L’Iran envoie des navires de guerre dans l’Atlantique dans un contexte de doutes sur leur destination

Sur cette photo satellite fournie par Maxar Technologies, le navire Makran de la marine iranienne est vu au large de l’île de Lark, en Iran, le 10 mai 2021. (© 2021 Maxar Technologies via AP)
Sur cette photo satellite fournie par Maxar Technologies, le navire Makran de la marine iranienne est vu au large de l’île de Lark, en Iran, le 10 mai 2021. (© 2021 Maxar Technologies via AP)
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Publié le Samedi 12 juin 2021

L’Iran envoie des navires de guerre dans l’Atlantique dans un contexte de doutes sur leur destination

  • Le voyage du nouveau contre-torpilleur Sahand, de construction nationale, et du navire Makran, destiné à la collecte de renseignements, a été annoncé jeudi.
  • Des médias américains, citant des responsables américains anonymes, ont indiqué que les navires se dirigeaient vers le Venezuela.

DUBAÏ: Un contre-torpilleur iranien et un navire de soutien naviguent actuellement dans l’océan Atlantique dans le cadre d’une mission rare loin de la République islamique, a rapporté jeudi la télévision d’État iranienne, sans indiquer la destination finale des navires.

Le voyage du nouveau contre-torpilleur Sahand, de construction nationale, et du navire Makran, destiné à la collecte de renseignements, intervient alors que des médias américains, citant des responsables américains anonymes, ont indiqué que les navires se dirigeaient vers le Venezuela. L’Associated Press n’a pas pu confirmer immédiatement la destination des navires.

Les navires sont partis le mois dernier du port de Bandar Abbas, dans le sud de l’Iran, a mentionné l’amiral Habibollah Sayyari, chef adjoint de l’armée iranienne. Selon lui, il s’agit du voyage le plus long et le plus difficile jamais entrepris par la marine iranienne, sans donner plus de détails.

La télévision d’État iranienne a diffusé une courte vidéo du contre-torpilleur naviguant dans les eaux agitées de l’Atlantique. Elle a probablement été filmée depuis le Makran, un pétrolier commercial converti en plateforme de lancement mobile pour hélicoptères.

«La marine améliore sa capacité de navigation et prouve sa durabilité à long terme dans les eaux troubles et les conditions météorologiques défavorables de l’Atlantique», a affirmé M. Sayyari, ajoutant que les navires de guerre ne feraient escale dans aucun port pendant la mission.

Des images de Maxar Technologies datées du 28 avril semblent montrer sept navires d’attaque rapide iraniens, généralement associés aux Gardiens de la révolution paramilitaires, sur le pont du Makran. Des images satellites de Planet Labs Inc. suggèrent que le Makran a quitté le port de Bandar Abbas peu après le 29 avril. Il n’a pas été immédiatement précisé où le Makran et le contre-torpilleur se trouvaient actuellement.

À Washington, le porte-parole du Département d’État américain, Ned Price, n’a pas voulu spéculer sur ce que les navires transportaient, indiquant seulement que «si l’Iran tentait de transporter des armes ou de violer ses obligations internationales, nous serions prêts à réagir».

«Nous avons lu les articles de presse concernant ce mouvement», a déclaré M. Price. «Nous sommes prêts à exercer notre autorité, y compris les sanctions, contre tout acteur qui permet à l’Iran de continuer à fournir des armes à des partenaires violents agissant par procuration.»

Citant des responsables anonymes, le site web Politico a rapporté pour la première fois, fin mai, que la destination finale des navires pourrait être le Venezuela. L’Iran entretient des relations étroites avec le président vénézuélien Nicolas Maduro et a expédié de l’essence et d’autres produits au pays alors qu’une campagne de sanctions américaines visait Caracas, privé de carburant. Le Venezuela aurait payé l’Iran, qui fait lui-même l’objet de sanctions américaines, pour ces livraisons.

Un proche collaborateur de M. Maduro a démenti les articles de presse selon lesquels les navires accosteraient au Venezuela. Le responsable s’est exprimé sous couvert d’anonymat afin de discuter de questions géopolitiques sensibles.

Lors d’une conférence de presse tenue le 31 mai, le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Saeed Khatibzadeh, a refusé de dire où se rendait le Makran.

«L’Iran peut être présent dans les eaux internationales et ce droit est garanti par le droit international», a-t-il expliqué. «Aucun pays ne peut violer ce droit et que personne ne commette des erreurs de calcul. Ceux qui vivent dans des maisons en verre devraient être prudents», a-t-il ajouté.

Les navires d’attaque rapides à bord du Makran sont du même type que ceux utilisés par les Gardiens de la révolution lors de leurs rencontres tendues avec les navires de guerre américains dans le golfe arabique et son étroite embouchure, le détroit d’Ormuz. Il n’a pas été précisé dans l’immédiat quels seraient les plans du Venezuela pour ces navires.

«Si les navires sont livrés, ils pourraient constituer le noyau d’une force de guerre asymétrique au sein des forces armées vénézuéliennes», a indiqué l’Institut naval des États-Unis dans une analyse publiée précédemment. «Cette force pourrait se focaliser sur la perturbation de la navigation afin de contrer des forces navales supérieures. Les routes maritimes à destination et en provenance du canal de Panama sont proches de la côte vénézuélienne.»

Au début du mois, un incendie a coulé le plus grand navire de guerre de l’Iran, le Kharg, de 207 mètres de longueur, qui servait à réapprovisionner les autres navires de la flotte en mer et effectuer des exercices d’entraînement. Les responsables n’ont pas donné la cause de cet incendie. Celui-ci fait suite à une série d’explosions mystérieuses qui ont commencé en 2019 et qui ciblent des navires commerciaux dans les voies maritimes du Moyen-Orient.

Ce voyage inhabituel intervient avant l’élection présidentielle iranienne qui se tiendra le 18 juin, au cours de laquelle les électeurs devront choisir un successeur au président relativement modéré, Hassan Rouhani.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 

 


Centre de coordination militaro-civile pour Gaza: beaucoup de discussions, peu de résultats

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  • "Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore" ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés
  • "Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix"

JERUSALEM: Lancé par les Etats-Unis dans le sillage du cessez-le-feu entre Israël et le Hamas pour surveiller la trêve et favoriser l'afflux d'aide humanitaire, le Centre de coordination militaro-civile (CMCC) pour Gaza peine à tenir ses promesses.

"Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix, il n'y a aucune autre initiative, c'est ça ou continuer à discuter dans le vent avec des Israéliens".

"Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore", ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés par la campagne militaire israélienne.

Le CMCC doit permettre d'amorcer la suite des étapes du plan de paix pour Gaza après plus de deux ans d'une guerre dévastatrice déclenchée le 7 octobre 2023 par l'attaque sans précédent du mouvement palestinien Hamas sur Israël.

"Lorsque nous l'avons ouvert, nous avons clairement indiqué qu'il se concentrait sur deux choses: faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire, logistique et sécuritaire vers Gaza et aider à surveiller en temps réel la mise en oeuvre de l'accord", insiste le capitaine Tim Hawkins, porte-parole du Commandement militaire central américain (Centcom), couvrant notamment le Moyen-Orient.

L'initiative a été présentée aux acteurs (ONG, agences des Nations unies, diplomates...) comme un générateur d'idées totalement inédites.

Frustrés par leurs difficultés avec les autorités israéliennes, de nombreux pays et acteurs humanitaires disent s'être jetés dans le projet, impatients d'avoir un nouvel interlocuteur se disant enclin à trouver des solutions: les Etats-Unis.

"Rien n'a changé" 

"Au début, les Américains nous ont dit qu'ils découvraient qu'Israël interdisaient l'entrée de tout un tas de choses dans Gaza, la fameuse liste des biens à double usage, ils avaient l'air choqués et on se disait qu'enfin on allait franchir cet obstacle", raconte un ingénieur humanitaire, "mais force est de constater que strictement rien n'a changé".

Deux mois après l'ouverture, nombre d'humanitaires et diplomates contactés par l'AFP jugent, sous couvert de l'anonymat, que la capacité ou la volonté américaines à contraindre Israël est limitée.

Les visiteurs réguliers ou occasionnels des lieux ont décrit à l'AFP le grand hangar occupé par le CMCC à Kiryat Gat (sud d'Israël), comme un entrepôt où de nombreux militaires, israéliens et américains principalement, rencontrent des humanitaires, diplomates, et consultants.

Le premier des trois étages du bâtiment est réservé aux Israéliens, et le dernier aux troupes américaines. Tous deux sont interdits d'accès aux visiteurs.

Le deuxième, recouvert de gazon artificiel, sert d'espace de rencontres avec le monde extérieur.

"On dirait un espace de coworking, mais avec des gens en uniforme", s'amuse une diplomate qui raconte y croiser des "GIs qui boivent de la bière" au milieu d'une sorte d'open-space, avec des panneaux récapitulant les principaux points du plan Trump.

Plusieurs personnes ont dit à l'AFP avoir vu un tableau blanc barré de l'inscription "What is Hamas?" ("Qu'est-ce que le Hamas?") en lettres capitales, sans éléments de réponse.

"Il y a des tables rondes sur des sujets qui vont de la distribution d'eau ou de nourriture à la sécurité", raconte un humanitaire, "en gros on nous écoute décrire ce qu'on veut faire, et quels problèmes on a rencontrés depuis deux ans".

"Boussole du droit" 

Mais "ce n'est pas là que les décisions sont prises", tranche un diplomate qui cite des canaux de discussions parallèles, notamment une équipe supervisée par Arieh Lighstone, un collaborateur de l'émissaire américain Steve Witkoff, à Tel-Aviv.

Plusieurs diplomates regrettent l'absence d'officiels palestiniens dans les murs.

Un autre problème réside dans l'émergence de concepts largement rejetés par la communauté internationale, notamment celui des "Alternative Safe Communities" (ASC), visant à regrouper des civils "vérifiés", non affiliés au Hamas, dans des communautés créées ex nihilo dans une zone de la bande de Gaza sous contrôle militaire israélien, et où les services de base seraient dispensés.

"On a perdu la boussole du droit", commente une diplomate.

Mais le reproche qui revient le plus souvent est le fait que les questions politiques (gouvernance, maintien de l'ordre...) sont évacuées au profit de questions techniques.

"Ils discutent d'où mettre les stations d'épuration, pas de qui les exploitera ni de qui paiera les employés", résume un autre.

Concédant "certaines frictions", sans plus de détail, le capitaine Hawkins, du Centcom, met en avant certaines avancées comme l'ouverture de nouveaux points de passage pour l'aide à destination de Gaza. "Nous progressons, assure-t-il, tout en reconnaissant pleinement qu'il reste encore beaucoup à faire."


Le Congrès américain approuve la levée définitive des sanctions contre la Syrie

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
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  • Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar
  • Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis

WASIHNGTON: Le Congrès américain a approuvé mercredi la levée définitive des sanctions imposées par les Etats-Unis contre la Syrie du temps de Bachar al-Assad, devant permettre le retour d'investissements dans ce pays ravagé par des années de guerre civile.

L'abrogation d'une loi dite "Caesar", adoptée en 2019 lors du premier mandat de Donald Trump et qui imposait ces sanctions, figure en effet dans le texte sur la stratégie de défense (NDAA), que le Sénat américain a approuvé mercredi par 77 voix pour et 20 contre.

La Chambre des représentants s'était déjà prononcée la semaine dernière et le texte attend désormais d'être promulgué par le président américain.

Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar. Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis.

Le chef de la diplomatie syrienne, Assaad al-Chaibani, a salué sur Telegram le vote du Sénat comme "ouvrant de nouveaux horizons pour la coopération et le partenariat entre notre pays et le reste du monde".

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars.

Bien que son application soit suspendue, de nombreux responsables américains jugeaient qu'elle pouvait nuire à la confiance des investisseurs tant qu'elle n'était pas abrogée.

Le dirigeant syrien Ahmad al-Chareh a été reçu le 10 novembre à la Maison Blanche par le président Trump, une première pour un chef d'Etat syrien depuis l'indépendance du pays en 1946 et une consécration pour l'ancien jihadiste qui, en moins d'un an au pouvoir, a sorti son pays de l'isolement.

Donald Trump l'avait déjà rencontré lors d'un voyage dans le Golfe en mai, annonçant alors la levée des sanctions américaines.

Après 13 ans de guerre civile, la Syrie cherche à garantir des fonds pour sa reconstruction, dont le coût pourrait dépasser 216 milliards de dollars, selon la Banque mondiale.

"L'abrogation aujourd'hui de la loi Caesar est une étape décisive pour donner au peuple syrien une véritable chance de se reconstruire après des décennies de souffrances inimaginables", s'est félicité la sénatrice démocrate Jeanne Shaheen.


Les principales villes du Soudan privées de courant après des frappes de drones sur une centrale

Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
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  • Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale
  • Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des FSR

PORT-SOUDAN: Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts, ont indiqué plusieurs témoins à l'AFP.

Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale.

Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

Le gouvernement de l’État du Nil a confirmé la mort des deux secouristes dans un communiqué officiel.

Cette station est un nœud stratégique du réseau électrique soudanais, recevant l’électricité produite par le barrage de Merowe — la plus grande source d'énergie hydroélectrique du pays — avant sa redistribution vers plusieurs régions.

Des témoins ont également indiqué qu’aux alentours de 02H00 (minuit GMT), les forces de l’armée régulière avaient activé leurs systèmes de défense antiaérienne, rapportant avoir vu des flammes et de la fumée s'élever au-dessus de la ville contrôlée par l'armée en guerre depuis avril 2023 contre les FSR.

Les coupures d’électricité se sont étendues à plusieurs États, notamment ceux du Nil, de la mer Rouge — où se trouve Port-Soudan, siège provisoire du gouvernement pro-armée — ainsi qu’à la capitale Khartoum, selon des témoins, l'incendie n'étant toujours pas maitrisé.

Les FSR n’ont jusqu'à présent pas commenté l'attaque.

Ces derniers mois, les FSR ont été accusées de lancer des attaques de drones sur de vastes zones contrôlées par l’armée, visant des infrastructures civiles et provoquant des coupures de courant affectant des millions de personnes.

La guerre, qui a éclaté en avril 2023, a fait plusieurs dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué "la pire crise humanitaire au monde", selon l'ONU.