Les discours de haine en ligne « peu contrôlés dans le monde arabe »

Très peu de mesures ont été adoptées dans le monde arabe pour rendre Facebook et d'autres réseaux sociaux responsables de la diffusion d'idées extrémistes, d'opinions sectaires et de discours de haine. (AFP/File Photo)
Très peu de mesures ont été adoptées dans le monde arabe pour rendre Facebook et d'autres réseaux sociaux responsables de la diffusion d'idées extrémistes, d'opinions sectaires et de discours de haine. (AFP/File Photo)
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Publié le Samedi 09 octobre 2021

Les discours de haine en ligne « peu contrôlés dans le monde arabe »

  • Le témoignage de la lanceuse d'alerte, Frances Haugen, atteste d'une approche peu rigoureuse en matière de lutte contre l'extrémisme en ligne
  • Facebook soutient que sa technologie repère de manière proactive les discours de haine dans plus de 40 langues, dont l'arabe

LONDRES : Pour une plateforme qui compte plus de 2,91 milliards d’ « amis », Facebook s'est fait de nombreux ennemis ces derniers temps. Cette animosité s'est faufilée même parmi ses employés.

En effet, Frances Haugen, ancienne employée de Facebook et lanceuse d'alerte, vient de témoigner cette semaine devant les membres du Sénat. Elle a dressé un tableau cinglant de la manière dont le plus grand réseau social du monde fait primer les gains sur la sécurité publique.

La plate-forme a pourtant mené des recherches internes approfondies, qui ont été divulguées aux médias américains. Ils font apparaître les préjudices que Facebook et ses produits infligent aux communautés, aux institutions démocratiques et aux enfants dont l'image est fragile.

En revanche, peu de mesures ont été prises dans le monde arabe, par exemple, pour amener Facebook et d'autres plates-formes de réseaux sociaux à assumer la responsabilité des idées extrémistes, des opinions sectaires et des discours haineux qui continuent de se frayer un chemin jusqu'aux millions d'utilisateurs dans la région, même si ces plates-formes sont censées surveiller leur contenu.

« Une petite recherche en arabe a suffi pour que j'identifie 38 groupes ou pages existant actuellement sur Facebook avec plus de 100 adeptes ou « likes » qui font incontestablement référence dans leur titre aux Protocoles des Sages de Sion. Il s'agit de l'exemple le plus infâme de désinformation et de discours de haine anti-juifs de l'histoire », explique à Arab News David Weinberg, directeur du bureau de Washington pour les affaires internationales de l'Anti-Defamation League ("Ligue anti-diffamation").

« On peut dire que Facebook aurait pu aisément partir de telles pages s'il était intéressé, même de façon superficielle, par la détection proactive des discours de haine horrifiants qui violent de façon flagrante ses conditions d'utilisation et peuvent engendrer des violences létales ».

Certes, Facebook a supprimé des millions de publications comportant des discours de haine sur ses plateformes en 2020. Cependant, un long chemin reste à parcourir, notamment pour les langues autres que l'anglais.

« Facebook n'a pas répondu au vrai problème. Il s'est plutôt livré à des manœuvres promotionnelles. Les propos de Mme Haugen ont démasqué tous les méfaits de Facebook », confie à Arab News Mohammad Najem, directeur exécutif de SMEX, une organisation de Beyrouth spécialisée dans la défense des droits numériques qui se concentre sur la liberté d'expression, la confidentialité et la sécurité en ligne.

« Malheureusement, ces menaces sont de plus en plus nombreuses et les entreprises de technologie leur consacrent très peu d'efforts».

Frances Haugen, ancienne employée de Facebook et lanceuse d'alerte, lors de son témoignage devant la Commission du commerce, des sciences et des transports du Sénat dans une séance intitulée « Protéger les enfants sur le web : Témoignage d'une lanceuse d'alerte de Facebook » au Capitole, le 05 octobre 2021 à Washington, DC. (AFP)
Frances Haugen, ancienne employée de Facebook et lanceuse d'alerte, lors de son témoignage devant la Commission du commerce, des sciences et des transports du Sénat dans une séance intitulée « Protéger les enfants sur le web : Témoignage d'une lanceuse d'alerte de Facebook » au Capitole, le 05 octobre 2021 à Washington, DC. (AFP)

Réagissant à ces allégations, un porte-parole de Facebook a déclaré vendredi à Arab News que « les discours de haine ne sont pas tolérés sur nos plateformes, ce qui nous amène à continuer à investir massivement dans les personnes, les systèmes et la technologie pour repérer et supprimer ce contenu dans les plus brefs délais ».

« Facebook emploie désormais 40 000 personnes chargées de la sûreté et de la sécurité et a investi 13 milliards de dollars à cet effet depuis 2016. La technologie que nous employons permet d'identifier de manière anticipée les discours de haine et ce, dans plus de 40 langues dans le monde, dont l'arabe ».

« Nous sommes conscients qu'il nous reste du travail à faire, mais nous continuons à améliorer considérablement notre système de lutte contre les contenus néfastes ».

« Notre dernier rapport sur le respect des normes communautaires (Community Standards Enforcement Report) montre que Facebook repère et supprime dorénavant les discours haineux sur ses plateformes comme il ne l'a jamais fait auparavant : la prévalence des discours haineux –  soit la quantité de ce type de contenu que les gens observent réellement –  sur Facebook représente désormais 0,05 % du contenu visionné et a baissé de près de 50 % durant les trois derniers trimestres ».

Facebook a certes été soumis à une surveillance particulière ces derniers temps, mais il n'est pas le seul coupable. La modération jugée insuffisante sur la plate-forme de microblogging qu'est Twitter suscite, elle aussi, de vives inquiétudes.

La politique de Twitter en matière de discours haineux a été récemment mise à jour et stipule que les utilisateurs ne doivent pas « promouvoir la violence à l'encontre d'autres personnes, les attaquer ou les menacer directement en raison de leur race, de leur origine ethnique ou nationale ». Pourtant les comptes qui se livrent à ces pratiques restent actifs sur la plate-forme.

Les grandes plate-formes de médias sociaux, parmi lesquelles Facebook, Instagram et WhatsApp, ont subi une panne importante le 4 octobre 2021, comme l'ont montré les sites de suivi, ce qui a eu un impact sur plusieurs dizaines de millions d'utilisateurs potentiels.  (AFP)
Les grandes plate-formes de médias sociaux, parmi lesquelles Facebook, Instagram et WhatsApp, ont subi une panne importante le 4 octobre 2021, comme l'ont montré les sites de suivi, ce qui a eu un impact sur plusieurs dizaines de millions d'utilisateurs potentiels.  (AFP)

« Prenons l'exemple du chef suprême de l'Iran : il est autorisé à se servir de Twitter en recourant aux nombreux comptes qu’il possède sur cette plate-forme y compris des comptes réservés à la propagande –ceux-ci sont rédigés en persan, en arabe et en anglais, mais aussi en ourdou, en espagnol, en français, en allemand, en italien, en russe et en hindi –», explique M. Weinberg.

«Twitter compte également parmi ses utilisateurs de grands médias appartenant à des groupes extrémistes violents soutenus par l'Iran, tels que le Hamas, le Hezbollah et le Jihad islamique palestinien. Même Facebook n'a pas fait preuve d'une telle indulgence ».

Ainsi, le religieux égyptien exilé Youssouf Al-Qaradawi et Qaïs Al-Khazali, désigné comme terroriste, restent actifs et bien en vue (le premier compte 3,2 millions d'adeptes) ; tous deux ont fait l'objet de la série Deep Dive d'Arab News.

Dans l'un de ses messages de haine, Al-Qaradawi a écrit : « À travers l'histoire, Dieu les a assujettis (les Juifs) à des gens qui les ont punis pour leur corruption. La dernière punition leur a été infligée par Hitler. C'était une punition de Dieu. La prochaine fois, si Dieu le veut, ce sont les fidèles croyants qui les puniront».

En outre, les autres réseaux sociaux semblent tous être confrontés au même problème : ne pas pouvoir détecter de manière cohérente les discours haineux dans des langues autres que l'anglais.

Comme l'a souligné Mme Haugen dans son témoignage devant le Sénat, Facebook possède « des documents qui illustrent l'importance de l'investissement dans les opérations lancées dans différentes langues, et ces documents montrent qu'il y a toujours eu un sous-investissement dans les langues autres que l'anglais ».

Mme Haugen a quitté Facebook en mai et a transmis à des journalistes et à d'autres personnes des documents internes, alléguant que Facebook privilégie systématiquement les gains au détriment de la sécurité. (Getty via AFP)
Mme Haugen a quitté Facebook en mai et a transmis à des journalistes et à d'autres personnes des documents internes, alléguant que Facebook privilégie systématiquement les gains au détriment de la sécurité. (Getty via AFP)

De ce fait, les groupes extrémistes ont pu exploiter librement cette approche peu rigoureuse à l'égard du niveau de modération dans d'autres langues.

Les spécialistes s'accordent à dire que les plates-formes de réseaux sociaux, dans leur quête de gains, pourraient avoir exacerbé la division sociale, suscité des attaques racistes et compromis la confiance et ce, à l'échelle mondiale. Tout cela a débouché sur une confusion inédite entre réalité et fiction. « J'ai assisté à plusieurs reprises à des conflits opposant les profits de Facebook à notre sécurité », a expliqué Mme Haugen aux sénateurs lors du témoignage qu'elle a livré mardi.

« À chaque fois, Facebook favorisait ses profits dans la façon dont il réglait ces conflits. Cela a entraîné davantage de divisions, davantage de dommages, davantage de mensonges, davantage de menaces et davantage de conflits. Dans certains cas, ces discussions en ligne, menaçantes, ont provoqué une violence réelle qui a blessé, voire, tué des gens.

« Tant que Facebook opère dans l'ombre et soustrait ses recherches à l'examen du public, il n'a pas de comptes à rendre. Tant que les incitations ne changeront pas, Facebook ne changera pas. Si on le laisse faire, Facebook continuera à faire des choix qui nuisent au bien collectif. Notre bien à tous ».

Il ne faut pas sous-estimer l'influence des réseaux sociaux sur l'attitude et la confiance du public. Ainsi, en 2020, 79 % des jeunes arabes - chiffre impressionnant - obtenaient leurs informations des médias sociaux, contre 25 % en 2015, selon l'enquête Arab Youth Survey.

Des partisans du président américain Donald Trump, dont Jake Angeli, un partisan de QAnon connu pour son visage peint et son chapeau à cornes, manifestent au Capitole le 6 janvier 2021. (AFP/File Photo)
Des partisans du président américain Donald Trump, dont Jake Angeli, un partisan de QAnon connu pour son visage peint et son chapeau à cornes, manifestent au Capitole le 6 janvier 2021. (AFP/File Photo)

Facebook, ainsi que le reste de ses produits populaires, tels qu'Instagram et WhatsApp, qui ont été confrontés lundi à une panne qui a duré près de six heures à travers le monde, ont souvent été impliqués dans des épisodes de violence : de l'incitation à la haine ethnique contre les musulmans rohingyas en Birmanie à la prise d'assaut du Capitole à Washington par des partisans du président sortant Donald Trump en janvier dernier.

« Les recherches effectuées par Facebook montrent que la colère est plus facile à inspirer aux gens que toute autre émotion », a expliqué Mme Haugen dans une interview qu'elle a récemment accordée à l'émission « 60 Minutes » de CBS News.

Elle a également affirmé que « Facebook s’est rendu compte que, s’il modifie l'algorithme pour accroître sa sécurité, les utilisateurs passeront moins de temps à naviguer sur le site, ils cliqueront sur moins de publicités et généreront moins d'argent ».

Nombreux sont celles et ceux qui ont applaudi le courage de Mme Haugen qui s'est exprimée et a divulgué des milliers de documents internes qui mettent à nu les rouages de l'entreprise - des allégations jugées « tout bonnement infondées » par Mark Zuckerberg, le PDG de Facebook.

Au cours des derniers mois, ce réseau social a mené des batailles juridiques sur plusieurs fronts.  En Australie, le gouvernement a intenté une action en justice contre Facebook pour trancher sur son statut d'éditeur, ce qui le ferait porter la responsabilité du contenu posté par des tiers en cas de diffamation.

De son côté, la Russie tente de soumettre le géant des médias sociaux à une amende draconienne représentant 5 à 10 % de son chiffre d'affaires annuel, en raison d'un grand nombre de violations de la loi.

Certes, Facebook a supprimé des millions de publications comportant des discours de haine sur ses plateformes en 2020. Cependant, un long chemin reste à parcourir. (AFP/File Photo)
Certes, Facebook a supprimé des millions de publications comportant des discours de haine sur ses plateformes en 2020. Cependant, un long chemin reste à parcourir. (AFP/File Photo)

Au début de cette année, les pays du Groupe des Sept (G7), qui regroupe le Canada, la France, l'Allemagne, l'Italie, le Japon, le Royaume-Uni et les États-Unis, se sont accordés sur un taux d'imposition mondial d'au moins 15 % auquel Facebook et d'autres géants du secteur des technologies, dont Amazon, doivent se soumettre.

À la décharge de Facebook, il faut reconnaître que ses modérateurs doivent accomplir une tâche exténuante : naviguer entre les règles et réglementations des différents gouvernements et la sophistication de plus en plus poussée des extrémistes qui sévissent sur la Toile.

Pour Jacob Berntsson, responsable de la politique et de la recherche au sein de Tech Against Terrorism (Technologie contre le terrorisme) -  une initiative visant à contrer l'extrémisme en ligne tout en préservant la liberté d'expression - les organisations terroristes sont désormais plus à même d'utiliser les plateformes de réseaux sociaux sans se laisser piéger par les modérateurs.

« Je pense que Facebook est sans aucun doute capable d'améliorer sa réponse à ce niveau, mais la tâche devient particulièrement difficile lorsque le statut juridique du groupe est peu clair, par exemple », confie M. Berntsson à Arab News.

« Tout cela montre, à mon avis, que la modération du contenu à cette échelle est pratiquement impossible.  Les erreurs sont inévitables et les lacunes aussi ».

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Twitter: @Tarek_AliAhmad


L'armée israélienne dit se préparer à une «  offensive décisive » contre le Hezbollah libanais

Les violences depuis le 8 octobre entre l'armée israélienne et le Hezbollah ont fait au moins 523 morts au Liban, en majorité des combattants, selon un bilan établi par l'AFP à partir de différentes sources. (AFP)
Les violences depuis le 8 octobre entre l'armée israélienne et le Hezbollah ont fait au moins 523 morts au Liban, en majorité des combattants, selon un bilan établi par l'AFP à partir de différentes sources. (AFP)
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  • "Quand le moment viendra et que nous passerons à l'offensive, ce sera une offensive décisive"
  • Dans un discours prononcé lors d'un déplacement dans le nord, le général israélien Ori Gordin, a déclaré aux soldats: "nous avons déjà éliminé plus de 500 terroristes au Liban, la grande majorité d'entre eux appartenant au Hezbollah"

JERUSALEM: Un commandant de l'armée israélienne a indiqué vendredi que les troupes dans le nord du pays, où Israël à une frontière avec le Liban, se préparaient à une "offensive décisive" contre le Hezbollah, après des mois d'échanges de tirs transfrontaliers.

Le mouvement islamiste libanais Hezbollah et l'armée israélienne échangent des tirs quasi quotidiennement depuis l'attaque le 7 octobre du mouvement islamiste palestinien Hamas en Israël, qui a déclenché la guerre dans la bande de Gaza.

Dans un discours prononcé lors d'un déplacement dans le nord, le général israélien Ori Gordin, a déclaré aux soldats: "nous avons déjà éliminé plus de 500 terroristes au Liban, la grande majorité d'entre eux appartenant au Hezbollah", selon un communiqué de l'armée.

Les troupes israéliennes dans le nord sont actuellement en opération pour protéger les habitants de cette partie du pays et "préparer la transition vers l'offensive", a ajouté le général Gordin, commandant les forces israéliennes dans le nord.

"Quand le moment viendra et que nous passerons à l'offensive, ce sera une offensive décisive", a-t-il encore dit.

Les violences depuis le 8 octobre entre l'armée israélienne et le Hezbollah ont fait au moins 523 morts au Liban, en majorité des combattants, selon un bilan établi par l'AFP à partir de différentes sources.

La plupart d'entre eux, 342 personnes, ont été confirmés comme étant des combattants du Hezbollah, mais le bilan comprend également 104 civils. M. Gordin n'a pas mentionné de victimes civiles. Dans le nord d'Israël, au moins 18 soldats israéliens et 13 civils ont été tués, selon l'armée.

Le Hezbollah, soutenu par l'Iran, affirme que ses attaques contre Israël depuis le 8 octobre ont pour objectif de soutenir son allié du Hamas.

Des dizaines de milliers d'habitants ont depuis été déplacés au Liban et en Israël en raison de cette flambée de violence transfrontalière.


Polio, eaux usées, hôpitaux surchargés: la crise sanitaire à Gaza

Seulement 16 des 36 hôpitaux à Gaza sont opérationnels, mais partiellement, selon l'OMS, qui fait état d'un "afflux massif de blessés". (AFP)
Seulement 16 des 36 hôpitaux à Gaza sont opérationnels, mais partiellement, selon l'OMS, qui fait état d'un "afflux massif de blessés". (AFP)
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  • L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a fait état de vives inquiétudes face à une possible épidémie de polio dans la bande de Gaza
  • De son côté, l'armée israélienne a annoncé dimanche avoir lancé une campagne de vaccination de ses soldats contre la polio

GENEVE: L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a fait état de vives inquiétudes face à une possible épidémie de polio dans la bande de Gaza, alors que la crise sanitaire y est déjà très grave.

Voici un aperçu de certains des défis sanitaires auxquels est confronté le territoire palestinien, selon l'OMS.

Polio dans les eaux usés

Menace largement répandue voici encore une quarantaine d'années, la poliomyélite - qui peut entraîner en quelques heures des paralysies irréversibles - a très largement disparu dans le monde grâce aux vaccins.

Mais il existe une autre forme de poliovirus qui peut se propager: le poliovirus qui a muté à partir de la source contenue à l'origine dans le vaccin antipoliomyélitique oral (VPO). C'est ce poliovirus dérivé d'une souche vaccinale (PVDVc) qui a été retrouvé à Gaza.

Lorsqu'elles se répliquent dans le tube digestif, les souches de VPO changent génétiquement et peuvent se propager dans les communautés qui ne sont pas complètement vaccinées contre la poliomyélite, en particulier dans les zones où les conditions d'hygiène et d'assainissement sont mauvaises, ou dans des zones surpeuplées.

Le 16 juillet, le Réseau mondial de laboratoires de lutte contre la poliomyélite a isolé le poliovirus de type 2 dérivé d'une souche vaccinale (PVDVc2) dans six échantillons d'eaux usées à Deir al-Balah et Khan Younès.

Aucun prélèvement humain n'a encore été effectué à Gaza de sorte que l'OMS ne sait toujours pas si quelqu'un y a été infecté par le poliovirus. L'OMS et le Fonds des Nations unies pour l'enfance (Unicef) espèrent collecter cette semaine les premiers échantillons humains.

De son côté, l'armée israélienne a annoncé dimanche avoir lancé une campagne de vaccination de ses soldats contre la polio.

Manque d'eau et d'assainissement

L'OMS et ses partenaires espèrent achever l'évaluation des risques liés à la polio cette semaine. Mais l'OMS a prévenu qu'il y a "un risque élevé" de propagation du poliovirus à Gaza et au niveau international "si cette épidémie ne fait pas l'objet d'une réponse rapide et optimale".

Le Dr Ayadil Saparbekov, chef d'équipe à l'OMS pour les urgences sanitaires dans les territoires palestiniens, espère que des recommandations pourront être publiées dimanche.

Mais "étant donné les limites actuelles en matière d'hygiène et assainissement de l'eau à Gaza, il sera très difficile pour la population de suivre le conseil de se laver les mains et de boire de l'eau salubre", a-t-il relevé mardi, lors d'un point de presse.

"Avec le système de santé paralysé, le manque d'eau et d'assainissement, ainsi que le manque d'accès de la population aux services de santé... la situation s'annonce très mauvaise", a-t-il souligné.

Au-delà de la polio, l'OMS est "très inquiète" face à de possibles épidémies dans la bande de Gaza.

Système de santé dévasté 

Seulement 16 des 36 hôpitaux à Gaza sont opérationnels, mais partiellement, selon l'OMS, qui fait état d'un "afflux massif de blessés" dans le complexe médical Nasser après de nouveaux bombardements lundi à Khan Younès, dans un contexte de "grave pénurie de réserves de sang, de fournitures médicales et de lits d'hôpitaux".

Avant le conflit à Gaza, déclenché le 7 octobre par les attaques du Hamas, il y avait environ 3.500 lits d'hôpitaux dans le territoire palestinien. Aujourd'hui, l'OMS estime qu'il y en a 1.532.

Seulement 45 des 105 établissements de soins de santé primaires sont opérationnels. Huit des dix hôpitaux de campagne sont opérationnels, dont quatre seulement partiellement.

Dans une telle situation, "il se peut que davantage de personnes meurent de maladies transmissibles que des blessures" liées à la guerre, a averti le Dr Saparbekov.

Selon ce responsable de l'OMS, "jusqu'à 14.000 personnes pourraient" avoir besoin d'une évacuation médicale hors de Gaza.


Les EAU proposent une mission internationale temporaire pour l'après-guerre à Gaza

Reem bint Ebrahim Al-Hashimy, ministre d'État émiratie pour la coopération internationale, a déclaré que la mission contribuerait à rétablir l'ordre public et à répondre à la crise humanitaire dans Gaza d'après-guerre. (Archive/AFP)
Reem bint Ebrahim Al-Hashimy, ministre d'État émiratie pour la coopération internationale, a déclaré que la mission contribuerait à rétablir l'ordre public et à répondre à la crise humanitaire dans Gaza d'après-guerre. (Archive/AFP)
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  • Elle a souligné le rôle clé des États-Unis dans le succès de la mission
  • La mission ouvrirait la voie à la réunification de Gaza et de la Cisjordanie occupée sous une Autorité palestinienne unique et légitime

ABOU DHABI : Les Émirats arabes unis ont appelé à l'établissement d'une mission internationale temporaire pour poser les jalons d'une nouvelle gouvernance à Gaza après la guerre.

Jeudi, dans un communiqué relayé par l'agence de presse nationale, Reem Al-Hashimy, ministre d'État pour la coopération internationale,  a déclaré que cette mission viserait à rétablir l'ordre et à faire face à la crise humanitaire dans Gaza post-conflit.
Selon la ministre, la mission devrait être déployée à l'invitation du gouvernement palestinien, sous la houlette d'un "nouveau Premier ministre crédible et indépendant", pour répondre aux besoins des Palestiniens et reconstruire Gaza. 

Elle préparerait le terrain pour la réunification de Gaza et de la Cisjordanie occupée sous une Autorité palestinienne unique et légitime.

Al-Hashimy a souligné qu'un retour à la situation d'avant le 7 octobre ne garantirait pas une paix durable, cruciale pour la stabilité régionale. 

Elle a exhorté les États-Unis à mener les efforts internationaux pour reconstruire Gaza, parvenir à la solution à deux États et faciliter les réformes palestiniennes, autant d'éléments qui contribueraient au succès de la mission internationale.

Israël, a-t-elle ajouté, doit également respecter le droit humanitaire international.

"Gaza ne peut se relever sous un blocus continu, ou si l'Autorité palestinienne légitime est empêchée d'assumer ses responsabilités", a-t-elle affirmé, appelant à l'arrêt des colonies israéliennes illégales et des violences en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. 

La ministre a réitéré le soutien des EAU aux efforts internationaux pour la solution à deux États.
"Notre ambition dépasse les frontières de Gaza et exige une collaboration internationale. L'établissement de la paix n'est pas seulement une nécessité régionale, mais un enjeu global qui profiterait à tout le Moyen-Orient et au monde entier", a-t-elle souligné pour conclure.