ONU: une Assemblée générale annuelle sans relief en pleine crise mondiale

(Photo, Ludovic MARIN/AFP).
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Publié le Mardi 22 septembre 2020

ONU: une Assemblée générale annuelle sans relief en pleine crise mondiale

  • Le bâtiment est quasi-vide, aucun dirigeant n'a fait le déplacement. Tous ont été dissuadés de venir à cause de la maladie par les autorités américaines
  • Sans bilatérales, sans "diplomatie sous la table", comment trouver des solutions, des compromis sur les conflits qui secouent la planète, améliorer les relations entre pays ?

NATIONS UNIES: Trump, Erdogan, Xi, Poutine, Rohani, Macron... En pleine crise mondiale due à la pandémie de Covid-19, leur voix attendue mardi au premier jour de l'Assemblée générale de l'ONU ne résonnera pas dans le vaste complexe des Nations unies à New York.

Le bâtiment est quasi-vide, aucun dirigeant n'a fait le déplacement. Tous ont été dissuadés de venir à cause de la maladie par les autorités américaines. Plutôt que de repousser cette grand-messe diplomatique annuelle, les organisateurs ont choisi le mode virtuel, avec des vidéos enregistrées.

Un temps envisagée, la venue du président américain Donald Trump a été abandonnée. S'exprimer devant une salle clairsemée, où n'est admis qu'un diplomate masqué par pays, n'entrait probablement pas dans sa stratégie pour la présidentielle de novembre.

Cela "manque de drame", soupire Richard Gowan du centre de réflexion Crisis Group. Et plusieurs diplomates de renchérir à l'unisson: sans bilatérales, sans "diplomatie sous la table", comment trouver des solutions, des compromis sur les conflits qui secouent la planète, améliorer les relations entre pays?

Sur le site web de l'ONU, les discours des 193 membres vont s'enchaîner pendant une semaine, mettant en scène les dirigeants de la planète: le Chinois Xi Jinping devant une fresque de la Grande Muraille, d'autres dans des parcs présidentiels ou des palais, tandis que certains privilégieront la sobriété égayée du drapeau de leur pays.

Après une introduction du secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, le président brésilien Jair Bolsonaro parlera le premier, comme le veut la coutume, suivi de Donald Trump. Des sommets thématiques (Covid-19, climat, Liban, Libye, biodiversité...), aussi virtuels, sont prévus dans les semaines à venir en marge de l'Assemblée.

A l'extérieur du siège des Nations unies, quelques barrières ont été érigées autour des entrées sans raison explicite. Les journalistes sont rares et le contraste est saisissant avec les années précédentes qui voyaient plus de 10.000 personnes -présidents, chefs de gouvernement, ministres et autres diplomates- converger vers ce quartier de Manhattan transformé en bunker par la police.

A l'intérieur, c'est le désert, les cafétérias sont fermées, les couloirs silencieux alors que dans le passé chaque recoin, incluant les jardins, servait à ériger des dizaines de bureaux et salons éphémères. 

"Maison en désordre" 

Craignant l'incident technique, comme c'est encore régulièrement le cas lors des visioconférences du Conseil de sécurité (image figée, interprétariat aléatoire faute d'un son correct...), l'Organisation a demandé à recevoir les vidéos des discours quatre jours avant leur diffusion, interdisant toute spontanéité ou réactivité à l'actualité.

En 1945, l'ONU avait été créée pour que plus jamais le monde ne connaisse de conflit à l'échelle du globe. Une troisième guerre mondiale ne s'est pas produite mais la pandémie de Covid-19, due à un virus invisible, a mis à genoux la planète avec près d'un million de morts depuis fin décembre et un impact économique et social dévastateur.

Face à la crise et à des pays plus enclins aux décisions unilatérales qu'à favoriser le multilatéralisme, l'ONU a "manqué le rendez-vous", ont relevé de nombreux experts, et son Assemblée générale cette année en est l'illustration. 

Lundi, lors d'un sommet consacré au 75e anniversaire de l'Organisation, le président américain s'est fait représenter par une ambassadrice adjointe de la mission américaine auprès de l'ONU, témoignant de son dénigrement à l'égard du multilatéralisme.

"L'ONU doit se concentrer sur l'action", a au contraire réclamé Xi Jinping. "Il nous faut faire une réflexion sérieuse sur l'ONU dont nous avons besoin", a-t-il ajouté, alors que Pékin y prend de plus en plus d'influence quand Washington s'en détache.

Le président français Emmanuel Macron a admis une crise interne. "Notre maison commune est en désordre à l'image de notre monde. Ses fondations s'érodent, ses murs se lézardent parfois sous les coups de boutoir de ceux-là même qui l'ont construite", a-t-il dit, évoquant un "système international prisonnier" des rivalités entre pays.

Son homologue turc, Recep Tayyip Erdogan, a réclamé "de réformer le Conseil de sécurité" pour davantage d'égalité dans le monde. Une demande partagée par la chancelière allemande Angela Merkel. "Le Conseil de sécurité est trop souvent dans l'impasse" et "nous avons besoin de réformes" avec une Allemagne dans une instance "agrandie", a-t-elle dit.

Lundi soir, l'Assemblée générale a interrompu son sommet-anniversaire virtuel alors que 55 pays devaient encore parler, dont le Brésil, l'Iran, l'Arabie saoudite, le Royaume-Uni ou Israël. En cause des vidéos de discours qui ont dépassé allégrement les trois minutes requises pour chacune d'entre elles. Aucune indication n'a été donnée sur une date de reprise.


La BBC doit «se battre» pour défendre son journalisme, dit le DG sortant

Au moment où le groupe est très critiqué et accusé de partialité, en particulier par la droite conservatrice, le DG sortant a reconnu que "les temps sont durs pour la BBC". (AFP)
Au moment où le groupe est très critiqué et accusé de partialité, en particulier par la droite conservatrice, le DG sortant a reconnu que "les temps sont durs pour la BBC". (AFP)
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  • Tim Davie, qui a démissionné dimanche, a reconnu qu'une "erreur" avait été commise dans un documentaire sur le président américain diffusé en octobre 2024, selon ses propos tenus lors d'une visioconférence avec les employés du groupe audiovisuel public
  • Le groupe audiovisuel public britannique est dans la tourmente après avoir réalisé, pour ce documentaire diffusé dans son magazine d'information phare "Panorama", un montage trompeur d'un discours de Donald Trump

LONDRES: La BBC doit "se battre" pour défendre son journalisme, a déclaré mardi le directeur général sortant de la BBC, Tim Davie, alors que le groupe public britannique est menacé de plainte en diffamation par Donald Trump.

Tim Davie, qui a démissionné dimanche, a reconnu qu'une "erreur" avait été commise dans un documentaire sur le président américain diffusé en octobre 2024, selon ses propos tenus lors d'une visioconférence avec les employés du groupe audiovisuel public, rapportés par la chaîne BBC News.

Le groupe audiovisuel public britannique est dans la tourmente après avoir réalisé, pour ce documentaire diffusé dans son magazine d'information phare "Panorama", un montage trompeur d'un discours de Donald Trump, le 6 janvier 2021, qui donnait l'impression que le président sortant incitait explicitement ses partisans à une action violente contre le Congrès.

"Nous avons fait une erreur, et il y a eu un manquement à nos règles éditoriales", a reconnu Tim Davie, expliquant qu'il avait assumé sa "part de responsabilité" en démissionnant.

Il n'a toutefois pas mentionné directement la menace d'action en justice lancée par Donald Trump, ni la date de son départ effectif, lors de cette visioconférence avec le président de la BBC, Samir Shah.

Au moment où le groupe est très critiqué et accusé de partialité, en particulier par la droite conservatrice, le DG sortant a reconnu que "les temps sont durs pour la BBC".

"Mais nous nous en sortirons", et "nous devons nous battre pour défendre notre journalisme", a-t-il insisté.

"Nous sommes une organisation unique et précieuse, et je vois la liberté de la presse mise à rude épreuve, je vois son instrumentalisation", a-t-il encore ajouté.


Le président allemand demande à son homologue algérien de gracier l'écrivain Boualem Sansal

La présidence algérienne a confirmé dans son propre communiqué que M. Steinmeier avait demandé à Abdelmadjid Tebboune "d'accomplir un geste humanitaire en graciant l'écrivain Boualem Sansal", une information reprise par la télévision algérienne par ailleurs. (AFP)
La présidence algérienne a confirmé dans son propre communiqué que M. Steinmeier avait demandé à Abdelmadjid Tebboune "d'accomplir un geste humanitaire en graciant l'écrivain Boualem Sansal", une information reprise par la télévision algérienne par ailleurs. (AFP)
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  • "Un tel geste serait l'expression d'une attitude humanitaire et d'une vision politique à long terme. Il refléterait ma relation personnelle de longue date avec le président Tebboune et les bonnes relations entre nos deux pays"
  • Appelant son homologue Abdelmadjid Tebboune à un "geste humanitaire", Frank-Walter Steinmeier propose aussi que Boualem Sansal soit transféré en Allemagne pour "y bénéficier de soins médicaux (...) compte tenu de son âge avancé (...)"

BERLIN: Le président allemand a exhorté lundi son homologue algérien à gracier l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, emprisonné depuis un an en Algérie et au coeur d'une grave crise diplomatique entre Alger et Paris.

Appelant son homologue Abdelmadjid Tebboune à un "geste humanitaire", Frank-Walter Steinmeier propose aussi que Boualem Sansal soit transféré en Allemagne pour "y bénéficier de soins médicaux (...) compte tenu de son âge avancé (...) et de son état de santé fragile".

"Un tel geste serait l'expression d'une attitude humanitaire et d'une vision politique à long terme. Il refléterait ma relation personnelle de longue date avec le président Tebboune et les bonnes relations entre nos deux pays", a estimé le président allemand, dans un communiqué.

La présidence algérienne a confirmé dans son propre communiqué que M. Steinmeier avait demandé à Abdelmadjid Tebboune "d'accomplir un geste humanitaire en graciant l'écrivain Boualem Sansal", une information reprise par la télévision algérienne par ailleurs.

Selon des spécialistes à Alger, le fait que la présidence et la télévision publique reprennent les éléments de langage du président allemand peut être perçu comme un signe positif.

Mais aucune indication n'a été donnée quant au calendrier de la prise de décision par le président algérien.

Dans une longue interview accordée en septembre dernier, le président Abdelmadjid Tebboune avait par ailleurs évoqué la possibilité de se rendre en Allemagne fin 2025 ou début 2026.

Arrêté à Alger le 16 novembre 2024, le romancier et essayiste franco-algérien Boualem Sansal a été condamné en appel en juillet à cinq ans de réclusion pour avoir notamment déclaré que l'Algérie avait hérité sous la colonisation française de territoires appartenant jusque-là au Maroc.

Jeudi, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, avait souligné que la France menait un "dialogue exigeant" avec Alger pour obtenir la libération de Boualem Sansal.

L'affaire s'inscrit dans un contexte d'hostilité entre Paris et Alger, qui sont empêtrés depuis plus d'un an dans une crise diplomatique sans précédent qui s'est traduite par des expulsions de fonctionnaires de part et d'autre, le rappel des ambassadeurs des deux pays et des restrictions sur les porteurs de visas diplomatiques.


La BBC, dans l'oeil du cyclone, sommée de s'expliquer

Le président de la BBC, Samir Shah, doit s'expliquer lundi au lendemain de la démission retentissante du directeur général du groupe audiovisuel public britannique et de la patronne de sa chaîne d'information BBC News, après le montage trompeur d'un discours de Donald Trump. (AFP)
Le président de la BBC, Samir Shah, doit s'expliquer lundi au lendemain de la démission retentissante du directeur général du groupe audiovisuel public britannique et de la patronne de sa chaîne d'information BBC News, après le montage trompeur d'un discours de Donald Trump. (AFP)
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  • La BBC, institution longtemps chérie des Britanniques mais cible régulière des médias et responsables politiques conservateurs, est dans la tourmente, accusée ces derniers jours d'avoir déformé des propos du président américain dans un documentaire
  • La BBC est mise en cause pour avoir monté des passages différents d'un discours de Donald Trump datant du 6 janvier 2021, jour de l'assaut du Capitole à Washington, de telle façon qu'il semble inciter ses partisans à marcher vers le siège du Congrès

LONDRES: Le président de la BBC, Samir Shah, doit s'expliquer lundi au lendemain de la démission retentissante du directeur général du groupe audiovisuel public britannique et de la patronne de sa chaîne d'information BBC News, après le montage trompeur d'un discours de Donald Trump.

La BBC, institution longtemps chérie des Britanniques mais cible régulière des médias et responsables politiques conservateurs, est dans la tourmente, accusée ces derniers jours d'avoir déformé des propos du président américain dans un documentaire de son magazine d'information phare, "Panorama", diffusé en octobre 2024, une semaine avant la présidentielle américaine.

La BBC est mise en cause pour avoir monté des passages différents d'un discours de Donald Trump datant du 6 janvier 2021, jour de l'assaut du Capitole à Washington, de telle façon qu'il semble inciter ses partisans à marcher vers le siège du Congrès pour se "battre comme des diables".

Or, dans la phrase originale, M. Trump disait: "Nous allons marcher vers le Capitole et nous allons encourager nos courageux sénateurs et représentants et représentantes au Congrès". L'expression "se battre comme des diables" correspondait à un autre passage du discours.

Face à la polémique grandissante, son directeur général, Tim Davie, et la patronne de la chaîne d'information du groupe BBC News, Deborah Turness, ont annoncé dimanche leur démission, qui fait la Une des journaux lundi.

Le président américain a dénoncé les "journalistes corrompus" et "malhonnêtes" de la BBC, sur son réseau Truth Social.

Le président du conseil d'administration du groupe, Samir Shah, doit s'excuser et s'expliquer dans une réponse écrite aux questions de la commission parlementaire sur la culture sur cette affaire, et sur d'autres accusations de partialité sur la couverture de la guerre à Gaza.

"La BBC doit répondre à de graves questions concernant ses normes éditoriales et la manière dont la direction gère les problèmes", a jugé la présidente de la commission, Caroline Dinenage, estimant que le groupe public "se devait d'être exemplaire" face à la montée de la désinformation.

Lundi, la patronne démissionnaire de BBC News a de nouveau assuré qu'il n'y avait "pas de partialité institutionnelle" sur la chaîne, qui a produit le programme mis en accusation.

 

- "Violation des règles" -

 

La classe politique a quasi unanimement critiqué la BBC pour sa gestion de l'affaire, qui tombe d'autant plus mal que le groupe audiovisuel doit renégocier d'ici fin 2027 son nouveau contrat de mission avec le gouvernement.

La cheffe de l'opposition, Kemi Badenoch, a déploré "un catalogue de graves défaillances". Le chef du parti d'extrême droite Reform UK, Nigel Farage, a appelé à "un changement de fond en comble" du groupe public.

La BBC tire une grande part de ses ressources de la redevance annuelle (174,50 livres, soit 198 euros), payée par 22,8 millions de foyers, soit 3,8 milliards de livres.

Samir Shah a dit espérer que le futur directeur général du groupe, dont la nomination pourrait prendre plusieurs mois, "façonnerait positivement" le prochain contrat de mission. la ministre de la Culture, Lisa Nandy, qui a qualifié la situation d'"extrêmement grave", a affirmé que le futur contrat aiderait la BBC à "garantir son rôle" auprès du public.

Le chef du parti libéral démocrate (centriste), Ed Davey, a appelé le Premier ministre Keir Starmer, et la classe politique en général, à défendre la BBC face à Donald Trump et la sphère Maga. "Il est facile de voir pourquoi Trump veut détruire la première source d'information dans le monde. Nous ne pouvons pas le laisser faire", a-t-il prévenu sur la plateforme X.

Le Telegraph a eu connaissance d'une note interne rédigée par l'ancien conseiller indépendant du comité des normes éditoriales de la BBC, Michael Prescott, dans laquelle il suggérait que des erreurs avaient été commises dans le montage. Il affirme que les responsables chargés des normes éditoriales du groupe auprès de qui il a soulevé le problème ont nié toute violation des règles.

En octobre, le régulateur des médias avait épinglé la BBC pour avoir "enfreint les règles de diffusion" à propos d'un reportage à Gaza dans lequel le narrateur principal, un enfant, était le fils d'un haut responsable du mouvement islamiste palestinien Hamas.