Algérie-UE : L’accord d’association en péril

L'ancien ministre algérien des Affaires étrangères , Abdelkader Messahel, en conférence de presse à Bruxelles (Photo, François WALSCHAERTS/AFP).
L'ancien ministre algérien des Affaires étrangères , Abdelkader Messahel, en conférence de presse à Bruxelles (Photo, François WALSCHAERTS/AFP).
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Publié le Jeudi 27 août 2020

Algérie-UE : L’accord d’association en péril

  • Dans leur grande majorité, les Algériens restent convaincus que l’accord a été mal négocié, par un gouvernement dont la seule priorité était de sortir l’Algérie de son isolement
  • Historiquement complexes, les relations entre Alger et Bruxelles risquent de traverser une nouvelle zone de turbulences à l’issue incertaine

PARIS : L’Algérie a officiellement annoncé son intention de remettre à plat l’accord d’association avec l’Union européenne (UE), signé en 2002 et entré en vigueur en 2005.

Ce dernier prévoit la création d’une zone de libre-échange (ZLE) entre les deux parties signataitaires, avec la suppression progressive des barrières douanières au cours d’une période de transition de douze ans, finalement prolongée de trois ans pour permettre aux entreprises algériennes de se mettre à niveau. Autrement dit, l’ouverture totale et réciproque de leurs marchés devrait intervenir, en théorie, le 1er septembre 2020.

À la veille de cette date fatidique, le président Tebboune a instruit son ministre du Commerce, Kamel Rezig, « de procéder à une évaluation des accords commerciaux… notamment le dossier sur l’accord d’association avec l’UE qui doit faire l’objet d’une attention particulière faisant valoir nos intérêts pour des relations équilibrées », d’après le communiqué sanctionnant le Conseil des ministres du 9 août 2020.

Cette décision est intervenue en réponse au mécontentement quasi unanime suscité par l’accord dans les milieux d’affaires, mais aussi les syndicats, les experts économiques et une frange importante de la société civile, par crainte de l’effondrement du marché intérieur après la suppression totale des barrières douanières. Tous dénoncent un déséquilibre commercial avéré en faveur de l’UE qui, de surcroît est premier fournisseur de l’Algérie avec 45% de parts de marché en 2019.

Un constat largement partagé par l’Association nationale des exportateurs algériens (Anexal). Selon son président, Ali Bey Nasri, le volume des importations algériennes des pays de l’UE se monte à 283 milliards contre 12 milliards de dollars au titre des exportations, hors hydrocarbures, au cours de la période 2005-2017. Et d’ajouter : « L’Algérie perd chaque année deux milliards de dollars en termes de fiscalité » du fait de l’accord.

D’autres experts déplorent la place disproportionnée accordée au volet commercial, par rapport aux autres aspects tels que le transfert de technologie, la circulation des personnes ou encore les investissements directs étrangers (IDE) – dont le flux entrant en Algérie a enregistré un recul global de 6% en 2019 (Cnuced).

Universitaire spécialiste des relations internationales, le professeur Brahim Guendouzi apporte un éclairage pertinent à ce propos, jugeant : « Il est utile de rappeler que l’accord d’association… ne se limite pas au seul volet de la libre circulation des marchandises, mais comprend également d’autres aspects aussi importants, comme le dialogue politique, le commerce des services ainsi que la coopération économique, financière, sociale et culturelle, et enfin dans le domaine de la justice. D’où la terminologie utilisée – Accord d’association – pour faire ressortir l’impact réciproque entre les parties contractantes de l’ensemble des clauses. »

Dans leur grande majorité, les Algériens restent convaincus que l’accord a été mal négocié, par un gouvernement dont la seule priorité était de sortir l’Algérie de son isolement. À l’époque, le pays devait faire face aux conséquences du plan d’ajustement structurel, imposé par le FMI, et au désastre économique et humain engendré par dix ans de lutte contre le terrorisme.

Dans un tel contexte, les négociateurs algériens se sont empressés de boucler le dossier sans véritablement mesurer l’impact de l’accord sur leur économie à moyen et long termes. De plus, l’Algérie doit aujourd’hui faire face à la pression des 27 pays qui composent l’Europe alors qu’ils n’étaient que 15 au moment de la ratification, sans compter que leur nombre continuera d’augmenter dans les prochaines années.

Confrontée à une crise économique depuis 2014, en raison de la baisse des cours pétroliers, aggravée par les turbulences politiques et la crise sanitaire mondiale qui la frappe de plein fouet, l’Algérie peut toujours tirer son épingle du jeu en usant de la possibilité de recourir aux clauses de sauvegarde, contenues dans l’accord d’association, pour préserver les secteurs les plus exposés.

Une option suggérée par le Pr Guendouzi. Il estime que « des mesures de sauvegarde peuvent être éventuellement mises en place dans le souci de prémunir le marché national d’un dommage grave ou de la menace d’un dommage sérieux. D’autant plus que certains pays européens eux-mêmes ont eu par le passé à recourir à certaines de ces mesures quand il s’agissait de préserver leurs intérêts commerciaux dans un contexte de concurrence exacerbée ».

Historiquement complexes, les relations entre Alger et Bruxelles risquent de traverser une nouvelle zone de turbulences à l’issue incertaine. À moins de trouver un nouveau compromis gagnant-gagnant qui permettra à l’Algérie de poursuivre son aventure européenne.


Automobile: les équipementiers français pressent Bruxelles d'imposer un contenu local

 Trois des plus gros équipementiers automobiles français ont demandé à Bruxelles d'imposer l'obligation d'un contenu local dans les véhicules, lors des annonces attendues mardi sur la révision de l'interdiction de vendre des voitures neuves autres que tout électriques, selon une lettre consultée lundi. (AFP)
Trois des plus gros équipementiers automobiles français ont demandé à Bruxelles d'imposer l'obligation d'un contenu local dans les véhicules, lors des annonces attendues mardi sur la révision de l'interdiction de vendre des voitures neuves autres que tout électriques, selon une lettre consultée lundi. (AFP)
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  • Les équipementiers européens "contribuent pour 75% à la valeur d'un véhicule et représentent 1,7 million d'emplois" en Europe
  • Mais "les surcapacités mondiales, les importations subventionnées (par le pays exportateur, NDLR) et un déséquilibre commercial accru érodent les fondations de notre industrie"

PARIS: Trois des plus gros équipementiers automobiles français ont demandé à Bruxelles d'imposer l'obligation d'un contenu local dans les véhicules, lors des annonces attendues mardi sur la révision de l'interdiction de vendre des voitures neuves autres que tout électriques, selon une lettre consultée lundi.

Dans cette missive adressée à la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et datée du 12 décembre, les dirigeants des équipementiers Valeo, Forvia et OPmobility demandent à la Commission "des mesures claires sur le contenu local lors des annonces du 16 décembre".

Les équipementiers européens "contribuent pour 75% à la valeur d'un véhicule et représentent 1,7 million d'emplois" en Europe, mais "les surcapacités mondiales, les importations subventionnées (par le pays exportateur, NDLR) et un déséquilibre commercial accru érodent les fondations de notre industrie", écrivent Christophe Périllat (Valeo), Martin Fisher (Forvia) et Félicie Burelle (OPmobility).

"Les perspectives actuelles indiquent que 350.000 emplois et 23% de la valeur ajoutée des automobiles dans l'UE sont en danger d'ici 2030 si des mesures fortes ne sont pas prises de manière urgente", ajoutent-ils.

Ces équipementiers soutiennent "la position des ministres français en faveur de +flexibilités ciblées+ dans la réglementation sur (les émissions de) CO2 si elle est assortie de conditions de critères de contenu local, dans l'intérêt des emplois, du savoir-faire dans l'automobile" et de "l'empreinte carbone" en Europe.

Les constructeurs automobiles européens et l'Allemagne notamment réclament depuis des semaines de nets assouplissements dans l'interdiction de vendre des voitures neuves thermiques ou hybrides prévue à partir de 2035.

Les annonces de la Commission sont attendues mardi après-midi.

La semaine dernière, plusieurs ministres français avaient envoyé une lettre aux commissaires européens pour dire qu'ils acceptaient des "flexibilités ciblées", à condition qu'elles s'accompagnent d'une règlementation incitative à la production en Europe.

"On est prêt à faire preuve de flexibilité", avait ensuite expliqué Roland Lescure, ministre français de l'Economie. "Si vous voulez vendre encore un peu de moteurs thermiques en 2035 très bien, mais il faut qu’ils soient faits en Europe", avec "au moins 75% de la valeur ajoutée faite en Europe", avait-il ajouté.


Espagne: amende de 64 millions d'euros contre Airbnb pour avoir publié des annonces de logements interdits

Le gouvernement espagnol a annoncé lundi avoir infligé une amende de 64 millions d'euros à la plateforme Airbnb pour avoir notamment publié des annonces de logements interdits, une infraction qualifiée de "grave", en pleine crise du logement dans le pays. (AFP)
Le gouvernement espagnol a annoncé lundi avoir infligé une amende de 64 millions d'euros à la plateforme Airbnb pour avoir notamment publié des annonces de logements interdits, une infraction qualifiée de "grave", en pleine crise du logement dans le pays. (AFP)
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  • L'amende qui vise Airbnb et atteint précisément 64.055.311 euros est "définitive", a précisé dans un communiqué le ministère de la Consommation
  • "Des milliers de familles vivent dans la précarité à cause de la crise du logement, tandis que quelques-uns s'enrichissent grâce à des modèles économiques qui expulsent les gens de chez eux"

MADRID: Le gouvernement espagnol a annoncé lundi avoir infligé une amende de 64 millions d'euros à la plateforme Airbnb pour avoir notamment publié des annonces de logements interdits, une infraction qualifiée de "grave", en pleine crise du logement dans le pays.

En Espagne, les plateformes de location de courte durée suscitent un vif débat, surtout dans les grandes villes touristiques, où de nombreux habitants leur reprochent de contribuer à la flambée des loyers.

L'amende qui vise Airbnb et atteint précisément 64.055.311 euros est "définitive", a précisé dans un communiqué le ministère de la Consommation, ajoutant que la plateforme basée aux Etats-Unis devait désormais "corriger les manquements constatés en supprimant les contenus illégaux".

"Des milliers de familles vivent dans la précarité à cause de la crise du logement, tandis que quelques-uns s'enrichissent grâce à des modèles économiques qui expulsent les gens de chez eux", a critiqué le ministre de la Consommation, Pablo Bustinduy, cité dans le communiqué.

"Aucune entreprise en Espagne, aussi grande ou puissante soit-elle, n'est au-dessus des lois", a-t-il poursuivi.

L'Espagne a accueilli en 2024 un nombre record de 94 millions de visiteurs, ce qui en fait la deuxième destination touristique dans le monde derrière la France. Ce chiffre pourrait être battu cette année.

Mais si le tourisme est un moteur de l'économie, de nombreux Espagnols dénoncent la congestion des infrastructures, la disparition des commerces traditionnels, remplacés par des boutiques touristiques, et surtout la flambée des loyers, les propriétaires de logements se tournant vers la location touristique, y compris sur Airbnb, nettement plus rentable.

Face à cette poussée de colère, plusieurs régions et municipalités ont annoncé des mesures ces derniers mois, à l'image de la mairie de Barcelone (nord-est), qui a promis de ne pas renouveler les licences de quelque 10.000 appartements touristiques, qui expireront en novembre 2028.

 


La RATP se cherche un ou une présidente

Cette photographie montre le logo de la société française de transports publics RATP, sur un bâtiment à Paris, le 3 mars 2025. (AFP)
Cette photographie montre le logo de la société française de transports publics RATP, sur un bâtiment à Paris, le 3 mars 2025. (AFP)
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  • Après le départ de Jean Castex à la SNCF, l’Élysée s’apprête à nommer rapidement le nouveau président ou la nouvelle présidente de la RATP
  • Plusieurs profils circulent, tandis que la régie fait face à d’importants défis

PARIS: Après le départ de Jean Castex à la SNCF, la RATP se cherche un ou une présidente, dont la nomination pourrait intervenir "rapidement", selon des sources concordantes.

L'annonce se fera par communiqué de l'Elysée en vertu de l'article 13 de la Constitution qui prévoit que le président de la République nomme aux emplois civils et militaires de l'Etat.

Suivront, deux semaines plus tard, deux auditions de l'impétrant devant les sénateurs, puis devant les députés. Les parlementaires ont la possibilité de s'opposer au candidat d'Emmanuel Macron s'ils réunissent trois cinquième de leurs votes cumulés contre le nom choisi par l'Elysée.

En revanche, si le candidat est adoubé par le Parlement, son nom est proposé en conseil d'administration comme nouvel administrateur, puis confirmé dans la foulée par un décret suivant le conseil des ministres.

Depuis l'arrivée de l'ancien Premier ministre Jean Castex à la tête de la SNCF début novembre, les rumeurs se multiplient sur le nom de celui ou celle qui sera chargé de lui succéder aux commandes de la Régie autonome des transports parisiens, vieille dame créée le 21 mars 1948 et désormais plongée dans le grand bain de l'ouverture à la concurrence.

Les articles de presse pèsent les différents "profils" pressentis, politiques ou techniques qui pourraient "faire le job".

Les noms qui reviennent le plus souvent sont ceux de Xavier Piechaczyk, président du directoire du distributeur d'électricité RTE et ex-conseiller énergie-transport de Jean-Marc Ayrault et François Hollande, Alain Krakovitch, actuel directeur des TGV et Intercités à SNCF Voyageurs, Jean-François Monteils, président du directoire de la Société des grands projets (SGP) et selon la Tribune, Valérie Vesque-Jeancard, présidente de Vinci Airways et directrice déléguée de Vinci Airports.

"Si le nom sort de l'Elysée avant la fin de l'année, cela permettrait au PDG de prendre ses fonctions fin janvier-début février" souligne un fin connaisseur des milieux ferroviaires qui requiert l'anonymat.

- "Aller vite" -

"Une entreprise industrielle comme la RATP ne peut pas rester sans pilote très longtemps" souligne une autre source, proche du dossier, qui requiert aussi l'anonymat, avant d'ajouter "il faut aller vite, car c'est aussi une boite politique, la RATP".

Une entreprise aux enjeux d'autant plus complexes, que malgré son ancrage initial parisien, la RATP dépend du financement de la région Ile-de-France pour ses matériels, s'étend de plus en plus loin dans la banlieue, voire en métropole, et gère des réseaux de transports dans 16 pays sur les cinq continents.

En France, elle est notamment pressentie pour gérer les transports ferroviaires régionaux autour de Caen en Normandie à partir de 2027 après avoir répondu - via sa filiale RATP Dev - à des appels d'offre d'ouverture à la concurrence.

A Paris, la RATP est en train d'introduire progressivement de nouveaux matériels sur son réseau. Le nouveau métro MF19 construit par Alstom, ira d'abord sur la ligne 10 puis sept autres lignes (7 bis, 3 bis, 13 d'ici 2027, puis 12, 8, 3 et 7 d'ici 2034).

L'ensemble du processus prendra une dizaine d'années environ de travaux de modernisation sur les lignes concernées: beaucoup d'ingénierie fine à organiser pour réaliser les travaux pendant la nuit sans interrompre le trafic diurne et de désagréments pour les voyageurs.

A échéance plus lointaine, le ou la future patronne devra déterminer la stratégie du groupe dans les nouvelles ouvertures à la concurrence qui se dessinent: les tramway en 2030 puis le métro en 2040.

Sur le réseau de bus francilien, où la RATP a d'ores et déjà perdu son monopole, elle est parvenue à conserver l'exploitation de 70% des lignes d'autobus qu'elle gérait à l'issue des dernières vagues d'appels d'offre de mise en concurrence qui se sont achevées cet automne.

En particulier, elle continue d'exploiter via RATP Dev tous les bus de Paris intra-muros et a engagé un processus de verdissement de sa flotte de bus, financé par Ile-de-France Mobilités (IDFM), l'autorité organisatrice des transports.

Ses concurrents Keolis (filiale de la SNCF), Transdev et l'italien ATM ont pris les rênes le 1er novembre des lignes remportées.