Les élections présidentielles américaines, un vrai dilemme pour les arabo-américains

Barack Obama regarde Donald Trump saluer Joe Biden lors de la prestation de serment du républicain en tant que président (Photo, Reuters).
Barack Obama regarde Donald Trump saluer Joe Biden lors de la prestation de serment du républicain en tant que président (Photo, Reuters).
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Publié le Samedi 29 août 2020

Les élections présidentielles américaines, un vrai dilemme pour les arabo-américains

Les élections présidentielles américaines, un vrai dilemme pour les arabo-américains
  • Les arabo-américains pourraient de même gaspiller leur vote et le donner à un candidat tiers, mais ce sera indirectement un vote pour Trump
  • Soutenir Biden est également un vote pour Israël, aussi sûrement que soutenir Trump est un risque élevé qui pourrait ne pas porter ses fruits

Alors que de nombreux activistes arabo-américains sont enthousiastes à l'idée de s'opposer à la réélection du président républicain américain Donald Trump, il y a peu d’enthousiasme pour soutenir son rival démocrate Joe Biden.

Tellement de conflits entourent les deux candidats que les électeurs arabo-américains devront soit fermer les yeux sur certaines positions anti-arabes de Biden ou sur la rhétorique pro-israélienne extrême de sa colistière, soit de tenter leur chance avec le Trump mercuriel et imprévisible dont l'administration a contribué à la réalisation de nombreux objectifs d'apartheid raciste d'Israël.

Les arabo-américains pourraient de même gaspiller leur vote et le donner à un candidat tiers, un candidat qui embrasse leurs rêves irréalisables et leurs demandes de remonter le temps, et la réalité, jusqu’en 1947. Beaucoup de personnes le feront. Mais un vote pour un candidat tiers est indirectement un vote pour Trump.

Néanmoins, soutenir Biden est également un vote pour Israël, aussi sûrement que soutenir Trump est un risque élevé qui pourrait ne pas porter ses fruits.

Nous connaissons tous les positions de Trump sur le Moyen-Orient. Elles ont été excessivement mises en avant par les activistes arabo-américains et leurs amis d’extrême gauche comme des conséquences de la politique républicaine.

Mais on pourrait soutenir que Trump n'est pas vraiment un républicain. C'est un démocrate conservateur – parfois appelé démocrate Reagan après la politique populiste de l'ancien président américain Ronald Reagan (de 1981 à 1989) qui a dirigé le parti républicain en soutenant fermement la couleur bleue, les espoirs traditionnels des Américains, ainsi que leurs rêves.

Reagan était certainement meilleur pour répondre aux besoins des démocrates conservateurs que Trump, qui enchaîne les controverses sur Twitter et dans une Maison Blanche qui fait l’objet de scandales.

Normalement, Trump aurait pu séduire les électeurs arabo-américains politiquement centristes. Les arabo-américains (musulmans et chrétiens) adhèrent à bon nombre des mêmes idéaux conservateurs qui sont au cœur des enjeux du Parti républicain. Par exemple, ils s'opposent principalement à l'avortement et soutiennent les valeurs familiales, terme souvent dénoncé par les démocrates et la gauche.

Mais lorsqu’il s’agit de sa politique étrangère au Moyen-Orient, en particulier le conflit israélo-palestinien, les efforts de Trump pour tenter une tactique différente pour soutenir l’État palestinien ont été dominés par le camp pro-israélien qui influence les décisions de la Maison Blanche et du Cabinet.

L’administration Trump a reconnu Jérusalem comme étant la capitale d’Israël, ce qui n’est en réalité qu’un petit pas au-delà de la position des démocrates qui soutiennent l'affirmation d'Israël selon laquelle une Jérusalem unie est la capitale éternelle d'Israël, et a également soutenu les revendications d'Israël du plateau du Golan. Toutefois, les administrations précédentes, républicaines et démocrates, n'ont jamais rien fait pour forcer Israël à se retirer de ces terres.

Trump a jeté les bases de la normalisation des relations entre les Émirats arabes unis et Israël en échange d’une promesse par Israël de suspendre l’annexion de régions majeures de la Cisjordanie. Malheureusement, il y a peu de différences entre les menaces d’annexion par Israël et la réalité de l’occupation israélienne aujourd’hui. Une réalité à laquelle républicains et démocrates ont ôté le caractère d’occupation, pour la revêtir d’un cachet de « dispute ».

Visiblement, à ce sujet, les actions de Trump ont été purement politiques, avec des campagnes de relations publiques et des étiquettes qui redéfinissent une réalité qui a considéré Jérusalem, la Cisjordanie, les droits palestiniens et la violence israélienne comme un peu plus qu’une actualisation de la politique israélienne existante.

Biden, en revanche, n’a pas été meilleur et sa colistière Kamala Harris non plus. Biden s’est déclaré sioniste dans le passé. Pire encore, le Comité national démocrate (DNC, l’organisme chargé de diriger le parti démocrate américain) a soigneusement vidé le langage qui soutiendrait les droits des Palestiniens, annulant les dispositions s'opposant à ces colonies illégales en soutenant le mouvement BDS (boycott, désinvestissement et sanctions) recherché par les arabo-américains démocrates, par les membres pro-palestiniens du Congrès, dont The Squad, et certains activistes du DNC.

En fait, les démocrates ont tiré la sonnette d’alarme pour la justice palestinienne, affirmant une position politiquement neutre de dénonciation des actions unilatérales telles que celles prises par Trump mais également prises par Israël pour porter atteinte aux droits des Palestiniens.

Les démocrates auraient pu confronter le racisme d’Israël, aller de l’avant en soutenant la fin de l’occupation israélienne et l’expansion des colonies illégales, une forme plus que subtile d’occupation continue, et réclamer justice pour les Palestiniens. Le DNC soutient une solution négociée à deux États, quelque chose qui ne se produira clairement jamais et qui ne s'est pas produit au cours des 27 dernières années, depuis qu'elle a été adoptée par l'ancien Premier ministre israélien Yitzhak Rabin et par le président palestinien Yasser Arafat en 1993.

La politique de l’administration Trump a déçu les arabo-américains lorsqu’il s’agit de la question palestinienne, alors que Biden et les démocrates préfèrent envelopper leur mensonge dans une rhétorique qui encourage l’espoir, sans plus. Trump ou Biden ? Il n’y a pas de choix véritable.

 

Ray Hanania est un ancien journaliste politique et chroniqueur à l'hôtel de ville de Chicago. Il est joignable sur son site web à l'adresse www.hanania.com. Twitter : @RayHanania

NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur www.arabnews.com