Dans et hors de Gaza: les médias pris dans l'escalade Hamas/Israël

Une boule de feu éclate de la tour Jala alors qu'elle est détruite lors d'une frappe aérienne israélienne dans la ville de Gaza, le 15 mai 2021 (Photo, AFP)
Une boule de feu éclate de la tour Jala alors qu'elle est détruite lors d'une frappe aérienne israélienne dans la ville de Gaza, le 15 mai 2021 (Photo, AFP)
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Publié le Dimanche 16 mai 2021

Dans et hors de Gaza: les médias pris dans l'escalade Hamas/Israël

  • Al-Jazeera diffuse en direct une discussion du propriétaire de l'immeuble avec un responsable israélien demandant une dizaine de minutes supplémentaires pour évacuer
  • Cette fois, la «ruse» évoquée par la presse israélienne aurait viser à tuer des combattants en se servant de la presse

JÉRUSALEM: Des bureaux de médias pulvérisés à la thèse invérifiable d'une « manipulation » pour faire croire à la présence de soldats israéliens à Gaza: l'escalade militaire entre le Hamas et Israël rappelle l'adage selon lequel la vérité peut être la « première victime » de la guerre. 

Branle-bas de combat samedi après-midi à Gaza. Le propriétaire de la tour Jala, immeuble abritant les bureaux locaux de la chaîne qatarie Al-Jazeera et de l'agence internationale américaine Associated Press (AP), reçoit un appel le sommant d'évacuer les lieux dans l'heure. 

« Et de passer le mot aux autres occupants de l'immeuble parce que l'armée israélienne va le bombarder », raconte en direct sur Al-Jazeera le reporter Safwa al-Kahlout. 

Immédiatement, les téléphones se mettent en marche. 

Les journalistes quittent leurs postes de travail, enfilent pour certains leurs gilets pare-balles, agrippent caméras, ordinateurs portables, trépieds, pour dévaler les escaliers sur une dizaine d'étages ou s'engouffrer dans le mince ascenseur. 

Al-Jazeera diffuse en direct une discussion du propriétaire de l'immeuble avec un responsable israélien demandant une dizaine de minutes supplémentaires pour évacuer.  

Des journalistes de Gaza se massent à l'extérieur de la tour, à distance pour se protéger, afin de filmer la scène. Les minutes passent. Al-Jazeera diffuse en direct de l'extérieur, la caméra fixée sur l'immeuble. Et puis boum! Un missile fend le ciment et un champignon de fumée et de poussière pousse dans le ciel.  

L'immeuble n'est plus. Et ce n'est pas le premier. Plus tôt dans la semaine, des tours de Gaza abritant des bureaux de médias palestiniens, dont la chaîne al-Quds liée au Hamas, ont été détruits. 

Et, à chaque fois, l'armée israélienne fournit à peu de choses près la même explication: les immeubles servaient de « planques » au Hamas, qui utilisaient des journalistes comme « bouclier humain ».  

Mais les condamnations pleuvent. 

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu discute avec le président américain Joe Biden, puis apparaît en soirée à la télévision pour défendre les frappes contre les « tours de la terreur », assurant que « la vie des civils n'a pas été mise en danger ». 

Le directeur du Comité pour la protection des journalistes (CPJ), Joel Simon, accuse l'armée israélienne de « cibler délibérément les locaux des médias afin de perturber la couverture de la souffrance humaine à Gaza ». 

Dans un communiqué, l'ONG Amnesty International a elle estimé qu'une « enquête » devait être ouverte sur un possible « crime de guerre ». 

Pour leur permettre de continuer à travailler, l'Agence France-Presse (AFP) a proposé d'héberger ses confrères d'AP et d'Al-Jazeera dans ses locaux.  

Où sont les frappes? 

Témoin, le journaliste est-il devenu malgré lui acteur de cette confrontation Hamas/Israël?  

A Jérusalem, le petit monde journalistique tente toujours de se remettre d'une nuit étrange.  

Jeudi, peu après minuit, l'armée israélienne envoie un court message aux correspondants: des troupes au sol tirent »dans » Gaza. 

L'AFP, comme d'autres médias, contacte rapidement le porte-parole de l'armée pour vérifier que les forces israéliennes sont bien entrées dans l'enclave. Réponse: « Oui, nos troupes sont dans Gaza ». 

Mais, deux heures plus tard, le porte-parole émet une « clarification »: les troupes « ne sont pas dans Gaza », et évoque un « problème de communication en interne » dont il assume la responsabilité, suggérant que les soldats étaient à quelques mètres de Gaza mais pas à l'intérieur. 

La dernière grande opération israélienne avec des troupes au sol dans l'enclave, sous blocus de l'Etat hébreu, remonte à 2014.  

Depuis, le Hamas a déployé un nouveau réseau de galeries souterraines --le projet « métro » selon Israël-- pour permettre à ses combattants de circuler à travers Gaza à l'abri des caméras de surveillance et de l'aviation israélienne qui épient ce territoire. 

Dans la nuit de mercredi à jeudi, l'aviation et des drones ont survolé Gaza pour frapper ces souterrains.  

Le lendemain des frappes, la presse locale, qui n'avait pas eu la « confirmation » de la présence de soldats israéliens au sol, évoque une autre théorie. 

L'armée aurait « trompé » la presse internationale dans l'espoir d'envoyer au Hamas le message selon lequel des troupes étaient « dans » Gaza afin que la « première ligne de défense » du mouvement armé se positionne dans les tunnels pour affronter des troupes au sol, résume le Jerusalem Post. 

Une fois dans les tunnels, l'aviation israélienne les aurait bombardés pour tuer un « grand nombre » de combattants et détruire des infrastructures clés du Hamas. 

Erreur ou ruse? 

En septembre 2019, l'armée israélienne avait dit avoir fait apparaître dans un hôpital de « faux blessés » d'un échange de tirs avec le Hezbollah libanais.  

But de la manoeuvre? Apaiser les tensions à la frontière en signifiant au Hezbollah qu'il avait accompli sa mission de venger une frappe israélienne et qu'il pouvait ainsi cesser les hostilités. 

Mais cette fois, la « ruse » évoquée par la presse israélienne aurait viser à tuer des combattants en se servant de la presse. 

Le porte-parole de l'armée a assuré à des correspondants étrangers avoir fait une « erreur » de bonne foi en affirmant que les soldats israéliens étaient dans Gaza, tout en suggérant que « l'audience cible » de cette information n'était pas la presse étrangère mais le Hamas. 

L'armée a-t-elle vraiment utilisé les journalistes pour pousser le Hamas dans ses tunnels et les bombarder? A-t-elle simplement fait une erreur? Ou a-t-elle tenté de masquer une erreur en la faisant passer pour une ruse auprès de la presse locale?  

« Outrée », l'Association de la presse étrangère à Jérusalem a écrit samedi à l'armée pour demander des explications.  

Dans sa réponse, les militaires qualifient de « conspirationniste » la thèse d'une « manipulation » évoquée par la presse locale. 


Gaza: l'armée israélienne annonce la remise de trois dépouilles d'otages à la Croix-Rouge

"Selon les informations fournies par la Croix-Rouge, trois cercueils de personnes décédées prises en otage ont été transférés sous leur garde et sont en route vers les troupes de Tsahal dans la bande de Gaza", indique un communiqué de l'armée israélienne. (AFP)
"Selon les informations fournies par la Croix-Rouge, trois cercueils de personnes décédées prises en otage ont été transférés sous leur garde et sont en route vers les troupes de Tsahal dans la bande de Gaza", indique un communiqué de l'armée israélienne. (AFP)
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  • "Selon les informations fournies par la Croix-Rouge, trois cercueils de personnes décédées prises en otage ont été transférés sous leur garde et sont en route vers les troupes de Tsahal dans la bande de Gaza"
  • L'armée israélienne a annoncé dimanche que le Hamas avait remis à la Croix-Rouge dans la bande de Gaza des cercueils contenant les corps de trois otages

JERUSALEM: L'armée israélienne a annoncé dimanche que le Hamas avait remis à la Croix-Rouge dans la bande de Gaza des cercueils contenant les corps de trois otages, dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu entre Israël et le Hamas, qui prévoit des échanges de dépouilles.

"Selon les informations fournies par la Croix-Rouge, trois cercueils de personnes décédées prises en otage ont été transférés sous leur garde et sont en route vers les troupes de Tsahal dans la bande de Gaza", indique un communiqué de l'armée israélienne.

 

 


A Gaza, des enfants reprennent les cours après deux ans de guerre

Malgré l'inconfort, elles ont répondu aux questions du professeur et ont copié la leçon du tableau noir dans leurs cahiers, visiblement heureuses d'être là. (AFP)
Malgré l'inconfort, elles ont répondu aux questions du professeur et ont copié la leçon du tableau noir dans leurs cahiers, visiblement heureuses d'être là. (AFP)
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  • Mettant à profit le fragile cessez-le-feu en vigueur depuis le 10 octobre, l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) a annoncé cette semaine cette réouverture progressive
  • Des déplacés sont toujours hébergées dans le bâtiment, sur la façade duquel des cordes à linge sont visibles

GAZA: Des élèves de l'école Al Hassaina à Nousseirat,  dans le centre de la bande de Gaza, viennent de reprendre les cours malgré les destructions dans le territoire palestinien, où l'ONU a annoncé rouvrir progressivement des établissements, a constaté samedi l'AFPTV.

Mettant à profit le fragile cessez-le-feu en vigueur depuis le 10 octobre, l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) a annoncé cette semaine cette réouverture progressive, après deux ans de guerre dévastatrice délenchée par l'attaque du Hamas en Israël du 7 octobre 2023.

Le patron de l'UNRWA, Philippe Lazzarini, a déclaré sur X mardi que plus de 25.000 écoliers avaient déjà rejoint les "espaces d'apprentissage temporaires" de l'agence, tandis qu'environ 300.000 d'entre eux suivraient des cours en ligne.

Dans l'école Al Hassaina, des images de l'AFPTV ont montré dans la matinée des jeunes filles se rassemblant dans la cour en rang pour pratiquer des exercices en clamant "Vive la Palestine!"

Environ 50 filles se sont ensuite entassées dans une salle de classe, assises à terre sans bureaux, ni chaises.

Malgré l'inconfort, elles ont répondu aux questions du professeur et ont copié la leçon du tableau noir dans leurs cahiers, visiblement heureuses d'être là.

Pendant la guerre entre Israël et le Hamas, cette école, comme de nombreuses autres installations de l'UNRWA, s'était transformée en refuge pour des dizaines de familles.

Des déplacés sont toujours hébergées dans le bâtiment, sur la façade duquel des cordes à linge sont visibles.

Une autre salle de classe accueillait un nombre similaire d'adolescentes, presque toutes portant des hijabs et également assises au sol, cahiers posés sur leurs genoux.

Warda Radoune, 11 ans, a déclaré avoir hâte de reprendre sa routine d'apprentissage. "Je suis en sixième maintenant, mais j'ai perdu deux années de scolarité à cause du déplacement et de la guerre", a-t-elle confié à l'AFP.

"Nous reprenons les cours lentement jusqu'à ce que l'école soit à nouveau vidée (des déplacés), et que nous puissions continuer à apprendre comme avant", a-t-elle ajouté.

"Alors que l'UNRWA travaille à ouvrir davantage d'espaces d'apprentissage temporaires dans les abris, certains enfants sont contraints d'apprendre sur des escaliers, sans bureaux ni chaises. Trop d'écoles sont en ruines", a pointé cette semaine l'UNRWA sur X.

Le directeur régional Moyen-Orient d'Unicef, Edouard Beigbeder, avait souligné fin octobre à l'AFP que la communauté humanitaire était engagée dans une "course contre la montre" pour "remettre l'éducation au centre des priorités" à Gaza, au risque sinon d'y laisser une "génération perdue".


Israël menace d'intensifier les attaques contre le Hezbollah dans le sud du Liban

L'Agence nationale libanaise de presse a rapporté que l'armée israélienne avait touché une voiture avec un missile guidé.  L'armée a confirmé la frappe, affirmant avoir visé un membre de la Force Radwan, unité d'élite du Hezbollah. (AFP)
L'Agence nationale libanaise de presse a rapporté que l'armée israélienne avait touché une voiture avec un missile guidé. L'armée a confirmé la frappe, affirmant avoir visé un membre de la Force Radwan, unité d'élite du Hezbollah. (AFP)
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  • Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes qu'elle a présentées comme des membres d'une force d'élite du Hezbollah
  • A l'ouverture du conseil des ministres hebdomadaire dimanche, M. Netanyahu a ensuite affirmé que le Hezbollah tentait de se "réarmer"

JERUSALEM: Israël a menacé dimanche d'intensifier ses attaques au Liban contre le Hezbollah, que le Premier ministre Benjamin Netanyahu a accusé de tenter de se "réarmer", exhortant Beyrouth à tenir ses engagements de le désarmer.

Malgré un cessez-le-feu conclu en novembre 2024 avec le mouvement pro-iranien, Israël continue de mener des attaques régulières contre les bastions libanais du Hezbollah et d'occuper cinq positions frontalières dans le sud du Liban.

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes qu'elle a présentées comme des membres d'une force d'élite du Hezbollah.

"L'engagement du gouvernement libanais à désarmer le Hezbollah et le chasser du sud du Liban doit être pleinement tenu", a d'abord déclaré dans un communiqué le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, affirmant que le groupe "joue avec le feu" et que "le président libanais traîne des pieds".

"Nous ne tolèrerons aucune menace contre les habitants du nord" d'Israël, a-t-il ajouté.

A l'ouverture du conseil des ministres hebdomadaire dimanche, M. Netanyahu a ensuite affirmé que le Hezbollah tentait de se "réarmer".

"Nous attendons du gouvernement libanais qu'il fasse ce qu'il s'est engagé à faire, c'est-à-dire désarmer le Hezbollah, mais il est clair que nous exercerons notre droit à l'autodéfense comme convenu dans les termes du cessez-le-feu", a-t-il averti.

"Nous ne permettrons pas au Liban de redevenir un nouveau front contre nous et nous agirons comme il faudra".

Des milliers d'Israéliens vivant près de la frontière nord avaient dû évacuer leurs domiciles pendant des mois, après l'ouverture par le Hezbollah d'un front contre Israël à la suite de la guerre déclenchée à Gaza en octobre 2023.

Les tirs de roquette du mouvement chiite avaient provoqué un conflit de plus d'un an, culminant par deux mois de guerre ouverte avant la conclusion d'un cessez-le-feu fin 2024.

Le Hezbollah a été fortement affaibli par la guerre, avec notamment l'assassinat de son chef historique, Hassan Nasrallah, par une frappe israélienne en septembre 2024 à Beyrouth, mais il demeure financièrement résilient et armé.

Depuis, les États-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe, un plan auquel le Hezbollah et ses alliés s'opposent, invoquant notamment la poursuite d'une présence israélienne sur le territoire libanais.

Raid meurtrier et nouvelle frappe 

L'armée israélienne a intensifié ses attaques contre des cibles du Hezbollah ces derniers jours.

Jeudi, elle a mené un raid meurtrier dans le sud du Liban, poussant le président libanais, Joseph Aoun, à ordonner à l'armée de faire face à de telles incursions.

M. Aoun avait appelé à des négociations avec Israël à la mi-octobre, après l'entrée en vigueur d'un cessez-le-feu à Gaza, parrainé par le président américain Donald Trump.

Il a accusé vendredi Israël de répondre à son offre de dialogue en intensifiant ses attaques, avant qu'une nouvelle frappe israélienne ne tue quatre personnes samedi dans le sud du pays, dans le district de Nabatiyeh.

L'Agence nationale libanaise de presse a rapporté que l'armée israélienne avait touché une voiture avec un missile guidé.

L'armée a confirmé la frappe, affirmant avoir visé un membre de la Force Radwan, unité d'élite du Hezbollah.

"Le terroriste était impliqué dans le transfert d'armes et dans les tentatives de reconstitution des infrastructures terroristes du Hezbollah dans le sud du Liban", a-t-elle indiqué, précisant que trois autres membres du groupe avaient été tués.

"Les activités de ces terroristes constituaient une menace pour l'Etat d'Israël et ses civils, ainsi qu'une violation des accords entre Israël et le Liban", a ajouté l'armée.

La veille, elle avait annoncé avoir tué un "responsable de la maintenance du Hezbollah", qui oeuvrait selon elle à rétablir des infrastructures du mouvement.

A Nabatiyeh, des centaines de personnes se sont rassemblées dimanche pour rendre hommage aux cinq membres du Hezbollah tués, a constaté un journaliste de l'AFP.

Les participants lançaient des pétales de fleurs sur les cercueils, recouverts du drapeau du Hezbollah, en scandant: "Mort à Israël, mort à l'Amérique".

"Voici le prix que le Sud (du Liban) paie chaque jour", a déclaré à l'AFP Rana Hamed, la mère de l'un des cinq hommes tués. "Nous savons qu'Israël est notre ennemi depuis des décennies."

L'émissaire américain, Tom Barrack, a exhorté samedi le Liban à engager des pourparlers directs avec Israël, affirmant que si Beyrouth franchissait le pas, les Etats-Unis pourraient faire "pression sur Israël pour qu'il se montre raisonnable".