait la stabilité régionale.

Dans une déclaration, le ministère saoudien des affaires étrangères a dénoncé ce qu'il a appelé "la poursuite des crimes" par les forces d'occupation israéliennes et a critiqué la communauté internationale pour son incapacité à prendre des mesures efficaces pour mettre fin à l'escalade.

Le Royaume a réaffirmé son rejet des actions qui portent atteinte au droit humanitaire international et a appelé à des efforts internationaux urgents pour mettre fin à la violence et assurer la protection des civils à Gaza.

Le ministère des affaires étrangères du Qatar a également condamné l'opération terrestre israélienne "dans les termes les plus forts", la qualifiant d'extension de la guerre contre le peuple palestinien et de "violation flagrante du droit international".

Il a averti que les actions d'Israël compromettaient les perspectives de paix par des politiques de "colonisation, d'agression et de racisme", et a exhorté la communauté internationale à prendre des mesures décisives pour garantir le respect des résolutions internationales.

Le Qatar a réitéré son soutien à la cause palestinienne et à la création d'un État palestinien indépendant sur les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale.

À Pékin, le porte-parole du ministère chinois des affaires étrangères, Lin Jian, a déclaré que la Chine "s'oppose fermement à l'escalade des opérations militaires d'Israël à Gaza et condamne tous les actes qui portent atteinte aux civils et violent le droit international", en référence au bombardement de la ville de Gaza.