Au Liban, le vaccin anti-Covid nouveau variant du clientélisme

Une infirmière libanaise d'apprête à administrer une dose du vaccin contre la covid-19.(AFP)
Une infirmière libanaise d'apprête à administrer une dose du vaccin contre la covid-19.(AFP)
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Publié le Jeudi 10 juin 2021

Au Liban, le vaccin anti-Covid nouveau variant du clientélisme

  • Dans ce pays en plein effondrement, avec désormais 55% de la population sous le seuil de pauvreté, les partis communautaires en perte de vitesse peinent à fidéliser ou reconquérir leurs bases populaires, estiment certains
  • Depuis des décennies, les grands partis libanais achètent les votes avec de l'argent liquide, des emplois dans le secteur public ou des prises en charge de frais d'hospitalisation ou de scolarité

BEYROUTH : Secoués par un soulèvement populaire à l'automne 2019 et à court de ressources publiques depuis la crise financière, les partis politiques libanais adaptent leurs vieilles pratiques clientélistes, puisant désormais dans la vaccination anti-Covid pour se refaire une santé.

Dans ce pays en plein effondrement, avec désormais 55% de la population sous le seuil de pauvreté, les partis communautaires en perte de vitesse peinent à fidéliser ou reconquérir leurs bases populaires, estiment certains.

"Les forces politiques tentent de manière directe ou indirecte de s'immiscer dans la campagne vaccinale (...) Le vaccin anti-Covid constitue pour elles un investissement rentable", affirme une source anonyme au sein de Comité national de vaccination.

Depuis des décennies, les grands partis libanais achètent les votes avec de l'argent liquide, des emplois dans le secteur public ou des prises en charge de frais d'hospitalisation ou de scolarité.

Privés de fonds publics, depuis la faillite financière de l'Etat, et d'aides internationales, faute de réformes de leur part, une de leurs nouvelles armes de choix semble être un système de "votes-contre-vaccins" à moins d'un an des législatives.

Parmi d'autres, le Courant du futur, du Premier ministre désigné Saad Hariri (musulman sunnite) a lancé début mai une campagne de vaccination dans l'ensemble du pays. 

"Plus de 7 000 personnes" ont déjà reçu le vaccin russe Sputnik V et "des dizaines de milliers de nouvelles doses" sont prévues dans les prochaines semaines, selon son responsable média Abdel Salam Moussa.    

Chez les Forces Libanaises (FL) et le Courant patriotique libre (CPL) - du président Michel Aoun - , plusieurs initiatives privées ont été lancées par des membres ou proches des deux formations chrétiennes.   

C'est le cas de l'ancien ministre de la Défense Elias Bou Saab, proche du CPL, qui a loué un hôpital privé en banlieue de Beyrouth pour la vaccination anti-Covid.    

Dans la région de Baalbeck-Hermel (Est), le député FL Antoine Habchi a, lui, piloté l'inoculation du vaccin à 1.600 personnes jusqu'ici "grâce aux fonds levés auprès de la diaspora", indique-t-il à l'AFP. 

 «Comment aurais-je fait?»

Pour beaucoup de "clients", il s'agit d'une aubaine alors que la monnaie locale a perdu plus de 85% de sa valeur face au dollar et que la vaccination publique, quoique gratuite, était lente à ses débuts.

Le vaccin russe, importé par une société privée, est vendu aux compagnies et associations à 38 dollars sur le marché local, soit environ 75% du salaire minimum.   

A Beyrouth, Firas et son épouse ont pu en bénéficier gratuitement le mois dernier grâce aux faveurs d'un parti local.

Le couple s'était inscrit sur la plateforme nationale mais a préféré ne pas attendre plus longtemps, de crainte de contracter le virus.    

"Je suis au chômage depuis six mois. Comment aurais-je fait pour financer deux vaccins ?", demande cet ancien assureur de 52 ans.

Comme lui, environ 60 000 personnes ont déjà profité de ce mécanisme sur les quelque 900 000 habitants déjà vaccinés, souligne Mohamad Haïdar, conseiller du ministre de la Santé.    

Le puissant Hezbollah chiite n'a, lui, mis en place aucun dispositif vaccinal, assure une source du parti sous anonymat. 

Depuis le début de la pandémie, la formation pro-iranienne a toutefois mené plusieurs opérations de séduction dans ses fiefs: désinfection des espaces publics, transport des patients vers les hôpitaux ou encore enterrement des victimes de la Covid. 

"Le Hezbollah n'a pas besoin d'importer des vaccins puisqu'il peut s'appuyer sur le ministre de la Santé, lui-même membre du parti", explique le politologue Hilal Khachan.      

 Mort ou muté ?  

Au lieu de disparaitre sous l'effet de la crise à laquelle il a contribué, le clientélisme au Liban tente ainsi de nouvelles mutations. 

Pour le directeur de la Lebanese Transparency Association, Julien Courson, ces nouvelles formes d'aide pourraient être "exploitées à des fins politiques" à l'approche "des législatives" de mai 2022. 

Lors les derniers scrutins, 47% des électeurs ont reçu des pots-de-vin en contrepartie de leurs votes, selon l'ONG Transparency International. 

Aujourd'hui, outre les vaccins, certains partis distribuent des colis alimentaires et des médicaments, sur fond d'hyperinflation et de fortes pénuries.

Le CPL va lancer une plateforme d'échange de médicaments entre partisans, confie Marwane Zoghbi, coordinateur du comité anti-Covid du parti du président Michel Aoun.   

De son côté, le Hezbollah a introduit une carte permettant à ses détenteurs de bénéficier d'escomptes sur de nombreux produits alimentaires, dont certains importés d'Iran.  

Malgré cette forte mobilisation, la marge de manœuvre des partis s'amenuise, estime toutefois Hilal Khachan.   

Selon lui, l'ampleur de la paupérisation actuelle révèle l'"échec" de ce système de parrainage. 

C'est pourquoi, ajoute-t-il, les partis cherchent des palliatifs et "attisent désormais les sensibilités confessionnelles" dans l'espoir de se maintenir au pouvoir.


Israël: des élus favorables à une loi instaurant la peine de mort pour les «terroristes»

 La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir. (AFP)
La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir. (AFP)
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  • Selon le médiateur israélien chargé des otages, Gal Hirsch, le Premier ministre Benjamin Netanyahu soutient cette initiative
  • La commission a approuvé un amendement au Code pénal, qui sera maintenant transmis au Parlement pour un vote en première lecture, une loi étant instaurée en Israël après une vote en troisième lecture

JERUSALEM: La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir.

La commission a approuvé un amendement au Code pénal, qui sera maintenant transmis au Parlement pour un vote en première lecture, une loi étant instaurée en Israël après une vote en troisième lecture.

Selon le médiateur israélien chargé des otages, Gal Hirsch, le Premier ministre Benjamin Netanyahu soutient cette initiative.

Dans une note explicative de la commission, il est indiqué que "son objectif est de couper le terrorisme à sa racine et de créer une forte dissuasion".

Le texte propose qu'un "terroriste reconnu coupable de meurtre motivé par le racisme ou la haine (...) soit condamné à la peine de mort - de manière obligatoire", ajoutant que cette peine serait "non optionnelle".

La proposition de loi a été présentée par une élue du parti Otzma Yehudit (Force Juive) d'Itamar Ben Gvir.

Ce dernier a menacé de cesser de voter avec la coalition de droite de Benjamin Netanyahu si ce projet de loi n'était pas soumis à un vote parlementaire d'ici le 9 novembre.

"Tout terroriste qui se prépare à commettre un meurtre doit savoir qu'il n'y a qu'une seule punition: la peine de mort", a dit le ministre lundi dans un communiqué.

M. Ben Gvir avait publié vendredi une vidéo de lui-même debout devant une rangée de prisonniers palestiniens allongés face contre terre, les mains attachées dans le dos, dans laquelle il a appelé à la peine de mort.

Dans un communiqué, le Hamas a réagi lundi soir en affirmant que l'initiative de la commission "incarne le visage fasciste hideux de l'occupation sioniste illégitime et constitue une violation flagrante du droit international".

"Nous appelons les Nations unies, la communauté internationale et les organisations pertinentes des droits de l'Homme et humanitaires à prendre des mesures immédiates pour arrêter ce crime brutal", a ajouté le mouvement islamiste palestinien.

Le ministère palestinien des Affaires étrangères et des expatriés, basé à Ramallah, a également dénoncé cette décision, la qualifiant de "nouvelle forme d'extrémisme israélien croissant et de criminalité contre le peuple palestinien".

"C'est une étape dangereuse visant à poursuivre le génocide et le nettoyage ethnique sous le couvert de la légitimité", a ajouté le ministère.


Frappes israéliennes sur le sud du Liban: deux morts 

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah. (AFP)
Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah. (AFP)
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  • Selon un bilan provisoire, "une frappe ennemie d'Israël" dans la région de Nabatiyé a fait lundi "un mort et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé
  • Un drone a visé une voiture à Doueir, a rapporté l'agence nationale d'information Ani

BEYROUTH: Des frappes israéliennes sur le sud du Liban ont tué lundi deux personnes et blessé sept autres, a indiqué le ministère libanais de la Santé, au lendemain de la menace d'Israël d'intensifier ses attaques contre le Hezbollah pro-iranien.

Malgré un cessez-le-feu conclu en novembre 2024, Israël continue de mener des attaques régulières contre les bastions du Hezbollah. Et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a accusé dimanche le Hezbollah de tenter de se "réarmer".

Selon un bilan provisoire, "une frappe ennemie d'Israël" dans la région de Nabatiyé a fait lundi "un mort et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé.

Un drone a visé une voiture à Doueir, a rapporté l'agence nationale d'information Ani.

Sur place, un photographe de l'AFP a vu des pompiers tenter d'éteindre l'incendie de la voiture visée qui s'est propagé à d'autres véhicules à proximité. Des ouvriers ramassaient les bris de verre des devantures de commerces endommagées, a-t-il également constaté.

Une autre frappe sur un village de la région de Bint Jbeil a fait un mort, selon le ministère de la Santé.

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah.

Des centaines de personnes ont participé à leurs funérailles dimanche dans la ville de Nabatiyé, scandant "Mort à Israël".

Le Hezbollah a été fortement affaibli par la guerre, avec notamment l'assassinat de son chef historique, Hassan Nasrallah, par une frappe israélienne en septembre 2024 à Beyrouth, mais il demeure financièrement résilient et armé.

Les États-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe, ce que le Hezbollah refuse.

"Nous attendons du gouvernement libanais qu'il fasse ce qu'il s'est engagé à faire, c'est-à-dire désarmer le Hezbollah, mais il est clair que nous exercerons notre droit à l'autodéfense comme convenu dans les termes du cessez-le-feu", avait averti le Premier ministre israélien dimanche.


La Turquie mobilise ses partenaires musulmans autour de Gaza

La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien. (AFP)
La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien. (AFP)
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  • Devant le Comité permanent pour la coopération économique de l'OCI, réuni lundi à Istanbul, le président turc Recep Tayyip Erdogan a critiqué l'attitude "très médiocre" d'Israël
  • "Nous devons apporter davantage d'aide humanitaire aux habitants de Gaza, puis commencer les efforts de reconstruction" a poursuivi le chef de l'Etat en appelant la Ligue arabe et l'OCI à jouer "un rôle moteur" en ce sens

ISTANBUL: La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien.

Les ministres de ces sept pays (Turquie, Arabie saoudite, Qatar, Emirats arabes unis, Jordanie, Pakistan et Indonésie), tous membres de l'organisation de la coopération islamique (OCI), avaient été reçus par Donald Trump fin septembre à New York en marge de l'Assemblée générale de l'ONU, avant la présentation du plan de paix américain six jours plus tard.

Devant le Comité permanent pour la coopération économique de l'OCI, réuni lundi à Istanbul, le président turc Recep Tayyip Erdogan a critiqué l'attitude "très médiocre" d'Israël depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu le 10 octobre, alors que "le Hamas semble déterminé" à respecter l'accord, estime-t-il.

"Nous devons apporter davantage d'aide humanitaire aux habitants de Gaza, puis commencer les efforts de reconstruction" a poursuivi le chef de l'Etat en appelant la Ligue arabe et l'OCI à jouer "un rôle moteur" en ce sens.

En amont de cette réunion, le chef de la diplomatie turque Hakan Fidan a reçu samedi une délégation du bureau politique du Hamas emmenée par Khalil al-Hayya, le négociateur en chef du mouvement islamiste palestinien.

Selon des responsables du ministère des Affaires étrangères, M. Fidan doit appeler à la mise en place de mécanismes permettant aux Palestiniens d'assurer la sécurité et la gouvernance de Gaza.

"Agir avec prudence" 

"Nous devons mettre fin au massacre à Gaza. Un cessez-le-feu à lui seul ne suffit pas", a insisté M. Fidan lors d'un forum à Istanbul.

"Nous devons reconnaître que Gaza doit être gouvernée par les Palestiniens et agir avec prudence", a encore souligné le ministre turc, plaidant de nouveau pour une solution à deux Etats.

Le chef de la diplomatie turque accuse Israël de chercher des prétextes pour rompre le cessez-le-feu.

Mais les efforts d'Ankara, qui multiplie les contacts diplomatiques avec les pays de la région et cherche à infléchir la position pro-israélienne des Etats-Unis, sont vus d'un mauvais œil par Israël qui juge Ankara trop proche du Hamas.

Les dirigeants israéliens ont exprimé à plusieurs reprises leur refus de voir la Turquie participer à la force internationale de stabilisation à Gaza.

En vertu du plan de Donald Trump, sur lequel est basé l'accord de cessez-le-feu, cette force de stabilisation, formée principalement de troupes de pays arabes et musulmans, doit se déployer à Gaza à mesure que l'armée israélienne s'en retirera.

Seuls des pays jugés "impartiaux" pourront rejoindre cette force, a cependant prévenu le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar.

Autre signe de la méfiance du gouvernement israélien : une équipe de secouristes turcs dépêchée pour participer à la recherche de corps, y compris israéliens, dans les ruines de Gaza, attendait toujours en fin de semaine dernière le feu vert israélien pour entrer dans le territoire palestinien, selon Ankara.