Comment la région arabe peut être immunisée contre la Covid-19

Un infirmier administre une dose de vaccin contre la Covid-19 au Centre international de conventions et d'expositions de Riyad, dans la capitale saoudienne, Riyad, le 21 janvier 2021 (Photo, AFP / Archives)
Un infirmier administre une dose de vaccin contre la Covid-19 au Centre international de conventions et d'expositions de Riyad, dans la capitale saoudienne, Riyad, le 21 janvier 2021 (Photo, AFP / Archives)
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Publié le Dimanche 25 avril 2021

Comment la région arabe peut être immunisée contre la Covid-19

  • Peu de régions du monde connaissent des inégalités de vaccination plus criantes que le Moyen-Orient
  • La localisation de la production des vaccins peut devenir nécessaire afin de garantir un approvisionnement adéquat

DUBAÏ: Au moment où les pays riches se précipitent pour immuniser leurs populations contre la maladie à coronavirus (la Covid-19), les pays les plus pauvres sont laissés pour compte avec un accès limité, sporadique et souvent retardé aux vaccins. Les experts préviennent qu'une telle inégalité risque de prolonger la pandémie.

En février, le Secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a qualifié cette distribution inégale de vaccins de «très injuste», identifiant l'équité vaccinale comme «le plus grand test moral devant la communauté mondiale».

Peu de régions du monde connaissent des inégalités plus criantes à cet égard que le Moyen-Orient. Pendant qu'Israël et les pays du CCG prennent de l'avance, d'autres comme le Liban et la Palestine viennent tout juste de recevoir leurs premières doses.

Leur voisin déchiré par la guerre, la Syrie, a récemment reçu une cargaison de vaccins des Émirats arabes unis, tandis que le Yémen a reçu son premier lot fin mars via l’initiative COVAX, le mécanisme mondial pour un accès équitable aux vaccins contre la Covid-19.

Cependant, à la mi-avril, le Liban n’avait administré que 268 578 doses. En supposant que chaque personne a besoin de deux vaccins, cela signifie que seulement 2% de la population a été vaccinée. De même, les 360 000 doses d’Oxford / AstraZeneca du Yémen ont à peine entamé sa population de 30 millions d’habitants.

En revanche, Israël a affirmé que près de 80% de ses 9 millions d'habitants ont reçu leur première dose, tandis que les Émirats arabes unis ont déclaré que plus de la moitié de sa population a été vaccinée.

Le 9 avril, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a annoncé que les campagnes de vaccination avaient maintenant commencé dans 194 pays mais n'avaient pas encore commencé dans 26 autres. Parmi ceux-ci, sept ont maintenant reçu des vaccins et cinq devraient recevoir le leur dans les prochains jours.

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Des travailleurs déchargent des boîtes de doses de vaccin Spoutnik V de fabrication russe en provenance des Émirats arabes unis, d'un camion, à son arrivée dans la bande de Gaza via le passage de Rafah avec l'Égypte, le 21 février 2021. (Photo, AFP /Archives)

COVAX, l’ initiative mondiale dirigée par l'UNICEF, Gavi the Vaccine Alliance, l'OMS et la Coalition pour la préparation et l'innovation aux épidémies, a joué un rôle déterminant dans la fourniture de vaccins aux pays en développement.

En mars, le premier envoi de vaccins financés par l'UE en provenance de l’initiative COVAX est arrivé en Jordanie, et un deuxième envoi devrait arriver dans le pays en avril.

La Palestine a également reçu ses 61 400 premières doses de la part de COVAX en mars, qu'elle a administrées aux personnel de la santé et aux personnes à risque en Cisjordanie. 21 300 doses supplémentaires ont été expédiées vers la bande de Gaza sous le contrôle du Hamas.

«L’UNICEF, au nom de l’initiative COVAX, a livré à ce jour plus de 3 millions de doses de vaccins contre la Covid-19 à 10 pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord», a affirmé le 1er avril Ted Chaiban, directeur de la région MENA auprès de l’UNICEF.

«L'initiative COVAX a été en mesure de livrer des vaccins dans 10 pays, dont Djibouti, l'Égypte, l'Irak, la Jordanie, le Liban, le Maroc, l'État de Palestine, le Soudan, la Tunisie et le Yémen».

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Un homme fait son inscription avant de recevoir une dose de vaccin contre le coronavirus dans un centre de vaccination installé au Centre financier international de Dubaï le 3 février 2021. (Photo, AFP / Archives)

Cependant, de vastes écarts continuent de saboter l'effort mondial COVAX. «Nous savons que les vaccins livrés jusqu'à présent sont loin, loin d'être suffisants», a confié Chaiban, citant les difficultés avec la forte demande mondiale et la fabrication.

«Ces retards ont un impact sur la taille et le volume des expéditions vers de nombreux pays, notamment ici dans cette région. Cela signifie que de nombreux travailleurs de première ligne n'ont pas été touchés avec les efforts de vaccination».

Robert Mardini, directeur général du Comité international de la Croix-Rouge, l'a exprimé plus franchement en disant: «Le pire pourrait être encore à venir».

S'exprimant lors du récent Sommet mondial sur la vaccination et la logistique organisé par le Hope Consortium basé à Abu Dhabi, un groupe créé pour fournir des milliards de doses contre la Covid-19 d'ici la fin de 2021, Mardini a assuré que les vaccins étaient envoyés à ceux qui en avaient besoin, en particulier ceux qui se trouvent dans les zones de conflit. Ce nombre énorme de doses de vaccin est vraiment essentiel pour mettre fin à cette pandémie.

VACCINS: MOYEN-ORIENT

* 2% - La population libanaise estimée être vaccinée à la mi-avril.

* 500 millions de dollars – La somme totale promise par l’Arabie Saoudite l'année dernière pour les campagnes de vaccination.

Si le Moyen-Orient veut avoir un semblant d'équité en matière de vaccins d'ici la fin de 2021, les experts estiment que les pays plus riches doivent aider les moins fortunés. La localisation de la production de vaccins peut également devenir nécessaire afin de garantir des approvisionnements adéquats dans toute la région.

L'Arabie saoudite, qui a assuré la présidence du G20 en 2020, a promis l'an dernier 150 millions de dollars à la Coalition pour la préparation et l'innovation aux épidémies, 150 millions de dollars à l'Alliance mondiale pour les vaccins et les vaccinations et 200 millions de dollars à d'autres programmes régionaux et mondiaux.

Début avril, l’agence de presse officielle des EAU, WAM, a rapporté que le Croissant-Rouge local avait livré des vaccins contre la Covid-19 à des personnes vulnérables en Syrie. Toutefois, Il n'a pas précisé combien de vaccins ni quelle marque.

«Les EAU ont toujours été un généreux donateur d'aide étrangère car ils savent que la protection de leur propre peuple contre la Covid-19 ne fonctionnera pas sans chercher des moyens d'aider à protéger les personnes dans d'autres pays en même temps», a déclaré Mark Suzman, PDG de la Fondation Bill & Melinda Gates, à Arab News. «Mettre fin à la pandémie signifie y mettre fin partout».

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Des gens font la queue devant un centre de vaccination contre la Covid-19 désigné dans le quartier du centre financier de Dubaï, aux Émirats arabes unis, le 24 janvier 2021. (Photo, AFP / Archives)

D’une façon remarquable, la société d'intelligence artificielle basée à Abu Dhabi, la G42, s'est associée à la firme chinoise Sinopharm CNBG pour lancer une version rebaptisée du vaccin Sinopharm appelée Hayat-Vax, éventuellement la première d'un pays arabe. Si le vaccin fabriqué aux Émirats arabes unis s'avère efficace, il pourrait offrir aux pays en développement une source d'approvisionnement précieuse, en particulier si des vaccinations seront nécessaires chaque année.

Le nom arabe du vaccin Hayat, qui signifie la vie, pourrait le rendre plus attrayant pour un public du Moyen-Orient qui est sceptique quant aux vaccins de la Chine. (Le 21 avril, Abu Dhabi a approuvé l'utilisation du vaccin Pfizer-BioNTech. Sinopharm était le seul vaccin disponible dans la capitale des EAU pour le grand public depuis décembre 2020).

Si les EAU pouvaient fabriquer leurs propres vaccins, d'autres acteurs régionaux le pourraient également en temps voulu. Le Maroc, par exemple, a vu son industrie pharmaceutique s'épanouir ces dernières années, ce qui en fait un leader potentiel sur le marché africain et méditerranéen.

Même si la fabrication pouvait être soutenue, une distribution rapide aux extrémités du monde resterait cependant un obstacle. «Le défi est énorme, c’est un défi mondial», a déclaré, Robert Sutton, chef du cluster logistique des ports d’Abou Dhabi, à Arab News.

«Au niveau régional, la seule façon pour nous de relever ce défi est de travailler ensemble, de travailler en partenariat, de tirer parti de divers experts et de l'infrastructure de la chaîne d'approvisionnement afin de franchir ensemble la ligne d'arrivée».

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Un Palestinien, vêtu d'un équipement de protection au milieu de la pandémie de la Covid-19, est assis sur une chaise, le dos sur une peinture murale lisant «La Palestine» et représentant une main représentant le signe de la victoire. (Photo, AFP /Archives)

Faisant référence à la première zone intégrée commerciale, logistique, industrielle et franche d'Abu Dhabi, Sutton a déclaré: «Nous avons distribué plus de 20 millions de vaccins via le centre KIZAD dans 26 pays. Le centre KIZAD n'est pas uniquement pour les EAU, il reconnaît tout à fait son rôle dans le soutien de la région et dans le soutien non seulement du Moyen-Orient mais également des régions plus larges de l'Afrique, de la Communauté d'États indépendants (CEI) et de l'Asie.

«Il y a 3,6 milliards de personnes dans un rayon d’une à six heures de vol d'Abou Dhabi, et nous avons la responsabilité et la capacité d'être en mesure de soutenir cette campagne de vaccination et leurs programmes. Je pense que nous avons joué un rôle central en veillant à ce que les vaccins soient livrés des EAU à d’autres pays dans le besoin».

S'il y a une chose que la pandémie a renforcée dans la conscience collective du monde, c'est la nécessité d'une solution inclusive et d'envergure mondiale. Le consensus général parmi les experts en santé publique est qu'une approche «moi en premier» ne fonctionnera tout simplement pas dans de tel contexte.

«Nous appelons à la fin du nationalisme au niveau des vaccins, car en fin de compte, soit nous gagnons ensemble, soit nous perdons ensemble», a soutenu Chaiban, directeur de la région MENA auprès de l’UNICEF

«Personne n'est en sécurité tant que tout le monde n'est pas en sécurité».

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L'organisation humanitaire controversée GHF, dit avoir terminé sa mission à Gaza

L'organisation humanitaire GHF, soutenue par Israël et les Etats-Unis et vivement critiquée par l'ONU, a annoncé lundi avoir terminé sa mission à Gaza, se prévalant d'y avoir fourni des dizaines de millions de repas gratuits "sans détournement" de l'aide par le Hamas. (AFP)
L'organisation humanitaire GHF, soutenue par Israël et les Etats-Unis et vivement critiquée par l'ONU, a annoncé lundi avoir terminé sa mission à Gaza, se prévalant d'y avoir fourni des dizaines de millions de repas gratuits "sans détournement" de l'aide par le Hamas. (AFP)
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  • L'organisme au financement opaque, déployé en mai dans le territoire palestinien en guerre, après deux mois de blocus humanitaire total imposé par Israël, a été vivement critiquée par la communauté humanitaire internationale
  • Ses distributions de nourriture ont été entachées par des violences qui ont tué plus de 1.000 personnes à proximité de ses sites, selon le bureau des droits de l'Homme de l'ONU

JERUSALEM: L'organisation humanitaire GHF, soutenue par Israël et les Etats-Unis et vivement critiquée par l'ONU, a annoncé lundi avoir terminé sa mission à Gaza, se prévalant d'y avoir fourni des dizaines de millions de repas gratuits "sans détournement" de l'aide par le Hamas.

La Gaza Humanitaran Foundation (GHF) a annoncé dans un communiqué "la fin réussie de sa mission d'urgence à Gaza après avoir distribué plus de 187 millions de repas gratuits directement aux civils dans le cadre d'une opération humanitaire record qui a permis de garantir que l'aide alimentaire parvienne aux familles palestiniennes en toute sécurité et sans détournement par le Hamas ou d'autres entités".

L'organisme au financement opaque, déployé en mai dans le territoire palestinien en guerre, après deux mois de blocus humanitaire total imposé par Israël, a été vivement critiquée par la communauté humanitaire internationale.

Ses distributions de nourriture ont été entachées par des violences qui ont tué plus de 1.000 personnes à proximité de ses sites, selon le bureau des droits de l'Homme de l'ONU.

L'ONG a rejeté les critiques et sa responsabilité dans ces violences.

"A un moment critique, nous sommes fiers d’avoir été la seule opération d'aide capable de fournir de manière fiable et sûre des repas gratuits directement au peuple palestinien de Gaza, à grande échelle et sans détournement, s'est félicité son directeur John Acree, cité par le communiqué.

"Le modèle de la GHF, dans lequel le Hamas ne pouvait plus piller et tirer profit du détournement de l'aide, a joué un rôle majeur pour amener le Hamas à la table des négociations et parvenir à un cessez-le-feu. Nous les remercions pour tout ce qu’ils ont apporté aux Gazaouis", a salué sur X le porte-parole du département d'Etat, Tommy Pigott.

 

 


Israël: des généraux limogés, d'autres sanctionnés, en lien avec le 7-Octobre

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  • Ces mesures prises par le chef d'état-major Eyal Zamir ont provoqué un regain de tension avec le ministre israélien de la Défense Israël Katz
  • Le limogeage de généraux de premier plan le 7-Octobre met en exergue la façon dont le Premier ministre Benjamin Netanyahu a réussi jusque-là à esquiver ses torts dans le fiasco du 7-Octobre

JERUSALEM: L'armée israélienne a annoncé le limogeage de trois généraux à des postes clés le 7 octobre 2023 et des sanctions disciplinaires contre plusieurs autres à cause de leur échec à empêcher ce jour-là l'attaque la plus meurtrière qu'ait connue Israël.

Ces mesures prises par le chef d'état-major Eyal Zamir ont provoqué un regain de tension avec le ministre israélien de la Défense Israël Katz, qui a annoncé lundi avoir demandé un "examen approfondi" du rapport, commandité par l'armée, qui leur a servi de base pour prendre ces mesures.

Le limogeage de généraux de premier plan le 7-Octobre met en exergue la façon dont le Premier ministre Benjamin Netanyahu a réussi jusque-là à esquiver ses torts dans le fiasco du 7-Octobre, malgré les appels de l'opinion publique et de l'opposition à la formation d'une commission d'enquête nationale.

M. Netanyahu a répété que les fautes de la direction politique ayant mené au 7-Octobre ne pourraient être examinées qu'après la fin de la guerre.

Le général de division Aharon Haliva, à l'époque chef des renseignements militaires, le général de division Oded Basyuk, alors chef des opérations, et le général de division Yaron Finkelman, qui commandait ce jour-là depuis peu la région militaire sud d'Israël, vont être déchargés "du cadre de réserve et ne (feront) plus partie" de l'armée, indique un communiqué de l'armée publié dimanche soir.

Le général Haliva a été le premier responsable militaire à démissionner, en 2024, en invoquant sa responsabilité pour le drame du 7-Octobre. Le général Finkelman a lui aussi démissionné en invoquant les mêmes motifs. Quant au général Basyuk, il a pris sa retraite après la guerre de 12 jours lancée par Israël contre l'Iran en juin.

Selon le communiqué de l'armée, les trois hommes portent chacun une responsabilité personnelle dans l'échec de l'institution militaire à anticiper et à repousser l'attaque lancée par le mouvement islamiste palestinien Hamas à partir de la bande de Gaza sur le sud d'Israël.

"Défaillance systémique" 

Ces mesures, prises par Eyal Zamir, font suite à la publication au début du mois du rapport d'un comité d'experts qu'il avait mandaté et qui a marqué la fin des enquêtes au sein de l'armée sur les défaillances ayant mené au drame du 7-Octobre.

Le rapport concluait à une "défaillance systémique et organisationnelle de longue date" au sein de l'appareil militaire.

Déplorant des "processus de prise de décision et de déploiement des forces déficients dans la nuit du 7 octobre 2023", le comité pointait des échecs au niveau de l'état-major général, de la direction des opérations, de la direction du renseignement militaire, du Commandement Sud, mais aussi de l'armée de l'Air et de la Marine.

Israël Katz, dont l'inimitié avec le chef d'état-major est connue, a réagi lundi à l'annonce des limogeages et mesures disciplinaires  en annonçant "un examen en profondeur" de ce rapport.

"A la suite des mesures annoncées hier par le chef d'état-major concernant la responsabilité des commandants dans les événements du 7 octobre, j'ai décidé de charger le contrôleur de l'établissement de la Défense, le général de division (à la retraite) Yaïr Wolansky, d'examiner en profondeur le rapport présenté par l'équipe dirigée par le général de division (à la retraite) Sami Turgeman", a annoncé le ministre de la Défense dans un communiqué.

Joute 

Il a précisé que le "contrôleur sera également invité à formuler une recommandation concernant des critères équitables pour l'élaboration de conclusions personnelles", faisant allusion aux limogeages et mesures disciplinaires annoncés par Eyal Zamir.

Selon les médias israéliens, il s'agit d'une énième joute dans le bras de fer qui oppose les deux hommes, M. Katz ayant cette fois-ci été ulcéré de ne pas avoir été prévenu directement des mesures qu'il a apprises par les médias.

En outre, le chef d'état-major s'est publiquement dissocié du gouvernement, notamment en appelant le 10 novembre à une "enquête systémique" sur le 7-Octobre.

Malgré les pressions de l'opinion publique et les demandes de l'opposition, le gouvernement israélien refuse l'établissement d'une commission nationale d'enquête dans l'échec des autorités à prévenir l'attaque.

Outre les trois généraux limogés, l'armée a annoncé des sanctions disciplinaires contre le général de division aérienne Tomer Bar et le vice-amiral David Saar Salma, respectivement à la tête de l'armée de l'Air et de la Marine.

Sont également visés par des mesures disciplinaires quatre autres généraux et quatre officiers supérieurs.

Le général Herzi Halévy, qui était à la tête de l'armée le 7 octobre 2023, a annoncé sa démission en janvier et quitté ses fonctions en mars. Il n'est pas concerné par les mesures.

 


Le Hezbollah enterre son chef militaire tué dans un bombardement israélien

Le Hezbollah a porté en terre lundi son chef militaire Haitham Ali Tabatabai, tué la veille par Israël dans la banlieue sud de Beyrouth, une attaque qui accentue encore la pression sur le Liban pour désarmer le mouvement pro-iranien. (AFP)
Le Hezbollah a porté en terre lundi son chef militaire Haitham Ali Tabatabai, tué la veille par Israël dans la banlieue sud de Beyrouth, une attaque qui accentue encore la pression sur le Liban pour désarmer le mouvement pro-iranien. (AFP)
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  • A l'appel de la formation chiite, des centaines de ses partisans sont descendus dans son fief de la banlieue sud de Beyrouth, pour les funérailles de celui que le mouvement a qualifié de "grand leader"
  • Jusque-là largement inconnu du grand public au Liban, il est le plus haut responsable du Hezbollah tué depuis la fin, il y a un an, de la dernière guerre qui a opposé le mouvement à Israël

BEYROUTH: Le Hezbollah a porté en terre lundi son chef militaire Haitham Ali Tabatabai, tué la veille par Israël dans la banlieue sud de Beyrouth, une attaque qui accentue encore la pression sur le Liban pour désarmer le mouvement pro-iranien.

A l'appel de la formation chiite, des centaines de ses partisans sont descendus dans son fief de la banlieue sud de Beyrouth, pour les funérailles de celui que le mouvement a qualifié de "grand leader".

Jusque-là largement inconnu du grand public au Liban, il est le plus haut responsable du Hezbollah tué depuis la fin, il y a un an, de la dernière guerre qui a opposé le mouvement à Israël.

Dans cette banlieue densément peuplée de la capitale, des membres du Hezbollah en treillis ont porté son cercueil et ceux d'autres compagnons tués dans la frappe ciblée de dimanche, recouverts des drapeaux jaunes du groupe, au son de chants religieux, a rapporté un correspondant de l'AFP.

La foule, d'où émergeaient des portraits des dirigeants du Hezbollah et du guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, a scandé des slogans contre Israël et les États-Unis.

Cet assassinat est intervenu alors qu'Israël a intensifié ces derniers temps ses frappes sur le territoire libanais malgré le cessez-le-feu, disant viser des membres ou infrastructures du Hezbollah qu'il accuse de se réarmer, ce que le mouvement dément.

"Voie diplomatique" 

Le gouvernement libanais est sous forte pression de Washington pour contraindre le Hezbollah à rendre ses armes conformément à l'accord de cessez-le-feu du 27 novembre 2024, ce que le mouvement islamiste refuse jusqu'à présent.

Après l'assassinat de Haitham Ali Tabatabai, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a réaffirmé qu'Israël "ne permettra(it) pas au Hezbollah de reconstruire son pouvoir" et appelé Beyrouth  à "respecter son engagement" à le désarmer.

A Paris, la diplomatie française a appelé à la "retenue" après la frappe israélienne qui fait "peser un risque d'escalade dans un contexte déjà marqué par de fortes tensions".

Les options du Hezbollah apparaissent désormais limitées: le mouvement est sorti très affaibli du conflit qu'il avait enclenché avec Israël après le début de la guerre à Gaza, et a perdu sa voie d'approvisionnement via la Syrie depuis la chute de Bachar al-Assad en décembre dernier.

Washington presse également Beyrouth de lui couper les financements iraniens. Téhéran, principal allié du Hezbollah, a dénoncé lundi un "lâche assassinat".

Il existe aujourd'hui "deux tendances au sein du groupe", explique à l'AFP une source proche du Hezbollah, sous couvert d'anonymat. "Ceux qui veulent répondre à l'assassinat et ceux qui préfèrent s'abstenir, et pour l'instant, la direction du groupe préfère la voie diplomatique".

"Les options du Hezbollah sont très limitées", affirme à l'AFP Nicholas Blanford, analyste à l'Atlantic Council. "Sa base réclame vengeance, mais si le Hezbollah répond directement (...) Israël ripostera très durement et personne au Liban ne remerciera le Hezbollah pour ça".

Selon lui, la frappe sur le chef militaire du Hezbollah "montre qu'Israël peut toujours localiser et cibler les hauts responsables (du mouvement) malgré toutes les mesures de protection".

"Rejeter les pressions" 

L'assassinat de Haitham Ali Tabatabai visait à "effrayer et affaiblir" le Hezbollah pour qu'il "se rende et se soumette, mais cet objectif ne sera jamais atteint", a lancé lors des funérailles un haut responsable du mouvement, Ali Damuch.

Israël était "inquiet de la réponse possible du Hezbollah, et doit le rester", a-t-il ajouté, exhortant les autorités libanaises à "affronter l'agression par tous les moyens (...) et à rejeter les pressions (...) à se conformer aux diktats américains et aux conditions israéliennes".

En vertu de l'accord de cessez-le-feu, l'armée libanaise doit démanteler la présence militaire du Hezbollah sur une bande d'une trentaine de kms entre la frontière avec Israël et le fleuve Litani, plus au nord.

L'armée a soumis un plan au gouvernement, dans lequel elle s'engage à accomplir cette tâche titanesque, avant de procéder par étapes sur le reste du territoire libanais. Mais les Etats-Unis et Israël accusent les autorités libanaises de tarder, face à la ferme opposition du Hezbollah.

Ce dernier invoque notamment le maintien par Israël de cinq postes dans le sud du Liban, dont l'accord de cessez-le-feu stipule pourtant que l'armée israélienne doit se retirer.

Un responsable militaire libanais a affirmé à l'AFP la semaine dernière que les demandes américaines et israéliennes d'un désarmement d'ici fin 2025 étaient "impossibles" à satisfaire, faute de personnel et d'équipement, et au vu du risque de confrontations avec les communautés locales soutenant le Hezbollah.