Arnaud Mimran, escroc à la taxe carbone, accusé de meurtres

Le trader français Arnaud Mimran arrive au palais de justice de Paris le 7 juillet 2016. Il est l'un des principaux accusés dans un procès pour une escroquerie présumée d'un montant de 283 millions d'euros impliquant le commerce de permis d'émission de carbone et les taxes sur ceux-ci. (Bertrand Guay / AFP)
Le trader français Arnaud Mimran arrive au palais de justice de Paris le 7 juillet 2016. Il est l'un des principaux accusés dans un procès pour une escroquerie présumée d'un montant de 283 millions d'euros impliquant le commerce de permis d'émission de carbone et les taxes sur ceux-ci. (Bertrand Guay / AFP)
Short Url
Publié le Vendredi 21 mai 2021

Arnaud Mimran, escroc à la taxe carbone, accusé de meurtres

  • La jonction entre le meurtre d'un escroc à la taxe carbone et l'assassinat d'un milliardaire a permis d'incriminer comme commanditaire Arnaud Mimran
  • Ce flambeur, proche du Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou, vient d'une famille fortunée

PARIS : Dix ans après, cela commençait à ressembler à deux "cold-cases" sans espoir de dénouement. Mais la jonction des dossiers du meurtre d'un escroc à la taxe carbone et de l'assassinat d'un milliardaire a permis à deux juges parisiens d'incriminer comme commanditaire le sulfureux homme d'affaires Arnaud Mimran.

Mis en examen le mois dernier pour "meurtre en bande organisée" pour l'un et "complicité d'assassinat" pour l'autre, le financier a contesté, devant le juge d'instruction, toute implication.

En septembre 2010, Samy Souied, l'une des figures de l'"escroquerie du siècle" sur le marché des quotas d'émissions de CO2 en 2008-2009, qui aurait coûté 1,6 milliards d'euros au fisc selon la Cour des comptes, est abattu porte Maillot à Paris. Les tueurs s'enfuient sur un scooter à la plaque volée.

Un an plus tard, en octobre 2011, Claude Dray, milliardaire ayant fait fortune dans le parfum puis l'immobilier de luxe, est retrouvé mort par balles dans sa luxueuse villa de Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine). Pas d'effraction, pas de vol, des mobiles à foison.

Chacune de ces deux enquêtes, distinctes, semble végéter pendant de nombreuses années, malgré quelques "tuyaux" et des soupçons qui portent sur Arnaud Mimran, 49 ans.

Ex-partenaire d'affaires du premier, ex-gendre du second, ce flambeur, proche du Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou, vient d'une famille fortunée. A partir du début des années 2000, il s'attire progressivement l'attention de la justice pour ses activités concernant sa "passion": la bourse.

Dans le dossier Souied, fin 2013, un témoin anonyme vient renforcer les soupçons à l'égard de Mimran, en le présentant comme "commanditaire". Mais le financier conteste et il n'y a aucune mise en cause.

D'autant que certains des avocats des parties civiles sollicités par l'AFP soupçonnent une proximité de M. Mimran et d'autres protagonistes de la "mafia du CO2" avec certains hauts gradés policiers, ralentissant l'enquête. Ces accusations font l'objet d'une enquête de la police des polices depuis l'été 2016.

Témoignages anonymes

Entre 2019 et 2020, deux renseignements anonymes permettent toutefois de relancer les deux enquêtes.

Le premier désigne Mimran comme commanditaire et un des frères de la famille Khider, proche du financier, comme "intermédiaire" dans le meurtre de Souied.

Le second accuse un membre de la même fratrie Khider, suspectée de "recouvrer des dettes" pour le "golden-boy" à l'époque, d'avoir participé "à une autre exécution sur les indications d'Arnaud Mimran pour accéder au pavillon de la victime", ce qui ressemble au dossier Dray.

Selon un document d'enquête évoqué par Mediapart, les juges d'instruction ont joint en mars les deux dossiers au vu "des similitudes (...) pouvant désigner un même commanditaire en la personne d'Arnaud Mimran: circonstances des assassinats similaires supposant un commanditaire proche des victimes, utilisation d'un calibre identique, existence d'un conflit avec les victimes, comportement relevant de la préparation avant les faits".

Fêtard, l'amateur de grosses cylindrées et de virées poker à Las Vegas avait un contentieux financier avec Souied évalué à 60 millions d'euros par le témoin de 2013. Souied a été abattu porte Maillot, là où Mimran lui avait demandé de l'attendre pour lui remettre une bague destinée à sa compagne.

Avec Claude Dray, Mimran entretenait des relations houleuses, notamment après une séparation difficile avec sa fille. Mais il s'était rabiboché avec celle-ci quelques semaines avant l'assassinat, ce qui aurait pu lui apporter des informations sur l'accès au domicile de M. Dray, avant de la quitter de nouveau quelques temps après.

En épluchant les factures téléphoniques, la Brigade criminelle a déterminé, dans un procès-verbal du 26 mars dévoilé par Mediapart et consulté par l'AFP, que M. Mimran, certains membres de la fratrie Khider et une de leurs connaissances, Brice K., s'étaient retrouvés avant le meurtre de Souied à deux reprises, de nuit, à Paris.

Les suspects, hormis M. Mimran, s'étaient aussi retrouvés à Orly, une poignée d'heures avant l'assassinat, là où la plaque de scooter utilisée par les tueurs avait été dérobée.

Mi-avril, le financier a été mis en examen pour "complicité d'assassinat" de M. Dray.

Dans le dossier Souied, Arnaud Mimran, Djoudi Khider et Brice K. ont été mis en examen pour "meurtre en bande organisée".

Mimran dément

Tous contestent les faits.

Devant le juge d'instruction, le 15 avril, M. Mimran s'est défendu dans une courte déclaration: "je n'ai jamais été ni le commanditaire ni l'auteur des assassinats de mon ex-beau père en 2011 ni de Samy Souied en 2010", a-t-il dit.

Pour lui, sa mise en cause à ce moment-là n'avait "qu'un seul objet": "m'empêcher d'être libéré le 9 mai alors que j'aurai accompli l'intégralité de ma peine", a-t-il dit.

M. Mimran devait en effet finir de purger sa peine de huit ans de prison à laquelle il avait été été condamné en appel à Paris en 2017 pour sa participation à la fraude au marché des quotas d'émission de CO2, une escroquerie à 283 millions d'euros.

Il doit par ailleurs comparaître du 8 au 25 juin aux assises avec Farid Khider et quatre autres accusés pour l'enlèvement et la séquestration en vue d'extorsion d'un richissime financier suisse en janvier 2015.

Dans les dossiers Souied comme Dray, plusieurs avocats des parties civiles interrogés par l'AFP sont convaincus que M. Mimran est le commanditaire. Mais les investigations ne sont pas terminées.

Ainsi, concernant M. Dray, seul le "golden boy" est mis en cause pour "complicité" d'un assassinat dont les auteurs n'ont pas encore été mis en cause: "les indices contre Mimran peuvent suffire" pour le mettre en examen, mais pas forcément pour le faire condamner, concède un conseil des parties civiles.

La jonction des deux dossiers pourrait en outre permettre d'avancer sur d'autres assassinats irrésolus, potentiellement liés eux aussi à ce cercle de l'escroquerie à la taxe carbone.


La France rapatrie treize femmes et enfants depuis les camps en Syrie, une première depuis deux ans

La Française Emilie Konig marche dans le camp Al-Roj, dans le nord-est de la Syrie, le 28 mars 2021, où elle est détenue avec d'autres personnes soupçonnées d'être des proches de membres présumés du groupe Daesh. (AFP)
La Française Emilie Konig marche dans le camp Al-Roj, dans le nord-est de la Syrie, le 28 mars 2021, où elle est détenue avec d'autres personnes soupçonnées d'être des proches de membres présumés du groupe Daesh. (AFP)
Short Url
  • La France a rapatrié dix enfants et trois femmes détenus dans des camps jihadistes en Syrie, marquant la première opération du genre depuis deux ans
  • Deux femmes ont été placées en garde à vue, et une troisième présentée à un juge antiterroriste

PARIS: La France a rapatrié tôt mardi matin dix enfants et trois femmes âgées de 18 à 34 ans qui étaient détenus dans des camps de prisonniers jihadistes dans le nord-est de la Syrie, une première depuis deux ans.

Parmi les femmes, "deux ont été placées en garde à vue, sur commission rogatoire du juge d'instruction", a annoncé le Parquet national antiterroriste (Pnat) dans un communiqué.

"Une autre femme, faisant l'objet d'un mandat d'arrêt, sera présentée à un juge d'instruction dans la journée" en vue d'une possible mise en examen, a-t-il ajouté.

"Les mineurs sont pris en charge dans le cadre de procédures d'assistance éducative sous la responsabilité du parquet" de Versailles, a indiqué le Pnat, qui "assurera le suivi centralisé des mineurs concernés, en lien avec les parquets territoriaux".

"La France remercie les autorités syriennes de transition ainsi que l'administration locale du Nord-Est syrien qui a rendu possible cette opération", a déclaré de son coté le porte-parole du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères.

Cette opération est une première depuis juillet 2023 en France, où ces retours restent une question sensible, dix ans après la vague d'attentats jihadistes sur le sol national.

Au total, 179 enfants et 60 femmes adultes ont été rapatriées depuis 2019, précise une source diplomatique.

Mais ces opérations avaient cessé à l'été 2023, faute de volontaires selon les autorités, et ce malgré des condamnations internationales dont celle de la Cour européenne des droits de l'Homme en 2022.

- "Arbitraire" -

"Pour les familles qui attendaient leurs petits-enfants, neveux et nièces depuis plus de six ans, c'est un immense et indescriptible soulagement", a déclaré l'avocate des femmes rapatriées, Marie Dosé, dans un communiqué transmis à l'AFP.

Mais "la France laisse derrière elle 110 autres enfants français, toujours détenus dans le camp Roj", l'un des camps contrôlés comme d'autres centres et prisons par les forces kurdes, depuis plus de six ans, dénonce-t-elle.

Des dizaines de milliers de personnes, d'une cinquantaine de nationalités et soupçonnées de liens avec l'organisation jihadiste État islamique, sont retenues dans ces camps.

En juin, quelque 120 enfants et une cinquantaine de femmes françaises y étaient encore retenus, selon le Collectif des Familles unies, qui rassemble leurs proches.

Après ce rapatriement nocturne, ce collectif a rediffusé sur X mardi matin son message habituel dénonçant la détention sur place d'enfants "coupables de rien" dans "des conditions indignes".

Car pour ces familles, rien n'est encore réglé. "Une nouvelle fois, la France fait le choix de l'arbitraire", regrette Marie Dosé.

"La France, qui refusait de rapatrier des enfants tant que leurs mères n'avaient pas donné leur accord, refuse aujourd'hui leur retour alors qu'ils sont devenus majeurs. Ce faisant et plus que jamais, la France décide donc de faire payer à ces enfants le choix de leurs parents", estime-t-elle aussi.

Elle dénonce également le sort de femmes sans enfant ou dont les enfants sont décédés, et que la France refuse désormais de rapatrier, ainsi que d'enfants nés en France et "conduits de force en Syrie" avant de pouvoir acquérir la nationalité, ou de jeunes majeurs enfermés dans d'autres lieux de détention syriens.

Pour Matthieu Bagard, responsable du pôle expertise Syrie de l'ONG Avocats sans frontières France, "ce rapatriement démontre une nouvelle fois que la France a la possibilité d'organiser ces opérations". Mais il déplore lui aussi la situation des femmes et jeunes majeurs toujours "illégalement détenus".

En février, l'administration kurde a annoncé, en coordination avec l'ONU, son intention de vider d'ici fin 2025 les camps du nord-est de la Syrie des déplacés syriens et irakiens, y compris les proches présumés de jihadistes.


Après «Bloquons tout» et les promesses de «rupture», les syndicats dans la rue jeudi

"Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées. (AFP)
"Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées. (AFP)
Short Url
  • Après sa rencontre avec Sébastien Lecornu lundi, la cheffe de file de la CGT, Sophie Binet, se montrait plus que jamais déterminée, malgré l'abandon de la suppression de deux jours fériés samedi
  • Dès son arrivée à Matignon, Sébastien Lecornu avait promis des "ruptures sur le fond" et "pas que sur la forme"

PARIS: "Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées.

Après sa rencontre avec Sébastien Lecornu lundi, la cheffe de file de la CGT, Sophie Binet, se montrait plus que jamais déterminée, malgré l'abandon de la suppression de deux jours fériés samedi. "(Il) ne s'est engagé à rien du tout. Aucune des mesures catastrophiques du musée des horreurs de M. Bayrou n'est enterrée !", a-t-elle lancé.

Dès son arrivée à Matignon, Sébastien Lecornu avait promis des "ruptures sur le fond" et "pas que sur la forme". Depuis vendredi, il reçoit les syndicats représentatifs - à l'exception de Frédéric Souillot (FO) qui souhaite le rencontrer après le 18. Mais ces derniers maintiennent leur appel à la mobilisation du 18, espérant peser de tout leur poids sur les futures orientations budgétaires.

CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, FSU et Solidaires seront ainsi unis jeudi dans la rue, pour la première fois depuis le 6 juin 2023 - date de la dernière mobilisation contre la réforme des retraites.

Les mesures avancées cet été sont "d'une brutalité sans précédent", dénonçaient-ils fin août dans un communiqué commun, regrettant que l'ancien gouvernement choisisse "encore une fois de faire payer les travailleuses et les travailleurs, les précaires, les retraité·es, les malades".

Ils pointent "des coupes dans les services publics, (...), une énième réforme de l'assurance chômage, le gel des prestations sociales et celui des salaires des fonctionnaires comme des contractuel·les, la désindexation des pensions de retraites, le doublement des franchises médicales, la remise en cause de la 5ème semaine de congés payés…".

L'abandon de la suppression de deux jours fériés, unanimement décriée par le monde syndical, constitue "une première victoire", qui "confirme que nous sommes en position de force", a estimé Sophie Binet.

Même la CFDT, pourtant peu rompue aux cortèges syndicaux, maintient sa participation: vendredi, Marylise Léon a réaffirmé que son syndicat était "plus que jamais motivé pour aller dans la rue", à l'issue de son entrevue avec Sébastien Lecornu.

"Le budget tel qu'il a commencé à être construit n'est pas compatible avec la justice sociale, fiscale et environnementale donc il y a vraiment besoin de le revoir de fond en comble", a-t-elle estimé lundi sur France Inter.

Sur la durée ? 

Sur la taxation des hauts patrimoines, revenue au cœur du débat, Mme Léon a pourtant apprécié que le Premier ministre dise être conscient de la nécessité de "faire quelque chose".

"Le budget, il va se décider dans la rue", insiste Mme Binet. Ainsi, "il faut faire une démonstration de force jeudi prochain et après", laissant entrevoir une mobilisation dans la durée.

Lundi, la CGT annonçait déjà plus de 220 manifestations, un chiffre encore amené à évoluer.

Les organisations syndicales parviendront-elles à dépasser l'affluence du mouvement citoyen "Bloquons tout" - qui a rassemblé près de 200.000 personnes le 10 septembre selon le ministère de l'Intérieur, sans toutefois parvenir à paralyser le pays ? Les manifestants du 10, parfois méfiants vis-à-vis des syndicats, participeront-ils à cette nouvelle journée ?

Aucune inquiétude côté syndical: "Nous avons déjà d'excellents retours sur la mobilisation de jeudi", assure Frédéric Souillot (FO).

"Nous avons l'objectif d'avoir un million de personnes avec nous", avance de son côté Cyril Chabanier (CFTC).

"La colère sociale est toujours là", abonde Julie Ferrua, co-déléguée générale de Solidaires.

De leur côté, les autorités s'attendent à une mobilisation plus importante que le 10 septembre et craignent la présence de plusieurs centaines de manifestants radicaux dans des cortèges. Une cellule de crise sera ouverte dès mardi au ministère de l'Intérieur.

Après le 18, ce sera le tour des agriculteurs de la FNSEA, le 26 septembre, de mener "une grande journée d'actions" autour des échanges internationaux de produits agricoles.


Lecornu va mettre fin aux "avantages à vie" des ex-ministres dès 2026

Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu participe à une réunion alors qu'il visite le centre de santé départemental à Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025. (AFP)
Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu participe à une réunion alors qu'il visite le centre de santé départemental à Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025. (AFP)
Short Url
  • Le Premier ministre Sébastien Lecornu concrétise une promesse phare pour réduire le « décalage » entre les élites politiques et la réalité des Français, dans un contexte de forte défiance envers sa nomination

PARIS: Fini le chauffeur et la voiture de fonction "à vie" pour les anciens de Matignon: les avantages octroyés aux ex-Premiers ministres seront "supprimés" dès 2026, a annoncé lundi Sébastien Lecornu, concrétisant l'une de ses premières promesses, très symbolique pour l'opinion.

Il n'est "pas concevable" que les anciens ministres "puissent bénéficier d'avantages à vie en raison d'un statut temporaire", a écrit le locataire de Matignon sur X, confirmant la mise en place de cette réforme dès le 1er janvier 2026.

"La protection policière ne sera accordée aux anciens Premiers ministres et ministres de l'Intérieur que pour une durée limitée, et reconduite en fonction de la réalité du risque. Tous les autres moyens mis à disposition des anciens Premiers ministres à vie le seront dorénavant pour une durée limitée", a expliqué M. Lecornu sur ce réseau social.

Sollicité par l'AFP, Matignon a expliqué que le gouvernement avait préparé une "instruction" à destination du Secrétariat général du gouvernement, en vue de revoir le décret du 20 septembre 2019, qui avait déjà restreint les privilèges accordés aux anciens Premiers ministres.

Ces derniers peuvent actuellement se voir octroyer "sur leur demande, un véhicule de fonction et un conducteur automobile", à la charge de l'Etat. Ils peuvent aussi bénéficier d'un "agent pour leur secrétariat particulier" pendant dix ans à compter de la fin de leurs fonctions et au plus tard jusqu'à ce qu'ils atteignent l'âge de 67 ans.

Des avantages qui ne s'appliquent pas pour les "ex" de Matignon lorsque ces derniers disposent déjà de ces privilèges via leur mandat (parlementaire ou local) ou leur fonction publique.

- "Mettre fin aux derniers privilèges" -

Une autre instruction du chef du gouvernement à l'attention de la Direction générale de la police nationale (DGPN) permettra de créer "un cadre" relatif à la "protection policière" des anciens Premiers ministres et ministres de l'Intérieur, a détaillé Matignon.

"On ne peut pas demander aux Français de faire des efforts si ceux qui sont à la tête de l'État n'en font pas. La réforme, ce n'est pas toujours +pour les autres+, cela crée la suspicion", avait lancé Sébastien Lecornu dans un entretien donné à plusieurs titres de la presse régionale durant le week-end.

"Beaucoup de choses ont été réglées pour les anciens présidents de la République. Je vais donc mettre fin aux derniers privilèges", avait-il encore promis, quelques jours seulement après sa prise de fonctions à Matignon, durant laquelle il s'était inquiété du "décalage" observé entre la vie politique et la vie "réelle" des Français.

Le Premier ministre, nommé mardi par Emmanuel Macron après la chute de François Bayrou, met ainsi en musique l'une de ses premières promesses, alors qu'il consulte en parallèle les forces politiques, syndicales et patronales en vue de former un gouvernement susceptible de survivre aux menaces de censure des oppositions.

Il doit aussi batailler contre une opinion publique très défiante vis-à-vis de sa nomination, même si les chiffres de confiance des Français à son égard varient selon les instituts de sondage.

Son prédécesseur, François Bayrou, avait déjà annoncé vouloir passer au crible ces privilèges ministériels: il avait confié fin août une mission à l'ex-député socialiste René Dosière pour identifier les "avantages indus, excessifs, inacceptables" dans un contexte de dérapage des finances publiques.

En réalité, l'économie à espérer de ces annonces est dérisoire par rapport aux dizaines de milliards d'euros recherchées par les gouvernements successifs. Les privilèges accordés au titre du décret de 2019 (chauffeur, secrétariat, véhicule) ont coûté 1,58 million d'euros à l'Etat en 2024, selon le gouvernement.

Un montant auquel il faut ajouter les dépenses de protection policière, évaluées à 2,8 millions d'euros par an dans un rapport parlementaire de 2019.