L’Iran fait preuve d’hypocrisie face à la relance de l’accord sur le nucléaire

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Publié le Dimanche 14 novembre 2021

L’Iran fait preuve d’hypocrisie face à la relance de l’accord sur le nucléaire

L’Iran fait preuve d’hypocrisie face à la relance de l’accord sur le nucléaire
  • Depuis l’arrivée au pouvoir du partisan de la ligne dure, Ebrahim Raïssi, en août dernier, les États-Unis et l’Union européenne ont du mal à convaincre l’Iran de retourner à la table des négociations
  • Les dirigeants iraniens ne sont pas en mesure d’imposer des contraintes excessives et irrationnelles ou de donner des leçons au monde sur l’accord nucléaire alors que leur dossier nucléaire est rempli d’activités clandestines, de tromperies et de mensonge

Alors que l’ancienne administration iranienne du président, Hassan Rohani, semblait prête à revenir à la table des négociations pour discuter de la relance de l’accord de Vienne sur le nucléaire, le gouvernement du nouveau président, Ebrahim Raïssi, aurait d’autres priorités concernant son programme de politique étrangère. Il retarde les pourparlers nucléaires tout en imposant des contraintes excessives et irrationnelles.

Après l’entrée en fonction de l’administration Biden en janvier, six cycles de négociations ont été conclus avec l’administration Rohani dans le but de ressusciter l’accord nucléaire de 2015. Néanmoins, les pourparlers entre la république islamique et les puissances mondiales du P5+1 (États-Unis, Russie, Chine, France, Grande-Bretagne et l'Allemagne) n’ont pas abouti à des résultats concrets.

Depuis l’arrivée au pouvoir du partisan de la ligne dure, Ebrahim Raïssi, en août dernier, les États-Unis et l’Union européenne (UE) ont du mal à convaincre l’Iran de retourner à la table des négociations, tandis que le régime théocratique sermonne le P5+1 sur la manière dont les négociations nucléaires devraient être menées et sur les modalités de l’accord.

Après une longue période d’attente, la république islamique a récemment annoncé qu’elle reprendrait les pourparlers nucléaires fin novembre. Mais le régime iranien a par la suite averti que ses exigences – notamment que Washington doit promettre de ne jamais se retirer de l’accord – doivent être satisfaites, au risque de faire échouer les pourparlers. Le secrétaire du Conseil suprême de sécurité nationale, Ali Shamkhani, a écrit dans un tweet: «Le président américain, en manque d’autorité, n’est pas prêt à donner des garanties. Si le statu quo actuel se poursuit, le résultat des négociations est clair.»

De toute évidence, le régime iranien formule des demandes qui ne peuvent être satisfaites. À titre d’exemple, Joe Biden ne peut donner aucune garantie au régime iranien sur la politique de l’administration à venir concernant l’accord nucléaire. Et si le régime était d’ailleurs pris en flagrant délit de violation de l’accord nucléaire? Le prochain président américain ne devrait-il pas pouvoir retirer le pays de l’accord et réimposer des sanctions?

L’Iran joue le rôle de la victime. Mais l’administration Biden doit rappeler au régime théocratique que, même si les dirigeants iraniens ont garanti qu’ils respecteraient les conditions de l’accord nucléaire en 2015, les preuves indiquent qu’ils le violaient avant même le retrait de l’administration Trump en 2018.

 

«Le régime a prévenu que ses exigences irréalistes devaient être satisfaites, faute de quoi les négociations échoueraient»

Dr Majid Rafizadeh

Par exemple, l’une des exigences les plus fondamentales de l’accord est que l’Iran fasse part de ses activités nucléaires à l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) – une condition à laquelle le pays ne s’est ouvertement pas conformé. Deux organisations non partisanes basées à Washington – l’Institut pour la science et la sécurité internationale et la Fondation pour la défense des démocraties – ont publié des rapports détaillés sur les installations nucléaires clandestines non déclarées de l’Iran, lesquelles violaient l’accord nucléaire, avant même que l’administration Trump ne se retire de l’accord. Dans le même temps, le Premier ministre israélien de l’époque, Benjamin Netanyahou, avait exhorté l’AIEA à inspecter immédiatement un «entrepôt atomique» en Iran, alors que le régime bénéficiait d’une levée des sanctions et déclarait être en conformité avec l’accord nucléaire.

L’AIEA a d’abord fait fi des rapports. Cela ne devrait pas être une surprise, puisqu’elle a longtemps ignoré le non-respect de l’accord par la république islamique. À titre d’exemple, les sites nucléaires iraniens clandestins de Natanz et d’Arak n’ont pas été découverts par l’AIEA, mais par un groupe d’opposition, le Conseil national de la résistance iranienne (CNRI).

Après qu’une pression importante a été exercée sur l’AIEA, et une fois que l’Iran a été en mesure de déplacer les matières suspectes, une inspection de l’installation nucléaire secrète signalée par M. Netanyahou a eu lieu. Bien que le site ait été nettoyé, les inspecteurs de l’AIEA ont pu y détecter des traces d’uranium radioactif.

Plus tard, deux autres emplacements où des activités nucléaires clandestines avaient eu lieu ont été identifiés. Cependant, les dirigeants iraniens n’ont pas répondu aux allégations de violations et la communauté internationale n’a pas fait pression sur Téhéran pour répondre aux questions alarmantes soulevées par l’organisme de surveillance nucléaire de l’Organisation des nations unies (ONU).

Comme le rapporte le directeur général de l’AIEA, Rafael Grossi, lors d’une réunion du conseil d’administration en juin à Vienne: «Plusieurs mois plus tard, l’Iran n’a toujours pas fourni les explications nécessaires concernant la présence de particules de matières nucléaires aux trois endroits où l’Agence a mené des évaluations complémentaires. En l’absence de telles explications de la part de l’Iran, je crains fort que des matières nucléaires aient été présentes aux trois emplacements non déclarés et que l’Agence ne soit pas au courant de leur emplacement actuel.»

Les dirigeants iraniens ne sont pas en mesure d’imposer des contraintes excessives et irrationnelles ou de donner des leçons au monde sur l’accord nucléaire alors que leur dossier nucléaire est rempli d’activités clandestines, de tromperies et de mensonges.

 

Le Dr Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain formé à Harvard.

Twitter: @Dr_Rafizadeh

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.