Le Liban se dirige t-il vers un scénario à la vénézuélienne ?

Les coupures d'électricité, les pénuries d'eau, le chômage et le manque de services de base ont attisé l'indignation de la population contre la classe dirigeante. (Anwat AMRO/AFP)
Les coupures d'électricité, les pénuries d'eau, le chômage et le manque de services de base ont attisé l'indignation de la population contre la classe dirigeante. (Anwat AMRO/AFP)
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Publié le Lundi 24 août 2020

Le Liban se dirige t-il vers un scénario à la vénézuélienne ?

  • Parmi les nombreux défis auxquels est confronté le Liban à la suite de l’explosion qui a ravagé Beyrouth le 4 août, le péril économique est l’un des plus graves, et reste à ce jour sans solution
  • « La kleptocratie enracinée, une classe politique corrompue, des acteurs complices dans le secteur bancaire et financier, tout cela indique que l’oligarchie politico-financière n’est pas prête à faire réformes », explique Nasser Saidi

C’est un ancien ministre de l'Économie du Liban qui a inventé la formule : « Libazuela ». Nasser Saidi, également ancien vice-gouverneur de la Banque du Liban - la Banque centrale du pays - affirme que le Liban se rapproche de plus en plus d’un scénario chaotique à la vénézuélienne. Autrefois Etat le plus riche d’Amérique latine, le pays est désormais plongé dans la pauvreté, et est synonyme d'échec politique, économique et humanitaire.

Sans une action urgente de la classe dirigeante libanaise discréditée et des puissances financières internationales qui ont les moyens de ressusciter l'économie du pays, la menace est terrible. « Le Liban est au bord de l'abîme, avec un produit intérieur brut (PIB) en baisse de 25% cette année, un chômage croissant, une hyperinflation, une catastrophe humanitaire avec plus de la moitié de la population sous le seuil de pauvreté, explique l’ancien ministre à Arab News. L’accroissement de la pauvreté alimentaire pourrait se transformer en famine, et un effondrement continu des secteurs bancaire et financier, une dévaluation de la monnaie,  ce sont des facteurs qui conduisent à un exil massif. C'est le scénario du Libazuela. »

Parmi les nombreux défis auxquels est confronté le Liban à la suite de l’explosion qui a ravagé Beyrouth le 4 août, lé péril économique est l’un des plus graves, et reste à ce jour sans solution. Sans certains progrès réalisés sur le front économique et financier, il est difficile d’imaginer un avenir pour un Libanais, mis à part pour petite clique de seigneurs de guerre et de kleptocrates qui se battent pour des pans de plus en plus inutiles de l'économie - un État en faillite.

Compte tenu de la situation géographique du Liban, qui se situe au cœur d’un Moyen-Orient instable et incendiaire, les enjeux sont mondiaux et ne sont pas uniquement une question régionale. « Le Liban se trouvant au centre d'une confrontation géopolitique entre les États-Unis et l'Iran, les acteurs locaux participent à ces jeux stratégiques aux dépens d’une population libanaise épuisée », assure Nasser Saidi.

L'explosion de Beyrouth a été la goutte de trop, alors que le pays tentait déjà de faire face à la crise économique et financière sans précédent. Certaines estimations évaluent les besoins immédiats – l’aide humanitaire sur les lieux de l’explosion ou la reconstruction des infrastructures essentielles de la ville –  à 15 milliards de dollars (12,6 milliards d’euros). Mais ce montant, ahurissant en soi, est insignifiant par rapport aux besoins financiers à long terme du Liban.

L’évaluation la plus récente des besoins financiers du pays  a été réalisée par Ghazi Wazni, le ministre des Finances, qui a présenté sa démission semaine dernière avec l’ensemble du gouvernement. Il a fait état de pertes totales dans le secteur bancaire d’un montant de 83 milliards de dollars, ainsi que d’un trou noir dans les comptes de la Banque Centrale équivalent à environ 50 milliards de dollars.

Ensemble, ces pertes représentent plus du double du PIB du pays. C'est comme si l'Arabie saoudite avait soudainement des dettes d’un montant d’1,5 trillion de dollars.

Une « pyramide de Ponzi » instaurée par l’élite politique et financière

Comment le Liban est-il entré dans une telle spirale ? À la suite de la tragédie de Beyrouth, l’attention s’est concentrée  sur un nombre restreint de décideurs économiques et d’hommes d’affaires libanais qui a géré l’économie du pays à son profit pendant de nombreuses années.

Il est maintenant bien documenté que cette classe d’hommes politiques – qui descend dans de nombreux cas de milices qui ont combattu pendant la longue et terrible guerre civile de 1975 à 1990 – a mis en œuvre ce qu’on appelle « une pyramide de Ponzi » dans le monde des affaires.

Les banques, souvent détenues par cette même oligarchie politique corrompue, offraient des taux d’intérêt élevés pour attirer des capitaux en dollars, qui étaient ensuite prêtés à la Banque centrale en échange de taux d’intérêts élevés généreux. La Banque centrale était la clef de voûte de tout le système, puisqu’elle prêtait ensuite à l’Etat pour qu’il puisse couvrir ses dépenses, accroissant ainsi sans fin son endettement. Plus de la moitié du système bancaire était dollarisé, et cela a représenté des opportunités de corruption et de fuite des capitaux énormes.

L'année dernière, Riad Salameh, le gouverneur de longue date de la Banque centrale a averti que des banquiers et des hommes d'affaires sans scrupules transféraient des millions d’euros d'actifs à l'étranger alors que la situation économique se détériorait et que les titulaires de comptes libanais se  voyaient imposer des restrictions, ne pouvant effectuer que des retraits de petites sommes en banque.

« Nous ferons de notre mieux pour enquêter sur tous les transferts à l'étranger », avait-il déclaré à l’époque. La semaine dernière, un long article d’investigation révélait que Riad Salameh détenait des sociétés étrangères ayant investi 100 millions de dollars dans des actifs immobiliers au Royaume-Uni, en Allemagne et en Belgique au cours de la dernière décennie.

Supposé garant de la stabilité financière du Liban pendant de nombreuses années, le cas de Salameh illustre plus particulièrement les dérives d’une élite économique qui a exploité le système savamment mis en place pour ses propres profits.

L’explosion de Beyrouth, la goutte de trop

Dans une économie qui était déjà au bord du gouffre, la pandémie de Covid-19 a explosé comme une bombe. Avec l’arrêt des économies mondiales en avril et mai, la diaspora libanaise s’est retrouvée largement affectée – au chômage partiel ou sans emploi - et a été dans l’incapacité d’envoyer des fonds dans le pays.

Au Liban, les infrastructures vacillantes ont commencé à se désagréger petit à petit, provoquant  des manifestions de rue qui ont fait face à la réaction prévisible de l’appareil sécuritaire. Les coupures d'électricité, les pénuries d'eau, le chômage et le manque de services de base ont attisé l'indignation de la population contre la classe dirigeante. Puis est survenue l’explosion de Beyrouth.

Les scènes de mort et de destruction ce jour-là ont suscité un élan de sympathie et de solidarité inédit pour le sort des citoyens ordinaires et un désir d’aider à la reconstruction financière. Mais cela a également durci le ton de la communauté économique internationale à l'égard du système économique corrompu qui a permis à une telle tragédie de se réaliser. 

Un banquier libanais basé à Dubaï, qui a souhaité garder l’anonymat, explique cependant les réticences à envoyer de l’argent à Beyrouth. « Bien sûr, nous voulons aider les gens dans ces horribles circonstances, mais voulons-nous remplir les poches des personnes qui ont causé un tel désastre par leur négligence criminelle? »

Les autorités financières internationales se sont montrées prudentes après la tragédie. Kristilina Georgieva, directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), s’en est expliqué : « C'est une tragédie qui arrive à un moment terrible. Le Liban est confronté à de profonds défis économiques et sociaux, aggravés par une pandémie, mais plus encore par le manque de volonté politique d'adopter et de mettre en œuvre des réformes significatives que le peuple libanais réclame. »

Le président français Emmanuel Macron, lors d'une tournée de la ville Beyrouth dévastée, a été encore plus franc dans ses propos. « Dans une situation comme celle-ci, il est parfaitement compréhensible que les gens espèrent se débarrasser de leurs dirigeants politiques », a-t-il déclaré, tout en s’engageant à ce que la France travaille avec d’autres pays pour aider à la reconstruction.

Sans réformes, pas de plan de sauvetage économique

Une conférence internationale qui s’était réunie à Paris en 2018 avait promis 11 milliards de dollars de prêts et de dons en échange de réformes qui n’ont pas été débloqués étant donné l’inertie des différents gouvernements. Une somme qui pourrait remédier dans une certaine mesure aux conséquences immédiates de l’explosion.

Même si cet argent était finalement débloqué, il ne permettrait pas au Liban d'éviter une catastrophe financière et économique. « C’est très appréciable, mais il faudrait multiplier par dix », s’exclame le banquier de Dubaï.

Le FMI, considéré par beaucoup comme le sauveur potentiel du pays, s'en tient à la ligne qu'il avait annoncée plus tôt dans l'année – avant même la pandémie et l'explosion de Beyrouth, depuis le moment où le Liban s’est trouvé en défaut de paiement, ne pouvant rembourser 1, 2 milliard de dollars d’Eurobonds.

Le FMI veut de véritables engagements de la part des dirigeants libanais, en matière de réforme et de transparence avant d’accepter de mettre en place un plan de sauvetage économique. Depuis la démission en bloc du gouvernement la semaine dernière, de tels engagements semblent encore plus hypothétiques.

Nasser Saidi ne se montre pas optimiste. « Un scénario avec des réformes nécessiterait une pression concertée de la part de la communauté internationale, avec la prise notamment de sanctions, y compris personnelles contre les banquiers, les politiciens et les décideurs libanais pour qu’ils mettent en œuvre des réformes », affirme t-il.

« La kleptocratie enracinée, une classe politique corrompue, des acteurs complices dans le secteur bancaire et financier, tout cela indique que l’oligarchie politico-financière n’est pas prête à faire réformes qui révéleraient au grand jour l’étendue de leur corruption de leur incompétence et de leur négligence criminelle. Le scénario du Libazuela est donc celui qui reste le plus probable ».

Ce texte est la traduction d'un article paru sur ArabNews.com


IA: pour la présidente de Microsoft France, il n'y a pas de «bulle»

 "Je ne crois pas du tout à la bulle" de l'intelligence artificielle (IA), assure lors d'un entretien à l'AFP Corine de Bilbao, présidente de Microsoft France, qui dit constater une diffusion rapide de l'IA chez les entreprises et les consommateurs. (AFP)
"Je ne crois pas du tout à la bulle" de l'intelligence artificielle (IA), assure lors d'un entretien à l'AFP Corine de Bilbao, présidente de Microsoft France, qui dit constater une diffusion rapide de l'IA chez les entreprises et les consommateurs. (AFP)
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  • Microsoft propose son propre assistant IA, baptisé Copilot, et contrôle 27% du capital de la start-up OpenAI, le créateur de ChatGPT, chatbot le plus utilisé au monde
  • En France, 40,9% des citoyens en âge de travailler ont adopté l'IA, assure Mme de Bilbao, contre 26,3% aux États-Unis, ce qui place la France à la cinquième place mondiale en termes d'adoption, selon une étude du Microsoft AI Economy Institute

PARIS: "Je ne crois pas du tout à la bulle" de l'intelligence artificielle (IA), assure lors d'un entretien à l'AFP Corine de Bilbao, présidente de Microsoft France, qui dit constater une diffusion rapide de l'IA chez les entreprises et les consommateurs.

Pour certains experts, les investissements colossaux dans l'IA semblent démesurés par rapport aux bénéfices générés, alimentant la peur d'une survalorisation du secteur.

Mais selon Corine de Bilbao, à la tête de la filiale française du géant américain des logiciels depuis 2021, "il y a des signes forts" de solidité comme le fait que cette technologie se diffuse "dans toutes les sphères de la société".

Microsoft propose son propre assistant IA, baptisé Copilot, et contrôle 27% du capital de la start-up OpenAI, le créateur de ChatGPT, chatbot le plus utilisé au monde, dans laquelle Microsoft a investi plus de 13 milliards de dollars.

En France, 40,9% des citoyens en âge de travailler ont adopté l'IA, assure Mme de Bilbao, contre 26,3% aux États-Unis, ce qui place la France à la cinquième place mondiale en termes d'adoption, selon une étude du Microsoft AI Economy Institute.

Un milliard d'agents IA

L'énergéticien français TotalEnergies utilise par exemple Copilot et des agents IA, capables de réaliser des tâches de façon autonome, à travers des cas d'usage "dans la maintenance, les achats, la sécurité", énumère la patronne.

Tandis que l'assureur italien Generali a "adopté massivement l'IA et automatisé plus d'un million d'opérations", ajoute-t-elle.

"Plus d'un milliard d'agents à l'échelle mondiale vont être diffusés dans les entreprises" d'ici 2028, s'enthousiasme Corine de Bilbao, citant une étude IDC pour Microsoft.

L'irruption de l'intelligence artificielle dans les entreprises peut toutefois se traduire par des vagues de licenciements comme chez Amazon, le groupe informatique HP ou encore l'assureur allemand Allianz Partners.

Microsoft France, qui compte près de 2.000 employés, a de son côté supprimé 10% de ses effectifs via un accord collectif de rupture conventionnelle sur la base du volontariat.  -

"C'est lié à la transformation de certains métiers, mais pas à l'IA", assure la dirigeante, ajoutant qu'en parallèle Microsoft est en train de recruter "des profils plus techniques", comme des "ingénieurs solutions", pour s'adapter aux demandes de ses clients.

"L'IA suscite beaucoup de peur", reconnaît Mme de Bilbao."On préfère parler de salariés augmentés" plutôt que d'emplois supprimés, poursuit-elle, beaucoup de tâches considérées comme rébarbatives pouvant être réalisées avec l'assistance de l'intelligence artificielle.

Selon elle, l'enjeu central est surtout celui de la formation des salariés à ces nouveaux outils.

"Nouvelle économie" 

"Il n'y aura pas de déploiement de l'IA s'il n'y a pas de valeur partagée, si l'ensemble des citoyens, des étudiants, des entreprises ne sont pas formés", souligne la patronne.

En France, le géant de Redmond (Etat de Washington) a déjà formé 250.000 personnes à l'IA sur un objectif d'un million d'ici 2027 et veut accompagner 2.500 start-up françaises.

"Un écosystème complet se développe entre les fournisseurs de modèles de langage, les infrastructures, on est en train de créer une nouvelle économie autour de cette IA", déclare Corine de Bilbao.

Microsoft a ainsi annoncé en 2024 un investissement de 4 milliards d'euros en France lors du sommet Choose France pour agrandir ses centres de données dans les régions de Paris et Marseille (sud), et construire un datacenter dans l'est de la France, près de Mulhouse.

"Ca avance très bien", explique-t-elle, sans donner de date à laquelle le centre sera opérationnel. "Cela ne pousse pas comme des champignons, ce sont des projets qui prennent quelques années en général", entre le dépôt de permis, de construction et l'accompagnement.

Pour 2026, le défi sera de passer d'une intelligence artificielle "expérimentale à une IA opérationnelle, qui délivre de la valeur pour les entreprises, à la fois sur leurs revenus, la productivité, et qui les aide à se transformer", conclut-elle.


Mercosur: Paris et Rome contrarient les plans de l'UE, ultimatum de Lula

Cette photographie montre des drapeaux européens flottant devant le bâtiment Berlaymont, siège de la Commission européenne à Bruxelles, le 2 décembre 2025. (AFP)
Cette photographie montre des drapeaux européens flottant devant le bâtiment Berlaymont, siège de la Commission européenne à Bruxelles, le 2 décembre 2025. (AFP)
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  • L’Italie rejoint la France pour demander un report de l’accord UE–Mercosur, menaçant la signature espérée par Ursula von der Leyen et ouvrant la voie à une minorité de blocage au sein des Vingt-Sept
  • Le Brésil met la pression, tandis que les divisions européennes persistent entre défense des agriculteurs et impératif économique face à la concurrence chinoise et américaine

BRUXELLES: L'Italie a rejoint la France mercredi pour réclamer un report de l'accord commercial entre l'Union européenne et le Mercosur, ce qui risque d'empêcher Ursula von der Leyen de parapher ce traité en fin de semaine, au grand dam du Brésil.

Une signature dans les prochains jours est "prématurée", a lâché Giorgia Meloni à la veille d'un sommet européen à Bruxelles.

La cheffe du gouvernement italien veut d'abord des garanties "suffisantes" pour le secteur agricole, et se dit "convaincue qu'au début de l'année prochaine, toutes ces conditions seront réunies".

Cette sortie est une douche froide pour la Commission européenne. Bruxelles n'a cessé de marteler ces derniers jours qu'une signature était indispensable avant la fin de l'année, pour la "crédibilité" de l'Union européenne et afin de ne pas contrarier les partenaires latino-américains.

Prudent, l'exécutif européen fait mine d'y croire encore. "Les chefs d'Etat et de gouvernement vont en discuter au sommet européen" ce jeudi, a dit à l'AFP Olof Gill, porte-parole de la Commission.

Au Brésil, le président Lula, qui avait appelé à la responsabilité Emmanuel Macron et Georgia Meloni, a posé une forme d'ultimatum.

"Si on ne le fait pas maintenant, le Brésil ne signera plus l'accord tant que je serai président", a-t-il menacé. "Si jamais ils disent non, nous serons désormais fermes avec eux, parce que nous avons cédé sur tout ce qu'il était possible de céder diplomatiquement".

- "Billet remboursable" -

La prise de position de Rome sur ce dossier est potentiellement décisive.

Avec la France, la Pologne et la Hongrie, l'Italie est en capacité de former une minorité de blocage au sein des Vingt-Sept, ce qui empêcherait un examen de l'accord durant la semaine.

"Ca risque d'être très chaud", convient un diplomate européen anonymement, alors que l'Allemagne comme l'Espagne insistent pour approuver ce traité de libre-échange le plus vite possible.

Le chancelier allemand, Friedrich Merz, a promis d'exercer une pression "intensive" sur ses partenaires européens mercredi soir et jeudi matin, en appelant à ne pas "chipoter" avec les grands traités commerciaux.

Emmanuel Macron a prévenu que "la France s'opposerait de manière très ferme" à un éventuel "passage en force" de l'Union européenne, a rapporté la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon.

Paris ne considère pas encore comme "acquis" le report de la signature du traité, mais les déclarations de Giorgia Meloni sont la "preuve" que "la France n'est pas seule", a-t-elle ajouté.

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, espérait parapher ce traité lors du sommet du Mercosur samedi dans la ville brésilienne de Foz do Iguaçu. Mais elle a besoin au préalable de l'aval d'une majorité qualifiée d'Etats membres à Bruxelles.

"J'espère qu'elle a un billet (d'avion) remboursable", glisse une source diplomatique européenne.

- Manifestation à Bruxelles -

Cet accord commercial avec l'Argentine, le Brésil, le Paraguay et l'Uruguay permettrait à l'UE d'exporter davantage de véhicules, de machines, de vins et de spiritueux, tout en facilitant l'entrée en Europe de viande, sucre, riz, miel ou soja sud-américains, ce qui inquiète les filières concernées.

Les agriculteurs européens ne décolèrent pas et annoncent une dizaine de milliers de manifestants jeudi à Bruxelles contre ce traité.

Pour rassurer la profession, l'UE a ajouté des mesures de sauvegarde: un suivi des produits agricoles sensibles et une promesse d'intervention en cas de déstabilisation du marché.

Un compromis a été trouvé mercredi soir sur ce volet entre des eurodéputés et des représentants des États membres: les garanties pour les agriculteurs y sont supérieures à ce qu'avaient voté les Vingt-Sept en novembre, mais en deçà de la position adoptée par le Parlement européen mardi.

Elles ne devraient toutefois pas suffire à la France. Le bras de fer avec Bruxelles s'inscrit dans un contexte de vaste mobilisation agricole dans l'Hexagone contre la gestion par les autorités de l'épidémie de dermatose nodulaire contagieuse (DNC).

Et au sein de l'Union européenne, une série d'États redoutent que Paris ne se contente pas d'un report du Mercosur mais essaye de faire échouer le traité, malgré plus de 25 ans de négociations.

Allemands, Espagnols et Scandinaves comptent quant à eux sur cet accord pour relancer une économie européenne à la peine face à la concurrence chinoise et aux taxes douanières des États-Unis.


Automobile: les équipementiers français pressent Bruxelles d'imposer un contenu local

 Trois des plus gros équipementiers automobiles français ont demandé à Bruxelles d'imposer l'obligation d'un contenu local dans les véhicules, lors des annonces attendues mardi sur la révision de l'interdiction de vendre des voitures neuves autres que tout électriques, selon une lettre consultée lundi. (AFP)
Trois des plus gros équipementiers automobiles français ont demandé à Bruxelles d'imposer l'obligation d'un contenu local dans les véhicules, lors des annonces attendues mardi sur la révision de l'interdiction de vendre des voitures neuves autres que tout électriques, selon une lettre consultée lundi. (AFP)
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  • Les équipementiers européens "contribuent pour 75% à la valeur d'un véhicule et représentent 1,7 million d'emplois" en Europe
  • Mais "les surcapacités mondiales, les importations subventionnées (par le pays exportateur, NDLR) et un déséquilibre commercial accru érodent les fondations de notre industrie"

PARIS: Trois des plus gros équipementiers automobiles français ont demandé à Bruxelles d'imposer l'obligation d'un contenu local dans les véhicules, lors des annonces attendues mardi sur la révision de l'interdiction de vendre des voitures neuves autres que tout électriques, selon une lettre consultée lundi.

Dans cette missive adressée à la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et datée du 12 décembre, les dirigeants des équipementiers Valeo, Forvia et OPmobility demandent à la Commission "des mesures claires sur le contenu local lors des annonces du 16 décembre".

Les équipementiers européens "contribuent pour 75% à la valeur d'un véhicule et représentent 1,7 million d'emplois" en Europe, mais "les surcapacités mondiales, les importations subventionnées (par le pays exportateur, NDLR) et un déséquilibre commercial accru érodent les fondations de notre industrie", écrivent Christophe Périllat (Valeo), Martin Fisher (Forvia) et Félicie Burelle (OPmobility).

"Les perspectives actuelles indiquent que 350.000 emplois et 23% de la valeur ajoutée des automobiles dans l'UE sont en danger d'ici 2030 si des mesures fortes ne sont pas prises de manière urgente", ajoutent-ils.

Ces équipementiers soutiennent "la position des ministres français en faveur de +flexibilités ciblées+ dans la réglementation sur (les émissions de) CO2 si elle est assortie de conditions de critères de contenu local, dans l'intérêt des emplois, du savoir-faire dans l'automobile" et de "l'empreinte carbone" en Europe.

Les constructeurs automobiles européens et l'Allemagne notamment réclament depuis des semaines de nets assouplissements dans l'interdiction de vendre des voitures neuves thermiques ou hybrides prévue à partir de 2035.

Les annonces de la Commission sont attendues mardi après-midi.

La semaine dernière, plusieurs ministres français avaient envoyé une lettre aux commissaires européens pour dire qu'ils acceptaient des "flexibilités ciblées", à condition qu'elles s'accompagnent d'une règlementation incitative à la production en Europe.

"On est prêt à faire preuve de flexibilité", avait ensuite expliqué Roland Lescure, ministre français de l'Economie. "Si vous voulez vendre encore un peu de moteurs thermiques en 2035 très bien, mais il faut qu’ils soient faits en Europe", avec "au moins 75% de la valeur ajoutée faite en Europe", avait-il ajouté.