Vaccins anti-Covid: le soutien américain à la levée des brevets change la donne

Les militants affichent une banderole: « Les brevets tuent! Les vaccins appartiennent à tout le monde, partout » lors d'une manifestation devant le ministère de l'Economie à Berlin. (Photo, AFP)
Les militants affichent une banderole: « Les brevets tuent! Les vaccins appartiennent à tout le monde, partout » lors d'une manifestation devant le ministère de l'Economie à Berlin. (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 07 mai 2021

Vaccins anti-Covid: le soutien américain à la levée des brevets change la donne

  • « Cela change la donne, il n'y a aucun doute là-dessus », a déclaré un diplomate occidental en charge du commerce qui suit les discussions à l'OMC
  • Les Etats-Unis ont longtemps figuré parmi les plus ardents défenseurs du maintien des droits de propriété intellectuelle

GENEVE : Le soutien américain à la levée des brevets sur les vaccins anti-Covid est un pas de plus vers un accord mondial, en discussion depuis des mois à l'OMC, mais sa portée pourrait être limitée.

« Cela change la donne, il n'y a aucun doute là-dessus », a déclaré un diplomate occidental en charge du commerce qui suit les discussions à l'Organisation mondiale du commerce à Genève.

La représentante américaine au Commerce, Katherine Tai, a créé la surprise mercredi en annonçant que Washington était désormais favorable à « la levée » des brevets sur les vaccins contre la Covid-19, une mesure réclamée depuis des mois à l'OMC par de nombreux pays, l'Inde et l'Afrique du Sud dirigeant le combat.

Cette prise de position est un revirement spectaculaire de la position des Etats-Unis, qui ont longtemps figuré parmi les plus ardents défenseurs du maintien des droits de propriété intellectuelle.

Mais depuis son arrivée à la Maison Blanche, le président américain Joe Biden a été soumis à d'intenses pressions l'enjoignant de soutenir cette initiative qui, selon ses partisans, permettrait d'accélérer la production des vaccins à travers le monde en aidant les pays en développement à produire des versions génériques moins chère.

Face à l’iniquité vaccinale, l'Inde et l'Afrique du Sud, soutenus par plusieurs dizaines de pays, ont déposé en octobre à l'OMC une demande de « dérogation temporaire à certaines obligations de l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) ».

« Un catalyseur »

Mais cette proposition s'est heurtée jusqu'à présent à l'opposition farouche des groupes pharmaceutiques et des pays qui les hébergent, pour qui les brevets ne sont pas les principaux obstacles à l'augmentation de la production. Ils ont également prévenu que la levée des brevets pourrait entraver l'innovation.

Mais, selon certains observateurs, le revirement historique de Washington a augmenté les chances de conclure un accord à Genève.

« Cela pourrait être un catalyseur de changement », a déclaré à l'AFP Gaétan de Rassenfosse, professeur en propriété intellectuelle à l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL).

Les Etats-Unis ayant quitté le camp du non, les pays qui continuent de rechigner à l'idée de renoncer aux brevets « seront de plus en plus isolés », a-t-il souligné.

Quelques heures après l'annonce américaine, certains dirigeants français et européens, entre autres, ont ainsi fait savoir qu'ils étaient prêts à discuter.

Le diplomate occidental en poste à Genève cité précédemment a également reconnu que la pression était désormais forte sur ces pays: personne « ne veut se retrouver seul ».

« Maintenant que Biden a bougé, l'UE va bouger. Ils n'ont pas vraiment le choix », a commenté pour sa part auprès de l'AFP Samira Guennif, du Centre d'Economie de l'Université Paris Nord.

 

AFRIQUE: Le manque de vaccins accroît le risque de nouvelle vague

BRAZZAVILLE : Le bureau régional pour l'Afrique de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a mis en garde jeudi contre le risque d'une nouvelle vague de coronavirus sur le continent à cause de retards croissants dans la vaccination par rapport au reste du monde.

« Du fait du report de livraison des doses de vaccins contre la Covid-19 fabriquées par le Serum institute of India à l'attention de l'Afrique, ainsi que de la lenteur du déploiement des vaccins et de l'apparition de nouveaux variants, le risque d'une nouvelle vague d'infections resté élevé en Afrique », a alerté dans un communiqué le bureau régional de l'OMS, basé à Brazzaville.

« Désormais, le continent africain ne représente plus que 1 % des doses de vaccin administrées dans le monde, contre 2 % il y a quelques semaines », selon le texte.

Seules environ « la moitié des 37 millions de doses de vaccin contre la Covid-19 reçues en Afrique ont été administrées jusqu'à présent », affirme l'OMS, tout en soulignant que "certains pays africains ont été exemplaires en matière de déploiement de vaccins".

« Les premières livraisons à 41 pays africains par le canal du Covax (visant à assurer aux pays pauvres l'accès aux vaccins, NDLR) ont eu lieu depuis début mars, mais neuf pays ont administré moins d'un quart des doses reçues et 15 pays ont administré moins de la moitié de leurs doses », déplore l'organisation.

« La tragédie en Inde ne doit pas se produire ici en Afrique, et nous devons tous rester en état d'alerte maximale », a déclaré la directrice régionale pour l'Afrique de l'OMS, Matshidiso Moeti, citée dans le communiqué.

« Si nous appelons à l'équité en matière de vaccins, l'Afrique doit aussi se retrousser les manches et tirer le meilleur parti de ce que nous avons. Nous devons utiliser toutes les doses dont nous disposons pour vacciner des gens », a-t-elle insisté.

Les deux côtés bougent

Sentant sans doute le vent venir, l'Inde et l'Afrique du Sud ont récemment informé l'OMC qu'elles entendaient réviser leur proposition initiale, laissant entendre qu'un compromis était possible. Un nouveau texte est attendu la semaine prochaine. 

« Il y a soudainement du mouvement des deux côtés », a relevé le diplomate occidental.

Si le volte-face américain redistribue les cartes sur le sujet, les négociations pourraient néanmoins être longues et l'OMC fonctionne par consensus : un seul des 164 membres peut tout bloquer.

Trouver un accord « risque de prendre du temps, et cela risque d'être en décalage avec l'urgence sanitaire », a fait remarquer Samira Guennif.

Reste que les pressions des pays, des ONG et des organisations internationales sont telles que le « oui » américain à la levée des brevets sur les vaccins pourrait accélérer le processus.

« S'ils veulent que cela se fasse rapidement, ils le peuvent », a estimé Gaétan de Rassenfosse.

Des ambitions différentes

Beaucoup de choses restent encore à négocier et clarifier, a averti le diplomate occidental, en soulignant que la proposition de M. Biden était beaucoup plus restreinte que la demande faite par l'Inde et l'Afrique du Sud, qui veulent également la levée des brevets sur plusieurs éléments, dont les traitements.

« Il y a un écart assez important entre les deux », a déclaré le diplomate.

Si l'Inde et l'Afrique du Sud sont disposées à revoir leurs ambitions à la baisse et peuvent accepter un accord portant uniquement sur les brevets, la possibilité de conclure un accord plus rapidement serait plus grande. 

« Mais s'ils maintiennent toutes leurs exigences et disent qu'ils veulent tout ou rien, alors cela prendra beaucoup plus de temps », a assuré le diplomate.


L'Inde cherche à porter la voix du « Sud global » entre le G7 et le Brics

Cette photographie prise et publiée par le Bureau d'information de la presse indienne (PIB) le 6 juin 2025 montre le Premier ministre indien Narendra Modi tenant le drapeau national lors de l'inauguration du pont ferroviaire de Chenab, qui fait partie de la liaison ferroviaire du Cachemire, à Reasi, dans l'État de Jammu-et-Cachemire. (PIB) / AFP)
Cette photographie prise et publiée par le Bureau d'information de la presse indienne (PIB) le 6 juin 2025 montre le Premier ministre indien Narendra Modi tenant le drapeau national lors de l'inauguration du pont ferroviaire de Chenab, qui fait partie de la liaison ferroviaire du Cachemire, à Reasi, dans l'État de Jammu-et-Cachemire. (PIB) / AFP)
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  • L'Inde n'est pas membre du Groupe des Sept (États-Unis, Japon, Allemagne, Royaume-Uni, France, Italie, Canada), mais elle est devenue une habituée de ses sommets, auxquels elle est régulièrement conviée depuis 2019.
  • « Nous contribuons activement à la diplomatie internationale et si cela peut servir de passerelle, c'est un atout pour la diplomatie internationale dans une période de relations difficiles et de tensions accrues », fait valoir M. Jaishankar.

PARIS : Invitée du G7 qui débute dimanche, mais aussi membre fondateur des Brics, l'Inde souhaite porter la voix du « Sud global », se posant en « passerelle » entre les différents acteurs de la scène internationale, affirme son ministre des Affaires étrangères dans un entretien à l'AFP.

L'Inde n'est pas membre du Groupe des Sept (États-Unis, Japon, Allemagne, Royaume-Uni, France, Italie, Canada), mais elle est devenue une habituée de ses sommets, auxquels elle est régulièrement conviée depuis 2019.

« Nous avons été un pays invité depuis plusieurs années et je pense que ça a été bénéfique pour le G7 », déclare à l'AFP Subrahmanyam Jaishankar depuis Paris, où il a clos samedi une visite en France, se félicitant d'avoir « la capacité de travailler avec différents pays sans qu'aucune relation ne soit exclusive ». 

Avec une population en passe de devenir la quatrième économie mondiale, l'Inde est l'un des pays les plus peuplés du globe. Elle siège à la table de nombreuses organisations, avec les Occidentaux au G7 ou au sein du « Quad » (Dialogue quadrilatéral pour la sécurité, avec les États-Unis, le Japon, l'Australie), mais aussi avec la Chine, la Russie et l'Iran au sein des Brics et du Groupe de Coopération de Shangaï.

« Nous contribuons activement à la diplomatie internationale et si cela peut servir de passerelle, c'est un atout pour la diplomatie internationale dans une période de relations difficiles et de tensions accrues », fait valoir M. Jaishankar.

Ancienne colonie britannique, indépendante depuis 1947, l'Inde se pose, avec le Brésil, en héraut du « Sud global », qui réunit « des pays qui ont été victimes de l'ordre mondial ces dernières années, ces derniers siècles ». 

« Dans les pays du Sud, il existe un fort ressentiment face aux inégalités de l'ordre international, une volonté de le changer, et nous en faisons pleinement partie », explique le ministre en poste depuis 2019.

« Aujourd'hui, pour des pays comme les nôtres, il est important de nous exprimer, de mener, de faire sentir notre présence. »

Cette voix passe aussi par les BRICS, devenue « l'une des principales plateformes de rassemblement pour les pays non occidentaux », dont les chefs d'État se réuniront en juillet.

Partisan de « négociations directes » pour résoudre la guerre entre l'Ukraine et la Russie, qui a frappé durement les pays du Sud, M. Jaishankar affiche son scepticisme face aux politiques de sanctions occidentales : « Ça n'a pas vraiment marché jusqu'à présent, non ? » 

Partenaire commercial et allié politique de la Russie, l'Inde pourrait se retrouver exposée en cas de sanctions contre Moscou.

« L'économie mondiale est sous tension. Plus on ajoute des facteurs de tensions, plus les difficultés seront grandes. »

Dans l'ordre mondial actuel, l'Inde doit composer avec la « discontinuité » posée par Donald Trump.

Des négociations en cours sur le sujet ont « bien avancé ».L'Inde doit également chercher « un équilibre » avec la Chine. 

Pékin soutient Islamabad, que New Delhi accuse de soutenir les activités de « terroristes » islamistes sur son sol.

Le 22 avril, une attaque au Cachemire indien a déclenché une confrontation militaire de quatre jours entre les deux pays, la plus grave depuis 1999. Narendra Modi a promis une « riposte ferme » à toute nouvelle attaque « terroriste », renforçant le spectre d'une escalade entre les deux puissances nucléaires.

« En 2008, la ville de Mumbai a été attaquée (plusieurs attentats jihadistes ont fait 166 morts) et nous avons commis l'erreur de ne pas réagir avec fermeté. Nous sommes déterminés à ne pas répéter ces erreurs. Si des terroristes pénètrent en Inde depuis et grâce au soutien d'un pays voisin, nous les poursuivrons et nous les châtierons ».

Mais l'Inde n'a jamais envisagé de recourir à l'arme nucléaire, assure-t-il : « Ces inquiétudes émanaient de personnes mal informées ».

 


Israël appelle les Iraniens à évacuer les zones proches de sites militaires

Des soldats et des membres d'une équipe de recherche et de sauvetage se rassemblent près de voitures endommagées dans la ville de Tamra, dans le nord d'Israël, à la suite d'une attaque à la roquette lancée par l'Iran dans la nuit du 15 juin 2025. (Photo par AHMAD GHARABLI / AFP)
Des soldats et des membres d'une équipe de recherche et de sauvetage se rassemblent près de voitures endommagées dans la ville de Tamra, dans le nord d'Israël, à la suite d'une attaque à la roquette lancée par l'Iran dans la nuit du 15 juin 2025. (Photo par AHMAD GHARABLI / AFP)
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  • L'armée a « demandé à toutes les personnes se trouvant actuellement dans des installations militaires en Iran, ou à proximité, d'évacuer immédiatement les lieux, précisant que leur vie était en danger ».
  • Le communiqué ne précise pas de coordonnées géographiques et n'est accompagné d'aucune carte permettant de localiser ces zones.

JERUSALEM : Le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a déclaré dimanche dans un communiqué de son bureau avoir ordonné à l'armée israélienne d'émettre des avis d'évacuation à l'intention des habitants de Téhéran vivant à proximité de sites militaires.

Après cet ordre, l'armée israélienne a appelé les Iraniens à évacuer les zones « à proximité d'installations militaires » dans un communiqué publié sur le réseau social X en persan et en arabe.

L'armée a « demandé à toutes les personnes se trouvant actuellement dans des installations militaires en Iran, ou à proximité, d'évacuer immédiatement les lieux, précisant que leur vie était en danger ».

Le communiqué ne précise pas de coordonnées géographiques et n'est accompagné d'aucune carte permettant de localiser ces zones, contrairement aux communiqués de l'armée israélienne adressés aux Palestiniens de la bande de Gaza, où elle est en guerre contre le mouvement islamiste Hamas.

Cette décision fait partie d'un plan « visant à faire pression sur le régime » en créant des déplacements de population, a déclaré à l'AFP une source sécuritaire israélienne.


La Russie s'apprête à construire la première centrale nucléaire du Kazakhstan

Une vue aérienne montre le village d'Ulken (au premier plan) et le site proposé pour la centrale nucléaire près du village d'Ulken, situé sur les rives du lac Balkhash, à environ 400 kilomètres au nord d'Almaty, le 22 septembre 2024. (Photo de Ruslan PRYANIKOV / AFP)
Une vue aérienne montre le village d'Ulken (au premier plan) et le site proposé pour la centrale nucléaire près du village d'Ulken, situé sur les rives du lac Balkhash, à environ 400 kilomètres au nord d'Almaty, le 22 septembre 2024. (Photo de Ruslan PRYANIKOV / AFP)
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  • « Rosatom a été désigné chef de file du consortium international pour la construction de la première centrale nucléaire au Kazakhstan », a indiqué l'agence kazakhe pour l'énergie atomique.
  • Le Kazakhstan, immense ex-république soviétique et allié de Moscou, est le premier producteur mondial d'uranium (43 %) et le troisième fournisseur d'uranium naturel de l'Union européenne.

ALMATY, KAZAKHSTAN : Le géant russe du nucléaire Rosatom sera le principal constructeur de la première centrale nucléaire du Kazakhstan, ont annoncé samedi les autorités de ce pays d'Asie centrale, premier producteur mondial d'uranium, un chantier que convoitaient la France, la Chine et la Corée du Sud.

« Rosatom a été désigné chef de file du consortium international pour la construction de la première centrale nucléaire au Kazakhstan », a indiqué l'agence kazakhe pour l'énergie atomique.

Le Kazakhstan, immense ex-république soviétique et allié de Moscou, est le premier producteur mondial d'uranium (43 %) et le troisième fournisseur d'uranium naturel de l'Union européenne, mais souffre d'un manque cruel d'électricité pour sa consommation intérieure.

L'agence kazakhe dit désormais « étudier la question de l'obtention de financements publics à l'exportation aux dépens de la Fédération de Russie, conformément aux propositions de Rosatom ». 

Rosatom a salué la décision kazakhe dans un communiqué et promis « la construction d'une centrale nucléaire selon le projet le plus avancé et le plus efficace au monde, basé sur des technologies russes ».

« Les réacteurs VVER-1200 de troisième génération combinent des solutions techniques éprouvées avec les systèmes de protection active et passive les plus récents. Ces derniers ont été développés en stricte conformité avec les normes internationales de sécurité », a ajouté la société.

Rosatom (Russie), China National Nuclear Corporation (Chine), EDF (France) et Korea Hydro & Nuclear Power (Corée du Sud) faisaient partie des quatre entreprises pressenties.

L'agence ajoute qu'elle « continuera à travailler avec des partenaires étrangers pour former un consortium international efficace », sans donner plus de précisions. 

Ce projet de consortium international, qui n'a jamais été spécifié, s'inscrit dans la volonté du dirigeant kazakh Kassym-Jomart Tokaïev de maintenir de bonnes relations avec les grandes puissances.

Moscou, puissance historique en Asie centrale, a ainsi remporté cet appel d'offres aux dépens de la Chine, désormais incontournable dans la région. Cette annonce intervient quelques jours avant la venue du président chinois Xi Jinping au Kazakhstan pour un sommet « Asie centrale-Chine ».

La centrale, dont la construction a été validée lors d'un référendum sans surprise à l'automne, doit être bâtie près du village abandonné d'Ulken, dans le sud du pays, sur les bords du lac Balkhach, le deuxième plus grand d'Asie centrale.

En Ouzbékistan voisin, le géant russe Rosatom va construire une petite centrale nucléaire et a proposé au Kirghizistan un projet similaire.