Après le choc de 2015, des années de tensions migratoires en Europe

Les migrants secourus sont transférés au port commercial de Lampedusa le 29 août 2020. (Mauro SEMINARA / AFP)
Les migrants secourus sont transférés au port commercial de Lampedusa le 29 août 2020. (Mauro SEMINARA / AFP)
Short Url
Publié le Lundi 31 août 2020

Après le choc de 2015, des années de tensions migratoires en Europe

  • En 2016, un pacte décrié entre l'UE et la Turquie fait retomber la pression: il prévoit, en échange notamment d'une aide financière
  • En 2019, moins de 129.000 migrants sont arrivés en Europe

PARIS : Après l'afflux chaotique de plus d'un million de migrants en 2015, les pays européens n'ont pas profité de l'accalmie les années suivantes: la chute des arrivées n'a mis fin ni aux tragédies en Méditerranée, ni aux querelles sur l'accueil de ces hommes, femmes et enfants.

La crise de 2015

Les arrivées en Europe s'accroissent progressivement à partir de 2011, au début du conflit en Syrie. Mais c'est en 2015 que la situation prend des proportions vertigineuses.

En avril, un drame frappe les esprits: jusqu'à 800 migrants partis de Libye périssent dans un naufrage. C'est la pire catastrophe en Méditerranée depuis des décennies. A la fin de l'été, les arrivées se multiplient: au total, plus d'un million sont recensées sur l'année, dont plus de 850.000 via la Grèce.

Craignant une catastrophe humanitaire, la chancelière Angela Merkel ouvre les portes de l'Allemagne, s'attirant les foudres de ses voisins qui fustigent un "appel d'air". Mais Berlin, au bord de la saturation, va rapidement réintroduire des contrôles aux frontières, suivi par d'autres, à commencer par l'Autriche et la Slovaquie.

Pour soulager l'Italie et la Grèce, les Européens adoptent en septembre des quotas de répartition de demandeurs d'asile, malgré l'opposition de plusieurs pays de l'Est. Ce plan temporaire, sans cesse contesté, cristallisera les divisions européennes.

Sur leur route, les migrants voient des clôtures se dresser, comme en Hongrie et en Slovénie.

2016, accord Turquie-UE

En mars 2016, les frontières se ferment une à une tout au long de la route des Balkans, de la Macédoine à l'Autriche, qu'empruntaient depuis l'été les migrants cherchant à rejoindre le nord de l'Europe.

Et le 18 mars, un pacte décrié entre l'UE et la Turquie fait retomber la pression: il prévoit, en échange notamment d'une aide financière, le renvoi vers la Turquie de tous les migrants qui arriveront désormais en Grèce.

Résultat: les arrivées en Europe chutent très nettement (à moins de 390.000 sur l'année 2016). Mais des dizaines de milliers de migrants se retrouvent bloqués en Grèce.

2017, l'Italie en première ligne

Autre conséquence de ce verrouillage: la Libye devient la principale voie de migration et l'Italie la première porte d'entrée en Europe.

Des accords entre Rome et les autorités et milices libyennes vont changer la donne à la mi-2017. Au prix de vives controverses: l'UE, qui appuie les gardes-côtes libyens, est accusée de fermer les yeux sur la détention et les violences subies par les migrants en Libye.

En 2018, c'est au tour de l'Espagne de devenir la principale porte d'entrée en Europe.

2018-2019, crise politique

Les Italiens portent au pouvoir fin mai une coalition de l'extrême droite et des populistes. Une de ses premières décisions est de refuser d'accueillir un bateau humanitaire chargé de 630 migrants.

L'Aquarius termine finalement sa route en Espagne, après une odyssée d'une semaine qui exacerbe les tensions au sein de l'UE, notamment entre Rome et Paris.

A l'issue d'un sommet européen sous haute tension fin juin, les pays européens envisagent la création de "plateformes de débarquement" hors de l'UE et de "centres contrôlés" en Europe, où distinguer rapidement migrants irréguliers à expulser et demandeurs d'asile à accueillir. Mais les capitales sont loin d'être d'accord sur les modalités.

Pendant un an, avec la fermeture des ports italiens incarnée par le ministre de l'Intérieur Matteo Salvini (extrême droite), le scénario se répète: des bateaux vont se retrouver bloqués en Méditerranée pendant des semaines, jusqu'à ce que des accords soient conclus entre quelques pays s'engageant à accueillir les migrants secourus.

Las, un navire de l'ONG Sea-Watch marque les esprits en juin 2019 en accostant de force sur l'île de Lampedusa.

Accord temporaire

Le changement de gouvernement en Italie à la fin de l'été 2019 et la réouverture des ports italiens va permettre d'ébaucher un accord en septembre entre l'Allemagne, la France, l'Italie et Malte, soutenu par quelques pays.

Un mécanisme temporaire est censé faciliter les débarquements, en rendant automatique l'accueil des migrants secourus par plusieurs pays volontaires. Il sera de fait suspendu avec la crise sanitaire.

En 2019, moins de 129.000 migrants sont arrivés en Europe.

2020, "chantage" d'Erdogan

Fin février 2020, la Turquie annonce l'ouverture de la frontière avec la Grèce, provoquant l'afflux de dizaines de milliers de migrants. Les Européens crient au "chantage".

La fermeture des frontières liée à la crise sanitaire va cependant limiter les tentatives de passage. La pandémie du nouveau coronavirus va aussi entraîner la fermeture des ports italiens et maltais début avril, et une raréfaction des bateaux humanitaires.

Parallèlement, la crise accélère les traversées en Méditerrannée centrale. Les ONG craignent une "tragédie à huis clos", tandis que l'Italie demande le soutien de l'UE.

Phénomène de moindre ampleur, les tentatives de traversées clandestines de la Manche depuis la France augmentent, suscitant des tensions entre Paris et Londres.


Moyen-Orient: À force de se vouloir équilibrée, la posture française en devient illisible

Le président français Emmanuel Macron est vu lors d'une cérémonie d'arrivée au sommet du Groupe des Sept (G7) au Pomeroy Kananaskis Mountain Lodge à Kananaskis, Alberta, Canada, le 16 juin 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron est vu lors d'une cérémonie d'arrivée au sommet du Groupe des Sept (G7) au Pomeroy Kananaskis Mountain Lodge à Kananaskis, Alberta, Canada, le 16 juin 2025. (AFP)
Short Url
  • En rappelant que l’Iran dispose de missiles pouvant atteindre le territoire français et qu’il soutient activement le Hamas et le Hezbollah, Barrot a justifié la fermeté de la diplomatie française à l’égard de Téhéran
  • Mais aussitôt, il a tempéré ses propos, indiquant qu’à ce stade, « les moyens militaires français n’ont pas été mobilisés », avant de renouveler un appel classique « à la retenue »

PARIS: Alors que la guerre entre Israël et l’Iran s’intensifie, la France tente de maintenir une ligne diplomatique fondée sur la retenue, la désescalade et l’équilibre.
Mais cette posture, censée affirmer une voix autonome au sein du concert international, peine désormais à convaincre. À force de vouloir ménager toutes les parties, la position française en devient brouillée, voire illisible.
S’exprimant le dimanche 15 juin, le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, s’est montré ferme : « Le programme nucléaire iranien a une vocation militaire. C’est une menace existentielle pour Israël, pour les pays de la région et pour nous aussi », a-t-il affirmé.
En rappelant que l’Iran dispose de missiles pouvant atteindre le territoire français et qu’il soutient activement le Hamas et le Hezbollah, Barrot a justifié la fermeté de la diplomatie française à l’égard de Téhéran.
Mais aussitôt, il a tempéré ses propos, indiquant qu’à ce stade, « les moyens militaires français n’ont pas été mobilisés », avant de renouveler un appel classique « à la retenue » à l’adresse de toutes les parties.
Le vendredi 13 juin, à la suite des frappes israéliennes contre des cibles iraniennes, Emmanuel Macron avait rappelé « le droit d’Israël à se protéger », tout en insistant sur la nécessité de « ne pas mettre en péril la stabilité de la région ».
Il est même allé jusqu’à affirmer que la France participerait « aux opérations de protection et de défense » d’Israël en cas de « représailles » menées par l’Iran, « si elle est en situation de le faire ».

La logique française se veut cohérente : elle soutient le droit d’Israël à se défendre, mais sans donner un chèque en blanc à la politique de Benyamin Netanyahou.

« J’ai marqué notre disponibilité en ce sens », a ajouté le président français lors d’une conférence de presse, et « à l’inverse, je n’envisage aucunement de participer à quelque opération offensive que ce soit. Ce n’est pas notre rôle », a-t-il fait valoir.
La condamnation française du programme nucléaire iranien est ancienne, tout comme son soutien au droit d’Israël à se défendre. Mais, par ailleurs, la France dénonçait, il y a quelques semaines, le blocus humanitaire imposé par Israël à Gaza, le qualifiant de « honte ».
La logique française se veut cohérente: elle soutient le droit d’Israël à se défendre, mais sans donner un chèque en blanc à la politique de Benyamin Netanyahou.
Cette même logique fait dire à Paris: oui à une riposte contre Téhéran si une ligne rouge est franchie, mais toujours dans une optique diplomatique.
À l’approche du sommet du G7 au Canada, Macron entend plaider cette voie médiane, espérant maintenir la France comme puissance d’équilibre. Mais encore faut-il être entendu et compris.
Dans les faits, Paris semble marginalisé. L’ambassadeur d’Israël en France, Joshua Zarka, a reconnu que Tel-Aviv n’avait pas informé la France de ses frappes.
« La relation n’est plus aussi proche qu’avant », a-t-il déclaré. Pour lui, la France reste un allié, « mais pas au point d’avoir été alertée », signifiant clairement que la critique française de la guerre à Gaza a éloigné les deux capitales.
Côté iranien, les leviers français sont tout aussi limités. Malgré les pressions exercées sur Téhéran, y compris une résolution récente de l’AIEA dénonçant l’enrichissement d’uranium par l’Iran, la République islamique reste sourde aux avertissements.

Les frappes croisées entre Israël et l’Iran ont aussi eu une conséquence immédiate : le report de la conférence de New York, prévue pour discuter de la reconnaissance d’un État palestinien, initiative portée conjointement par la France et l’Arabie saoudite.


Les menaces françaises de déclencher la procédure de « snap back » pour rétablir les sanctions, en cas d’absence d’accord sur le nucléaire, sont prises au sérieux, mais elles n’inversent pas la dynamique de confrontation.
Les frappes croisées entre Israël et l’Iran ont aussi eu une conséquence immédiate : le report de la conférence de New York, prévue pour discuter de la reconnaissance d’un État palestinien, initiative portée conjointement par la France et l’Arabie saoudite.
À Paris, on parle d’un simple report technique, mais en vérité, la flambée de violence a démontré le décalage entre la réalité sur le terrain et cette initiative diplomatique pourtant centrale.
Le président Macron, qui souhaitait inscrire cette reconnaissance dans une dynamique plus large d’accords régionaux, avec une normalisation entre Israël et certains pays arabes en contrepartie, doit composer avec un terrain à feu et à sang.
L’idée d’une « reconnaissance réciproque » (d’un État palestinien et de l’État d’Israël par de nouveaux acteurs) reste d’actualité, mais semble désormais hors de portée dans le contexte actuel.
Ce flou diplomatique se heurte aussi à une opinion publique française de plus en plus sceptique. Et Macron, en chute libre dans les sondages, doit composer avec un climat politique intérieur tendu.
Son autorité sur la politique étrangère, pourtant historiquement l’un des leviers du pouvoir présidentiel en France, semble contestée et contrariée.
Pour redevenir lisible et audible, Paris devra clarifier ses priorités : la dénonciation du programme nucléaire iranien ne peut s’accompagner d’une ambiguïté persistante sur la politique israélienne à Gaza et sur la reconnaissance par la France de l’État palestinien.


Metz: un forcené tué par balles, un policier touché à la main

Un homme "menaçant", détenteur de plusieurs armes à feu, a succombé à des blessures par balles lundi à Metz après un échange de coups de feu avec la police, tandis qu'un agent a été blessé, a annoncé le parquet. (AFP)
Un homme "menaçant", détenteur de plusieurs armes à feu, a succombé à des blessures par balles lundi à Metz après un échange de coups de feu avec la police, tandis qu'un agent a été blessé, a annoncé le parquet. (AFP)
Short Url
  • Alors que les forces de l'ordre interviennent, "l'homme est retranché chez lui et refuse de se rendre à la police", a poursuivi M. Grosdidier
  • Un peu avant 3H00, l'homme, installé au premier étage, "faisait feu depuis sa fenêtre sur la patrouille située dans la rue", a indiqué dans un communiqué le procureur de la République adjoint de Metz, Thomas Bernard

STRASBOURG: Un homme "menaçant", détenteur de plusieurs armes à feu, a succombé à des blessures par balles lundi à Metz après un échange de coups de feu avec la police, tandis qu'un agent a été blessé, a annoncé le parquet.

Les faits ont commencé dimanche soir dans une rue très passante de la vieille ville de Metz. "Vers 22h00, un individu menace depuis sa fenêtre, avec une arme à canon long, un passant", a rapporté le maire François Grosdidier sur sa page Facebook.

Alors que les forces de l'ordre interviennent, "l'homme est retranché chez lui et refuse de se rendre à la police", a poursuivi M. Grosdidier.

Un peu avant 3H00, l'homme, installé au premier étage, "faisait feu depuis sa fenêtre sur la patrouille située dans la rue", a indiqué dans un communiqué le procureur de la République adjoint de Metz, Thomas Bernard.

"Il sortait alors de son studio, tenant dans chaque main un revolver, et faisait feu sur les policiers présents dans le couloir", a-t-il ajouté. "Un policier était blessé à une main, tandis qu'un de ses collègues tirait à trois reprises, touchant l'individu à l'abdomen et au bras".

L'homme de 56 ans a été hospitalisé mais est décédé lundi matin. "Son casier judiciaire porte trace de neuf condamnations", selon M. Bernard.

Le policier blessé a également été hospitalisé.

L'homme détenait "plusieurs armes, de poing et d'épaule, dans son appartement", selon le maire qui a salué l'intervention des forces de l'ordre.


Tourisme en France : entre recherche de soleil, contraintes budgétaires et destinations alternatives

Cette photo prise le 22 mars 2024 montre un bateau navette naviguant sur la Garonne alors que l'église Saint-Louis-des-Chartrons (à gauche) surplombe les quais de Bordeaux, dans le sud-ouest de la France. Bordeaux accueillera certains des tournois de football des Jeux olympiques de Paris 2024 l'été prochain. (AFP)
Cette photo prise le 22 mars 2024 montre un bateau navette naviguant sur la Garonne alors que l'église Saint-Louis-des-Chartrons (à gauche) surplombe les quais de Bordeaux, dans le sud-ouest de la France. Bordeaux accueillera certains des tournois de football des Jeux olympiques de Paris 2024 l'été prochain. (AFP)
Short Url
  • les Français semblent partager la même priorité : partir en vacances sans trop grever leur budget.
  • L’ensoleillement demeure un facteur clé dans les choix de destination. Les zones méditerranéennes continuent de séduire, au détriment des régions plus tempérées

RIYAD : Alors que l'été 2025 se profile, les Français semblent partager la même priorité : partir en vacances sans trop grever leur budget. Si 61 % d’entre eux envisagent de prendre quelques jours de congé, selon un sondage OpinionWay pour Liligo, leur comportement de consommation évolue. Pour la première fois en cinq ans, le budget moyen baisse de 74 euros par personne.

L’ensoleillement demeure un facteur clé dans les choix de destination. Les zones méditerranéennes continuent de séduire, au détriment des régions plus tempérées comme la Bretagne, la Normandie ou le nord de la France. Cette tendance s’explique notamment par deux étés précédents jugés peu cléments sur le plan météorologique, ce qui dissuade certains vacanciers de s'y rendre à nouveau.

Dans les établissements touristiques du Grand Ouest, les professionnels constatent un recul des séjours d'une semaine, compensé par une légère hausse des courts séjours (2 à 6 nuits). Les réservations de dernière minute restent fréquentes et très dépendantes des prévisions météorologiques du dimanche soir.

Confrontés à une inflation persistante et à des inquiétudes concernant leur pouvoir d’achat, les Français adaptent leurs comportements. Ils réduisent leurs dépenses dans les restaurants, les commerces ou les activités annexes, et sont plus prudents dans la planification de leurs séjours. Les formules « tout compris », jugées plus économiques et prévisibles, rencontrent un succès croissant.

Selon le cabinet Pro tourisme, les prix des hébergements touristiques ont grimpé de 27 % en quatre ans. Dans ce contexte, les territoires proposant des tarifs plus accessibles, comme l’intérieur des terres ou les destinations proches des grandes agglomérations comme l’Eure, la Vienne, l’Ain ou l’Oise, enregistrent une forte progression des recherches, parfois jusqu’à +150 %.

Si les littoraux restent prisés, un rééquilibrage s’opère en faveur des zones rurales et périurbaines. Ces destinations sont non seulement plus abordables, puisque les locations y sont en moyenne 20 à 30 % moins chères que sur la côte, mais elles offrent également un cadre de vie plus agréable.

Ces destinations répondent à une demande croissante de nature, de tranquillité et d’authenticité. La France rurale, longtemps en retrait, bénéficie désormais d’une attractivité renouvelée. Un phénomène accentué par l’essor du télétravail, le besoin de déconnexion et la quête d’expériences plus simples. L’arrière-pays n’est plus perçu comme une alternative de repli, mais comme un véritable choix de qualité.

Sur le plan international, la France reste solidement installée comme première destination mondiale avec 100 millions de touristes étrangers en 2024, devant l’Espagne. Les métropoles touristiques qui accueillent une clientèle étrangère à fort pouvoir d’achat, comme Paris, Cannes, Nice ou les régions viticoles, affichent des perspectives encourageantes.

Les analystes estiment que les Jeux Olympiques 2024 ont amplifié la visibilité de la France sur la scène mondiale, générant un regain d’intérêt pour la capitale et ses alentours. À Paris, la fréquentation touristique devrait rester élevée en 2025 grâce à l’effet post-événementiel.

Entre contraintes économiques, recherche d’ensoleillement et désir de proximité, le tourisme en France est en pleine mutation. Les professionnels s’adaptent à une clientèle plus exigeante, plus mobile et surtout plus attentive à l’équilibre entre plaisir et dépenses. Le paysage touristique français, longtemps polarisé entre le littoral et la montagne, s’enrichit désormais d’une diversité de choix stratégiques, économiques et culturels.