Royaume-Uni: pour le Labour, une cinglante défaite qui ravive les guerres internes

Le chef du Labour, Keir Starmer, n'est sorti de son silence qu'en fin d'après-midi pour se dire «amèrement déçu» et assumer «l'entière responsabilité» de l'échec. (Photo, AFP)
Le chef du Labour, Keir Starmer, n'est sorti de son silence qu'en fin d'après-midi pour se dire «amèrement déçu» et assumer «l'entière responsabilité» de l'échec. (Photo, AFP)
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Publié le Samedi 08 mai 2021

Royaume-Uni: pour le Labour, une cinglante défaite qui ravive les guerres internes

  • Le Labour continue de souffrir des conséquences du Brexit avec la perte d'un bastion supplémentaire dans le nord de l'Angleterre
  • Ces élections sont intervenues à un moment où le succès de la campagne de vaccination redore le blason du gouvernement de Boris Johnson

LONDRES: Le chef du Labour, Keir Starmer, avait reconnu se préparer à une journée difficile. La perte d'un bastion supplémentaire travailliste dans le nord de l'Angleterre sonne comme un cinglant revers, qui ravive les querelles internes au sein de l'opposition à Boris Johnson.

Le patron du parti n'est sorti de son silence qu'en fin d'après-midi pour se dire «amèrement déçu» et assumer «l'entière responsabilité» de l'échec. Mais il s'est abstenu d'annoncer tout changement, malgré la grogne qui monte dans l'aile gauche.

Car le premier résultat du «Super jeudi» d'élections locales est tombé comme un coup de tonnerre au petit matin. Hartlepool, qui avait toujours élu des députés travaillistes depuis la création de la circonscription en 1974, va envoyer à Westminster, à l'issue d'un scrutin anticipé, la conservatrice Jill Mortimer qui a obtenu près du double du score de son adversaire du Labour, Paul Williams.

Après l'avoir pulvérisé lors des législatives de 2019, Boris Johnson enlève une brique de plus au «mur rouge», ces régions du nord de l'Angleterre qui ont souffert de plein fouet de la désindustrialisation des dernières décennies et ont voté massivement en faveur du Brexit en 2016 (près de 70% pour Hartlepool).

Dans le reste du pays, les conservateurs, au pouvoir depuis plus de 10 ans à Londres, progressent dans de nombreuses assemblées locales. 

Elu à la tête du Labour il y a un an après la déroute historique subie par son prédécesseur, le très à gauche Jeremy Corbyn, Keir Starmer, plus centriste, n'a pas eu la tâche facile. Il a dû mener l'opposition au gouvernement en pleine crise sanitaire, marquée par des appels à l'unité nationale et des dépenses publiques historiques inhabituelles pour un gouvernement conservateur.

En outre, ces élections sont intervenues à un moment où le succès de la campagne de vaccination redore le blason du gouvernement de Boris Johnson, jusqu'alors critiqué pour sa gestion de la pandémie, qui a fait plus de 127 000 morts dans le pays.

Plus fondamentalement, le Labour continue de souffrir des conséquences du Brexit. Il a manqué d'une position claire sur ce sujet majeur après la victoire du «leave». Sa direction garde une image de «remainers» peu appréciée dans l'électorat pro-Brexit, séduite à l'inverse par Boris Johnson et ses promesses de revaloriser les régions du Nord.

Pour l'expert en élections John Curtice, la leçon est claire: «Cela montre le manque de progrès du Labour pour renouer avec la classe ouvrière depuis les législatives» de 2019, a-t-il expliqué sur la BBC.

S'inspirer de Biden

L'aile gauche du parti d'opposition s'est engouffrée dans la brèche pour critiquer l'orientation de Keir Starmer, la députée Diane Abbott relevant qu'il n'était cette fois «pas possible de blâmer Jeremy Corbyn» et l'appelant à «changer de stratégie».

Ce dernier, qui avait attiré de nombreux militants jeunes vers le Labour, a appelé son camp à «proposer une vision plus audacieuse».

Le député Lloyd Russell-Moyle a conseillé à Keir Starmer de s'inspirer de Joe Biden, qui a «invité la gauche autour de la table au lieu de la clouer au pilori» et parle à la fois «aux libéraux et aux cols bleus».

A l'inverse, l'élu Steve Reed a estimé que le Labour devait poursuivre sa transformation «plus fort et plus vite» pour regagner la confiance.

Peter Mandelson, ancien député d'Hartlepool et allié clé de Tony Blair dans les années 1990, a mis la victoire sur le compte de «deux C: Covid et Corbyn et un peu de Brexit», estimant que l'ancien chef restait un repoussoir.

Les récentes attaques de Keir Starmer sur l'intégrité du pouvoir, éclaboussé par des révélations sur des conflits d'intérêt avec le monde des affaires et le financement de la luxueuse rénovation de l'appartement de Boris Johnson à Downing Street, n'ont pas porté.

Il se trouve sous pression désormais pour reprendre l'initiative mais a repoussé à plus tard tout changement de cap ou remaniement de la direction du parti. 

«Cela va au delà d'un remaniement ou des personnes, cela concerne le cœur du problème: savoir si le Labour s'adresse à lui-même ou au pays», a-t-il déclaré aux télévisions, promettant de s'atteler à «reconstruire la confiance» au sein de la classe ouvrière.

«Nous avons déjà changé, nous devons aller plus loin», a-t-il assuré.


Mamdani élu maire de New York, soirée de revers pour Trump

Le socialiste Zohran Mamdani a remporté mardi la mairie de New York au terme d'une soirée d'élections locales dans lesquelles Donald Trump a essuyé plusieurs revers, un message de défiance à un an des élections de mi-mandat. (AFP)
Le socialiste Zohran Mamdani a remporté mardi la mairie de New York au terme d'une soirée d'élections locales dans lesquelles Donald Trump a essuyé plusieurs revers, un message de défiance à un an des élections de mi-mandat. (AFP)
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  • L'élu local de 34 ans, opposant résolu au président américain, a largement devancé son principal adversaire, l'ancien gouverneur de l'Etat, le centriste Andrew Cuomo, selon les projections de plusieurs médias
  • Zohran Mamdani deviendra le 1er janvier le premier maire musulman de la plus grande ville des Etats-Unis

NEW YORK: Le socialiste Zohran Mamdani a remporté mardi la mairie de New York au terme d'une soirée d'élections locales dans lesquelles Donald Trump a essuyé plusieurs revers, un message de défiance à un an des élections de mi-mandat.

L'élu local de 34 ans, opposant résolu au président américain, a largement devancé son principal adversaire, l'ancien gouverneur de l'Etat, le centriste Andrew Cuomo, selon les projections de plusieurs médias.

Zohran Mamdani deviendra le 1er janvier le premier maire musulman de la plus grande ville des Etats-Unis.

Sa victoire a été accueillie par des cris de joie et parfois les larmes de ses partisans réunis dans une grande salle rococo des années 1920 du centre de Brooklyn.

"En cette période d'obscurité politique, New York sera la lumière", leur a lancé le jeune élu, ajoutant que la ville pouvait "montrer à une nation trahie par Donald Trump comment le vaincre".

L'ancien président démocrate Bill Clinton, dont M. Cuomo a fait partie de l'administration, a souhaité au vainqueur de "transformer l'élan de (sa) campagne" pour construire "un New York meilleur, plus juste et plus abordable".

"L'avenir s'annonce un peu meilleur", a commenté pour sa part Barack Obama, évoquant les différentes victoires démocrates de la soirée.

Participation record 

Donald Trump, qui a fait de Zohran Mamdani l'une de ses nouvelles bêtes noires, a lui aussi rapidement réagi. Dans un message publié sur son réseau Truth Social, il a cité des "sondeurs" anonymes affirmant que les défaites républicaines étaient dues à la paralysie budgétaire -- le  "shutdown" -- et au fait que son propre nom ne figurait pas sur les bulletins de vote.

Plus tôt dans la journée, il avait appelé les électeurs juifs à faire barrage au candidat, militant de la cause palestinienne. En réponse, Zohran Mamdani s'est de nouveau engagé, dans son discours de victoire, à "bâtir une mairie qui (...) ne faiblira pas dans la lutte contre le fléau de l'antisémitisme".

Vainqueur surprise de la primaire démocrate en juin, l'élu du Queens à l'Assemblée de l'Etat de New York n'a jamais, depuis lors, quitté la tête des sondages, même après le retrait de la course du maire sortant Eric Adams, qui a également appelé à le battre en ralliant Andrew Cuomo.

Signe de l'engouement pour le scrutin, avant la fermeture des bureaux de vote à 21H00, plus de deux millions d'électeurs s'étaient rendus aux urnes, la plus importante participation depuis près de 60 ans.

Né en Ouganda dans une famille d'intellectuels d'origine indienne, arrivé aux Etats-Unis à sept ans et naturalisé en 2018, Zohran Mamdani a fait de la lutte contre la vie chère le coeur de sa campagne.

Si Donald Trump l'a qualifié de "communiste", ses propositions -- encadrement des loyers, bus et crèches gratuits -- relèvent plutôt de la social-démocratie.

Autres victoires démocrates 

Très populaire auprès des jeunes, le futur maire a également ramené à lui de nombreuses personnes qui s'étaient éloignées de la politique, "des électeurs frustrés par le status quo, en quête de nouvelles personnalités", selon le politologue Costas Panagopoulos.

"Si Zohran Mamdani devient maire, Trump n'en fera qu'une bouchée", a prédit Andrew Cuomo avant le verdict mardi, insistant, comme il l'a fait durant toute la campagne, sur l'inexpérience de son adversaire.

Plusieurs fois, le président républicain a promis de mettre des bâtons dans les roues du jeune candidat démocrate s'il était élu, en s'opposant au besoin au versement de certaines subventions fédérales à la ville.

Voisin de New York, l'Etat du New Jersey a choisi la démocrate Mikie Sherrill contre l'homme d'affaires républicain Jack Ciattarelli. L'Etat a longtemps été considéré comme un bastion démocrate. Mais à la dernière présidentielle, Donald Trump y avait considérablement réduit l'écart.

Plus au sud sur la côte est, la Virginie a élu la première femme à sa tête, la démocrate Abigail Spanberger, battant la républicaine Winsome Earle-Sears.

Enfin, les Californiens ont approuvé un texte visant à redécouper leur carte électorale en faveur des démocrates, qui cherchent à compenser ce qu'ont fait au Texas les républicains sous la pression de Donald Trump.


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.