Au Sud-Liban, l’ombre de Téhéran

Une unité de la force de maintien de la paix des Nations Unies au Liban (FINUL) patrouille dans le village côtier de Qlaileh, dans le sud du Liban, le 20 juillet 2021. (Mahmoud Zayyat/AFP)
Une unité de la force de maintien de la paix des Nations Unies au Liban (FINUL) patrouille dans le village côtier de Qlaileh, dans le sud du Liban, le 20 juillet 2021. (Mahmoud Zayyat/AFP)
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Publié le Samedi 07 août 2021

Au Sud-Liban, l’ombre de Téhéran

  • Il faut placer les événements dans le cadre de ce qui se passe dans la région, notamment la confrontation entre Israël et l’Iran
  • L’embrasement du Sud-Liban entre dans ce contexte, l’Iran usant de tous les moyens pour faire pression sur tous les acteurs régionaux et internationaux

BEYROUTH : Alors que les Libanais commémoraient dans la douleur et la colère, le 4 août, le premier anniversaire de la double explosion du port qui a détruit de nombreux quartier de Beyrouth l’année dernière, faisant au moins 200 morts, plus de 6.000 blessés, et près de 300.000 sans-abris, un groupuscule palestinien a lancé plusieurs roquettes depuis le Sud-Liban, dont deux sont tombées dans la région de Kiryat Shmona sans faire de victimes.

En représailles, Israël a lancé plusieurs raids aériens dans la nuit de mercredi à jeudi. Deux bombes ont visé une route dans le village de Dimachkiyeh dans le caza de Jezzine, d’où les roquettes ont été lancées. Une troisième bombe est tombée à proximité du camp palestinien de Rachidiyeh dans le caza de Tyr. Il s’agissait des premiers raids aériens de l’État hébreu contre le Liban depuis 2014.

Cette escalade a été suivie côté israélien par des tirs de roquettes, revendiqués par le Hezbollah, dans le secteur des fermes de Chebaa dans la région disputée du plateau du Golan. Selon l’armée israélienne, 19 roquettes ont été tirées, dont six ont touché son sol. Trois sont tombées au Liban et les autres ont été interceptées par le système anti-missile «Dôme de fer». Israël a par la suite riposté par des frappes d’artillerie.

Cette poussée de fièvre à la frontière libano-israélienne a été accompagnée par de fermes mises en garde de l’État hébreu. Le porte-parole arabophone de l’armée israélienne, Avichay Adraee, a averti que « les frappes de l’armée israélienne se poursuivront et pourraient s’intensifier face aux tentatives terroristes visant l’État d’Israël et ses citoyens ». Une menace qui peut viser indistinctement le Hezbollah et certaines factions palestiniennes armées montrées du doigt.

De son côté, le ministre israélien de la Défense, Benny Gantz, a menacé de «rendre la situation au Liban encore plus désastreuse qu’elle ne l’est». «Nous n’avons pas l’intention de laisser le Hezbollah jouer avec nous, et il le sait. La situation du Liban est désastreuse. Nous pouvons la rendre encore pire», a-t-il ajouté sur la chaîne israélienne Channel 12.

Depuis vendredi après-midi, un calme précaire s’est installé à la frontière, accompagné de discours appelant à la désescalade. Israël a indiqué après ses tirs ne pas vouloir d’«escalade», après que la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (Finul) a mis en garde contre « une situation très dangereuse » et appelé à un cessez-le-feu « immédiat ». « Nous ne voulons pas d’une escalade en vue d’une véritable guerre, mais bien sûr nous sommes prêts à cela », a ainsi déclaré Amnon Shefler, un porte-parole de l’armée israélienne. Même son de cloche du numéro deux du Hezbollah, Naïm Kassem : «Nous ne pensons pas que les choses se dirigent vers une escalade, bien que le Hezbollah soit préparé» à une confrontation, a-t-il affirmé à la presse.

Interrogation sur le timing

Sachant que les incidents entre les deux parties sont réguliers dans ce secteur, le timing de ce regain de tension a suscité des interrogations. Certains observateurs y voient une tentative de diversion en pleine commémoration du 4 août, d’autant que les regards se tournent vers des factions palestiniennes proches de Damas, alors que le régime syrien est accusé d’être indirectement lié à l’explosion du port, puisque, selon certains, le stock de nitrate d’ammonium qui a explosé lui était destiné.

Pour le général à la retraite, Elias Hanna, l’attaque « n’est pas nécessairement liée aux commémorations ». Selon lui, «les premières frappes imputées à des groupuscules palestiniens ont pour but de faire en sorte que le conflit avec le Hamas puisse prendre une dimension régionale, et non plus locale ». Or, toujours selon l’ancien général, « l’obsession israélienne sur le plan militaire reste le Hamas». L’État hébreu ne veut pas que la guerre avec le Hamas s’exporte sur sa frontière Nord, au Liban. Sachant que le mouvement radical palestinien a prouvé qu’il a les capacités de frapper sur tout le territoire israélien suite aux derniers affrontements durant le mois du ramadan.

C’est dans ce contexte qu’il faut lire la réponse disproportionnée et inédite depuis presque une décennie de l’armée israélienne, en faisant usage de frappes aériennes, notamment par rapport aux trois roquettes lancée mercredi.

« En lançant des raids aériens, les Israéliens ont voulu placer haut la barre. Toutefois, le risque est calculé et reste bas. Ils n’ont pas incriminé le Hezbollah, ils ont frappé des positions palestiniennes, et ils ont accusé l’État libanais d’être responsable de l’insécurité sur son territoire », ajoute Elias Hanna qui estime que l’Etat hébreu a délibérément minimisé les frappes du Hezbollah. Le système antimissile fonctionne quand des zones habitées sont menacés. Si 10 roquettes ont été interceptées, du coup, certaines zones habitées étaient en danger, explique l’ancien général. « Israël ne veut donc pas faire monter la tension. Il y a aujourd’hui une nouvelle dynamique sur le terrain. La notion de dissuasion à elle seule n’est plus suffisante vu l’évolution de la situation », ajoute-t-il.

Rappelons également que le nouveau Premier ministre israélien, Naftali Bennett était ministre de la Défense, « il n’est donc pas étranger à ce genre de conflit. Mais son prédécesseur avait mis la barre tellement haut que Bennett n’arrive pas à la dépasser, surtout en matière de confrontation », ajoute Elias Hanna.  La différence, actuellement, entre les deux, c’est le changement aux États-Unis entre Donald Trump et Joe Biden. « Israël ne peut pas se permettre une guerre de grande envergure s’il n’est pas soutenu par les USA en terme diplomatique, militaire, de renseignement, etc… »

Pour le politologue Sami Nader, le Hezbollah non plus ne veut pas d’une guerre. «Il est coincé : il revient de Syrie épuisé; il y a aussi la crise économique et sociale au Liban qui touche notamment sa base électorale ; et il y a enfin l’affaire du port où il est pointé du doigt ». Par ailleurs, le parti chiite ne peut plus se permettre une guerre de l’ampleur de celle de 2006. « La situation actuelle est très différente de celle de 2006 où le Hezbollah n’était pas en ligne de mire comme c’est le cas maintenant. Le parti est complétement à découvert, alors qu’il s’est placé contre la révolution qui a éclaté le 17 octobre 2019. Il est donc clair que ce n’est pas le timing adéquat pour le Hezb », ajoute l’expert. D’ailleurs la réponse du parti chiite vendredi a été très calculée pour minimiser les risques. Il voulait juste dire à Israël qu’il répond pour le principe, et pour ne pas changer les règles d’engagement. En revanche, Israël sait que le Liban devient le ventre mou du Hezbollah et non plus sa forteresse ».

Le Hezbollah est un acteur hybride, précise le général Elias Hanna. « Mais en fin de compte, il ne peut pas sortir de son environnement et de son enracinement libanais. Son action sous la coupe de l’Iran aura des limites qu’il ne pourra pas dépasser, et cette limite c’est le Liban », précise-t-il.

Confrontation régionale

En effet, les échanges de tirs à la frontière libano-israélienne coïncident avec un accroissement des tensions entre l’État hébreu et la République islamique, parrain du Hezbollah, dans la foulée d’une attaque meurtrière en mer d’Oman contre un pétrolier appartenant à un homme d’affaires israélien.

« Il faut placer ces événements au Sud-Liban dans le cadre de ce qui se passe dans la région, affirme ainsi Sami Nader, notamment la confrontation entre Israël et l’Iran », surtout après l’élection du nouveau président conservateur Ebrahim Raïssi. L’aile dure contrôle désormais tous les rouages de l’État et de sa politique, alors que les négociations sur le nucléaire à Vienne sont complètement bloquées.

« Dans ce contexte, il faut noter qu’il y a eu un changement de cap chez l’Administration Biden ». A un certain moment, on a cru que les Américains vont revenir à la politique d’Obama de dissociation entre le nucléaire et les autres questions régionales. Mais il s’est avéré qu’ils ont poursuivi là où Donald Trump les a laissés : « ils veulent un deal sur les trois volets, nucléaires, stratégique et balistique », dit l’expert, tout en ajoutant : « L’heure est actuellement à l’escalade dans la région, avec plusieurs brasiers allumés, comme les attaques sur les bases militaires américaines en Irak, les agressions contres des navires dans le Golfe. L’embrasement du Sud-Liban entre dans ce contexte, l’Iran usant de tous les moyens pour faire pression sur tous les acteurs régionaux et internationaux. C’est donc une des cartes dont disposent les Iraniens face aux États-Unis et Israël ».


Gaza: Le roi de Bahreïn et le président égyptien insistent sur la nécessité d’une réponse arabe unifiée

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  • Abdel Fattah al-Sissi et le roi Hamad s’engagent à agir conjointement pour faire face à l’escalade de la crise à Gaza
  • Le roi Hamad et le président égyptien ont également évoqué l’ordre du jour du 33e Sommet arabe, que Bahreïn accueillera le mois prochain

LE CAIRE: Le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, et le roi Hamed de Bahreïn se sont engagés à agir conjointement pour faire face à l’escalade de la crise à Gaza et à ses répercussions sur la région.

M. Al-Sissi a reçu le roi Hamed au Caire mercredi. Les deux dirigeants ont fait part de leur espoir de voir les efforts de paix déboucher sur une nouvelle voie pour la région, ce qui permet d’envisager un avenir dans lequel leurs pays œuvreraient ensemble à la prospérité.

Le roi Hamed a précisé lors d’une conférence de presse conjointe que le président égyptien et lui avaient également évoqué l’ordre du jour du 33e Sommet arabe, que Bahreïn accueillera le mois prochain.

M. Al-Sissi et le roi de Bahreïn ont insisté sur la nécessité d’adopter des politiques claires pour promouvoir la paix, la sécurité et la stabilité au Moyen-Orient.

Le roi a déclaré avoir discuté avec le président Al-Sissi de plusieurs questions qui concernent le renforcement de la coopération arabe.

M. Al-Sissi et le roi Hamed ont discuté des efforts déployés par leurs pays et de «l’action arabe commune pour faire face à cette situation intenable, pour y mettre un terme et, surtout, pour empêcher qu’elle ne se reproduise».

«Ainsi, la communauté internationale doit s’unir pour imposer un cessez-le-feu immédiat, urgent et durable dans la bande de Gaza ainsi que mettre fin à toute tentative de déplacement forcé, de famine ou de punition collective du peuple palestinien frère. Elle doit s’unir pour garantir l’acheminement complet, durable et sans entraves de quantités suffisantes d’aide humanitaire et de secours dont le secteur a désespérément besoin», a ajouté le dirigeant égyptien.

«En parallèle, les parties doivent s’engager immédiatement et sérieusement sur des voies propices à une solution politique juste et durable à la cause palestinienne, fondée sur la solution à deux États ainsi que sur la création d’un État palestinien indépendant et souverain, selon les frontières du 4 juin 1967, ayant Jérusalem-Est pour capitale. Cet État palestinien devrait jouir à la fois de la reconnaissance internationale et être membre à part entière des Nations unies.»

M. Al-Sissi a indiqué que l’Égypte avait mis en garde à plusieurs reprises contre les conséquences désastreuses qui pourraient résulter de la guerre en cours en Palestine occupée. Ce conflit entraîne des appels à l’escalade et des représailles, créant un cycle de violence qui détruit toute chance de paix et de stabilité dans la région.

«En effet, ces derniers mois, la région est en proie aux conséquences dévastatrices de la guerre en cours, dont les flammes se sont propagées à l’extérieur. Cette situation a engendré l’état actuel de tension et de péril dans la région, qui menace gravement la sécurité, la stabilité et l’avenir de notre peuple», a-t-il poursuivi.

Selon le président égyptien, les dirigeants «ont longuement discuté de ces développements régionaux troublants et des solutions que nous envisageons, animés par notre conviction commune de l’importance cruciale de préserver la sécurité et la stabilité de la région et de ses peuples face aux multiples menaces, et de ne pas abandonner leur sort à la volonté des bellicistes. Cet engagement est fondé sur le principe consistant à accorder la priorité à la sécurité arabe commune, que nous considérons comme indivisible».

M. Al-Sissi a précisé que les deux dirigeants étaient convenus de la nécessité de déployer et d’encourager des efforts immédiats et intensifs en vue d’une désescalade dans les territoires palestiniens et au niveau régional.

«Nous avons par ailleurs discuté de l’importance d’exhorter les parties à adopter une approche rationnelle, à opter pour des solutions politiques et à abandonner les solutions militaires et les notions de domination et d’hégémonie», a déclaré le président.

«Nous sommes aujourd’hui réunis à une heure extrêmement grave en raison de la guerre sanglante menée par Israël contre la bande de Gaza et de la perte inexorable de milliers de civils innocents et sans défense dans des scènes d’une horreur indicible.»

«Ils n’ont rien fait d’autre que de vivre sur leur terre, de rester attachés à leur maison et à leur patrie, et d’aspirer à une vie empreinte de dignité, de fierté et d’humanité.»

«Il s’agit sans aucun doute d’un moment décisif qui restera dans les annales, étant donné le recours scandaleux à la force militaire pour terroriser, affamer et infliger des souffrances inimaginables à des civils innocents, collectivement et sans distinction, pour les terrifier et les pousser à abandonner leurs maisons, et pour les déplacer de force de leur terre.»

«Tout cela se produit alors que la communauté internationale reste les bras croisés, incapable de faire respecter la justice et le droit international, le droit humanitaire international ou même les principes fondamentaux de l’humanité, ou ne voulant pas», a conclu le président égyptien.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Gaza: La Ligue arabe exprime ses craintes à l'ONU

Le général de division Patrick Gauchat s’entretient avec Ahmed Aboul Gheit au Caire. (X/@arableague_gs)
Le général de division Patrick Gauchat s’entretient avec Ahmed Aboul Gheit au Caire. (X/@arableague_gs)
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  • Le secrétaire général de la Ligue arabe, Ahmed Aboul Gheit, s’est entretenu avec le général de division de l’ONU, Patrick Gauchat
  • Le chef de l’Onust a informé le secrétaire général des conflits qui se déroulent dans plusieurs zones surveillées par l’ONU

LE CAIRE: Le secrétaire général de la Ligue arabe, Ahmed Aboul Gheit, a déclaré à un haut responsable de l’ONU qu’il redoutait que le conflit à Gaza ne devienne incontrôlable et ne menace la sécurité régionale. 

Lors d’une réunion au Caire avec le général de division Patrick Gauchat, chef de mission et chef de l’Organisme des nations unies chargé de la surveillance de la trêve (Onust), M. Aboul Gheit a insisté sur la nécessité de mettre en œuvre la résolution sur le cessez-le-feu du Conseil de sécurité de l’ONU et de fournir une aide humanitaire urgente à la population affamée de Gaza.

Selon Gamal Roshdy, porte-parole du secrétaire général de la Ligue arabe, la réunion portait sur la situation régionale. M. Aboul Gheit a affirmé que la guerre menée par Israël contre Gaza violait le droit international et les principes humanitaires.

Le chef de l’Onust a informé le secrétaire général des conflits qui se déroulent dans plusieurs zones surveillées par l’ONU, notamment la Ligne bleue, qui délimite la trêve entre le Liban et Israël.

M. Aboul Gheit a estimé que les résolutions politiques demeuraient le moyen le plus efficace pour assurer la sécurité de toutes les parties.

Toutefois, la mise en œuvre de ces résolutions reste difficile dans la mesure où Israël poursuit ses objectifs en recourant à la force militaire et en prenant des civils pour cible, a-t-il ajouté.

D’après le site Internet de l’Onust, le Conseil de sécurité, dans la résolution No 50 (1948), appelait à une cessation des hostilités en Palestine le 29 mai 1948 et chargeait le médiateur de l’ONU en Palestine de surveiller l’application de la trêve avec l’aide d’un groupe d’observateurs militaires.

Le premier groupe d'observateurs militaires, créé en 1949 pour superviser la mise en œuvre des accords d’armistice israélo-arabes, est devenu par la suite l’Organisme des nations unies chargé de la surveillance de la trêve.

Les observateurs de l’Onust au Moyen-Orient ont pour rôle de surveiller le respect des cessez-le-feu et des accords d’armistice, d’empêcher que des incidents isolés ne dégénèrent et de prêter main-forte à d’autres opérations de maintien de la paix de l’ONU dans la région.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Nouveaux raids meurtriers israéliens à Gaza, sanctions occidentales contre l'Iran

Un Palestinien porte une cuisinière à gaz alors qu'il marche au milieu des débris d'un bâtiment détruit dans la ville de Nuseirat, dans le centre de la bande de Gaza, le 18 avril 2024. (AFP)
Un Palestinien porte une cuisinière à gaz alors qu'il marche au milieu des débris d'un bâtiment détruit dans la ville de Nuseirat, dans le centre de la bande de Gaza, le 18 avril 2024. (AFP)
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  • Ces dernières 24 heures, au moins 71 morts supplémentaires ont été recensés d'après le ministère de la Santé dans la bande de Gaza
  • Les déclarations alarmantes se sont multipliées après la menace d'Israël de répondre à la première attaque directe aux drones et missiles de l'Iran contre le territoire israélien

JÉRUSALEM: L'armée israélienne a mené jeudi de nouveaux raids à Gaza qui ont tué des dizaines de Palestiniens dont des femmes et des enfants, a indiqué le Hamas, le jour où des puissances occidentales ont renforcé les sanctions contre l'Iran après son attaque contre Israël.

Les déclarations alarmantes se sont multipliées après la menace d'Israël de répondre à la première attaque directe aux drones et missiles de l'Iran contre le territoire israélien lancée le 13 avril en riposte à une frappe meurtrière imputée à Israël contre son consulat à Damas.

A Téhéran, un haut responsable des Gardiens de la révolution, le général Ahmad Haghtalab, a mis en garde Israël contre l'éventualité d'une attaque contre ses sites nucléaires, en affirmant que son pays était prêt à lancer en représailles de "puissants missiles" sur les "installations nucléaires de l'ennemi".

"Nous sommes au bord d'une guerre au Moyen-orient qui provoquera des ondes de choc dans le reste du monde", a prévenu le chef de la diplomatie de l'Union européenne Josep Borrell.

Le Moyen-Orient est au bord du "précipice" d'un "conflit régional généralisé", a renchéri le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres devant le Conseil de sécurité.

Alors que la région est déjà ébranlée par la guerre entre Israël et le Hamas palestinien à Gaza, M. Guterres a dénoncé l'"enfer humanitaire" créé par les opérations militaires israéliennes dans le territoire palestinien qui ont fait en plus de six mois 33.970 morts, essentiellement des civils, selon le ministère de la Santé du Hamas.

La campagne israélienne de bombardements aériens intensifs suivie d'une offensive terrestre, a été déclenchée par une attaque menée le 7 octobre par des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza dans le sud d'Israël, qui a entraîné la mort de 1.170 personnes, en majorité des civils, selon un bilan de l'AFP établi à partir de données officielles israéliennes.

Plus de 250 personnes ont été enlevées durant l'attaque d'une ampleur sans précédent et 129 restent retenues à Gaza, dont 34 sont mortes d'après des responsables israéliens.

Avant l'aube, des frappes israéliennes ont ciblé la petite bande de terre assiégée par Israël depuis le 9 octobre et dont la majorité des 2,4 millions d'habitants sont menacés de famine selon l'ONU.

Ces dernières 24 heures, au moins 71 morts supplémentaires ont été recensés d'après le ministère de la Santé dans la bande de Gaza, où le mouvement islamiste palestinien Hamas a pris le pouvoir en 2007.

"C'est horrible"

"Nous avons récupéré les restes de 12 personnes", a déclaré Abdeljabbar al-Arja, après avoir fouillé les décombres d'une maison touchée par une frappe à Rafah (sud) où s'entassent 1,5 million de personnes en majorité déplacées par la guerre.

"Il y avait des femmes et des enfants, on a trouvé des bras et des pieds. Ils ont tous été mis en pièces. C'est horrible", s'est-il exclamé.

Des bombardements ont aussi touché le camp Al-Mawasi, près de Rafah, devenu un camp aux milliers de tentes abritant des déplacés.

"Notre terre a été rasée, notre maison détruite (...) Nos espoirs et rêves ont été pulvérisés", a dit Shams Majid, 22 ans, un déplacé.

L'armée israélienne a dit avoir frappé des dizaines de "cibles" dans la bande de Gaza, dont des "terroristes, des postes d'observation et des structures militaires".

"Mort, destruction" 

M. Guterres a évoqué devant le Conseil de sécurité deux millions de Palestiniens endurant "la mort, la destruction, le déni d'aide humanitaire vitale". "Et tout cela se produit avec des limites importantes imposées par les autorités israéliennes sur la livraison d'aide à la population de Gaza, qui fait face à la faim généralisée."

Il a réitéré son appel à un cessez-le-feu immédiat et à la libération de tous les otages.

Les pourparlers sur une trêve à Gaza associée à une libération d'otages piétinent depuis des mois, les protagonistes s'accusant de les bloquer.

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu dit vouloir poursuivre la guerre jusqu'à la destruction du Hamas qu'il considère comme une organisation terroriste, de même que les Etats-Unis et l'UE. Il est décidé à lancer une offensive terrestre contre Rafah, présentée comme le dernier grand bastion du Hamas.

M. Netanyahu a récusé "les allégations sur une famine à Gaza" et affirmé qu'Israël faisait "tout son possible sur la question humanitaire".

Réponse différente

Le Premier ministre israélien lutte sur un autre front, contre la République islamique d'Iran, son ennemi juré.

En attaquant Israël, l'Iran a dit avoir agir en "légitime défense" après l'attaque qui a détruit son consulat à Damas le 1er avril et coûté la vie à sept de ses militaires dont deux hauts gradés. Téhéran a accusé Israël qui n'a ni confirmé ni démenti.

Les dirigeants iraniens ont ensuite souligné qu'ils ne cherchaient "pas une expansion des tensions" avec Israël.

Israël a dit avoir intercepté avec ses alliés la quasi-totalité des quelque 350 drones et missiles iraniens, et affirmé que l'attaque iranienne ne resterait pas "impunie".

D'après le diffuseur public israélien Kan, M. Netanyahu a décidé de ne pas mettre en oeuvre des plans de frappes de représailles rapides après avoir discuté avec le président américain Joe Biden, qui cherche à éviter une nouvelle confrontation.

"Il y aura bien une réponse mais elle sera différente de ce qui était initialement prévu", a indiqué un haut responsable à la chaîne.

Entretemps, les Etats-Unis, alliés indéfectibles d'Israël, et le Royaume-Uni ont annoncé avoir renforcé leurs sanctions contre l'Iran, ciblant "le programme iranien de drones, l'industrie sidérurgique et les constructeurs automobiles". L'UE a aussi annoncé de nouvelles sanctions contre Téhéran.

"Nous faisons en sorte que l'Iran rende des comptes", a dit Joe Biden.