Syrie: deux ans après sa défaite, l'EI toujours dangereux

Des véhicules détruits et des bâtiments endommagés dans le village de Baghouz, dans la province de Deir Ezzor, dans l'est de la Syrie, près de la frontière irakienne,  le 24 mars 2019 (Photo, AFP)
Des véhicules détruits et des bâtiments endommagés dans le village de Baghouz, dans la province de Deir Ezzor, dans l'est de la Syrie, près de la frontière irakienne, le 24 mars 2019 (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 23 mars 2021

Syrie: deux ans après sa défaite, l'EI toujours dangereux

  • Fer de lance de la lutte anti-EI en Syrie, les FDS, soutenues par une coalition internationale dirigée par Washington, avaient annoncé le 23 mars 2019 avoir pris Baghouz
  • Le groupe jihadiste lance encore des attaques meurtrières dans le vaste désert syrien, visant les forces kurdes comme l'armée du régime de Bachar al-Assad

SYRIE: Le groupe jihadiste Etat islamique (EI) représente toujours un grand danger, ont mis en garde mardi dans l'est de la Syrie les Forces démocratiques syriennes (FDS) dominées par les Kurdes, qui marquent le deuxième anniversaire de la chute du « califat ». 

Fer de lance de la lutte anti-EI en Syrie, les FDS, soutenues par une coalition internationale dirigée par Washington, avaient annoncé le 23 mars 2019 avoir pris Baghouz, ultime bastion des jihadistes en Syrie au terme d'une bataille longue, meurtrière et dévastatrice. 

La mise en déroute de l'EI dans ce petit village aux confins orientaux de la Syrie en guerre, tout près de la frontière avec l'Irak, signifiait la fin du « califat », autoproclamé en 2014 sur un vaste territoire à cheval sur les deux pays. 

« La chute du dernier carré de territoire de l'EI (...) ne signifie pas la défaite totale », a lancé mardi un porte-parole des FDS, en marge d'une parade militaire au champ pétrolier d'Al-Omar, au nord de Baghouz. 

« Nous sommes au stade le plus difficile de notre lutte contre le terrorisme », a-t-il souligné. 

Car deux ans après, le groupe jihadiste lance encore des attaques meurtrières dans le vaste désert syrien, visant les forces kurdes comme l'armée du régime de Bachar al-Assad. 

L'organisation ultra-radicale mobilise toujours quelque 10 000 combattants en Irak et en Syrie, selon un récent rapport onusien. 

Et c'est sans compter les 11 0000 jihadistes détenus dans les prisons kurdes, selon l'ONU, ou leurs femmes et enfants retenus dans des camps, que certains considèrent comme de véritables bombes à retardement. 

« Attentats terroristes »  

Mardi, des combattants des FDS en treillis ont défilé sous le regard de hauts responsables kurdes, chefs des tribus locales et représentants de la coalition internationale anti-EI. 

Sur un mur, les drapeaux des FDS et des milices kurdes encadraient une série de photos des hommes et des femmes tombés au combat dans la lutte contre les jihadistes. 

Pendant plusieurs années, l'organisation ultra violente, qui a su attirer des milliers d'étrangers, a fait régner la terreur, enchaînant les attentats spectaculaires au Moyen-Orient et dans des capitales européennes, comme Paris ou Bruxelles. 

Sur les territoires qu'il contrôlait, le groupe avait instauré une véritable administration, frappant sa propre monnaie et prélevant des impôts, établissant une police des moeurs. 

En octobre 2019, le chef de l'EI Abou Bakr al-Baghdadi a été tué dans une opération américaine dans le nord-ouest de la Syrie. 

Avec son successeur, qui se fait appeler Abou Ibrahim al-Hachimi al-Qourachi, l'organisation poursuit son insurrection, revendiquant des attentats en Afrique de l'Ouest mais aussi en Afghanistan ou encore en Syrie et en Irak. 

En février dernier, 26 combattants pro-régime ont péri dans une embuscade dans la province syrienne de Deir Ezzor (est). 

Le chef du Commandement central américain, le général Kenneth McKenzie, évoquait en février le « projet » de l'EI de »maintenir son insurrection en Irak et Syrie ainsi qu'une présence cyber planétaire, tout en conservant une structure cellulaire qui lui permet de commettre des attentats terroristes ». 

« Autre Guantanamo »  

Quelque 43 000 étrangers sont toujours retenus par les Kurdes dans le nord-est de la Syrie, des hommes dans les prisons, des femmes et des enfants dans les camps, selon Human Rights Watch (HRW). 

Parmi eux se trouvent environ 27 500 mineurs étrangers, dont au moins 300 dans des prisons, précise l'ONG. 

Ces étrangers « entament une troisième année de détention illégale dans des conditions qui mettent leur vie en danger, tandis que leurs gouvernements détournent le regard », a fustigé l'experte de HRW Letta Tayler dans un communiqué. 

L'organisation va jusqu'à dénoncer « la création d'un autre Guantanamo ». 

Si les Kurdes n'ont de cesse d'appeler les pays concernés à rapatrier femmes et enfants, la plupart des Etats, Occidentaux en tête, sont frileux. 

Certains, dont la France, ont permis le retour d'enfants, souvent orphelins, ou d'un nombre très limité de femmes. 

La majorité des familles étrangères affiliées à l'EI se trouvent dans le camp surpeuplé d'Al-Hol (nord-est), où vivent près de 62.000 personnes, dont 93% de femmes et d'enfants. 

« Le danger de l'EI ça reste les milliers de détenus et les milliers de familles dans les camps d'Al-Hol et de Roj, qui gardent l'idéologie extrémiste », ont averti mardi les FDS, pointant du doigt « le manque d'action sur la scène internationale pour résoudre ce dossier ». 


Liban: deux morts dans une frappe israélienne contre un véhicule dans le sud 

Des équipes d'urgence libanaises bouclent le périmètre d'un incendie sur le site des frappes israéliennes suite à des ordres d'évacuation, dans la banlieue sud de Beyrouth, le 27 avril 2025. Photo d'illustration (Photo par AFP)
Des équipes d'urgence libanaises bouclent le périmètre d'un incendie sur le site des frappes israéliennes suite à des ordres d'évacuation, dans la banlieue sud de Beyrouth, le 27 avril 2025. Photo d'illustration (Photo par AFP)
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  • Deux personnes ont été tuées jeudi dans une frappe israélienne contre un véhicule dans le sud du Liban
  • Israël mène régulièrement des frappes au Liban, principalement dans le sud, affirmant cibler le Hezbollah pro-iranien, plus de cinq mois après l'entrée en vigueur d'un cessez-le-feu le 27 novembre

BEYROUTH: Deux personnes ont été tuées jeudi dans des frappes israéliennes sur une localité du sud du Liban, a annoncé le ministère libanais de la Santé.

Le ministère a indiqué dans un communiqué qu'une frappe "menée par un drone de l'ennemi israélien contre une voiture dans la localité de Maiss el-Jabal a tué un Libanais et blessé deux Syriens".

Une autre personne a été tuée dans une seconde frappe sur cette localité, a ajouté le ministère dans un autre communiqué.

Israël mène régulièrement des frappes au Liban, principalement dans le sud, affirmant cibler le Hezbollah pro-iranien, plus de cinq mois après l'entrée en vigueur d'un cessez-le-feu le 27 novembre.

Au début de la guerre à Gaza en octobre 2023, déclenchée par une attaque sans précédent du Hamas, le Hezbollah a tiré des roquettes à partir du sud du Liban sur Israël, affirmant agir en soutien à son allié palestinien.

Israël a réagi en septembre 2024 par d'intenses bombardements sur le Liban, principalement contre les bastions du Hezbollah, qui est sorti très affaibli de la guerre.

Une commission regroupant le Liban, Israël, les Etats-Unis, la France et l'ONU est chargée de superviser l'application du cessez-le-feu.

Beyrouth presse la communauté internationale de faire pression sur Israël pour qu'il mette fin à ses attaques et se retire de cinq positions frontalières où il a maintenu des troupes, malgré l'accord.

Le Liban affirme respecter l'ensemble de ses engagements et impute à Israël la responsabilité du non-respect de l'accord.

Lundi, l'armée israélienne a indiqué avoir frappé plus de 50 "cibles terroristes" en un mois au Liban "après des violations du cessez-le-feu et des accords entre Israël et le Liban, posant une menace pour l'Etat d'Israël et sa population".

 


Les Emirats vont lever l'interdiction à leurs ressortissants de se rendre au Liban

Les Emirats arabes unis vont lever l'interdiction faite à leurs ressortissants de se rendre au Liban, qui avait été imposée lors d'une querelle diplomatique en 2021, selon une déclaration conjointe des deux pays publiée jeudi. (AFP)
Les Emirats arabes unis vont lever l'interdiction faite à leurs ressortissants de se rendre au Liban, qui avait été imposée lors d'une querelle diplomatique en 2021, selon une déclaration conjointe des deux pays publiée jeudi. (AFP)
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  • En 2021, les Emirats arabes unis avaient interdit à leurs ressortissants de se rendre au Liban, et rappelé leurs diplomates en poste à Beyrouth en signe de solidarité avec l'Arabie saoudite, après les critiques d'un ministre libanais envers Riyad
  • Ni Beyrouth ni Abou Dhabi n'avaient interdit les déplacements des Libanais aux Emirats arabes unis, bien que certains aient eu des difficultés à obtenir des visas

DUBAI: Les Emirats arabes unis vont lever l'interdiction faite à leurs ressortissants de se rendre au Liban, qui avait été imposée lors d'une querelle diplomatique en 2021, selon une déclaration conjointe des deux pays publiée jeudi.

Cette décision a été annoncée au lendemain d'une rencontre à Abou Dhabi entre le président libanais Joseph Aoun et son homologue émirati Mohammed ben Zayed Al-Nahyane.

"Les deux parties sont convenues d'autoriser les citoyens à voyager, après avoir pris les mesures nécessaires pour faciliter les déplacements entre les deux pays et mis en place les mécanismes appropriés", indique le communiqué.

En 2021, les Emirats arabes unis avaient interdit à leurs ressortissants de se rendre au Liban, et rappelé leurs diplomates en poste à Beyrouth en signe de solidarité avec l'Arabie saoudite, après les critiques d'un ministre libanais envers l'intervention militaire de Ryad au Yémen.

Ni Beyrouth ni Abou Dhabi n'avaient interdit les déplacements des Libanais aux Emirats arabes unis, bien que certains aient eu des difficultés à obtenir des visas.

Le Fonds d'Abou Dhabi pour le développement, qui soutient des projets d'infrastructure dans les pays en développement, enverra une délégation au Liban pour étudier d'éventuels projets communs, ajoute le communiqué.

Les liens entre les deux pays se sont détériorés au cours de la dernière décennie en raison de l'influence du Hezbollah pro-iranien sur le Liban.

Mais depuis que le Hezbollah est sorti affaibli fin novembre de plus d'un an d'hostilités, dont deux mois de guerre ouverte, avec Israël, les Emirats arabes unis manifestent à nouveau leur intérêt pour le Liban, à la suite d'autres pays du Golfe.

En mars, l'Arabie saoudite avait déclaré qu'elle examinerait les "obstacles" à la reprise des importations libanaises et à la levée de l'interdiction faite à ses ressortissants de se rendre au Liban.

M. Aoun avait auparavant rencontré le prince héritier Mohammed ben Salmane, dirigeant de facto de l'Arabie saoudite, à Ryad, où il effectuait son premier voyage à l'étranger depuis son entrée en fonction en janvier.

M. Aoun, qui a les faveurs de Ryad et de Washington, a été élu après que l'affaiblissement du Hezbollah et le renversement en Syrie de l'allié du mouvement, Bachar al-Assad, ont modifié l'équilibre des pouvoirs au Liban.

 


Syrie: l'un des principaux chefs religieux druzes dénonce une «campagne génocidaire» contre sa communauté

 Au moins quinze combattants druzes ont été tués mercredi dans une embuscade près de Damas, a rapporté jeudi l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). (AFP)
Au moins quinze combattants druzes ont été tués mercredi dans une embuscade près de Damas, a rapporté jeudi l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). (AFP)
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  • Des combats avaient opposé mercredi à Sahnaya, près de Damas, des groupes armés liés au pouvoir islamiste sunnite à des combattants druzes, avant un retour à un calme précaire
  • Les 15 combattants druzes, qui se rendaient à Sahnaya, ont été pris pour cible "par les forces de sécurité, et des hommes armés qui leur sont affiliés", selon l'ONG

DAMAS: La plus haute autorité spirituelle des druzes de Syrie a dénoncé jeudi une "campagne génocidaire" contre sa communauté et s'en est pris au pouvoir d'Ahmad al-Chareh, au lendemain de combats confessionnels ayant fait des dizaines de morts près de Damas.

Ces heurts entre combattants druzes et groupes armés liés au pouvoir sunnite illustrent l'instabilité persistante en Syrie, près de cinq mois après le renversement du président Bachar al-Assad, issu de la minorité alaouite.

Dans un communiqué, cheikh Hikmat al-Hajri a dénoncé une "campagne génocidaire injustifiée" visant des "civils à leur domicile" et réclamé "une intervention immédiate de forces internationales".

"Nous ne faisons plus confiance à une entité qui prétend être un gouvernement (...) Un gouvernement ne tue pas son peuple en recourant à ses propres milices extrémistes, puis, après les massacres, prétend que ce sont des éléments incontrôlés". "Un gouvernement protège son peuple."

Les combats à Jaramana et Sahnaya, où vivent des chrétiens et des druzes, ont réveillé le spectre des massacres qui ont fait début mars plus de 1.700 morts, en grande majorité des membres de la minorité alaouite. Les violences avaient été déclenchées par des attaques des pro-Assad contre les forces de sécurité.

Affirmant vouloir défendre les druzes, Israël, pays voisin de la Syrie avec laquelle il est techniquement en guerre, a menacé de frapper le pouvoir syrien en cas de nouvelles violences contre cette minorité.

Les druzes sont une minorité ésotérique issue de l'islam chiite et ses membres sont répartis notamment entre le Liban, la Syrie et Israël. Les alaouites sont une autre branche minoritaire de l'islam, tandis que le sunnisme et le chiisme en sont les deux principaux courants.

"Engagement ferme" 

Les combats près de Damas ont été déclenchés lundi soir par une attaque de groupes armés affiliés au pouvoir contre Jaramana, après la diffusion sur les réseaux sociaux d'un message audio attribué à un druze et jugé blasphématoire à l'égard du prophète Mahomet. L'AFP n'a pas pu vérifier l'authenticité du message.

Les heurts à Jaramana ont fait 17 morts mardi avant de s'étendre mercredi à Sahnaya où 22 combattants de deux camps ont péri, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). Mercredi aussi, 15 combattants druzes ont péri dans une embuscade sur une route menant à Sahnaya, d'après l'ONG.

Des accords entre représentants des druzes et du pouvoir ont permis de rétablir le calme mardi soir à Jaramana, une banlieue de Damas, et mercredi soir à Sahnaya, à 15 km au sud-ouest de Damas, où des forces de sécurité ont été déployées.

Les autorités syriennes avaient averti qu'elles "frapperaient d'une main de fer tous ceux qui cherchent à saper la stabilité de la Syrie", accusant des "groupes hors-la-loi" d'avoir provoqué les violences.

Le pouvoir syrien a dans ce contexte réaffirmé son "engagement ferme à protéger toutes les composantes du peuple syrien, y compris la communauté druze". Il a aussi exprimé "son rejet catégorique de toute ingérence étrangère" après l'intervention militaire israélienne.

"Etendre le chaos" 

Israël a mené plusieurs frappes affirmant cibler des objectifs du pouvoir syrien.

Les druzes d'Israël forment une minorité arabophone d'environ 150.000 personnes réputée pour son patriotisme, et sont surreprésentés dans l'armée et la police par rapport à leur nombre.

Au Liban voisin, le chef druze libanais, Walid Joumblatt, a accusé Israël d'instrumentaliser les druzes de Syrie. "Israël continue de vouloir appliquer son plan de toujours (...) consistant à morceler la région en entités confessionnelles et étendre le chaos", a-t-il déclaré fin mars.

Dès la chute de Bachar al-Assad le 8 décembre, renversé par une coalition de factions rebelles islamistes dirigée par M. Chareh après plus de 13 ans de guerre civile, Israël a multiplié les gestes d'ouverture envers les druzes.

Mais les dignitaires druzes ont réaffirmé leur attachement à l'unité de la Syrie et rejeté les menaces israéliennes contre le pouvoir syrien.

"En se plaçant en protecteur de la communauté druze, Israël espère à la fois se trouver des alliés locaux, particulièrement dans le sud syrien, mais aussi peser dans la balance à un moment où le futur de la Syrie reste incertain (...)", estime Michael Horowitz, un analyste indépendant.