Raï accuse l'État de complot contre le peuple

Le patriarche maronite Mar Béchara Boutros Raï impute la crise à «l'avidité et au monopole». (Photo, Getty Images)
Le patriarche maronite Mar Béchara Boutros Raï impute la crise à «l'avidité et au monopole». (Photo, Getty Images)
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Publié le Lundi 31 mai 2021

Raï accuse l'État de complot contre le peuple

  • «Le pays, sans pouvoir exécutif, se dirige vers la ruine»
  • L’équipe de Hariri considère les deux listes proposées comme «une ingérence dans les pouvoirs du Premier ministre désigné et une tentative de restreindre son autorité»

BEYROUTH: Le patriarche maronite du Liban, Mar Béchara Boutros Raï, a accusé dimanche l’État de complot contre son peuple, en plus de dénoncer la sphère politique, incapable de former un gouvernement «pour obtenir des médicaments, une miche de pain, de l’électricité et du carburant».

Raï, dont la médiation pour débloquer l'impasse entre le président Michel Aoun et le Premier ministre désigné Saad Hariri reste vaine, estime que le pays manque de «personnes courageuses». De tels individus porteraient en eux la volonté de construire une véritable patrie pour les Libanais, et se caractériseraient par une «pensée patriotique pure, dénuée de loyauté envers les puissances étrangères».

Hariri a été chargé de former un nouvel exécutif le 22 octobre de l'année dernière, à la suite de la démission du Premier ministre Hassan Diab après l'explosion du 4 août au port de Beyrouth.

Mais Hariri et Aoun ont jusque-là été incapables de s'entendre sur la composition du futur gouvernement, ni sur la répartition des portefeuilles. Chacun blâme l'autre pour l’absence de progrès, alors que le pays croule sous l’effondrement économique et la Covid-19.

Le prélat impute en partie la crise à «l'avidité et au monopole», et qu'il encourage l’adhésion à une politique de neutralité, de sorte que le Liban ne soit pas une «plate-forme pour la guerre, les conflits et les armes».

Il a appelé les agences de sécurité et judiciaires «à perquisitionner les entrepôts» où sont dissimulés les stocks de médicaments en attendant la suppression des subventions, «à arrêter le monopole et à fermer les routes de contrebande».

Plus tôt, des militants du Courant patriotique libre (CPL) sur les réseaux sociaux ont échangé des rumeurs au sujet de l’absence de Hariri du Liban. La campagne de diffamation a débuté après que deux propositions de composition du gouvernement, envoyées par le président à Raï, aient été divulguées.

L’équipe de Hariri considère les deux listes proposées comme «une ingérence dans les pouvoirs du Premier ministre désigné et une tentative de restreindre son autorité».

Le député Mohammed Al-Hajjar, du bolc parlementaire du Futur, a déclaré que Hariri n’a aucune objection à faire adopter de nouvelles initiatives pour former un gouvernement. Mais «la nouvelle méthode inconstitutionnelle de nommer les ministres qu’impose Aoun est inacceptable».

«Un consensus local et international existe sur la nécessité de former un cabinet d’experts non partisans, mais le Hezbollah ne veut pas d’un gouvernement», soutient Al-Hajjar. Si ce dernier le voulait, un cabinet aurait été formé dès le début. Il se sert de son allié pour exécuter son plan».

Le député Nazih Najm, du bloc du Futur, rappelle que sans gouvernement, pas de solution possible pour l'électricité, la farine, le diesel ou les médicaments. Il décrit les propositions de solutions qui circulent en ce moment comme des «injections de morphine».

«Le pays, sans pouvoir exécutif, se dirige vers la ruine», a-t-il déclaré. «Le président et le chef du CPL, le député Gebran Bassil, doivent se rendre compte qu'il n'est pas faisable de former un cabinet à plusieurs chefs, parce qu'il ne pourra pas fonctionner pas ou produire. Si l'intention est de former un gouvernement similaire à l'actuel gouvernement intérimaire, alors les choses devraient rester telles qu'elles sont aujourd'hui».

Le pays vit une pénurie d'articles de base. Les médicaments sont absents des pharmacies, et le carburant se fait rare dans les stations d’essence.

Des chiffres publiés par la Banque du Liban indiquent qu'en 2020, la Banque a vendu des devises étrangères afin d’importer des médicaments, des fournitures médicales et des matières premières pour l'industrie pharmaceutique, une transaction d’une valeur de 1,17 million de dollars.

Du début de l’année jusqu’au 20 du mois en cours, la Banque en a vendus pour une valeur de 1,43 million de dollars. Les surplus de médicaments ont été soit perdus à cause de la contrebande vers l’extérieur du Liban, soit stockés en attendant la suppression des subventions.

La BDL a enregistré une augmentation de 30% du montant en monnaies fortes utilisées pour importer du carburant au cours de l'année en cours par rapport à l'ensemble de 2020, ce qui signifie que le carburant a été soit trafiqué en Syrie, soit stocké, ce qui est moins probable.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


Liban: quatre morts dans un raid israélien, riposte du Hezbollah et des factions alliées

Cette photo prise depuis le kibboutz de Malkia, au nord d'Israël, le long de la frontière avec le sud du Liban, montre de la fumée s'échappant du village libanais de Mays al-Jabal lors des bombardements israéliens le 5 mai 2024 (Photo, AFP).
Cette photo prise depuis le kibboutz de Malkia, au nord d'Israël, le long de la frontière avec le sud du Liban, montre de la fumée s'échappant du village libanais de Mays al-Jabal lors des bombardements israéliens le 5 mai 2024 (Photo, AFP).
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  • Les blessés ont été transportés vers des hôpitaux de la région
  • En près de sept mois de violences transfrontalières, au moins 389 personnes parmi lesquelles 255 combattants du Hezbollah et plus de 70 civils ont été tuées au Liban

BEYROUTH: «Quatre personnes d'une même famille» ont été tuées dans un «raid de l'armée israélienne» sur le village de Mays al-Jabal, a déclaré l'agence officielle d'information libanaise (ANI), actualisant un précédent bilan faisant état de trois victimes.

Il s'agit d'un homme, d'une femme et de leurs enfants âgés de 12 et 21 ans, d'après l'ANI, qui a précisé que deux autres personnes ont été blessées.

Depuis le début de la guerre à Gaza, le Hezbollah libanais, un allié du Hamas palestinien, échange quasi-quotidiennement avec l'armée israélienne des tirs à la frontière libano-israélienne. Des factions palestiniennes et autres groupes alliés ont aussi revendiqué des attaques depuis le Liban contre Israël.

Blessés transportés 

Selon ANI, des habitants du village inspectaient leurs maisons et magasins endommagés dans de précédents bombardements au moment du raid.

Les blessés ont été transportés vers des hôpitaux de la région.

Samedi soir, le Hezbollah a revendiqué des tirs sur des positions militaires dans le nord d'Israël.

Le Hezbollah a déclaré dans un communiqué avoir tiré « des dizaines de roquettes de types Katioucha et Falaq » sur Kiryat Shmona, dans le nord d'Israël, «en réponse au crime horrible que l'ennemi israélien a commis à Mays al-Jabal », qui, selon lui, a tué et blessé des civils.

En près de sept mois de violences transfrontalières, au moins 389 personnes parmi lesquelles 255 combattants du Hezbollah et plus de 70 civils ont été tuées au Liban, selon un décompte de l'AFP. Au moins 11 combattants du Hamas ont été tués selon ce même décompte.

Côté israélien, 11 soldats et neuf civils ont été tués, selon un bilan officiel.


Le forum de Riyad examine le rôle de la traduction dans la promotion de l'identité saoudienne

L'Université Princesse Noura bent Abdelrahman accueillera le 15 mai une conférence intitulée « Traduire l'identité saoudienne à travers d'autres langues et cultures ». (SPA)
L'Université Princesse Noura bent Abdelrahman accueillera le 15 mai une conférence intitulée « Traduire l'identité saoudienne à travers d'autres langues et cultures ». (SPA)
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  • La conférence vise à contribuer à un objectif clé de la Vision 2030 du Royaume, à savoir la promotion des valeurs islamiques et de l'identité nationale, en encourageant les Saoudiens à traduire ces concepts dans d'autres langues et cultures
  • Le rôle de la traduction dans la promotion d'une image positive du Royaume sera également discuté, ainsi que la promotion de la reconnaissance internationale et la mise en évidence de l'impact culturel du Royaume

RIYAD : Le Collège des langues de l'Université Princesse Noura bent Abdelrahman de Riyad accueillera le 15 mai une conférence intitulée « Traduire l'identité saoudienne à travers d'autres langues et cultures ».

L'événement, dont le slogan est « Nous traduisons notre identité », aura lieu au département des conférences et des séminaires et est parrainé par le ministre saoudien de l'Éducation, Yousef Al-Benyan.

Il se concentrera sur le partage du patrimoine culturel, historique, littéraire et intellectuel du Royaume avec un public mondial, a rapporté l'agence de presse saoudienne.


L'interminable attente des proches de jeunes migrants tunisiens perdus en mer

El Hencha fait actuellement face à un exode de jeunes en quête de mieux comme en Europe. (X : @ClimateActionG1)
El Hencha fait actuellement face à un exode de jeunes en quête de mieux comme en Europe. (X : @ClimateActionG1)
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  • Les occupants du bateau étaient surtout des jeunes de 17 à 30 ans, originaires d'El Hencha, bourgade agricole de 6.000 habitants
  • Inès Lafi n'avait aucune idée des intentions de son frère Mohamed, presque 30 ans

EL HENCHA: La plupart avaient gardé le secret: une quarantaine de migrants tunisiens, très jeunes, ont embarqué clandestinement en janvier en quête du "paradis européen" et depuis plus de quatre mois, leurs proches désespèrent de recevoir des nouvelles des disparus.

Ils sont partis vraisemblablement de Sfax (centre), épicentre en Tunisie de l'émigration irrégulière vers l'Italie, la nuit du 10 au 11 janvier sur une mer démontée, selon les familles.

Les occupants du bateau étaient surtout des jeunes de 17 à 30 ans, originaires d'El Hencha, bourgade agricole de 6.000 habitants à 40 kilomètres au nord de Sfax. Une mère et son bébé de quatre mois étaient aussi du voyage.

Inès Lafi n'avait aucune idée des intentions de son frère Mohamed, presque 30 ans, qui gagnait sa vie en conduisant la camionnette familiale de "louage" (taxi collectif).

"Il est sorti vers 22H00 avec son téléphone, sans rien dire à mes parents, sans vêtements de rechange ni sac, comme s'il allait retrouver ses amis", raconte à l'AFP cette ouvrière de 42 ans, qui souffre d'insomnies depuis.

Yousri, 22 ans, est aussi parti en cachette. "La majorité des jeunes n'ont pas informé leur famille, ils se sont débrouillés pour avoir un peu d'argent", confirme M. Henchi, son oncle instituteur.

Meftah Jalloul, poissonnier de 62 ans, savait lui "depuis un certain temps" que son fils Mohamed, 17 ans, "voulait migrer en Europe" et le lui avait déconseillé "mais c'est devenu une idée fixe".

La nuit fatidique, il a tenté d'empêcher son unique garçon de sortir, l'implorant d'attendre une meilleure météo, mais "il m'a embrassé sur la tête et il est parti", relate M. Jalloul.

«Désespérance»

Le commerçant culpabilise: "chaque jour, il créait des problèmes à la maison, il voulait de l'argent pour migrer. C'est moi qui lui ai donné l'argent, donc je suis responsable".

Les Tunisiens ont représenté la deuxième nationalité des migrants illégaux arrivés en Italie (17.304) en 2023, après les Guinéens, selon des statistiques officielles.

"Cette immigration irrégulière ne s'explique pas seulement par des motifs économiques et sociaux", analyse Romdhane Ben Amor, porte-parole de l'ONG FTDES. Il y a aussi "le facteur politique (le coup de force du président Kais Saied à l'été 2021, NDLR) et le sentiment de désespérance des Tunisiens qui ne croient pas dans l'avenir du pays".

Les disparus d'El Hencha, issus de la classe moyenne, pas particulièrement pauvres, partageaient cette "sensation d'horizon bouché".

Le frère d'Inès avait un travail mais "avec 20 dinars par jour (trois euros environ), une fois payé ses cigarettes, il disait qu'il ne pouvait pas faire de projets, ni construire une maison, ni se marier".

Mohamed l'instituteur pointe du doigt "les jeunes déjà en Italie qui publient sur les réseaux sociaux (...) leur quotidien". Les autres "voient ça et veulent changer leur avenir. Ils imaginent l'Europe comme un paradis", souligne-t-il. C'était, pense-t-il, le cas de Yousri qui travaillait dans un café internet pour 10/15 dinars par jour après avoir quitté le lycée avant le bac.

Meftah Jalloul était lui d'accord pour que son fils, également décrocheur scolaire, émigre, mais légalement et seulement après avoir fait une formation. "Il pouvait apprendre un métier: plombier, menuisier, mécanicien", souligne le père de famille.

Aujourd'hui, M. Jalloul lutte pour garder espoir.

«Temps très mauvais»

"Quatre mois se sont écoulés et je pleure mon fils. Ma famille et moi, nous sommes épuisés", dit-il en fondant en larmes.

Lui et d'autres familles se raccrochent à l'idée que l'embarcation aurait pu dériver vers la Libye voisine. Des contacts ont été pris, des recherches menées, en vain.

Inès Lafi et Mohamed Henchi redoutent le pire. Plus de 1.300 migrants sont morts ou ont disparu dans des naufrages l'an passé près des côtes tunisiennes, selon le FTDES.

"Le temps était très mauvais. Même les pêcheurs qui connaissent la mer sont rentrés, lui est sorti", explique Inès, furieuse contre le passeur, connu de tous pour son activité clandestine, qui n'est pas non plus revenu de cette dernière traversée.

Aux autorités, les familles demandent la poursuite des recherches et davantage d'opportunités à El Hencha.

"Il faut enrichir la zone industrielle avec d'autres unités de production, fournir des emplois aux jeunes", estime M. Henchi.

Il faudrait aussi, dit l'instituteur, "construire un état d'esprit différent" avec des programmes éducatifs pour donner envie de bâtir son avenir en Tunisie. Sinon les jeunes "se contentent d'un tour au café, d'un peu de ping-pong ou volley-ball".