Libye: Haftar tenté par la voie politique après l'échec militaire?

Les sponsors étrangers de Khalifa Haftar, qui n'hésitaient pas à le recevoir avec les honneurs, évitent désormais de s'afficher à ses côtés. (Photo, AFP)
Les sponsors étrangers de Khalifa Haftar, qui n'hésitaient pas à le recevoir avec les honneurs, évitent désormais de s'afficher à ses côtés. (Photo, AFP)
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Publié le Samedi 29 mai 2021

Libye: Haftar tenté par la voie politique après l'échec militaire?

  • Khalifa Haftar «a perdu sa base populaire» en Cyrénaïque car «les tribus lui reprochent d'avoir impliqué leurs fils dans une guerre où beaucoup sont morts pour rien»
  • A cela s'ajoute la perte d'une partie de ses appuis dans l'Est, surtout le soutien des puissantes tribus qu'il avait ralliées à sa cause

TRIPOLI: Lâché par des tribus puissantes et certains de ses soutiens étrangers, le maréchal Khalifa Haftar s'est fait discret tout au long du processus politique en Libye ayant permis l'installation d'un gouvernement unifié chargé de préparer les prochaines élections.

Mais l'homme fort de l'Est du pays riche en pétrole, qui tente de se replacer en première ligne, pourrait selon des analystes être tenté de jouer la carte politique en vue des élections cruciales annoncées pour le 24 décembre.

D'avril 2019 à juin 2020, le maréchal âgé de 77 ans, qui a lancé ses combattants à la conquête de Tripoli, n'a pas réussi à s’emparer de la capitale libyenne, siège de l'ancien gouvernement reconnu par l'ONU, en dépit de l'appui de la Russie, de l'Egypte ou des Emirats arabes unis.

Cet échec a été suivi de la signature d'un cessez-le-feu en octobre et, surtout, de l'installation en mars sous l'égide de l'ONU d'un gouvernement unifié chargé de mener la transition d'ici les élections, dans un pays en proie au chaos depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi après une révolte populaire en 2011.

Dans ce contexte, les soutiens du chef de l'autoproclamée Armée nationale libyenne (ANL) "ont compris que la seule issue possible était politique", faute de quoi ils risqueraient de "perdre leurs intérêts en Libye", décrypte l'analyste libyen Mahmoud Khalfallah.

Ses sponsors étrangers, qui n'hésitaient pas à le recevoir avec les honneurs, évitent désormais de s'afficher à ses côtés, souligne-t-il.

«Sérieux problèmes»

A cela s'ajoute la perte d'une partie de ses appuis dans l'Est, surtout le soutien des puissantes tribus qu'il avait ralliées à sa cause.

Khalifa Haftar "a perdu sa base populaire" en Cyrénaïque, la partie orientale du pays où le système tribal reste important, souligne Mahmoud Khalfallah, car "il ne jouit plus du soutien incontestable des tribus qui lui reprochent d'avoir impliqué leurs fils dans une guerre où beaucoup sont morts pour rien".

Reste que les "sérieux problèmes de défiance" auxquels fait face le maréchal ne sont que "partiellement dus à des dynamiques tribales", souligne Jalel Harchaoui, chercheur au Global Initiative à Genève.

"Ce qui, avant juin 2020, était encore gérable (...) est plus difficile maintenant que les finances de Haftar se sont asséchées et ses espoirs d’expansion territoriale à l'ouest sont bloqués", analyse-t-il.

Du début du dialogue politique en novembre à l'installation du gouvernement de transition, le maréchal s'est fait discret à mesure que la voie politique prenait le dessus sur l'option militaire.

Mais depuis avril, il multiplie les apparitions. Lors d'un grand rassemblement, il a promis de construire "trois nouvelles" villes autour de Benghazi, la grande cité de l'Est, avec à la clef des milliers de logements pour les familles des "martyrs" tombés dans les combats, sans aucune précision sur ces projets grandioses.

Khalifa Haftar enchaîne ensuite les rassemblements et s'affiche avec les notables tribaux pour "tenter de regagner leur soutien", selon M. Khalfallah: "Il sait pourtant qu'ils ne lui font plus confiance et ne vont plus lui confier leurs fils pour une nouvelle guerre."

«Trouble-fêtes»

Même le langage du maréchal a changé, il a "lâché le discours martial", note Miloud el-Hajj, professeur en relations internationales.

Khalifa Haftar, qui avait aidé Mouammar Kadhafi à accéder au pouvoir en 1969 avant de faire défection après sa cinglante défaite au Tchad en 1987, "parie sur les prochaines élections dans l’espoir de s'assurer une victoire politique après sa défaite militaire", estime cet universitaire.

Les élections présidentielle et législatives restent elles-mêmes hypothétiques, en raison de fortes divergences, notamment sur le mode de scrutin, alors que la présidentielle serait la première élection du genre à être organisée en Libye.

Pour le chercheur Hamish Kinnear de l'institut Verisk Maplecroft, "Haftar semble soutenir une élection présidentielle directe dans laquelle il pourrait soit se présenter lui-même, soit promouvoir son propre candidat".

Si les élections sont reportées, il "s'en servira probablement pour affirmer que le gouvernement de transition est illégitime et envisager un retour au conflit armé", mais "il n'est plus aussi puissant qu'il ne l'était autrefois", poursuit-il.

Selon une source diplomatique européenne, "il faut s'assurer que le processus ne soit pas torpillé par les manœuvres des uns et des autres", car "si on exclut un certain nombre d'acteurs de l'Est, y compris Haftar, on leur donne des raisons de devenir des trouble-fêtes du processus au lieu d'y prendre part". 


L'Arabie saoudite condamne les actions d'Israël à Gaza devant la CIJ

 Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
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  • Tel-Aviv "continue d'ignorer" les décisions de la Cour internationale de justice, déclare le représentant du Royaume
  • M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

DUBAI : L'Arabie saoudite a condamné mardi devant la Cour internationale de justice la campagne militaire israélienne en cours à Gaza, l'accusant de défier les décisions internationales et de commettre de graves violations des droits de l'homme.

S'exprimant devant la Cour, le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, a déclaré qu'Israël "continue d'ignorer les ordres de la Cour" et a insisté sur le fait que "rien ne justifie les violations commises par Israël à Gaza".

M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

Ses remarques ont été formulées au deuxième jour des audiences de la CIJ sur les obligations humanitaires d'Israël à l'égard des Palestiniens, qui se déroulent dans le cadre d'un blocus israélien total de l'aide à la bande de Gaza, qui dure depuis plus de 50 jours.

Ces audiences s'inscrivent dans le cadre d'efforts plus larges visant à déterminer si Israël a respecté les responsabilités juridiques internationales dans sa conduite lors de la guerre contre Gaza.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com


Syrie: neuf morts dans des affrontements entre forces de sécurité et combattants druzes près de Damas

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
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  • Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité "
  • "La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué

DAMAS: Neuf personnes ont été tuées dans des affrontements entre les forces de sécurité syriennes et des combattants de la minorité druze à Jaramana, dans la banlieue de Damas, sur fond de tension confessionnelle, selon un nouveau bilan mardi d'une ONG.

Ces violences interviennent un mois après des massacres qui ont visé la minorité alaouite, faisant des centaines de morts, dans le pays où la coalition islamiste qui a pris le pouvoir en décembre est scrutée par la communauté internationale.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), "les forces de sécurité ont lancé un assaut" contre la banlieue à majorité druze de Jaramana, après la publication sur les réseaux sociaux d'un message vocal attribué à un druze et jugé blasphématoire envers l'islam.

L'OSDH, basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un solide réseau de sources en Syrie, a précisé que six combattants locaux de Jaramana et trois "assaillants" avaient été tués.

Plusieurs habitants de Jaramana joints au téléphone par l'AFP ont indiqué avoir entendu des échanges de tirs dans la nuit.

"Nous ne savons pas ce qui se passe, nous avons peur que Jaramana devienne un théâtre de guerre", a affirmé Riham Waqaf, une employée d'une ONG terrée à la maison avec son mari et ses enfants.

"On devait emmener ma mère à l'hôpital pour un traitement, mais nous n'avons pas pu" sortir, a ajouté cette femme de 33 ans.

Des combattants locaux se sont déployés dans les rues et aux entrées de la localité, demandant aux habitants de rester chez eux, a dit à l'AFP l'un de ces hommes armés, Jamal, qui n'a pas donné son nom de famille.

"Jaramana n'a rien connu de tel depuis des années". La ville est d'habitude bondée, mais elle est morte aujourd'hui, tout le monde est à la maison", a-t-il ajouté.

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants.

 "Respecter l'ordre public" 

Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité de ce qui s'est produit et de toute aggravation de la situation".

"La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué.

Il a dénoncé dans le même temps "toute atteinte au prophète Mahomet" et assuré que le message vocal était fabriqué "pour provoquer la sédition".

Le ministère de l'Intérieur a souligné mardi "l'importance de respecter l'ordre public et de ne pas se laisser entraîner dans des actions qui perturberaient l'ordre public".

Il a ajouté qu'il enquêtait sur le message "blasphématoire à l'égard du prophète" Mahomet pour identifier l'auteur et le traduire en justice.

Les druzes, une minorité ésotérique issue de l'islam, sont répartis notamment entre le Liban, la Syrie et Israël.

Dès la chute du pouvoir de Bachar al-Assad le 8 décembre en Syrie, après plus de 13 ans de guerre civile, Israël multiplié les gestes d'ouverture envers cette communauté.

Début mars, à la suite d'escarmouches à Jaramana, Israël avait menacé d'une intervention militaire si les nouvelles autorités syriennes s'en prenaient aux druzes.

Ces propos ont été immédiatement rejetés par les dignitaires druzes, qui ont réaffirmé leur attachement à l'unité de la Syrie. Leurs représentants sont en négociation avec le pouvoir central à Damas pour parvenir à un accord qui permettrait l'intégration de leurs groupes armés dans la future armée nationale.

Depuis que la coalition islamiste dirigée par Ahmad al-Chareh, qui a été proclamé président intérimaire, a pris le pouvoir, la communauté internationale multiplie les appels à protéger les minorités.

Début mars, les régions du littoral dans l'ouest de la Syrie ont été le théâtre de massacres qui ont fait plus de 1.700 tués civils, en grande majorité des alaouites, selon l'OSDH.


Gaza 2025: 15 journalistes tués, selon le Syndicat des journalistes palestiniens

 Les violences contre les journalistes interviennent dans le cadre d'une nouvelle campagne militaire israélienne à Gaza, à la suite de l'échec d'un accord de cessez-le-feu avec le Hamas. (AFP)
Les violences contre les journalistes interviennent dans le cadre d'une nouvelle campagne militaire israélienne à Gaza, à la suite de l'échec d'un accord de cessez-le-feu avec le Hamas. (AFP)
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  • Le dernier rapport du syndicat fait état d'une augmentation des arrestations, des menaces et du harcèlement des journalistes par les Israéliens
  • Le syndicat a également enregistré 49 menaces de mort proférées à l'encontre de journalistes

LONDRES: Au moins 15 professionnels des médias ont été tués à Gaza depuis le début de l'année 2025, selon un nouveau rapport publié par le Syndicat des journalistes palestiniens.

Le rapport, publié ce week-end par le comité des libertés du syndicat chargé de surveiller les violations commises par Israël à l’encontre des journalistes, souligne la persistance du ciblage direct des professionnels des médias.

Sept journalistes ont été tués en janvier et huit en mars, selon le rapport.

Par ailleurs, les familles de 17 journalistes ont été endeuillées, tandis que les habitations de 12 autres ont été détruites par des tirs de roquettes et d’obus. De plus, 11 personnes ont été blessées au cours de ces attaques.

Le rapport note que la violence à l'encontre des équipes de journalistes ne se limite pas aux attaques mortelles. Il fait état de l'arrestation de 15 journalistes, à leur domicile ou alors qu'ils étaient en mission. Certains ont été libérés quelques heures ou quelques jours plus tard, tandis que d'autres sont toujours en détention.

Le syndicat a également enregistré 49 menaces de mort proférées à l'encontre de journalistes, dont beaucoup ont été avertis d'évacuer les zones qu'ils couvraient.

Le rapport relève également une intensification du harcèlement judiciaire, avec plus d’une dizaine de cas où des journalistes – en majorité issus du quotidien Al-Quds, basé en Cisjordanie – ont été convoqués pour interrogatoire et se sont vu interdire de couvrir des événements aux abords de la mosquée Al-Aqsa et dans la vieille ville de Jérusalem.

En Cisjordanie occupée, environ 117 journalistes ont été victimes d'agressions physiques, de répression ou d'interdictions de reportage, en particulier à Jénine et à Jérusalem. La commission a également recensé 16 cas de confiscation ou de destruction de matériel de travail.

Les violences à l'encontre des journalistes surviennent dans le cadre d'une nouvelle campagne militaire israélienne à Gaza, à la suite de l'échec d'un accord de cessez-le-feu avec le Hamas. Les forces israéliennes ont intensifié leur offensive, coupant les approvisionnements vitaux des 2,3 millions d'habitants de Gaza, laissant l'enclave au bord de la famine.

Les actions d'Israël font désormais l'objet d'audiences à la Cour internationale de justice de La Haye, où Tel-Aviv est accusé de violer le droit international en restreignant l'aide humanitaire à Gaza.

Le bilan humanitaire est catastrophique.

Selon le ministère de la santé de Gaza, plus de 61 700 personnes ont été tuées à Gaza depuis qu'Israël a lancé son offensive le 7 octobre 2023. Plus de 14 000 autres sont portées disparues et présumées mortes, les civils constituant la grande majorité des victimes.

Le Comité pour la protection des journalistes, organisme de surveillance de la liberté de la presse basé à Washington, a également lancé un signal d’alarme face au nombre élevé de journalistes tués, indiquant qu’au moins 176 d’entre eux – en grande majorité des Palestiniens – ont perdu la vie depuis le début de l’offensive israélienne sur les territoires occupés.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com