«Demain, ce sera terrible»: au procès du 13-Novembre, la «douleur» des familles endeuillées

Ce croquis réalisé le 8 septembre 2021, montre une vue générale lors de la première journée du procès du 13 novembre 2015. (Photo, AFP)
Ce croquis réalisé le 8 septembre 2021, montre une vue générale lors de la première journée du procès du 13 novembre 2015. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 06 octobre 2021

«Demain, ce sera terrible»: au procès du 13-Novembre, la «douleur» des familles endeuillées

  • «En l'espace de quelques secondes, il a perdu sa mère, son beau-père et sa marraine», la «meilleure» amie de sa mère
  • «La mort de Victor a saccagé nos vies. Du jour au lendemain, la vie disparaît», poursuit-elle, en lisant à toute vitesse le qu'elle a écrit, son fils aîné silencieux à côté d'elle.

PARIS : "Je veux qu'il dorme, demain ce sera terrible": au procès des attentats du 13-Novembre, la cour a entendu mardi la "douleur" de l'annonce de la mort pour les familles de victimes, et les "années teintées de larmes et de colère" qui ont suivi.

Samedi 14 novembre 2015, 17H00, à l'Ecole militaire où sont accueillies les nombreuses familles qui cherchent leurs proches, au lendemain des attentats. "C'est une attente interminable qui commence", dit Marie-Amélie devant la cour d'assises spéciale de Paris.

Cheveux blonds, lunettes rouges rectangulaires, jupe noire droite, elle se tient à la barre à côté de son neveu, Pierre*, grand mince aux cheveux bouclés. En novembre 2015, il avait 13 ans. 

"Il ne parlera pas", prévient sa tante.

Elle se souvient de "l'angoisse qui monte" ce samedi-là quand personne n'a de nouvelles de Marie-Aimée - "tout le monde l'appelait Marie" - ni de son conjoint Thierry. 

La veille au soir, sa "petite soeur" - de 12 ans sa cadette - était à la Belle Equipe avec sa bande d'amis pour fêter l'anniversaire d'Hodda, co-gérante de ce bar du XIe arrondissement.

"Rester sans rien faire est insupportable" alors, regroupés dans le salon des parents, ils appellent les numéros verts qui ne répondent pas, tentent les commissariats du quartier - fermés -, l'hôpital, partagent des photos. "J'ai l'impression d'être dans un trou noir", lui dit depuis son fauteuil son père, 88 ans.

«Tsunami»

A l'Ecole militaire, la nouvelle tombe dans la soirée, vers 22H00. "Ma mère s'effondre. Le téléphone sonne, c'est" Pierre.

"Je lui ai dit que nous ne savions pas encore, que nous allions rentrer et reviendrions demain. Je me souviens d'avoir pensé +je veux qu'il dorme, demain, ce sera terrible+", raconte Marie-Amélie.

Près d'elle, Pierre* reste droit, les yeux comme accrochés aux feuilles de papier posées devant sa tante. Il retire parfois son masque pour se tamponner les yeux avec un mouchoir.

"En l'espace de quelques secondes, il a perdu sa mère, son beau-père et sa marraine", la "meilleure amie" de sa mère. 

Son père étant absent de sa vie, un "conseil de famille" décide que Pierre ira vivre chez ses grands-parents. L'après, souligne Marie-Amélie comme plusieurs proches, c'est aussi reconnaître les corps, préparer les enterrements, vider les appartements. Au milieu du "tsunami", il y a aussi le soutien des autres. "L'appartement de mes parents est resté rempli pendant des semaines".

Mais "les années qui ont suivi ont été teintées de silence, de colère, de larmes", dit-elle.

"Depuis six ans, je tente d'aider Pierre à se construire dans cette douleur, et aussi en dehors de cette douleur. Je ne voulais pas et je ne veux toujours pas que ça devienne son identité".

Son père à elle est "mort de chagrin" deux ans plus tard. Sa mère vit désormais mieux "dans sa mémoire ancienne, là les morts ne sont pas encore morts".

«La vie disparaît»

Victor Muñoz fêtait lui aussi l'anniversaire d'une amie à La Belle équipe, ce 13 novembre 2015. Il a été "assassiné à l'âge de 24 ans", tué d'une "rafale à la nuque" à la terrasse de ce bar, lâche sa mère, Dominique Kielemoes, carré gris et veste en jean. 

Elle raconte aussi la froideur de l'accueil à l'Institut médico-légal (IML) où elle a dû dire au revoir à son fils "sans pouvoir le toucher", dans un temps "limité à cinq minutes". "Qui peut imaginer la douleur de ces moments là ?". 

"La mort de Victor a saccagé nos vies. Du jour au lendemain, la vie disparaît", poursuit-elle, en lisant à toute vitesse le texte qu'elle a écrit, son fils aîné silencieux à côté d'elle.

"Il fallait rester debout pour lui malgré l'immensité de notre chagrin", déclare Dominique Kielemoes. 

Cette professeure d'histoire-géographie en lycée n'a "pas pu reprendre le travail" qu'elle aimait: "je sentais que je ne pouvais pas supporter d'être en face de jeunes gens pleins de vie", explique-t-elle.

Son fils était "beau, solaire, joyeux", il aimait "le foot et le Barça", était "épris de liberté". En témoignant au procès de ces attentats, il s'agit de parler de la "vie, des passions, des amours" de tous ces jeunes tués le 13-Novembre. "Ce n'étaient pas des cibles". 


Macron et Xi dans les Pyrénées pour une escapade «personnelle»

Le président chinois Xi Jinping est accueilli par le président français Emmanuel Macron et son épouse Brigitte à son arrivée à l'aéroport de Tarbes (Photo, AFP).
Le président chinois Xi Jinping est accueilli par le président français Emmanuel Macron et son épouse Brigitte à son arrivée à l'aéroport de Tarbes (Photo, AFP).
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  • L'étape pyrénéenne pourrait, dans l'esprit de la délégation française, favoriser «un échange franc et amical»
  • Ce coin de montagne est «directement lié à l'histoire très personnelle» d'Emmanuel Macron, explique son entourage

 

TARBES: Après les ors de l'Elysée, la neige des cimes: Emmanuel Macron et Xi Jinping sont arrivés mardi dans les Pyrénées au second jour de la visite d'Etat du président chinois, pour une escapade "personnelle" censée permettre un dialogue plus direct sur la guerre en Ukraine ou les désaccords commerciaux.

"Nos montagnes françaises", "j'espère, continueront de nous inspirer", a lancé lundi, lyrique, le président français en accueillant son homologue chinois à Paris pour la première fois depuis 2019. Il a dit s'attendre, dans les Hautes-Pyrénées, à des "discussions fructueuses et amicales".

L'avion du chef de l'Etat et celui du président chinois ont atterri à Tarbes en fin de matinée, ont constaté des journalistes de l'AFP.

Les deux dirigeants sont attendus au col du Tourmalet, mythique ascension du Tour de France, où la météo est encore hivernale même si la saison est finie à la station de ski de La Mongie.

Une centaine de personnes sont venues apporter leur soutien au dirigeant chinois et des dizaines de drapeaux rouges aux cinq étoiles jaunes coloraient les abords de la route menant au col, dans la commune de Sainte-Marie-de-Campan.

"C'est vraiment étrange de voir ça ici", sourit Jean-Michel Garem, un villageois retraité.

Emmanuel Macron et Xi Jinping, accompagnés de leurs épouses, déjeuneront dans le restaurant d'altitude d'Eric Abadie, éleveur et ami du président français. Une sorte de réponse à la cérémonie du thé qu'ils avaient partagée l'an dernier à Canton dans la résidence officielle où le père du président chinois avait vécu quand il était gouverneur de la province du Guangdong.

Un cadre qui contraste avec celui du palais présidentiel où, entre un accueil en grande pompe et un banquet fastueux, ils n'ont pas cherché à dissimuler les différends sur le commerce entre l'Europe et la Chine.

Emmanuel Macron a appelé à un "cadre de concurrence loyale", se félicitant à l'issue des discussions d'avoir préservé le cognac français de la menace de taxes douanières chinoises "provisoires".

Conviée pour afficher un front continental uni, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a prévenu que l'Union européenne prendrait "des décisions fermes" pour "protéger son économie", dénonçant l'afflux de véhicules électriques chinois massivement subventionnés.

"Le soi-disant +problème de la surcapacité de la Chine+ n'existe pas", leur a répondu sèchement Xi Jinping.

Sur l'Ukraine, il s'est voulu plus consensuel, réaffirmant sa volonté d'œuvrer à une solution politique.

Et il a apporté son soutien à une "trêve olympique" à l'occasion des Jeux de Paris cet été, poussée également par Emmanuel Macron. Selon une source diplomatique française, cette trêve pourrait servir, s'agissant de l'Ukraine, à enclencher un processus plus politique après plus de deux ans de conflit.

Mais Paris, qui insiste depuis un an pour que Pékin fasse pression sur la Russie pour contribuer à mettre fin à la guerre, se veut "lucide" sur les chances limitées d'une percée rapide. D'autant que le président chinois reste le principal allié de son homologue russe Vladimir Poutine, qu'il doit recevoir prochainement.

Séduction 

L'étape pyrénéenne pourrait, dans l'esprit de la délégation française, favoriser "un échange franc et amical" sur ces sujets épineux. L'idée est de casser l'imposant protocole qui accompagne le moindre déplacement du numéro un chinois.

Ce coin de montagne est "directement lié à l'histoire très personnelle" d'Emmanuel Macron, explique son entourage. Celui qui fête mardi les 7 ans de sa première élection, a passé de nombreuses vacances entre le bourg de Bagnères-de-Bigorre et La Mongie avec ses grands-parents auxquels il était très attaché.

"La diplomatie d'Emmanuel Macron a toujours misé, de manière peut-être excessive, sur le pouvoir de séduction", analyse Bertrand Badie, spécialiste des relations internationales à Sciences Po. "Il y a toujours eu chez lui l'idée que ses relations personnelles pouvaient renverser les structures", ajoute-t-il.

Le cadre intimiste du Tourmalet participe de cette volonté.

"Mais c'est mal connaître Xi Jinping qui n'est pas vraiment un grand sentimental", prévient le chercheur.

Le candidat des socialistes aux élections européennes de juin Raphaël Glucksmann a dénoncé la "tonalité amicale" de cette visite officielle. "L'homme qui déporte les Ouïghours, qui réprime les Hongkongais et les Tibétains n'est pas notre ami", a-t-il déclaré sur RTL.

Son adversaire de droite François-Xavier Bellamy (Les Républicains) a également pointé sur LCI les "ingérences" de Pékin et sa "stratégie agressive pour mettre à terre notre économie". La tête de liste macroniste Valérie Hayer a néanmoins défendu la volonté du chef de l'Etat de parler à son homologue chinois, souhaitant sur France 2 "un dialogue direct et franc sur l'ensemble des sujets".

Le politiste Bertrand Badie acquiesce: avec la Chine de Xi Jinping, "il y a un vrai travail à faire" car personne, jusqu'ici, "n'a trouvé la clé des relations euro-chinoises".


Affaire Meurice et remous à France Inter: appel à la grève dimanche à Radio France

Le 3 mai, dans la foulée de l'affaire Meurice, les sociétés des journalistes (SDJ) et des producteurs (SDPI) de France Inter avaient dénoncé "un virage éditorial" de la première radio de France  (Photo, AFP).
Le 3 mai, dans la foulée de l'affaire Meurice, les sociétés des journalistes (SDJ) et des producteurs (SDPI) de France Inter avaient dénoncé "un virage éditorial" de la première radio de France (Photo, AFP).
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  • L'humoriste en a été suspendu le 2 mai dans l'attente d'une éventuelle sanction pouvant aller jusqu'au licenciement, quatre jours après avoir réitéré ses propos polémiques sur Benjamin Netanyahu
  • Il avait comparé le Premier ministre israélien à une «sorte de nazi mais sans prépuce»

 

PARIS: Les syndicats de Radio France ont appelé à faire grève dimanche pour protester contre "la répression de l'insolence et de l'humour" après la suspension de Guillaume Meurice, ainsi que contre "des menaces" qui pèsent sur certaines émissions de France Inter.

Six syndicats (CGT, CFDT, FO, SNJ, SUD, Unsa) ont déposé lundi soir un préavis de grève pour dimanche de 00h00 à minuit. C'est le jour où est diffusée l'émission hebdomadaire de Charline Vanhoenacker, à laquelle participe d'ordinaire Guillaume Meurice.

L'humoriste en a été suspendu le 2 mai dans l'attente d'une éventuelle sanction pouvant aller jusqu'au licenciement, quatre jours après avoir réitéré ses propos polémiques sur Benjamin Netanyahu tenus fin octobre.

Il avait comparé le Premier ministre israélien à une "sorte de nazi mais sans prépuce", ce qui lui avait valu des accusations d'antisémitisme et une plainte, récemment classée sans suite.

Dans leur préavis de grève, les syndicats demandent à la direction du groupe public "la fin de la répression de l'insolence et de l'humour" et "la réaffirmation sans limites de la liberté d'expression" sur ses antennes.

Menaces 

Plus largement, les syndicats s'inquiètent des "menaces" qui pèsent selon eux "sur des émissions populaires et singulières", en particulier sur France Inter.

Le 3 mai, dans la foulée de l'affaire Meurice, les sociétés des journalistes (SDJ) et des producteurs (SDPI) de France Inter avaient dénoncé "un virage éditorial" de la première radio de France. Elles assuraient notamment avoir appris le remplacement prochain de l'émission sur l'environnement "La terre au carré".

Les syndicats accusent la direction de Radio France de mener "une politique de casse sociale sur les antennes" alors qu'un "projet de réforme de l'audiovisuel public va être discuté prochainement à l'Assemblée nationale".

Projet de la ministre de la Culture Rachida Dati, la mise en place d'une gouvernance unique pour l'audiovisuel public (dont France Télévisions et Radio France) sera examinée les 23 et 24 mai dans l'hémicycle.

Les syndicats fustigent enfin "une campagne de dénigrement et de calomnies orchestrée par des partis politiques, organisations ou personnalités franchement hostiles au service public de la radio". Ce dernier est fréquemment accusé par des personnalités de droite de pencher nettement à gauche.


L'entrée des locaux historiques de Sciences Po Paris à nouveau bloquée

Des gendarmes français évacuent des manifestants qui organisent un sit-in pro-Gaza dans le hall d'entrée de l'Institut d'études politiques (Sciences Po Paris) à Paris, le 3 mai 2024. (Photo Miguel Medina AFP)
Des gendarmes français évacuent des manifestants qui organisent un sit-in pro-Gaza dans le hall d'entrée de l'Institut d'études politiques (Sciences Po Paris) à Paris, le 3 mai 2024. (Photo Miguel Medina AFP)
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  • Une vingtaine d'étudiants sont présents dans la rue, certains arborant des masques sanitaires ou des keffiehs dissimulant une partie de leur visage
  • Les cours sont terminés depuis vendredi au sein de cet établissement d'enseignement supérieur souvent assimilé à une pouponnière des élites

PARIS : L'entrée des locaux historiques de Sciences Po Paris est bloquée mardi matin par des étudiants mobilisés en faveur des Palestiniens, a constaté une journaliste de l'AFP.

Des poubelles, mobilier urbain, vélos en libre service, obstruaient l'entrée du bâtiment situé au 27 rue Saint-Guillaume, un quartier huppé de la capitale.

Une vingtaine d'étudiants sont présents dans la rue, certains arborant des masques sanitaires ou des keffiehs dissimulant une partie de leur visage. Des policiers sont positionnés à proximité.

«On se mobilise avec ces moyens non conventionnels car on pense qu’on n’a plus d’autres choix, on a essayé les mails, les discussions. On est en période d’examen, on est tous fatigués», a déclaré à l'AFP une étudiante en première année qui n'a pas souhaité dévoiler son identité.

Cette jeune femme justifie le blocage par les mêmes revendications qui agitent les campus de Sciences Po Paris depuis plusieurs semaines, notamment une enquête sur les partenariats avec des universités israéliennes et «l'arrêt de la répression des étudiants mobilisés et des sanctions».

Elle affirme que 10 étudiants poursuivent une grève de la faim entamée vendredi après une évacuation de ces mêmes locaux par les forces de l'ordre.

Contactée la direction de Sciences-Po n'a pas répondu à ce stade.

Les cours sont terminés depuis vendredi au sein de cet établissement d'enseignement supérieur souvent assimilé à une pouponnière des élites.

Les étudiants en examens peuvent rentrer par une porte annexe, a constaté une journaliste de l'AFP.