Nominations aux Oscars: «Mank» en tête, les femmes en force

La statue des Oscars (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 16 mars 2021

Nominations aux Oscars: «Mank» en tête, les femmes en force

  • Souvent critiquée pour son manque de représentativité, l'Académie des Oscars a sélectionné cette année deux femmes sur cinq dans la catégorie du « meilleur réalisateur »
  • Jusqu'à présent, aucun film produit par une plateforme de streaming n'a remporté l'Oscar suprême du meilleur long-métrage et cette année Netflix a deux candidats sur huit

LOS ANGELES: Le film « Mank », ode en noir et blanc à l'âge d'or d'Hollywood, est arrivé lundi nettement en tête des nominations pour les Oscars qui font cette année la part belle aux femmes. 

Film de David Fincher produit par Netflix, « Mank » a obtenu dix nominations au total, dans les catégories du meilleur film, meilleur acteur (Gary Oldman), meilleur réalisateur, meilleure actrice dans un second rôle (Amanda Seyfried) ainsi que dans de nombreuses catégories techniques primées par l'Académie américaine des arts et sciences du cinéma, qui décerne les prestigieux prix. 

Viennent ensuite six films avec six nominations, dont « Nomadland » de Chloé Zhao avec Frances McDormand, considéré comme le favori par de nombreux experts après sa victoire aux Golden Globes, et « Les Sept de Chicago », drame judiciaire d'Aaron Sorkin autour de la répression des manifestations contre la guerre du Vietnam, avec Sacha Baron Cohen. 

Souvent critiquée pour son manque de représentativité, l'Académie des Oscars a sélectionné cette année deux femmes sur cinq dans la catégorie du « meilleur réalisateur », Chloé Zhao et Emerald Fennell pour « Promising Young Woman ». Il s'agit d'une première. 

Coqueluche d'Hollywood cette année, Chloé Zhao est aussi la première femme à concourir aux Oscars dans quatre catégories différentes (meilleur film, réalisation, montage et scénario), relève l'Académie. 

Autre record historique: 76 nominations au total sont allées à des femmes.  

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« Mank » est un film américain réalisé par David Fincher et sorti en 2020 en exclusivité sur Netflix (Photo, AFP)

Diversité 

Les cinémas sont restés totalement fermés depuis la mi-mars à Los Angeles en raison des restrictions sanitaires liées à la pandémie, ce qui a contraint les Oscars à repousser au 25 avril la cérémonie de remise des prix, du jamais vu. Coïncidence du calendrier, les salles obscures de « LA » ont reçu le feu vert pour une réouverture partielle à partir de ce lundi. 

Les Golden Globes ont été fustigés pour l'absence de films mettant en scène des acteurs noirs mais les Oscars ont évité cet écueil et sélectionné à six reprises « Judas and the Black Messiah », qui met en lumière le combat pour les droits civiques dans les années 1960 et l'action des Blacks Panthers. 

Daniel Kaluuya et Lakeith Stanfield sont tous deux en lice pour l'Oscar du meilleur second rôle masculin pour ce film, face notamment à Leslie Odom Jr (« One Night in Miami ») et Sacha Baron Cohen. 

Autres candidats sérieux de cette 93e édition, « Minari » et sa famille d'Américains d'origine sud-coréenne s'installant à la campagne, « The Father » avec le légendaire Anthony Hopkins, réalisé par l'auteur français Florian Zeller, et »Sound of Metal », avec le rappeur Riz Ahmed. Tous ont récolté six nominations également. 

Côté film étranger, le candidat français « Deux » n'a pas été retenu et c'est le film danois « Drunk », avec Mads Mikkelsen, qui semble favori. 

A noter la nomination posthume, très attendue, du défunt Chadwick Boseman, décédé l'an dernier d'un cancer à l'âge de 43 ans, pour son rôle dans « Le Blues de Ma Rainey », autre production Netflix. 

Avec ses nombreux films, dont l'audience a été dopée par les confinements liés à la pandémie, la plateforme de vidéo à la demande Netflix semble bien partie pour cette 93e édition des Oscars. 

VOD contre « Nomadland » 

Jusqu'à présent, aucun film produit par une plateforme de streaming n'a remporté l'Oscar suprême du meilleur long-métrage et cette année Netflix a deux candidats sur huit. 

Amazon Prime est présent dans cette catégorie phare avec « Sound of Metal » et a aussi décroché trois nominations pour « One Night in Miami » et deux autres pour « Borat 2 ». 

En raison du coronavirus qui a tenu le jury à l'écart des salles de projection et autres événements privés, les quelque 10 000 professionnels votant aux Oscars ont dû visionner les films sur la propre plateforme internet de l'Académie des Oscars. 

« On a presque l'habitude du streaming maintenant », a lancé un membre de l'Académie, qui défend traditionnellement l'expérience sur grand écran. « C'est vraiment incroyable ce qui peut se passer en une année. Pas un seul d'entre nous n'est allé dans une salle de cinéma », a-t-il ajouté, sous couvert de l'anonymat. 

Encore faudra-t-il aux œuvres des plateformes devancer « Nomadland », déjà sacré aux festivals de Venise et Toronto, et qui vient encore de s'illustrer aux Golden Globes et aux prix de la critique américaine. 

Road movie intime et contemplatif, le film de Chloé Zhao est produit par Searchlight, filiale de Disney qui était déjà derrière le succès de « La Forme de l'Eau » et de « Birdman » aux Oscars. Le film prend toute son ampleur sur grand écran et sa campagne de promotion a eu la bonne idée d'inclure des projections privées en drive-in, ce qui pourrait constituer un atout. 

« Je pense que ‘Nomadland’ est de facto le favori du moment », a estimé ce membre de l'Académie. 

La cérémonie des 93e Oscars se déroulera dans différents lieux, parmi lesquels le Dolby Theatre d'Hollywood qui accueille habituellement cette soirée de gala. 

C'est Steven Soderbergh, réalisateur de « Contagion », qui sera aux manettes de la cérémonie.

LES NOMINATIONS DANS LES PRINCIPALES CATÉGORIES

Meilleur film 

  • « The Father » 
  • « Judas and the Black Messiah » 
  • « Minari »  
  • « Nomadland »  
  • « Promising Young Woman » 
  • « Sound of Metal »  
  • « Les Sept de Chicago » 
  • « Mank » 

Meilleur réalisateur 

  • Chloé Zhao, « Nomadland »  
  • David Fincher, « Mank » 
  • Lee Isaac Chung, « Minari »  
  • Emerald Fennell, « Promising Youg Woman » 
  • Thomas Vinterberg, « Drunk »  
  • Meilleure actrice 
  • Viola Davis, « Le Blues de Ma Rainey » 
  • Andra Day, « Billie Holiday, une affaire d'Etat » 
  • Vanessa Kirby, « Pieces of a Woman »   
  • Frances McDormand, « Nomadland » 
  • Carey Mulligan, « Promising Young Woman » 

Meilleur acteur 

  • Riz Ahmed, « Sound of Metal » 
  • Chadwick Boseman, « Le Blues de Ma Rainey » 
  • Anthony Hopkins, « The Father » 
  • Gary Oldman, « Mank » 
  • Steven Yeun, « Minari » 
  • Meilleure actrice dans un second rôle 
  • Maria Bakalova, « Borat 2 » 
  • Glenn Close, « Une ode américaine » 
  • Olivia Colman, « The Father » 
  • Amanda Seyfried, « Mank » 
  • Yuh-Jung Youn, « Minari » 
  • Meilleur acteur dans un second rôle 
  • Sacha Baron Cohen, « Les Sept de Chicago »  
  • Daniel Kaluuya, « Judas and the Black Messiah » 
  • Leslie Odom, Jr., « One Night in Miami » 
  • Paul Raci, « Sound of Metal » 
  • LaKeith Stanfield, « Judas and the Black Messiah » 

Meilleur film étranger 

  • « Drunk » (Danemark, Pays-Bas, Suède) 
  • « Shao Nian De Ni » (Hong Kong) 
  • « L'Affaire collective » (Roumanie) 
  • « L'homme qui a vendu sa peau » (Tunisie) 
  • « La voix d'Aida » (Bosnie) 

Meilleur film d'animation 

  • « En avant »  
  • « Voyage vers la lune » 
  • « Shaun le mouton le film: la ferme contre-attaque » 
  • « Soul »  
  • « Le peuple loup » 

Meilleur documentaire 

  • « L'Affaire collective » 
  • « Crip Camp: la révolution des éclopés » 
  • « The Mole Agent » 
  • « La sagesse de la pieuvre » 
  • « Time » 

Meilleur scénario original 

  • « Judas and the Black Messiah » - Will Berson et Shaka King 
  • « Minari » - Lee Isaac Chung 
  • « Promising Young Woman » - Emerald Fennell 
  • « Sound of Metal » - Darius Marder et Abraham Marder 
  • « Les Sept de Chicago » - Aaron Sorkin 

Meilleur scénario adapté 

  • « Borat 2 » - Sacha Baron Cohen, Anthony Hines, Dan Swimer, Peter Baynham, Erica Rivinoja, Dan Mazer, Jena Friedman, Lee Kern  
  • « The Father » - Christopher Hampton et Florian Zeller  
  • « Nomadland » - Chloé Zhao  
  • « One Night in Miami » - Kemp Powers  
  • « Le tigre blanc » - Ramin Bahrani 

Films avec plus de cinq nominations 

  • « Mank » - 10  
  • « The Father » - 6  
  • « Judas and the Black Messiah » - 6  
  • « Minari » - 6  
  • « Nomadland » - 6  
  • « Sound of Metal » - 6  
  • « Les Sept de Chicago »  - 6 

La bibliothèque Jadal est une oasis culturelle dans la province orientale de l'Arabie saoudite

Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
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  • Ali Al-Herz a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres, offrant aux visiteurs un espace où la mémoire, la philosophie et la culture prennent vie.
  • adal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

DHAHRAN : Dans le village tranquille d'Umm Al-Hamam, situé dans la province orientale de l'Arabie saoudite, une passion de longue date pour les livres s'est transformée en un havre culturel.

Ali Al-Herz, bibliophile et archiviste littéraire, a transformé sa maison en une bibliothèque d'exception nommée Jadal, un véritable trésor contenant plus de 37 000 livres, plus de 100 000 journaux et magazines, ainsi que des antiquités, dont certaines datent de plus d'un siècle.

Mais Jadal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

Al-Herz a déclaré à Arab News : « Depuis ma naissance, j'ai été entouré des livres de ma mère. J'ai grandi immergé dans cette passion, à tel point qu'elle m'a complètement envahi ; je suis devenu un rat de bibliothèque. »

L'étincelle qui a tout déclenché a été la rencontre d'Al-Herz avec l'épopée Sirat Antar à l'âge de 13 ans. « À partir de cette épopée, et à travers elle, j'ai commencé à explorer d'autres mondes », a-t-il déclaré. 

C'est cette curiosité et cette fascination qui ont finalement conduit Al-Herz à créer l'une des initiatives les plus originales du royaume d'Arabie saoudite.

Le nom « Jadal » signifie « débat » ou « discussion » en arabe, reflétant l'esprit curieux de la bibliothèque. Pour Al-Herz, l'objectif n'est pas seulement de préserver les textes, mais aussi l'idée de questionner et d'explorer les idées.

Al-Herz a déclaré : « J'ai choisi ce nom pour la bibliothèque, car il est profondément ancré dans l'histoire philosophique de la Grèce antique, ainsi que dans notre propre tradition culturelle arabo-islamique, en particulier dans notre héritage religieux. »

L'atmosphère philosophique imprègne les trois salles principales, nommées d'après Socrate, Platon et Aristote, qui accueillent les visiteurs dans un univers dédié à la lecture et à la réflexion. 

Des manuscrits rares, des textes anciens, des journaux et des antiquités ont été soigneusement archivés. Chaque pièce est un murmure du passé qui s'adresse à l'avenir. 

Al-Herz explique : « Même mon intérêt récent pour l'achat de livres s'est principalement orienté vers les éditions rares et les imprimés anciens, afin de créer une harmonie entre patrimoine et modernité. »

Mais Jadal ne se laisse pas envahir par la nostalgie, car Al-Herz organise toutes les deux semaines une réunion littéraire. Cet événement fait revivre une tradition qui était autrefois importante dans la vie intellectuelle des Arabes.

C'est un environnement où écrivains, universitaires et penseurs se réunissent autour d'un café arabe pour échanger des idées dans une atmosphère animée. 

À une époque où les gens recherchent des informations instantanées en ligne, Al-Herz continue d'utiliser des méthodes traditionnelles. « Il y a une lutte permanente entre deux générations », observe-t-il. « La victoire reviendra finalement à cette dernière génération, une fois que ma génération aura disparu. Les bibliothèques papier seront alors transformées en musées. »

Il a peut-être raison, mais pour l'instant, au cœur de la campagne de Qatif, la bibliothèque Jadal continue d'exister, et c'est un lieu où l'encre, la mémoire, le débat et le patrimoine continuent de façonner l'âme culturelle du Royaume. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com 


Amin Maalouf apporte un soutien inattendu aux langues régionales

Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
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  • Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs,
  • Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale.

PARIS : Une initiative d'un collectif visant à enseigner le patrimoine littéraire dans les langues régionales de France a reçu lundi  un soutien inattendu : celui du secrétaire perpétuel de l'Académie française, Amin Maalouf.

M. Maalouf, écrivain franco-libanais, a été élu en 2023 à la tête d'une institution dont la mission est de veiller au rayonnement et à l'intégrité de la langue française.

Toutefois, il soutient la démarche du Collectif pour les littératures en langues régionales, qui suggère un enseignement de ce type au collège ou au lycée, a indiqué ce collectif à l'AFP.

Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs, afin de sensibiliser à la « richesse de la production littéraire » dans d'autres langues que le français. 

« M. Maalouf, comme nous, est convaincu qu'il est nécessaire que les élèves français découvrent ces trésors culturels », écrit ce collectif à M. Bayrou, qui parle lui-même le béarnais.

Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale (de l'alsacien au tahitien, en passant par le basque ou le corse), traduits en français.

On y trouve entre autres un poème en provençal de Frédéric Mistral (prix Nobel de littérature en 1904) intitulé Mirèio, une chronique en breton de Pierre-Jakez Hélias intitulée Bugale ar Republik, un court récit en créole martiniquais de Raphaël Confiant intitulé Bitako-a, ainsi qu'une chanson en picard d'Alexandre Desrousseaux intitulée Canchon dormoire (plus connue sous le nom de P'tit Quinquin).

« Il ne s'agit pas de donner des cours de langues régionales, mais de présenter des œuvres issues des littératures en langues régionales, que ce soit en français ou en version bilingue », précise le collectif.

Idéalement, selon lui, les élèves aborderaient des langues issues d'autres régions que la leur. « Pourquoi seuls les élèves antillais apprendraient-ils qu'il existe une littérature en créole ? », demande ce collectif, qui présente son initiative à la presse lors d'une visioconférence lundi après-midi. 


L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle

L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle. (Photo Fournie)
L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle. (Photo Fournie)
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  • Fraîchement conçue, cette installation baignée de jaune, ancrée dans les œuvres passées de l'artiste, offre une expérience sensorielle riche et complexe ainsi qu'un commentaire culturel incisif.
  • « The Social Health Club » s'articule autour d'objets trouvés au marché Haraj de Djeddah en 2018.

RIYAD : Ce mois-ci, l'artiste saoudienne Ahaad Alamoudi fait monter la température au Basel Social Club qui se tient jusqu'au 21 juin dans la ville suisse avec sa dernière installation, « The Social Health Club ». 

Fraîchement conçue, cette installation baignée de jaune, ancrée dans les œuvres passées de l'artiste, offre une expérience sensorielle riche et complexe ainsi qu'un commentaire culturel incisif. Elle marque également une première pour l'artiste avec un élément de performance en direct.

Basée à Djeddah, Alamoudi est connue pour créer des installations multimédias immersives s'inspirant de la dynamique complexe de son pays natal en pleine évolution. « The Social Health Club » s'articule autour d'objets trouvés au marché Haraj de Djeddah en 2018, notamment divers équipements de sport, dont un rameur.

« Ce sont des pièces que j'ai chinées dans des brocantes. J'aime le fait qu'aucune instruction n'accompagne ces machines : je ne connais ni leur nom, ni leur provenance, ni leur fabricant. Mais elles font désormais partie du paysage urbain dans lequel j'évolue. J'ai essayé de créer un espace ludique », a-t-elle déclaré à Arab News. 

Dans « The Social Health Club », les équipements, peints principalement dans un jaune vif et saturé, restent intacts, symbolisant une culture obsédée par l'auto-optimisation. Au cœur de l'installation se trouve un caméo représentant un fer à repasser peint en jaune, déjà présent dans son œuvre vidéo de 2020 intitulée « Makwah Man » (Makwah signifie « fer à repasser » en arabe).

« Beaucoup de mes œuvres sont issues d'un récit que je crée dans une vidéo. Dans « Makwah Man », cet homme vêtu d'une thobe jaune repasse un long morceau de tissu jaune au milieu du désert. Et pendant qu'il repasse, il nous dit comment vivre notre vie. Mais en nous disant comment vivre notre vie, il commence aussi à remettre en question la sienne, à comprendre le rôle du pouvoir, à prendre conscience de la pression du changement et de l'adaptation », explique Alamoudi. 

« Le jaune est présent dans la vidéo, mais l'artiste porte également une thobe jaune. Il y a aussi, dans cette version présentée à Art Basel, un portant de thobes jaunes qui tournent dans l'exposition. Pour moi, la thobe jaune est un symbole unificateur. J'essaie de dire que nous vivons tous cela différemment. Ainsi, dans la performance (pour « The Social Health Club »), un culturiste local vêtu d'une thobe jaune fera des exercices sur ces machines. Il n'a pas de règles à suivre. Il ne connaît rien, ne sait pas comment utiliser « correctement » l'équipement. Il entrera dans l'espace et utilisera les machines comme il le pourra.

« La performance sera enregistrée. Mais je pense que c'est plutôt une activation », a-t-elle poursuivi. « Ce n'est pas l'œuvre elle-même. L'œuvre existe sous la forme des machines. 

« Le Social Health Club » a été créé en étroite collaboration avec la conservatrice Amal Khalaf. Ensemble, ils se sont rendus à Djeddah où Alamoudi a pu découvrir avec elle des « machines un peu inhabituelles, différentes des machines classiques que l'on trouve dans les salles de sport et dont tout le monde connaît immédiatement l'utilité », explique Alamoudi.

« Elle est vraiment incroyable », a-t-elle poursuivi. « Nous avons vraiment construit cet espace ensemble. En gros, j'ai principalement créé la vidéo ; tout le reste a été construit à partir de là. Elle m'a beaucoup aidée. Elle s'est vraiment intéressée aux changements sociaux et à la manière dont nous les abordons. Notre collaboration a été parfaite. »

Le jaune domine chaque centimètre carré de l'œuvre, de manière délibérée et intense. 

« Je suis obsédé par les symboles dans certaines de mes œuvres. Et cela s'accompagne également d'une couleur », explique Alamoudi. « Je voulais mettre en valeur quelque chose de luxueux, de coloré, presque comme de l'or, mais qui n'est pas de l'or. Son apparence est assez austère. » 

Le jaune est à la fois une invitation et un avertissement. « Je pense que le jaune est également assez trompeur. J'aime cette couleur qui incite les gens à s'approcher pour voir ce qui se passe, mais qui les amène en même temps à se demander ce que c'est  elle est si agressive qu'elle en devient un peu inconfortable. »

L'interaction du spectateur est essentielle à la signification de l'œuvre. 

« Je pense que les machines représentent quelque chose et qu'elles véhiculent quelque chose, mais elles sont en réalité activées par les gens, par ce que les gens font avec elles », explique Alamoudi. « C'est pourquoi j'encourage beaucoup de spectateurs à interagir avec les œuvres, à les utiliser ou à essayer de les utiliser sans aucune instruction. Beaucoup de personnes qui entrent dans l'espace peuvent avoir peur de les toucher ou d'interagir avec elles. La présence de l'artiste qui active les structures ajoute une autre dimension à l'œuvre elle-même. »

Elle espère que les visiteurs se sentiront libres d'explorer les œuvres, sans être encombrés par des attentes.

« Les gens sont censés les utiliser à leur guise. Ils peuvent s'asseoir dessus, se tenir debout dessus, les toucher — ils peuvent aussi les laisser tranquilles », conclut-elle en riant. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com