L'Arabie saoudite et le Pakistan sont à nouveau sur la bonne voie

La visite du Premier ministre Imran Khan à Djeddah montre que les relations entre l'Arabie saoudite et le Pakistan sont à nouveau sur la bonne voie. (Photo par Bandar Algaloud)
La visite du Premier ministre Imran Khan à Djeddah montre que les relations entre l'Arabie saoudite et le Pakistan sont à nouveau sur la bonne voie. (Photo par Bandar Algaloud)
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Publié le Samedi 08 mai 2021

L'Arabie saoudite et le Pakistan sont à nouveau sur la bonne voie

L'Arabie saoudite et le Pakistan sont à nouveau sur la bonne voie
  • Le choix de Gwadar, en particulier, pour un tel investissement a indiqué la tendance saoudienne à rejoindre le réseau d'intégration régionale plus large: le corridor économique Chine-Pakistan
  • Les leaders des deux pays ont été suffisamment résilients pour relever le défi et remettre à nouveau les relations saoudo-pakistanaises sur la bonne voie

Le Premier ministre pakistanais Imran Khan est en visite en Arabie saoudite à l'invitation personnelle du prince héritier Mohammed ben Salmane.

Le chef d'état-major pakistanais, le général Qamar Javed Bajwa, est arrivé à Riyad avant cette visite de haut niveau pour jeter les bases de ce qui est décrit par les médias comme un élan majeur dans les relations saoudo-pakistanaises, surtout en termes économiques, commerciaux et de coopération environnementale.

Cela est considéré comme un bon augure pour les deux pays frères, car leur amitié historique a connu une rupture malheureuse l'année dernière.

Heureusement, les leaders des deux pays ont été suffisamment résilients pour relever le défi et remettre à nouveau les relations saoudo-pakistanaises sur la bonne voie.

Pour sûr, cette résilience est enracinée dans les relations interpersonnelles, ce qui les aide finalement à surmonter des problèmes temporaires et à maintenir la coopération sur des questions d'intérêt et de préoccupation mutuelles. Cette fois, ce n'est pas différent, et voici pourquoi.

Peu de temps après son élection en tant que Premier ministre en août 2018, Khan a pu développer une relation personnelle avec le prince héritier.

Khan s'est rendu deux fois en Arabie saoudite au cours des deux mois suivants, la deuxième fois à l'invitation personnelle du prince héritier pour assister à la conférence «Initiative d'investissement futur» dans le cadre de la Vision 2030.

Khan avait hérité d'une grave crise de la balance des paiements. L'Arabie saoudite a donc pris les devants en offrant une aide financière de 6,2 milliards de dollars, dont 3 milliards de dollars de prêts ainsi qu’une facilité de paiement différé du pétrole de 3,2 milliards de dollars.

S'inspirant de Riyad, les EAU ont aussi emboîté le pas en offrant 6 milliards de dollars d'aide supplémentaire au Pakistan.

Lorsque le prince héritier saoudien s'est rendu au Pakistan en février 2019, il a été personnellement conduit par Khan au domicile du Premier ministre, sur la colline d'Islamabad.

Dans un autre exemple qui symbolisait les excellents rapports personnels entre les deux leaders charismatiques, le prince héritier a confié joyeusement au premier ministre pakistanais: «Je suis votre ambassadeur en Arabie saoudite». Plus tard dans l'année, le prince héritier a offert son avion personnel à Khan afin de se rendre à New York pour le sommet de l'ONU. Même si les relations saoudo-pakistanaises ont brièvement connu une mauvaise période en 2020, Khan a déclaré: «Le Pakistan et l'Arabie saoudite resteront à jamais des amis proches».

Cette visite historique au Pakistan du prince héritier Mohammed ben Salmane en 2019 a été le témoin d'une transition majeure dans les relations stratégiques saoudo-pakistanaises dans la sphère économique, avec l'annonce de 20 milliards de dollars d'investissements saoudiens au Pakistan, dont une raffinerie de pétrole et un complexe pétrochimique d'Aramco de 10 milliards de dollars dans la ville portuaire stratégique de Gwadar.

Le reste des investissements concernait les secteurs des mines et des énergies renouvelables.

Cela était en parallèle avec les efforts pour signer l'Accord de libre-échange dans le but d’accroitre le volume du commerce bilatéral, qui s’élève à 2 milliards de dollars.

Dans le passé, les deux nations avaient des coopérations étroites dans les domaines de la sécurité et de la géopolitique, et l'aide économique saoudienne se limitait aux privilèges pétroliers. Aujourd'hui, pour la première fois, le Royaume s'intéresse au développement économique à long terme du Pakistan.

Ce moment prometteur dans les relations saoudo-pakistanaises se produit dans un contexte de revirement favorable de la géopolitique régionale, marqué par des percées sur différents fronts.

Dr. Ali Awadh Asseri

Le choix de Gwadar, en particulier, pour un tel investissement a indiqué la tendance saoudienne à rejoindre le réseau d'intégration régionale plus large: le corridor économique Chine-Pakistan.

Dans l'ordre naturel des choses, la prochaine étape logique aurait été d'élaborer conjointement les plans de développement des projets économiques saoudiens proposés au Pakistan.

Malheureusement, les forces internationales hostiles à la position exceptionnelle de l'Arabie saoudite dans le monde musulman, et l'alliance historique saoudo-pakistanaise, n'ont pas pu assimiler le fait que les deux nations frères portent leur relation à un niveau différent où leurs intérêts pourraient être liés géo-économiquement à l'avenir.

Ce qui s'est passé ensuite est une triste phase de notre histoire actuelle, qui ne vaut pas la peine d'être rappelée.

Ce qui mérite d’être mentionné, cependant, c'est que l'Arabie saoudite est, et restera, le cœur de l'islam pour tous les musulmans du monde entier, et aucun autre pays ne peut revendiquer un tel droit: Que l'Organisation de la coopération islamique (OCI) est le seul organe représentatif des 57 pays musulmans et qu'aucune tentative de créer un bloc musulman alternatif ne réussira jamais. Le fait que les relations saoudo-pakistanaises sont bien enracinées dans l’affection et le respect que leurs deux peuples ont les uns pour les autres, et par conséquent aucune conspiration ne peut entraver leur évolution naturelle en tant que partenaires historiques.

C’est pourquoi le faux récit concernant le rôle de l’OCI au Cachemire n’a pas duré longtemps. C'est pourquoi la triste image du soutien économique saoudien au Pakistan a finalement échoué à l'épreuve du temps.

Heureusement, les deux pays disposent de canaux de communication officiels et officieux de manière à surmonter tout cas de malentendu grave ou de désinformation délibérée ayant un impact sur leurs relations.

Leurs liens sont indestructibles car ils sont fondé sur la volonté des deux peuples.

Par conséquent, les deux pays frères ont toujours été côte à côte dans les moments difficiles. Qu'il s'agisse de défendre le caractère sacré des deux Saintes Mosquées ou de vaincre le fléau du terrorisme, le Pakistan a toujours été un partenaire de poids pour l'Arabie saoudite.

De même, l'Arabie saoudite n'a jamais déçu le Pakistan dans les temps difficiles, que ce soit la vague de terrorisme après le 11 septembre ou le tremblement de terre dévastateur de 2005.

Les deux pays coopèrent ainsi étroitement pour instaurer la paix et la stabilité en Afghanistan. L'engagement saoudien actuel ou émergent au Pakistan reflète le même esprit de camaraderie aux racines islamiques.

Rétrospectivement, ce que représente la visite du Premier ministre Khan à Djeddah, c'est que la relation entre l'Arabie saoudite et le Pakistan est revenue au niveau où elle était lorsque le prince héritier s'est rendu à Islamabad il y a plus de deux ans.

La décision de l'Arabie saoudite et des Émirats arabes unis de reporter plus de 2 milliards de dollars de prêts à l'année prochaine implique la reprise de leurs plans de secours financiers respectifs, dont le Pakistan a désespérément besoin pour éviter les effets dévastateurs de la troisième vague de la pandémie du coronavirus (Covid-19).

La visite devrait lancer les travaux sur les projets de développement saoudiens de 20 milliards de dollars au Pakistan, notamment la raffinerie de pétrole et le complexe pétrochimique d'Aramco à Gwadar.

Pour stimuler le commerce bilatéral, un accord global de coopération douanière figurait également à l'ordre du jour.

En outre, l’interaction de presque une semaine du général Bajwa avec ses homologues saoudiens et la récente nomination du lieutenant-général à la retraite Bilal Akbar au poste d’ambassadeur du Pakistan en Arabie saoudite garantiront à coup sûr une coordination renforcée en matière de défense et des relations stratégiques entre les deux pays.

À vrai dire, cette fois, la relation devrait permettre une coopération plus approfondie au-delà de la défense et de l'économie, sur les questions du changement climatique en particulier.

Khan partage la vision du prince héritier telle que définie dans les deux initiatives saoudiennes, l’initiative verte pour l’Arabie saoudite ainsi que l’initiative verte pour le Moyen-Orient, annoncées récemment, et qui s’alignent sur l’initiative de son gouvernement pour un Pakistan propre et vert.

Et, heureusement, ce moment prometteur dans les relations saoudo-pakistanaises se produit au milieu d'un revirement favorable de la géopolitique régionale, marqué par l’offre de paix saoudienne à l’Iran, la fin de la crise au Qatar et le cessez-le-feu indo-pakistanais au Cachemire.

Tous ces développements ouvrent certainement l'espace diplomatique qui permet à l'Arabie saoudite et au Pakistan de concentrer leurs efforts conjoints pour le développement économique et la stabilité régionale.

 

                Le Dr Ali Awadh Asseri a été ambassadeur d’Arabie saoudite au Pakistan de 2001 à 2009 et a reçu la plus haute distinction civile du Pakistan, Hilal-e-Pakistan, pour ses services dans la promotion des relations saoudo-pakistanaises. Il est titulaire d'un doctorat en économie de l'Université arabe de Beyrouth et auteur du livre «Combating Terrorism: Saudi Arabia’s Role in the War on Terror» (Combattre le terrorisme: le rôle de l’Arabie saoudite dans la guerre contre le terrorisme) (Oxford, 2009).

 

Les opinions exprimées par les écrivains dans cette section sont les leurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue d'Arab News.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com