Zemmour, une «bulle sondagière»? La France n’a pas dit son dernier mot

Une affiche électorale au portrait d'Eric Zemmour vandalisée à Paris. (AFP).
Une affiche électorale au portrait d'Eric Zemmour vandalisée à Paris. (AFP).
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Publié le Vendredi 14 janvier 2022

Zemmour, une «bulle sondagière»? La France n’a pas dit son dernier mot

  • L’image qui se dégage d’Éric Zemmour dans les médias est celle d’un homme politique qui compte chambouler le paysage politique français
  • Certains vont jusqu’à comparer l’engouement qu’il suscite dans certains milieux à celui du président Emmanuel Macron avant son entrée officielle en campagne en 2017

PARIS: C’est un jeu non dénué de danger auquel s’adonnent les médias français en couvrant le moindre des faits et gestes du chroniqueur et polémiste Éric Zemmour. Depuis la publication de son dernier livre, La France n’a pas dit son dernier mot, au mois de septembre, Zemmour est omniprésent sur la scène médiatique.

Chacune de ses phrases, de ses apparitions publiques ou déplacements sont relayés, commentés et analysés par les médias, jusqu’à l’écœurement. Pourtant, ce polémiste qui porte haut et fort des positions d’extrême droite, n’est ni plus ni moins qu’un auteur qui a publié un livre dans lequel il affirme noir sur blanc sa haine des immigrés et des musulmans, assurant que la France s’achemine vers une guerre civile, en raison de la négligence de ses dirigeants.

Ce qui étonne c’est le traitement de faveur qui est accordé à Eric Zemmour par le milieu médiatique et l’image qui se constitue au fil de sa campagne promotionnelle.

C’est évidemment son droit dans un pays où la liberté d’expression fait partie intégrante des principes fondateurs de la République. C’est également son droit, en temps qu’auteur, d’effectuer des tournées dans Paris et les régions françaises pour promouvoir et dédicacer son livre, tout comme des dizaines d’autres écrivains en cette rentrée littéraire.

Traitement de faveur

Cependant, ce qui étonne c’est le traitement de faveur qui lui est accordé par le milieu médiatique et l’image qui se constitue au fil de sa campagne promotionnelle. Aucun autre auteur n’occupe autant de temps d’antenne et d’espace dans les médias. Il est quasi impossible d’échapper au quotidien à son image, à ses propos ou à l’enthousiasme qu’il soulève lors de ses tournées.

C’est à croire que Zemmour est le seul et unique auteur à avoir publié un livre en cet automne littéraire foisonnant. C’est à croire aussi que le polémiste qui cultive le doute sur une éventuelle candidature à la prochaine élection présidentielle, est le seul et unique candidat potentiel à ce scrutin.

D’ailleurs, l’image qui se dégage de lui dans les médias n’est ni celle d’un auteur, ni celle d’un candidat potentiel à la présidentielle. C’est plutôt celle d’un homme politique qui compte chambouler le paysage politique français par ses prises de positions singulières et brutales.

Les enquêtes d’opinion qui se succèdent donnent Zemmour tantôt à deuxième ou à la troisième place du premier tour de la présidentielle.

Certains vont même jusqu’à comparer l’engouement qu’il suscite dans certains milieux à celui du président Emmanuel Macron avant son entrée officielle en campagne en 2017.

Ses rencontres avec les lecteurs, abondamment couvertes par les médias, prennent l’allure de meetings électoraux, et le polémiste apparaît comme celui qui donne son impulsion à cette précampagne balbutiante.

Pire encore, il est des moments où le polémiste apparaît comme un conquérant, voire un combattant, un justicier qui a pris sur lui de libérer les Français des dangers qui les menacent. Et pour donner cette image, les médias, qui ont choisi de jouer le rôle de chauffeurs de salles pour le candidat non déclaré, s’adossent aux sondages.

Ces enquêtes d’opinion qui se succèdent donnent Zemmour tantôt à deuxième ou à la troisième place du premier tour de la présidentielle. Selon ces pronostics, le second tour se jouera soit entre Macron et Zemmour, soit entre Macron et la présidente du Rassemblement National (RN), Marine Le Pen. Selon un sondage de l’institut Ipsos, Le Pen est créditée de 16% des intentions de vote au premier tour, contre 15% pour Zemmour.

Sondages: les enseignements de l’histoire?

Autant dire que la concurrence est rude, surtout que le parti de droite Les Républicains (LR) peine toujours à surmonter ses divisions. L’ancien ministre Xavier Bertrand recueille pour sa part 14% des intentions de vote, alors qu’il n’est pas certain de l’adhésion des Républicains à sa candidature.

Le chercheur Alex Dezé et le professeur de statistiques Michel Lejeune estiment de leur côté dans une tribune publiée dans le quotidien Libération que ces sondages à six mois de la présidentielle n’ont pas de grande valeur. Se basant sur des enquêtes d’opinion réalisées de 1965 à 2002 à six mois du scrutin, ils en déduisent «qu’aucun sondage n’a prédit correctement l’ordre d’arrivée au premier tour».

Sans vouloir sous-estimer «le potentiel électoral à venir du polémiste», il leur paraît certain que «l’attention qui entoure Éric Zemmour se fonde pour l’instant sur une bulle sondagière».

Cette bulle, exploitée à souhait sur le plan médiatique, ranime le souvenir de la présidentielle de 2002, et du coup de théâtre électoral qui l’a marqué au second tour.

La veille de ce second tour, un octogénaire s’était fait agresser chez lui à Orléans par une bande d’adolescents. Les images de ce vieux monsieur surnommé «papy Voise» (de son nom Paul Voise) au visage couvert de blessures et d’hématomes, ont tourné en boucle sur les télévisions françaises, incarnant l’insécurité qui règne dans le pays. L’impact de ces images a abouti à éliminer le candidat socialiste de l’époque, Lionel Jospin, de la course à la présidence.

Le président sortant de l’époque, Jacques Chirac, avait alors affronté le candidat de l’extrême droite, Jean-Marie Le Pen. Le surnom de «papy Voise» est depuis devenu le symbole du sensationnalisme médiatique et de ses conséquences. Contrairement à l’adage qui dit qu’une hirondelle ne fait pas le printemps, le buzz médiatique peut faire et défaire des destinées politiques.


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».


Selon ManPowerGroup, l'IA pourrait réduire l'importance des « compétences » dans le recrutement

Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
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  • L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences ».
  • « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

PARIS : L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences », selon un dirigeant de ManPowerGroup.

En effet, « les compétences pourraient s'avérer obsolètes dans six mois », explique Tomas Chamorro-Premuzic, directeur de l'innovation du géant américain du travail temporaire, rencontré par l'AFP au salon Vivatech, à Paris, qui ferme ses portes samedi.  Selon lui, « il vaut mieux savoir que vous travaillez dur, que vous êtes curieux, que vous avez de bonnes aptitudes relationnelles et ça, l'IA peut vous aider à l'évaluer ».

Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

Cependant, les tâches informatiques (utilisation d'Internet, messagerie, etc.) pouvant être accomplies de manière autonome par des agents d'IA connaissent une « rapide expansion ». 

Dans ce contexte, les employeurs pourraient rechercher de plus en plus de salariés dotés de compétences hors de portée de l'IA, telles que le jugement éthique, le service client, le management ou la stratégie, comme l'indique une enquête de ManpowerGroup menée auprès de plus de 40 000 employeurs dans 42 pays et publiée cette semaine.

M. Chamorro-Premuzic déplore toutefois que ces compétences ne soient pas encore davantage mises en avant dans la formation. « Pour chaque dollar que vous investissez dans la technologie, vous devez investir huit ou neuf dollars dans les ressources humaines, la transformation culturelle, la gestion du changement », dit-il.

Les craintes d'un chômage de masse provoqué par l'IA restent par ailleurs exagérées à ce stade, estime le dirigeant, malgré certaines prédictions alarmistes.

D'après Dario Amodei, patron de la société d'intelligence artificielle Anthropic, cette technologie pourrait faire disparaître la moitié des emplois de bureau les moins qualifiés d'ici cinq ans. 

« Si l'histoire nous enseigne une chose, c'est que la plupart des prévisions sont fausses », répond M. Chamorro-Premuzic.

Concernant le recrutement, activité principale de ManPowerGroup, le dirigeant ajoute que « les agents d'intelligence artificielle ne deviendront certainement pas le cœur de notre métier dans un futur proche ». Il constate également que l'IA est utilisée par les demandeurs d'emploi.

« Des candidats sont capables d'envoyer 500 candidatures parfaites en une journée, de passer des entretiens avec leurs bots et de déjouer certains éléments des évaluations », énumère-t-il.