Après la guerre à Gaza, le «monsieur CPI» rassemble ses preuves contre Israël

L'avocat palestinien des droits humains Raji Sourani se tient dans son bureau surplombant Gaza ravagée par la guerre depuis le dixième étage d'une tour le 23 juin 2021. MOHAMMED ABED / AFP
L'avocat palestinien des droits humains Raji Sourani se tient dans son bureau surplombant Gaza ravagée par la guerre depuis le dixième étage d'une tour le 23 juin 2021. MOHAMMED ABED / AFP
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Publié le Vendredi 25 juin 2021

Après la guerre à Gaza, le «monsieur CPI» rassemble ses preuves contre Israël

  • Pour Raji Sourani, le jour où la CPI a annoncé qu'elle ouvrait une enquête sur les crimes commis dans les Territoires palestiniens était un jour «lumineux»
  • Crâne dégarni et paupières lourdes, l'avocat de 66 ans a déposé des dizaines de dossiers auprès de la Cour depuis 2015, afin de représenter des Palestiniens victimes selon lui de crimes de guerre commis par Israël

GAZA: Au dixième étage d'une tour de Gaza, les dossiers de Raji Sourani n'ont pas le temps de prendre la poussière. L'avocat palestinien s'active pour représenter les victimes de la dernière guerre avec Israël, auprès de la Cour pénale internationale (CPI).

Pour Raji Sourani, le jour où la CPI a annoncé qu'elle ouvrait une enquête sur les crimes commis dans les Territoires palestiniens était un jour "lumineux", quand l'ex-Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu fustigeait lui "une décision qui est l'essence même de l'antisémitisme".

Crâne dégarni et paupières lourdes, l'avocat de 66 ans a déposé des dizaines de dossiers auprès de la Cour depuis 2015, afin de représenter des Palestiniens victimes selon lui de crimes de guerre commis par Israël.

Une enquête à La Haye "peut permettre aux victimes de retrouver leur dignité", estime le "monsieur CPI" des Palestiniens qui dit croire "en l'idée de justice" malgré tous les obstacles.

"Nous sommes des rêveurs, si vous regardez autour de nous, les faits sont si tristes, tout est déséquilibré" en faveur d'Israël, regrette l'avocat qui a fondé le Centre palestinien pour les droits humains en 1995 et a étudié en Egypte et au Liban.

Avec son équipe d'une soixantaine de personnes, il documente tout ce qui peut prouver selon lui que l'Etat hébreu cible délibérément des civils sous couvert de lutte contre le mouvement islamiste Hamas, au pouvoir dans l'enclave --une accusation vigoureusement démentie par les autorités israéliennes.

Les dossiers portent sur la guerre entre Israël et le Hamas en 2014, les manifestations réprimées lors de la Grande marche du retour de 2018, le "blocus illégal et inhumain" imposé depuis 2007 par Israël sur Gaza... et désormais aussi sur la confrontation armée mi-mai entre le Hamas et Israël.

Photos d'immeubles détruits, listes détaillées des victimes, rapports sur les missiles utilisés par l'armée israélienne, cartographie des endroits bombardés: son travail de fourmi est soigneusement classé dans des dizaines de classeurs.

Kafka

Du 10 au 21 mai, 260 Palestiniens ont été tués par des frappes israéliennes sur Gaza, parmi lesquels des combattants, selon les autorités locales. En Israël, les tirs de roquettes depuis le micro-territoire ont fait 13 morts, dont un soldat, d'après la police et l'armée.

L'armée israélienne se défend de viser des positions civiles et affirme tout faire pour éviter les victimes civiles, tout en reconnaissant des dommages collatéraux.

Insuffisant, martèle Raji Sourani.

"Les guerres ont lieu entre des armées, les civils doivent être épargnés", assène-t-il. "Les familles Al-Kolak, Abou Al-Awf, Al Hadidi, les tours Shorouk, Hanadi, Jalaa, les réseaux hydrauliques et d'électricité: qu'est-ce que cela a à voir avec le Hamas?!"

D'après Israël, les tours détruites abritaient des locaux du Hamas, organisation qu'il considère comme terroriste. Le Hamas, lui, a accusé Israël de frapper des "habitations civiles".

A ceux qui revendiquent le droit d'Israël à l'autodéfense face au Hamas, l'avocat leur oppose une situation "kafkaïenne": un belligérant dispose d'avions de chasse ultra-modernes pour affronter une population sous occupation, en Cisjordanie, ou sous blocus, à Gaza.

"Gaza est la plus grande prison à l'air libre, ils nous ont transformés en mendiants", lance Raji Sourani, dont le ton calme s'est soudain envolé.

Prix Kennedy

Emprisonné à plusieurs reprises par Israël pour ses activités politiques, car membre du Front populaire de libération de la Palestinien (FPLP) considéré comme "terroriste" par Israël, M. Sourani a "utilisé chaque minute" de sa peine pour étudier l'hébreu et les conventions de Genève sur le droit international humanitaire. 

"J'ai vécu toute ma vie sous occupation, personne ne peut dire que l'occupation israélienne est juste", affirme celui qui travaille avec des organisations israéliennes de défense des droits humains.

Dans son bureau où s'entassent des dizaines d'ouvrages juridiques, en arabe et en anglais, trône sur une commode le buste de Robert Kennedy, ex-sénateur et procureur américain.

Raji Sourani a reçu en 1991, avec l'avocat israélien Avigdor Feldman, le prix Kennedy, au titre de son engagement pour les droits humains. Un prix également décerné en 2016 à sa grande déception à Joe Biden, alors vice-président américain.

"Nous voulons que ce prix défende ce que Robert Kennedy a dit: justice pour tous, qu'importe la couleur, la race, ou quoi que ce soit", dit l'avocat, qui reproche à l'actuel président américain son soutien à l'autodéfense d'Israël.

"Nous ne voulons rien d'autre que l'application du droit international", assure M. Sourani. "Nous n'avons aucun désir personnel de revanche mais je pense que les Palestiniens ont droit à la justice et à la dignité."


La diplomatie française estime qu'Israël doit faire preuve de « la plus grande retenue » au Liban

Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
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  • l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, Hezbollah.
  • Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

PARIS : La France a exhorté mercredi Israël « à faire preuve de la plus grande retenue » au Liban après la frappe israélienne qui a touché Beyrouth dimanche dernier, et a souligné que le démantèlement des sites militaires du Hezbollah revenait « exclusivement aux forces armées libanaises ».

Malgré un cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre après plus d'un an de guerre entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, très affaibli, qui affirme de son côté respecter l'accord.

Le week-end dernier, Israël a assuré avoir visé un entrepôt de missiles.

Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

« La France rappelle que le respect du cessez-le-feu s'impose à toutes les parties sans exception afin de garantir la sécurité des populations civiles des deux côtés de la Ligne bleue », la frontière de facto délimitée par les Nations unies, a souligné mercredi Christophe Lemoine, porte-parole du ministère français des Affaires étrangères.

« La France appelle donc Israël à faire preuve de la plus grande retenue et à se retirer au plus vite des cinq points toujours occupés sur le territoire libanais », a-t-il ajouté lors d'un point presse.

Une commission regroupant le Liban, Israël, les États-Unis, la France et l'ONU est chargée de superviser l'application du cessez-le-feu.

Beyrouth presse la communauté internationale de faire pression sur Israël pour qu'il mette fin à ses attaques et se retire des cinq positions frontalières où il s'est maintenu dans le sud du pays, malgré l'accord.


Les services de sécurité des Émirats déjouent un transfert illégal d'armes vers le Soudan

Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
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  • Les services de sécurité ont réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises 
  • Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays

ABU DHABI: Les services de sécurité des Émirats arabes unis ont déjoué une tentative de transfert illégal d'armes et d'équipements militaires aux forces armées soudanaises, a déclaré mercredi le procureur général des Émirats arabes unis, Hamad Saif al-Chamsi.

M. Al-Chamsi a déclaré que les services de sécurité avaient réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises après l'arrestation de membres d'une cellule impliquée dans la médiation non autorisée, le courtage et le trafic illicite d'équipements militaires, sans avoir obtenu les licences nécessaires auprès des autorités compétentes.

Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays.

L'avion transportait environ cinq millions de munitions de type Goryunov (54,7 x 62 mm).

Les autorités ont également saisi une partie du produit financier de la transaction en possession de deux suspects dans leurs chambres d'hôtel.

M. Al-Chamsi a déclaré que l'enquête avait révélé l'implication de membres de la cellule des chefs militaires soudanais, notamment l'ancien chef des services de renseignement Salah Gosh, un ancien officier de l'agence de renseignement, un ancien conseiller du ministre des Finances et une personnalité politique proche du général Abdel Fattah al-Burhan et de son adjoint Yasser al-Atta. Plusieurs hommes d'affaires soudanais ont également été impliqués.

Selon les enquêteurs, les membres de la cellule ont conclu un marché d'équipement militaire portant sur des fusils Kalachnikov, des munitions, des mitrailleuses et des grenades d'une valeur de plusieurs millions de dollars.

Les armes ont été transférées de l'armée soudanaise à une société d'importation des Émirats arabes unis en utilisant la méthode de transfert des HAWALADARS.

La transaction a été facilitée par l'intermédiaire d'une société appartenant à un membre fugitif de la cellule travaillant pour les forces armées soudanaises, en coordination avec le colonel Othman al-Zubair, responsable des opérations financières au sein de l'armée soudanaise.

De faux contrats et de fausses factures commerciales ont été utilisés pour prétendre que les paiements concernaient un contrat d'importation de sucre.

L'enquête a conclu que ces transactions avaient été effectuées à la demande du comité d'armement des forces armées soudanaises, présidé par Al-Burhan et son adjoint Al-Atta, en toute connaissance de cause et avec leur approbation. Les membres de la cellule ont été directement chargés de négocier et de finaliser les transactions par Ahmed Rabie Ahmed al-Sayed, une personnalité politique proche du commandant en chef soudanais et responsable de la délivrance des certificats et des approbations des utilisateurs finaux.

Les enquêteurs ont confirmé que Salah Gosh jouait un rôle central dans la gestion du trafic illégal d'équipements militaires aux Émirats arabes unis, en coordination avec d'autres membres de la cellule.

Le groupe a réalisé une marge bénéficiaire de 2,6 millions de dollars (1 dollar = 0,88 euro) par rapport à la valeur réelle des deux transactions, qu'il s'est répartie entre lui et plusieurs complices. La part de Gosh a été retrouvée en possession du suspect Khalid Youssef Mukhtar Youssef, ancien officier de renseignement et ex-chef de cabinet de Gosh.

La cargaison saisie était arrivée à l'aéroport des Émirats arabes unis à bord d'un avion privé en provenance d'un pays étranger.

L'avion s'était posé pour faire le plein et avait officiellement déclaré qu'il transportait un lot de fournitures médicales.

Cependant, la cargaison militaire a été découverte sous la supervision du ministère public, sur la base de mandats judiciaires émis par le procureur général.

Les autorités ont également saisi des copies des contrats relatifs aux deux transactions, de faux documents d'expédition, ainsi que des enregistrements audio et des messages échangés entre les membres de la cellule.

L'enquête a permis de découvrir plusieurs sociétés appartenant à un homme d'affaires soudano-ukrainien, dont une opérant aux Émirats arabes unis.

Ces sociétés ont fourni à l'armée soudanaise des armes, des munitions, des grenades et des drones, en collaboration avec les membres de la cellule et le responsable financier de l'armée.

L'une des sociétés figure sur la liste des sanctions américaines.

Les enquêtes en cours ont révélé que les intérêts financiers et les profits du groupe sont étroitement liés à la poursuite du conflit interne au Soudan.

Le procureur général a souligné que cet incident représentait une grave atteinte à la sécurité nationale des Émirats arabes unis, en faisant de leur territoire une plateforme pour le trafic illégal d'armes à destination d'un pays en proie à des troubles civils, en plus de constituer des infractions pénales punissables par la loi.

Il a conclu en déclarant que le ministère public poursuivait ses procédures d'enquête en vue de déférer les suspects à une procédure judiciaire d'urgence.

Les résultats définitifs seront annoncés à la fin de l'enquête.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Retailleau engage la procédure de dissolution d'Urgence Palestine

Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine.
  • Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

PARIS : A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine, ainsi que de Lyon Populaire, qui appartient à l'ultra droite, après avoir lancé mardi celle du groupe antifasciste La Jeune Garde.

Invité de CNews/Europe 1, le ministre de l'Intérieur a justifié la dissolution d'Urgence Palestine en affirmant qu'il fallait « taper sur les islamistes ». « L'islamisme est une idéologie qui essaie d'instrumentaliser une religion. Il y a une défiguration de la foi », a-t-il dit.

« Il ne faut pas défigurer la juste cause des Palestiniens », a poursuivi M. Retailleau, qui a insisté sur le fait que « beaucoup de nos compatriotes musulmans professent une foi parfaitement compatible avec les valeurs de la République ».

Créé au lendemain de l'attaque sans précédent du Hamas dans le sud d'Israël le 7 octobre 2023, qui a déclenché la guerre à Gaza, le collectif Urgence Palestine dit rassembler « des citoyens, des organisations et mouvements associatifs, syndicaux et politiques mobilisés pour l'auto-détermination du peuple palestinien ». 

Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

« À l'heure où le peuple palestinien est confronté au génocide, à la famine, où les Israéliens cherchent à détruire et à anéantir le peuple palestinien, que fait le gouvernement français ? Il veut dissoudre notre collectif, c'est insupportable », a réagi Omar Al Soumi, l'un des militants d'Urgence Palestine.

« C'est la réalité d'une France complice du génocide », a-t-il accusé dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux.

Urgence Palestine a reçu de nombreux messages de soutien de la part d'organisations de l'extrême gauche et de la gauche radicale. 

« Non à la dissolution d'Urgence Palestine », a écrit sur Instagram le Nouveau Parti Anticapitaliste, dénonçant « des prétextes pour faire taire les voix solidaires avec la Palestine ! ».

L'eurodéputée insoumise Rima Hassan a également critiqué les dissolutions engagées contre la Jeune Garde et Urgence Palestine.

« La dérive autoritaire et fasciste de Macron est aussi réelle, tangible et concrète », a-t-elle réagi sur X.

Tsedek!, qui se présente comme un « collectif juif décolonial », a aussi apporté son soutien à ces deux organisations.

« Le gouvernement qui appelle à la dissolution d’Urgence Palestine, c’est la République qui reprend ses droits et réaffirme que l’antisémitisme ne passera pas en France », s'est au contraire félicitée Sarah Aizenman, présidente du collectif « Nous vivrons », auprès de l'AFP. 

« Cette organisation ne défend pas les droits des Palestiniens, elle soutient une organisation terroriste », a accusé Mme Aizenman.

Les annonces de procédures de dissolution contre La Jeune Garde et Urgence Palestine interviennent à la veille des rassemblements du 1er-Mai et pourraient tendre le climat des manifestations, notamment à Paris, selon un haut responsable de la police.

Le ministre de l'Intérieur et le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, ont par avance prévenu qu'aucun débordement ne serait toléré.

Environ 15 000 personnes sont attendues jeudi pour la manifestation parisienne.