L'Europe au défi de la flambée des prix de l'énergie

Les prix de l'énergie montent aussi aux États-Unis. Le pays, producteur de gaz de schiste, est un peu plus protégé que l'Europe. (AFP)
Les prix de l'énergie montent aussi aux États-Unis. Le pays, producteur de gaz de schiste, est un peu plus protégé que l'Europe. (AFP)
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Publié le Jeudi 23 septembre 2021

L'Europe au défi de la flambée des prix de l'énergie

  • Les importations de gaz naturel liquéfié (GNL) ont aussi reculé car l'Asie est également très demandeuse
  • L'AIE met pour sa part en garde sur l'effet «de baisses de production non planifiées et de grosses vagues de froid, surtout si elles interviennent tard dans l'hiver»

PARIS: À l'approche de l'hiver, les prix du gaz et de l'électricité flambent en Europe sous l'effet de plusieurs facteurs, obligeant les gouvernements à réagir.

Pourquoi le gaz est-il si cher ?

Les cours du gaz naturel faisant référence en Europe ont quadruplé en six mois. Pour le directeur exécutif de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), Fatih Birol, c'est "le résultat de multiples facteurs".


D'un côté, la reprise économique mondiale après la chute de l'activité durant les confinements crée une forte demande ces derniers mois, renforcée par la météo avec une longue et froide saison de chauffe en Europe, où les stocks ne sont pas remplis.


Parallèlement, une série de problèmes pèse sur l'offre. Certains pays ont vu leur production baisser à cause de retards de maintenance dus à la pandémie ou d'infrastructures vieillissantes. 


Les importations de gaz naturel liquéfié (GNL) ont aussi reculé car l'Asie est également très demandeuse. Des travaux et un incendie en août sur des infrastructures en Russie ont limité les flux par gazoduc.


L'effet se fait sentir sur les particuliers mais aussi les entreprises : Fitch Ratings cite notamment le secteur des engrais et de l'agroalimentaire. Le groupe CF Fertilisers avait ainsi arrêté il y a quelques jours deux usines d'engrais au Royaume-Uni.

Et l'électricité ?

Le marché de l'électricité bat également des records : sur le marché à terme, le mégawattheure pour livraison en 2022 a dépassé les 109 euros en France, 112 euros en Grande-Bretagne ou 105 euros en Allemagne. 


Ces prix "ont presque doublé sur la plupart des principaux marchés de l'électricité et sont actuellement à leur plus haut historique", notent les analystes de Barclays, évoquant "deux raisons clefs".


"D'abord, les prix du carbone (permis de polluer NDLR) ont augmenté de près de 80% cette année", notent-ils. Ils ont été renchéris dans le cadre des efforts de l'UE pour atteindre son objectif de réduire ses émissions de CO2 de 55% d'ici 2030 (par rapport à 1990).


S'y ajoute une répercussion de la forte hausse des prix du gaz et du charbon, qui alimentent certaines centrales électriques.

La situation va-t-elle s'améliorer ?

"Les prix du gaz pourraient rester élevés jusqu'à la fin de la saison d'hiver, compte tenu des faibles niveaux de gaz naturel dans les installations de stockage européennes", estime Fitch Ratings.


L'AIE met pour sa part en garde sur l'effet "de baisses de production non planifiées et de grosses vagues de froid, surtout si elles interviennent tard dans l'hiver".


De multiples facteurs jouent mais l'AIE semble compter sur la Russie, soupçonnée d'utiliser ses ressources naturelles pour servir ses intérêts géopolitiques, pour ouvrir le robinet de gaz et donner de l'air au marché. Le premier fournisseur de l'UE "pourrait faire plus pour augmenter la disponibilité du gaz en Europe", a déclaré l'agence mardi.


La ministre américaine de l'Énergie Jennifer Granholm a aussi tenté de faire pression sur la Russie, sans la citer. "Nous et nos partenaires devons être prêts à continuer à nous interposer lorsqu'il y a des acteurs qui peut-être manipulent l'offre afin d'en bénéficier", a-t-elle dit.

Que font les gouvernements ?

Plusieurs pays tentent d'atténuer l'effet de la hausse des prix pour les consommateurs.

L'Espagne a notamment décidé une baisse temporaire de l'impôt spécial sur l'électricité payé par les entreprises et les particuliers.

La France a annoncé un chèque énergie exceptionnel de 100 euros pour près de 6 millions de ménages modestes.

Le Portugal a pris des mesures pour les tarifs de l'électricité, l'Italie y réfléchit.

Aucune mesure coordonnée n'a pour l'instant été prise mais la Commission européenne a dit discuter avec les États membres pour trouver des "outils" destinés à enrayer la hausse des cours.

Côté entreprises, le Royaume-Uni a dépensé quelques millions de livres pour aider CF Fertilisers à redémarrer sa production.

Et ailleurs ?

Les prix de l'énergie montent aussi aux États-Unis. Le pays, producteur de gaz de schiste, est un peu plus protégé que l'Europe. Certains secteurs s'inquiètent toutefois : une association d'entreprises, Industrial Energy Consumers of America, a ainsi demandé au gouvernement de limiter les exportations de GNL américain pour assurer un remplissage des stocks du pays.


En Asie, la situation est également moins tendue mais "la demande pour le GNL devrait rester forte avant les jeux olympiques d'hiver de Pékin" en février 2022, prévoit Barclays. Une demande qui devrait par ricochet continuer à soutenir les prix payés en Europe.


IA: Google investit 5 milliards de livres au Royaume-Uni avant la visite de Trump

Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
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  • Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat
  • Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres

LONDRES: Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays.

Cette somme financera "les dépenses d'investissement, de recherche et développement" de l'entreprise dans le pays, ce qui englobe Google DeepMind (le laboratoire d'IA du géant californien), a indiqué le groupe dans un communiqué.

Google ouvre mardi un centre de données à Waltham Cross, au nord de Londres, dans lequel il avait déjà annoncé l'an dernier injecter un milliard de dollars (850 millions d'euros). La somme annoncée mardi viendra aussi compléter ce financement, a précisé un porte-parole de l'entreprise à l'AFP.

Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat.

Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres.

Selon un responsable américain, qui s'exprimait auprès de journalistes, dont l'AFP, en amont de la visite, les annonces se porteront à "plus de dix milliards, peut-être des dizaines de milliards" de dollars.

Le gouvernement britannique avait déjà dévoilé dimanche plus d'un milliard de livres d'investissements de banques américaines dans le pays, là aussi en amont de la visite d'Etat du président Trump.

Et l'exécutif britannique a annoncé lundi que Londres et Washington allaient signer un accord pour accélérer les délais d'autorisation et de validation des projets nucléaires entre les deux pays.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités.

Le partenariat avec Washington, baptisé "Atlantic Partnership for Advanced Nuclear Energy", doit lui aussi être formellement signé lors de la visite d'État de Donald Trump.

 


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".


La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, alerte le Secours populaire

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
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  • "La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire
  • "La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg

PARIS: La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, touchant tous les aspects de la vie des plus fragiles, alerte jeudi le Secours Populaire, qui publie un baromètre témoignant de cette situation jugée préoccupante.

"La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire.

L'association publie un baromètre qui indique qu'un tiers des Français (31%) rencontrent des difficultés financières pour se procurer une alimentation saine permettant de faire trois repas par jour. De même 39% ont du mal à payer leurs dépenses d'électricité et 49% à partir en vacances au moins une fois par an, selon ce sondage réalisé par l'Institut Ipsos, auprès d'un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population nationale âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

"La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg.

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier.

Malgré un "léger mieux" constaté sur certains indicateurs lié au "ralentissement de l'inflation", ce baromètre révèle "une situation sociale toujours très préoccupante", selon le Secours populaire.

En début de semaine, la déléguée interministérielle à la prévention et la lutte contre la pauvreté, Anne Rubinstein, a évoqué des "difficultés" rencontrées par l'Etat pour résorber un taux de pauvreté qui a atteint un niveau record en 2023 en France métropolitaine.

Face à cette situation, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) a appelé mardi à une "mobilisation collective" pour "débloquer la lutte contre la précarité".

Au niveau européen, 28% de la population déclare se trouver en situation précaire, également selon ce baromètre du Secours Populaire, qui s'appuie aussi sur des échantillons de 1.000 personnes représentatifs de neuf autres pays (Allemagne, Grèce, Italie, Pologne, Royaume-Uni, Moldavie, Portugal, Roumanie, Serbie).

La part des personnes se considérant comme précaires demeure à un niveau "très alarmant" en Grèce (46%) et en Moldavie (45%), pointe le baromètre.

En 2024, le Secours populaire a soutenu 3,7 millions de personnes en France. L'association fournit notamment de l'aide alimentaire et organise des activités pour différents publics pour rompre l'isolement.