Des Libanais se battent pour briser le tabou de l’impunité

Scène d’apocalypse le 4 août dernier à Beyrouth. (Photo AFP).
Scène d’apocalypse le 4 août dernier à Beyrouth. (Photo AFP).
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Publié le Vendredi 21 août 2020

Des Libanais se battent pour briser le tabou de l’impunité

  • Le bâtonnier de l’Ordre des avocats de Beyrouth, Melhem Khalaf, estime qu’«un crime impuni est un crime récompensé. La justice apaise les gens. Et quand on le fait, on établit la paix sociale »
  • « Il n’a pas de démocratie tant qu’il y a impunité et tant qu’il n’y a pas reddition des comptes», affirme Salah Honein, juriste et ancien député

BEYROUTH: Suite aux explosions du port de Beyrouth, plusieurs initiatives sont nées pour assigner en justice l’Etat libanais de manière globale. Le but : poursuivre les responsables, afin de les sanctionner et de demander des dommages et intérêts. C’est dans ce contexte que le barreau de Beyrouth, sous l’impulsion du bâtonnier Melhem Khalaf, a décidé d’agir. C’est aussi l’initiative de Marie Ghantous, avocate à la retraite, qui fait partie d’un groupe d’avocats déterminés à poursuivre l’Etat libanais et à lui demander des comptes.  

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Melhem Khalaf sur les lieux de l'explosion, au port de Beyrouth. (Photo fournie).

« Nous sommes demandeurs de justice, nous ne sommes pas demandeurs de vengeance », précise Me. Khalaf. Pour sortir de l’impunité, « il faut présenter des voies d’accès à la justice. L’ordre des avocats de Beyrouth a ainsi mis en place une cellule de crise qui propose plusieurs services », précise le bâtonnier. Le 1er est relatif aux demandes de mises en liberté des manifestants. Le 2e est relatif à tous les sinistrés de l’explosion du port de Beyrouth. Le 3e  concerne toutes les personnes qui ont été touchées par la violence de l’Etat. Il y a sept centres qui ont été mis sur pieds sur sept places publiques et qui donnent accès à la justice pour être le plus proche possible des citoyens et les aider à constituer leur dossier et les présenter devant la Cour de justice. Les gens peuvent aller devant les avocats et les experts bénévoles pour avoir un accès facile à la justice. Il y a aussi une approche électronique. Tout sinistré peut établir son dossier à partir de sa maison, en scannant ses photos et documents.

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La scène de l'explosion, au port de Beyrouth. (Photo AFP).

Pour sa part, Marie Ghantous affirme que le but du groupe auquel elle appartient – et dont elle prend soin de ne pas en dévoiler les détails - « est de s’entraider ». « La solidarité doit être inscrite dans notre ADN. Et nous espérons qu’à travers notre action, nous pourrons restaurer l’Etat de droit auquel nous aspirons ».

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Des citoyens blessés par l'explosion attendent de se faire soigner devant un établissement hospitalier à Beyrouth le 4 août 2020. (Photo AFP). 

Selon elle, « il faut que la personne lésée réclame ses droits, et les défendre. C’est une démarche citoyenne très importante. Pour être un bon citoyen, il fait interagir positivement au sein de la société. C’est comme ça qu’on sent qu’on a sa place dans la société et qu’on peut impacter positivement le cours des choses ».

Absence totale de confiance

Toutefois, une majorité de Libanais n’a plus du tout confiance non seulement en leurs dirigeants, mais aussi dans les institutions étatiques en général. Les soupçons de corruption et de favoritisme visent également le pouvoir judiciaire, notamment la pratique de la mainmise des politiciens sur les rouages de la justice. Certains appelant d’emblée à une enquête internationale, de crainte que les forces en place ne fassent disparaître des preuves. La querelle entre les deux pouvoirs politique et judiciaire autour de la nomination du juge qui va être chargé de l’enquête sur les causes des explosions du port est un exemple flagrant du flou artistique qui entoure la notion de reddition des comptes au Liban. Cette querelle ne fait d’ailleurs que confirmer les inquiétudes des citoyens libanais quant à l’indépendance de l’enquête.

Melhem Khalaf prévient à cet égard : « La justice est devant un examen auquel elle doit répondre par une reprise de confiance à laquelle les gens appellent et que les juges doivent assumer. Si le pouvoir judiciaire failli à cette mission de reprendre confiance, on va vers un Etat défaillant, un concept de droit international public, qui a des retombées particulièrement lourdes en conséquence juridique ».

Il ajoute: « C’est notre dernière chance, et cette chance on la cherche de tous nos vœux ».

Melhem Khalaf estime qu’«un crime impuni est un crime récompensé. La justice apaise les gens. Et quand on le fait, on établit la paix sociale, dont on a amplement besoin aujourd’hui ». Aucune société ne peut vivre en paix si elle a cette frustration permanente qu’entretiennent certains. « Dans de tels cas, on a souvent l’attention tournée vers les responsables, mais on oublie souvent les victimes. La réparation a un effet thérapeutique. Ça aide les victimes, choquées et désemparées, à sortir de leur dépression », explique pour sa part Marie Ghantous, également professeure de droit international public à l’Université Saint-Joseph.

« Il n’a pas de démocratie tant qu’il y a impunité et tant qu’il n’y a pas reddition des comptes», affirme Salah Honein, juriste et ancien député. « Il faut assumer ses responsabilités et en cas de manquement, il faut subir une sanction. Tant qu’on n’a pas ces deux bases fondamentales, on ne peut pas espérer un Etat de droit au Liban », ajoute-t-il. Selon lui, « pour briser l’impunité, il faut briser le système mafieux qui la couvre. Il faut surtout briser le mur de la peur afin de pouvoir designer, d’une manière impartiale et juste, tous ceux qui sont responsable de cette tragédie ».

Pour M. Honein, « il est impératif que ces procès aient lieu. Et la balle est aujourd’hui dans les mains de la Justice. Nous espérons donc que les juges aient la conscience et la vigilance nécessaires dans cette situation exceptionnelle ».

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Sama, dont le prénom signifie « Ciel » en arabe, a perdu son œil dans l’explosion. (Photo AFP).

Selon la Constitution, le pouvoir judiciaire est indépendant. « Même si dans certains cas, le juge a été nommé par le pouvoir politique, dans son action il doit rester affranchi de toute contrainte. Sa seule référence doit rester la loi et sa conscience », ajoute l’ancien député qui estime que cette liberté doit s’illustrer à tous les niveaux de la procédure : de l’enquête, au procès et au jugement.

Aujourd’hui, tous les regards sont braqués sur les juges. Le peuple libanais espère beaucoup de la justice. Et la catastrophe subie est telle qu’il faut être à la hauteur des attentes réclamées. « Les magistrats doivent être conscients que l’avenir du Liban repose sur leurs épaules », précise-t-il.

Pour Marie Ghantous, « si notre travail est bien fait en amont, si nos dossiers sont bien constitués, nous donnerons alors aux juges les moyens pour rendre justice aux victimes. C’est notre devoir en tant qu’avocats d’aider et de soutenir les juges consciencieux et honnêtes. Il ne faut pas jeter l’opprobre sur une seule partie. Nous sommes tous responsables : juges, avocats et citoyens. Dans ces circonstances, je ne pense pas qu’un juge oserait se dérober à ses responsabilités ».

Faut-il abdiquer ?

Quand l’enquête est terminée, il doit y avoir un procès visant les responsables qui seront désignés, quels qu’ils soient. Il faut toutefois espérer que les décisions et les jugements soient pris sans interférence aucune du pouvoir politique.

Là aussi les Libanais craignent le pire. Il y a aujourd’hui une enquête en cours avec des enquêteurs internationaux, français, américains et polonais.

Or, au Liban, les responsables sécuritaires, les directeurs généraux, sont tous sous la protection des partis politiques au pouvoir. Qu’en est-il des ministres et du pouvoir exécutif ? Le Liban a connu très peu de cas où un homme politique a été jugé. Sans oublier la toute-puissance du Hezbollah, accusée d’avoir la main haute sur tout ce qui se passe dans le port.

Pour Salah Honein, « tout le monde est conscient aujourd’hui de la puissance du Hezbollah. Faut-il donc abdiquer ? C’est au pouvoir judiciaire aujourd’hui de briser ces obstacles en désignant les responsables. Si on ne brise pas le mur de la peur, on ne pourra pas briser le mur de l’impunité. La tâche est lourde pour les juges, qui doivent travailler en leur conscience ».

En outre, il faut admettre que les différentes fonctions au sein de l’administration sont des postes de responsabilité. Du coup, « il doit y avoir une reddition des comptes concernant la responsabilité de chacun », affirme-t-il.

Dans ce contexte, il faut qu’il y ait également une responsabilité politique. « C’est évident. Il ne peut pas ne pas avoir une responsabilité politique dans ce cas. C’est à la justice de designer les responsables, qu’ils soient administratifs, sécuritaires ou politiques », explique l’ancien député.  

Par ailleurs, tout homme politique, qu’il soit président, ministre ou autre, peut être poursuivi en justice s’il est accusé d’un crime. Le comité spécial pour juger les présidents et les ministres n’a pas de place dans ce contexte. « Il ne faut pas tomber dans le piège de l’immunité du ministre. Celle-ci est valable uniquement dans ‘le déroulement normal de ses fonctions quotidiennes’. Mais dans aucun cas, quand il y a un crime. Et dans le cas de l’explosion, il n’y a aucun doute qu’il y a un crime dont le peuple libanais est la victime », explique Salah Honein. Et d’ajouter : « Aujourd’hui il n’y a personne des dirigeants concernés depuis sept ans, même au niveau sécuritaire et politique, qui ne puisse être tenu responsable de l’explosion du port s’il était au courant de l’existence des produits dangereux et qui n’a pas réagi en conséquence. Cette négligence est un crime contre tout le peuple libanais qui est punissable par la loi ».

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La crise économique et financière, le cataclysme du 4 août, tout cela n’a fait que renforcer la rancœur des Libanais à l’égard du pouvoir en place.  (Photo AFP).

Une chose est désormais certaine. Les Libanais ont soif de justice. L’attente du jugement dans l’assassinat de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri, qui vient de tomber, illustre le désir des libanais d’en finir avec l’impunité. Les dirigeants politiques au Liban, dans leur grande majorité chefs de milices durant la guerre, règnent sans partage sur le pays du Cèdre depuis 30 ans. Les manifestations qui ont débuté le 17 octobre 2019 sont nées précisément de ce désir de sortir de ce marasme politique, économique et financier dans lequel la corruption des responsables a plongé le Liban.

L’explosion du port de Beyrouth qui a ravagé une partie de la capitale le 4 août dernier - qui a fait près de 200 morts et plus de 6000 blessés – a amplifié cette soif de reddition des comptes. Désormais, et pour une grande partie des Libanais, le pouvoir en place est non seulement corrompu, il est incompétent. Les cris de rage d’une population en détresse qui en appelle à juger les responsables ainsi qu’à la démission de la classe politique, se font de plus en plus entendre. Pendant ce temps, cette même classe politique continue de se murer dans un discours complètement autiste, tout en se dédouanant, en même temps, de toute responsabilité. Après tout, l’impunité est quasiment la règle pour les hommes politiques au Liban.


Israël: des élus favorables à une loi instaurant la peine de mort pour les «terroristes»

 La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir. (AFP)
La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir. (AFP)
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  • Selon le médiateur israélien chargé des otages, Gal Hirsch, le Premier ministre Benjamin Netanyahu soutient cette initiative
  • La commission a approuvé un amendement au Code pénal, qui sera maintenant transmis au Parlement pour un vote en première lecture, une loi étant instaurée en Israël après une vote en troisième lecture

JERUSALEM: La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir.

La commission a approuvé un amendement au Code pénal, qui sera maintenant transmis au Parlement pour un vote en première lecture, une loi étant instaurée en Israël après une vote en troisième lecture.

Selon le médiateur israélien chargé des otages, Gal Hirsch, le Premier ministre Benjamin Netanyahu soutient cette initiative.

Dans une note explicative de la commission, il est indiqué que "son objectif est de couper le terrorisme à sa racine et de créer une forte dissuasion".

Le texte propose qu'un "terroriste reconnu coupable de meurtre motivé par le racisme ou la haine (...) soit condamné à la peine de mort - de manière obligatoire", ajoutant que cette peine serait "non optionnelle".

La proposition de loi a été présentée par une élue du parti Otzma Yehudit (Force Juive) d'Itamar Ben Gvir.

Ce dernier a menacé de cesser de voter avec la coalition de droite de Benjamin Netanyahu si ce projet de loi n'était pas soumis à un vote parlementaire d'ici le 9 novembre.

"Tout terroriste qui se prépare à commettre un meurtre doit savoir qu'il n'y a qu'une seule punition: la peine de mort", a dit le ministre lundi dans un communiqué.

M. Ben Gvir avait publié vendredi une vidéo de lui-même debout devant une rangée de prisonniers palestiniens allongés face contre terre, les mains attachées dans le dos, dans laquelle il a appelé à la peine de mort.

Dans un communiqué, le Hamas a réagi lundi soir en affirmant que l'initiative de la commission "incarne le visage fasciste hideux de l'occupation sioniste illégitime et constitue une violation flagrante du droit international".

"Nous appelons les Nations unies, la communauté internationale et les organisations pertinentes des droits de l'Homme et humanitaires à prendre des mesures immédiates pour arrêter ce crime brutal", a ajouté le mouvement islamiste palestinien.

Le ministère palestinien des Affaires étrangères et des expatriés, basé à Ramallah, a également dénoncé cette décision, la qualifiant de "nouvelle forme d'extrémisme israélien croissant et de criminalité contre le peuple palestinien".

"C'est une étape dangereuse visant à poursuivre le génocide et le nettoyage ethnique sous le couvert de la légitimité", a ajouté le ministère.


Frappes israéliennes sur le sud du Liban: deux morts 

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah. (AFP)
Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah. (AFP)
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  • Selon un bilan provisoire, "une frappe ennemie d'Israël" dans la région de Nabatiyé a fait lundi "un mort et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé
  • Un drone a visé une voiture à Doueir, a rapporté l'agence nationale d'information Ani

BEYROUTH: Des frappes israéliennes sur le sud du Liban ont tué lundi deux personnes et blessé sept autres, a indiqué le ministère libanais de la Santé, au lendemain de la menace d'Israël d'intensifier ses attaques contre le Hezbollah pro-iranien.

Malgré un cessez-le-feu conclu en novembre 2024, Israël continue de mener des attaques régulières contre les bastions du Hezbollah. Et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a accusé dimanche le Hezbollah de tenter de se "réarmer".

Selon un bilan provisoire, "une frappe ennemie d'Israël" dans la région de Nabatiyé a fait lundi "un mort et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé.

Un drone a visé une voiture à Doueir, a rapporté l'agence nationale d'information Ani.

Sur place, un photographe de l'AFP a vu des pompiers tenter d'éteindre l'incendie de la voiture visée qui s'est propagé à d'autres véhicules à proximité. Des ouvriers ramassaient les bris de verre des devantures de commerces endommagées, a-t-il également constaté.

Une autre frappe sur un village de la région de Bint Jbeil a fait un mort, selon le ministère de la Santé.

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah.

Des centaines de personnes ont participé à leurs funérailles dimanche dans la ville de Nabatiyé, scandant "Mort à Israël".

Le Hezbollah a été fortement affaibli par la guerre, avec notamment l'assassinat de son chef historique, Hassan Nasrallah, par une frappe israélienne en septembre 2024 à Beyrouth, mais il demeure financièrement résilient et armé.

Les États-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe, ce que le Hezbollah refuse.

"Nous attendons du gouvernement libanais qu'il fasse ce qu'il s'est engagé à faire, c'est-à-dire désarmer le Hezbollah, mais il est clair que nous exercerons notre droit à l'autodéfense comme convenu dans les termes du cessez-le-feu", avait averti le Premier ministre israélien dimanche.


La Turquie mobilise ses partenaires musulmans autour de Gaza

La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien. (AFP)
La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien. (AFP)
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  • Devant le Comité permanent pour la coopération économique de l'OCI, réuni lundi à Istanbul, le président turc Recep Tayyip Erdogan a critiqué l'attitude "très médiocre" d'Israël
  • "Nous devons apporter davantage d'aide humanitaire aux habitants de Gaza, puis commencer les efforts de reconstruction" a poursuivi le chef de l'Etat en appelant la Ligue arabe et l'OCI à jouer "un rôle moteur" en ce sens

ISTANBUL: La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien.

Les ministres de ces sept pays (Turquie, Arabie saoudite, Qatar, Emirats arabes unis, Jordanie, Pakistan et Indonésie), tous membres de l'organisation de la coopération islamique (OCI), avaient été reçus par Donald Trump fin septembre à New York en marge de l'Assemblée générale de l'ONU, avant la présentation du plan de paix américain six jours plus tard.

Devant le Comité permanent pour la coopération économique de l'OCI, réuni lundi à Istanbul, le président turc Recep Tayyip Erdogan a critiqué l'attitude "très médiocre" d'Israël depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu le 10 octobre, alors que "le Hamas semble déterminé" à respecter l'accord, estime-t-il.

"Nous devons apporter davantage d'aide humanitaire aux habitants de Gaza, puis commencer les efforts de reconstruction" a poursuivi le chef de l'Etat en appelant la Ligue arabe et l'OCI à jouer "un rôle moteur" en ce sens.

En amont de cette réunion, le chef de la diplomatie turque Hakan Fidan a reçu samedi une délégation du bureau politique du Hamas emmenée par Khalil al-Hayya, le négociateur en chef du mouvement islamiste palestinien.

Selon des responsables du ministère des Affaires étrangères, M. Fidan doit appeler à la mise en place de mécanismes permettant aux Palestiniens d'assurer la sécurité et la gouvernance de Gaza.

"Agir avec prudence" 

"Nous devons mettre fin au massacre à Gaza. Un cessez-le-feu à lui seul ne suffit pas", a insisté M. Fidan lors d'un forum à Istanbul.

"Nous devons reconnaître que Gaza doit être gouvernée par les Palestiniens et agir avec prudence", a encore souligné le ministre turc, plaidant de nouveau pour une solution à deux Etats.

Le chef de la diplomatie turque accuse Israël de chercher des prétextes pour rompre le cessez-le-feu.

Mais les efforts d'Ankara, qui multiplie les contacts diplomatiques avec les pays de la région et cherche à infléchir la position pro-israélienne des Etats-Unis, sont vus d'un mauvais œil par Israël qui juge Ankara trop proche du Hamas.

Les dirigeants israéliens ont exprimé à plusieurs reprises leur refus de voir la Turquie participer à la force internationale de stabilisation à Gaza.

En vertu du plan de Donald Trump, sur lequel est basé l'accord de cessez-le-feu, cette force de stabilisation, formée principalement de troupes de pays arabes et musulmans, doit se déployer à Gaza à mesure que l'armée israélienne s'en retirera.

Seuls des pays jugés "impartiaux" pourront rejoindre cette force, a cependant prévenu le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar.

Autre signe de la méfiance du gouvernement israélien : une équipe de secouristes turcs dépêchée pour participer à la recherche de corps, y compris israéliens, dans les ruines de Gaza, attendait toujours en fin de semaine dernière le feu vert israélien pour entrer dans le territoire palestinien, selon Ankara.