Jérusalem : Répression sauvage et violation du sacré, un cocktail explosif

Une vue du dôme du Rocher où trône la mosquée Al-Aqsa à Jérusalem, le 10 mai 2021. (AFP).
Une vue du dôme du Rocher où trône la mosquée Al-Aqsa à Jérusalem, le 10 mai 2021. (AFP).
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Publié le Mercredi 12 mai 2021

Jérusalem : Répression sauvage et violation du sacré, un cocktail explosif

  • À la dimension spirituelle et religieuse de l’esplanade des Mosquées vient s’ajouter pour le monde musulman celle du mois le plus sacré de l’Islam
  • «On s’imaginait pouvoir contourner le conflit. Mais c’est impossible, la réalité se rappelle toujours aux gens», affirme Elias Sanbar

ATHÈNES : Si la violence s’exprime et se déploie inexorablement depuis hier à Gaza et à Tel Aviv, il ne faut pas perdre de vue l’origine de l’embrasement. C’est à Jérusalem que tout a recommencé, avec cette fois-ci, en toile de fond, le mois du ramadan.

Car à la dimension spirituelle et religieuse de l’esplanade des Mosquées vient s’ajouter pour le monde musulman, celle du mois le plus sacré de l’Islam. Les provocations initiées par l’extrême-droite israélienne ont ainsi visé un lieu et une période doublement vénérés par les musulmans du monde entier et c’est sans nul doute ce qui est en train de conduire à une spirale de violence qui paraît aujourd’hui inévitable.

L’ambassadeur de la Palestine à l’Unesco, Elias Sanbar, revient sur les derniers événements de Jérusalem et aime à rappeler à Arab News en français que «l’idée d’un moment zéro est fausse». «Ce conflit a 120 ans, il a pour source une injustice permanente et les premiers affrontements datent du XIXe siècle», souligne d’emblée le diplomate palestinien qui ajoute: «Il s’agit de la dernière colonisation qui subsiste.» «L’épisode actuel est certes déclenché par les évictions forcées lancées par l’extrême-droite israélienne mais ces pratiques sont loin d’être nouvelles. Tout récemment, et tout près du quartier de Cheikh Jarrah, trois hôtels ottomans magnifiques ont subi le même sort, il y a eu exactement le même “jeu”. Rien de nouveau à signaler dans la technique», affirme le diplomate.

jerusalem
La tour Al-Jawhara en proie aux flammes dans la bande de Gaza, le 12 mai 2021. (AFP).

 

«Ces événements dressent un constat: celui de la centralité du conflit.» 

Yves Aubin de la Messuzière

L’embrasement a donc pour origine une volonté sioniste de se réapproprier l’emblématique vieux quartier de Cheikh Jarrah à Jérusalem. Ce type d’exactions n’est ni ponctuel ni inhabituel. Et ne suscite généralement qu’un intérêt médiatique désabusé. Mais la double sacralité du lieu et du mois en a peut-être décidé autrement, provoquant une onde de choc dans le monde musulman.

esplanade des mosquees

 

Pour Yves Aubin de la Messuzière, ancien ambassadeur et directeur Afrique du nord/Monde arabe au ministère des Affaires étrangères, «ces événements dressent un constat, celui de la centralité du conflit» israélo-palestinien. Il n’est donc ni dépassé ni résolu. «Ce qui se passe me rappelle la visite d’Ariel Sharon sur l’esplanade», souligne M. de la Messuzière, lors d’un entretien téléphonique avec Arab News en français. Sharon est à l’époque le chef de l’opposition israélienne et sa présence près d’Al Aqsa ne peut être perçue que comme une provocation qui sera d’ailleurs à l’origine de la «deuxième Intifada» ou «Intifada d’Al-Aqsa» qui s’étalera sur cinq ans et fera des milliers de morts, la plupart côté palestinien. «Ces jeunes palestiniens qui manifestent ne connaissent ni la 1re ni la 2e Intifada», note l’ancien diplomate, qui ajoute que ces derniers s’élèvent spontanément contre ce qu’ils estiment être une provocation.

«On s’imaginait pouvoir contourner le conflit. Mais c’est impossible, la réalité se rappelle toujours aux gens.»

Elias Sanbar

Et cette provocation est de taille, comme le rappelle Sanbar. Car la logique sioniste se fonde fondamentalement sur l’idée du droit de propriété exclusif sur une terre: «Celui qui était là “avant” a un droit exclusif de plaisance. Si j’étais là avant toi, c’est que tu n’as pas le droit d’être là… C’est une déformation totale de l’Histoire», s’insurge le diplomate palestinien qui rappelle également que «les Palestiniens sont traités comme s’ils étaient des squatters, et Israël se présente comme le propriétaire légitime». «Tout cela est très pratique», note-t-il, car alors pour les Israéliens «il n’y a plus qu’à reprendre possession des lieux».

Pour Sanbar, et pour l’establishment palestinien, l’attitude israélienne n’est pas de nature à surprendre car avec la reconnaissance de Jérusalem comme capitale d’Israël par les États-Unis en décembre 2017, «il y a un président américain irresponsable» qui a pavé la voie à l’impunité. En pratique, Donald Trump a donné une ville «qui n’est pas la sienne à une partie tierce». «En vertu de quel droit?» se demande le représentant de la Palestine à l’Unesco. Pour lui, les événements de Cheikh Jarrah servent de piqure de rappel: «Les Israéliens nous disent: nous ne sommes pas uniquement en train de vous déposséder de vos propriétés, vous devez vous rappeler que cette ville est à nous. Vous devez tous partir ».  

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Saleh Diab. assis sur son canapé le 6 mai 2021. Il vit à Cheikh Jarrah et risque de perdre sa maison, réclamée par les tenants de l'extrême-droite israélienne. (AFP).

 

«Le Hamas a réagi, alors qu’Israël bénéficie d’une immunité totale et se place au-dessus du droit international, mais aussi du droit humain le plus élémentaire.»

Elias Sanbar

Pour Elias Sanbar, il est important de prendre conscience, une nouvelle fois, de la réalité. Laquelle « n’a jamais quitté la scène… Ce qu’il y a eu, ce sont des aveuglements volontaires. On s’imaginait pouvoir contourner le conflit. Mais c’est impossible, la réalité se rappelle toujours aux gens. Le réel est plus fort», dit Sanbar, qui martèle que les périodes d’illusion «ne durent qu’un temps».

Quid donc du rôle du Hamas dans ce conflit qui semble s’enliser dans la durée? Cette escalade vient-elle remettre en cause la décision du mouvement de mettre de côté la résistance armée au profit d’une résistance politique sous l’égide de l’OLP? Pour répondre, Sanbar rappelle d’abord le contexte de «répression sauvage» mis en œuvre par Israël. «Plus de 900 blessés par balles réelles en l’espace de deux jours, dont la majorité sont touchés à la tête. On tire dans la tête, et un nombre incroyable de Palestiniens ont perdu un œil», une autre manière de dire «cette ville est la nôtre».

«C’est dans ce contexte que le Hamas a réagi, alors qu’Israël bénéficie d’une immunité totale et se place au-dessus du droit international, mais aussi du droit humain le plus élémentaire», poursuit Sanbar. «Personne ne peut accepter ce qui est en train de se passer, une répression sauvage doublée d’une violation du sacré, alors même que les lieux de culte sont, et devraient rester, des endroits où les fidèles sont en sécurité. La répression et l’irrespect du religieux – alors que le mois sacré du ramadan touche à sa fin et que tout au long de cette période Israël avait mis en place à Al-Aqsa des restrictions d’accès jugées par beaucoup exagérées – sont «un cocktail explosif» qui ne peut que dégénérer. «Ce n’est rien de moins qu’un massacre dans les mosquées», martèle Elias Sanbar.

gaza
Des colonnes de fumée noire s'élèvent du complexe Hanadi à Gaza, peu après un pilonnage de l'armée israélienne. (AFP).

 

«Les Palestiniens ont désormais “la capacité morale et diplomatique de riposter”.»

Dr Roland Lombardi

Seul point «positif» du drame humain qui se joue à Jérusalem et Gaza en plein mois de ramadan: avoir remis le conflit israélo-palestinien sur le devant de la scène internationale, comme une confirmation de sa centralité et de la nécessite pressante de le résoudre et non de le contourner.

ramallah
Des Palestiniens de Ramallah manifestent en soutien à leurs concitoyens de Jérusalem, le 9 mai 2021. (AFP).

 

Pour Roland Lombardi, historien et géopolitologue spécialiste du Moyen-Orient, il est incontestable que, du côté des États-Unis, Joe Biden a donné un second souffle aux Palestiniens, notamment en autorisant de nouveau les aides à Gaza. Pour lui, le Hamas en sort revigoré après une période durant laquelle il a été doublement pris à la gorge, tant par la pandémie que par la crise économique. Les Palestiniens ont désormais «la capacité morale et diplomatique de riposter», mais «la clé reste Washington». Et pour l’heure, Biden reste tiraillé entre ses affinités israéliennes et la nécessité de mettre fin à la violence.


L'Arabie saoudite et l'Iran réaffirment leur engagement à mettre en œuvre l’Accord de Pékin

Une réunion organisée par Téhéran a rassemblé mardi des responsables saoudiens, iraniens et chinois. (SPA)
Une réunion organisée par Téhéran a rassemblé mardi des responsables saoudiens, iraniens et chinois. (SPA)
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  • Le vice-ministre saoudien des Affaires étrangères, Waleed Al-Khureiji, a participé mardi à la troisième réunion du Comité tripartite conjoint

RIYAD : L’Arabie saoudite et l’Iran ont réaffirmé leur engagement à mettre en œuvre l’Accord de Pékin lors d’une réunion tenue mardi à Téhéran.

Le vice-ministre saoudien des Affaires étrangères, Waleed Al-Khureiji, a assisté à la troisième réunion du Comité tripartite conjoint entre l’Arabie saoudite, l’Iran et la Chine.

Les parties saoudienne et iranienne « ont réaffirmé leur engagement à mettre en œuvre l’Accord de Pékin dans son intégralité, ainsi que leur volonté de renforcer les relations de bon voisinage entre leurs pays, dans le respect de la Charte des Nations unies, de la Charte de l’Organisation de la coopération islamique et du droit international », a indiqué l’Agence de presse saoudienne dans un communiqué.

L’Arabie saoudite et l’Iran ont également salué le rôle positif continu joué par la Chine ainsi que son soutien constant à la mise en œuvre de l’Accord de Pékin.

De son côté, la Chine a réaffirmé sa disponibilité à poursuivre son soutien et à encourager les démarches entreprises par le Royaume et l’Iran pour développer leurs relations dans divers domaines.

Les trois pays ont salué les progrès continus dans les relations saoudo-iraniennes et les perspectives qu’ils offrent à tous les niveaux, a ajouté la SPA.

Les trois pays ont également appelé à une cessation immédiate des agressions israéliennes en Palestine, au Liban et en Syrie.

Ils ont en outre condamné tout acte portant atteinte à l’intégrité territoriale de l’Iran.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L'armée israélienne dit avoir frappé des infrastructures du Hezbollah au Liban

Des véhicules de l'ONU passent devant des bâtiments détruits par l'offensive aérienne et terrestre menée par Israël contre le Hezbollah dans le sud du Liban, vue depuis la ville la plus septentrionale d'Israël, Metula, le dimanche 30 novembre 2025. (AP)
Des véhicules de l'ONU passent devant des bâtiments détruits par l'offensive aérienne et terrestre menée par Israël contre le Hezbollah dans le sud du Liban, vue depuis la ville la plus septentrionale d'Israël, Metula, le dimanche 30 novembre 2025. (AP)
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  • L’armée israélienne affirme avoir frappé plusieurs infrastructures du Hezbollah dans le sud du Liban, dont un site de lancement, un complexe d’entraînement et des installations militaires, malgré le cessez-le-feu de novembre 2024
  • Le contexte reste tendu depuis l’assassinat de Hassan Nasrallah en 2024, tandis que Washington presse Beyrouth de désarmer le Hezbollah, une demande rejetée par le groupe et ses alliés

JERUSALEM: L'armée israélienne a annoncé tôt mardi avoir frappé des infrastructures du mouvement islamiste Hezbollah pro-iranien dans le sud du Liban.

Les forces armées israéliennes ont indiqué "avoir frappé des infrastructures appartenant à l'organisation terroriste Hezbollah dans plusieurs zones du sud du Liban", dont un site de lancement utilisé pour des attaques contre Israël, dans un communiqué publié sur plusieurs réseaux sociaux.

Elles disent avoir ciblé également un complexe d'entraînement de la force al-Radwan, une unité d'élite, des champs de tir, des zones d'entraînement aux armes pour divers types d'armes et des structures militaires appartenant au Hezbollah.

Malgré un cessez-le-feu conclu en novembre 2024 avec le groupe chiite pro-iranien, Israël continue de mener des attaques régulières le visant dans ses bastions libanais, et d'occuper cinq points frontaliers dans le sud du Liban.

Israël avait menacé début novembre d'intensifier ses attaques au Liban, accusant le mouvement de se "réarmer".

Le Hezbollah a été fortement affaibli par la guerre, avec notamment l'assassinat de son chef historique, Hassan Nasrallah, par une frappe israélienne en septembre 2024 à Beyrouth.

Depuis, les États-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe, un plan auquel le Hezbollah et ses alliés s'opposent en invoquant notamment la poursuite d'une présence israélienne sur le territoire libanais.


Accord Arabie saoudite-Qatar pour une liaison ferroviaire à grande vitesse

Le cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani du Qatar est accueilli par le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane à son arrivée à Riyad. (X : @Spagov)
Le cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani du Qatar est accueilli par le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane à son arrivée à Riyad. (X : @Spagov)
Le cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani du Qatar est accueilli par le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane à son arrivée à Riyad. (X : @Spagov)
Le cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani du Qatar est accueilli par le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane à son arrivée à Riyad. (X : @Spagov)
Le cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani du Qatar est accueilli par le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane à son arrivée à Riyad. (X : @Spagov)
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Le cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani du Qatar est accueilli par le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane à son arrivée à Riyad. (X : @Spagov)
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  • L’Arabie saoudite et le Qatar lancent une ligne TGV de 785 km reliant Riyad à Doha, achevée d’ici six ans et destinée à transporter plus de 10 millions de passagers par an
  • Le projet, estimé à 115 milliards de SR, vise à renforcer l’intégration régionale, stimuler commerce et tourisme, et soutenir la transition vers des transports durables

RIYAD: L’Arabie saoudite et le Qatar ont signé lundi un accord pour construire une ligne ferroviaire à grande vitesse reliant les deux pays.

L’annonce est intervenue à l’issue d’une rencontre à Riyad entre le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane et l’émir du Qatar, cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, tenue dans le cadre du Conseil de coordination saoudo-qatari.

La liaison ferroviaire, qui connectera l’aéroport international King Salman de Riyad à l’aéroport international Hamad de Doha, constituera une première pour les deux nations et réduira le temps de trajet entre les deux capitales à seulement deux heures.

Selon un communiqué conjoint, le projet devrait être achevé d’ici six ans et créer 30 000 emplois dans les deux pays. Une fois opérationnel, il transportera plus de 10 millions de passagers par an.

Les dirigeants ont assisté à la signature de l’accord au palais Al-Yamamah à Riyad, où ils ont également coprésidé la huitième session du Conseil de coordination qataro-saoudien.

L’accord a été signé par le ministre saoudien des Transports et des Services logistiques, Saleh Al-Jasser, et par le ministre qatari des Transports, cheikh Mohammed ben Abdulla ben Mohammed Al-Thani. Il est considéré comme une étape stratégique visant à renforcer la coopération, l’intégration développementale et le développement durable, et à démontrer un engagement commun en faveur de la prospérité régionale.

La ligne à grande vitesse s’étendra sur 785 km et accueillera des trains capables de dépasser les 300 km/h. Plusieurs arrêts sont prévus entre les deux aéroports, notamment à Hofuf et Dammam.

Le service devrait considérablement améliorer les déplacements ferroviaires dans la région et stimuler le commerce ainsi que le tourisme. Le bénéfice économique pour les deux pays est estimé à 115 milliards de riyals saoudiens (30,6 milliards de dollars).

Conçue avec des technologies de pointe et une ingénierie intelligente, la ligne contribuera également à la durabilité environnementale en réduisant les émissions de carbone et en soutenant la transition vers des modes de transport plus efficaces et innovants. Elle constitue l’un des projets clés soutenant le développement régional et renforçant la connectivité ainsi que l’intégration au sein des pays du Conseil de coopération du Golfe.

Au cours de la réunion du conseil, les deux parties ont souligné la solidité de leurs liens économiques, avec un commerce bilatéral en 2024 en hausse de 634 % depuis 2021, à 930,3 millions de dollars (hors réexportations).

Le cheikh Tamim était accompagné lors des discussions par le Premier ministre, cheikh Mohammed ben Abdulrahman ben Jassim Al-Thani, ainsi que par d’autres hauts responsables.