Joe Biden: le monde bien moins sûr!

Le président américain Joe Biden s'exprime sur les droits des travailleurs et les syndicats dans la salle Est de la Maison Blanche le 8 septembre 2021 à Washington, DC. KEVIN DIETSCH / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / GETTY IMAGES VIA AFP
Le président américain Joe Biden s'exprime sur les droits des travailleurs et les syndicats dans la salle Est de la Maison Blanche le 8 septembre 2021 à Washington, DC. KEVIN DIETSCH / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / GETTY IMAGES VIA AFP
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Publié le Jeudi 09 septembre 2021

Joe Biden: le monde bien moins sûr!

Joe Biden: le monde bien moins sûr!
  • M. Biden a sciemment omis d’inclure à l’ordre du jour des négociations le sujet brûlant des ingérences iraniennes qui déstabilisent la région
  • Les Iraniens continuent sans relâche leur marche vers le développement de l’arme nucléaire

Il aura fallu que le président Joe Biden précipite le retrait des forces américaines de l’Afghanistan, que le pays tout entier tombe, en moins de dix jours, aux mains des talibans et une évacuation catastrophique et chaotique pour que les alliés des États-Unis se rendent compte que leur actuelle administration avait manqué à ses engagements vis-à-vis de ses alliés, mêmes les plus sûrs.

En outre, les Américains ont conservé une attitude dangereuse dans leur approche des tensions régionales à travers le monde. L’évacuation calamiteuse de la capitale afghane a sonné l’alarme dans plusieurs capitales moyen-orientales et même européennes, surtout lorsque fut constatée la mauvaise gestion du président Biden durant l’opération de Kaboul. Les conférences de presse qu’il a données ont révélé une forte tendance isolationniste.

Si l’administration américaine actuelle s’était contentée d’adopter une politique isolationniste qui aurait amené les États-Unis à se replier sur eux-mêmes, les dégâts auraient été faciles à contenir.

Mais l’administration est allée beaucoup plus loin en tournant le dos à ses alliés, comme cela a été le cas en Afghanistan, où des dizaines de milliers de ressortissants afghans qui avaient coopéré avec eux et avec les Occidentaux pendant vingt ans furent abandonnés par M. Biden à un sort probablement tragique, dans un pays tombé sous la coupe des talibans.

Les alliés occidentaux des forces de l’Otan en Afghanistan ont été eux aussi pris de cours par cette décision qui consistait à précipiter le retrait sans la moindre consultation préalable. Ils se sont sentis trahis.

Les mauvaises expériences subies sous l’administration Biden ne se limitent pas au chapitre afghan. Dès les premiers jours de son investiture, les relations du président américain avec l’un des principaux alliés des États-Unis au Moyen-Orient ont pris un virage surprenant.

En effet, l’administration américaine a brusquement annoncé qu’elle suspendait momentanément les livraisons d’armes offensives vers l’Arabie saoudite dans la perspective d’un réexamen complet des relations bilatérales. En agissant ainsi, l’administration a mis un terme à ses opérations de soutien logistique aux forces de la coalition arabe qui défendaient le gouvernement légitime au Yémen et elle a gelé plusieurs contrats d’armement signés avec l’administration de Donald Trump.

Le président Biden a avancé que ce réexamen avait pour objectif de mettre fin à la guerre du Yémen, qui, selon lui, avait trop duré, et qu’il était temps d’instaurer un cessez-le feu durable tout en initiant des négociations de paix auxquelles seraient associées les milices houthies. Cette démarche témoignait d’une approche plutôt froide vis-à-vis de l’Arabie saoudite, allié numéro un des États-Unis au Moyen-Orient.

À leur grande surprise, les Américains ont découvert que les milices houthies avaient répondu par une escalade militaire à l’initiative saoudienne qui proposait un cessez-le feu immédiat et le démarrage d’un processus de paix à travers des négociations directes. Les milices houthies ont lancé une grande offensive militaire pour s’emparer de la grande ville de Marib. En Arabie saoudite, les tirs de missiles balistiques et de drones kamikazes contre des cibles civiles se sont intensifiés. L’administration Biden s’est contentée, pendant plus de sept mois, de réagir par des communiqués qui condamnaient les attaques des milices houthies. La guerre commanditée par Téhéran se poursuit toujours au Yémen.

Un autre sujet illustre l’inconséquence de l’administration Biden vis-à-vis des alliés des États-Unis et de leurs préoccupations par rapport aux garanties américaines de leur sécurité. La gestion du dossier des négociations de Vienne sur le nucléaire iranien en est un exemple frappant.

Tout d’abord, M. Biden a repris les négociations à Vienne avec le groupe «4+1» sans aucune coordination avec les allies régionaux, qui sont pourtant les premiers concernés par le danger qu’incarne le nucléaire iranien et par la politique d’ingérence agressive menée par Téhéran dans les différentes affaires avec les pays arabes voisins. M. Biden a sciemment omis d’inclure à l’ordre du jour des négociations le sujet brûlant des ingérences iraniennes qui déstabilisent la région.

À Vienne, dès les premiers rounds, il a même offert des concessions aux Iraniens. En contrepartie du respect par les Iraniens des engagement stipulés par l’accord de 2015, il est allé jusqu’à proposer de lever totalement l’embargo sur le secteur pétrolier et toutes les sanctions en rapport avec programme nucléaire. Cela a permis de libérer des dizaines de milliards de dollars d’avoirs iraniens gelés dans les banques étrangères.

Téhéran répliquera en faisant traîner les pourparlers à Vienne jusqu’à aujourd’hui, tout en multipliant les violations de l’accord nucléaire de 2015, précisément au niveau de l’enrichissement d’uranium, qui atteint aujourd’hui un niveau tout à fait inquiétant. L’administration Biden ne réagira pas. Les Iraniens continuent sans relâche leur marche vers le développement de l’arme nucléaire. Les actions de déstabilisation régionale se multiplient sous le regard indifférent d’une administration qui perd beaucoup de son autorité à l’échelle internationale.

Huit mois après son élection, le président Joe Biden offre aux pays alliés l’image d’un «shérif» à la retraite. Et, depuis, le monde est beaucoup moins sûr!

 

Ali Hamade est journaliste éditorialiste au journal Annahar, au Liban. 

Twitter: @AliNahar

NDLR: Les opinions exprimées dans cette rubrique par leurs auteurs sont personnelles, et ne reflètent pas nécessairement le point de vue d’Arab News.