Livraison rapide à domicile: à boire et à manger pour les coursiers

Livreurs en CDI, mobilité propre ou assurances côté pile, pression et contrats flous côté face: si le «quick commerce» laboure un champ social laissé en jachère par les plate-formes de l'ubérisation, l'avenir dira si ce modèle présenté comme plus vertueux survit. (Photo, AFP)
Livreurs en CDI, mobilité propre ou assurances côté pile, pression et contrats flous côté face: si le «quick commerce» laboure un champ social laissé en jachère par les plate-formes de l'ubérisation, l'avenir dira si ce modèle présenté comme plus vertueux survit. (Photo, AFP)
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Publié le Samedi 04 décembre 2021

Livraison rapide à domicile: à boire et à manger pour les coursiers

  • Les «dark stores» (supermarchés sans client) proposent effectivement une kyrielle d'avantages auxquels les livreurs sont peu habitués
  • Le fonctionnement est sensiblement le même partout: des préparateurs de commandes slaloment dans ces «dark stores» puis des coursiers livrent une poignée d'articles en un temps record

PARIS: Livreurs en CDI, mobilité propre ou assurances côté pile, pression et contrats flous côté face: si le "quick commerce" laboure un champ social laissé en jachère par les plate-formes de l'ubérisation, l'avenir dira si ce modèle présenté comme plus vertueux survit.

"On offre des conditions de travail compétitives par rapport à tout ce qui existait avant", vante Henri Capoul, le patron de Cajoo, l'expert français de la livraison rapide à domicile.

Les "dark stores" (supermarchés sans client) proposent effectivement une kyrielle d'avantages auxquels les livreurs sont peu habitués: contrats et mutuelles donc, mais également évolution professionnelle, équipements personnels, téléphones et vélos ou scooters électriques fournis, salles de repos, voire coupons de réductions.

"J'ai commencé mi-octobre comme livreur en CDI à 35 heures et je suis déjà passé responsable des livreurs", témoigne ainsi Abdelhatif, recruté par le turc Getir. "J'ai commencé au Smic et j'ai gagné 10% en devenant chef".

Le fonctionnement est sensiblement le même partout: des préparateurs de commandes slaloment dans ces "dark stores" puis des coursiers livrent une poignée d'articles en un temps record.

"Quand une célèbre marque de pizza s'est engagée à livrer en moins de 30 minutes, l'accidentologie des livreurs a augmenté, rappelle Berker Yagci, le patron de Getir en France. 10 minutes, c'est notre délai moyen mais on ne communique jamais sur nos temps de livraison". 

"Il faut aller le plus vite possible, mais pas à tout prix", confirme Leo, qui a troqué son vélo-cargo pour le scooter électrique de Getir. "On n'est pas payé à la livraison, c'est plus sécurisant".

Pression

"Quand tu es auto-entrepreneur, tu n'as pas d'assurance. Là, je suis couvert, je cotise pour une retraite", compare également Barry. Chez Cajoo, il n'est pourtant qu'intérimaire.

"Je ne suis pas convaincue que les livreurs resteront éternellement salariés", doute Camille Toumelin, experte en marketing, qui a collaboré avec Cajoo ou l'Allemand Gorillas. "C'est bien pour avoir rapidement des livreurs mais ensuite c'est un frein à la rentabilité".

Elle assure que la pression pour tenir les délais est "énorme" et rappelle que Frichti proposait massivement des CDI à ses débuts avant de reprendre l'auto-entrepreneuriat.

Le patron de Getir reconnaît que son modèle pourrait "évoluer à l'avenir"... "On est dans une zone grise, explique-t-il. "Il faut adapter des règles pensées pour d'autres modèles. La législation doit refléter ce besoin de changement".

Elus du personnel en approche 

"Le salariat permet d'intégrer des syndicats et d'obtenir progressivement des mesures plus protectrices", décrypte Karine Sanouillet, experte grande distribution. "Le sujet de la représentation est central".

Le patron de Getir assure avoir déjà défini un accord collectif et vouloir "intégrer les partenaires sociaux" prochainement.

"Le siège de Cajoo dispose déjà d'un CSE et on va maintenant faire pareil pour les sites opérationnels. On fait bien les choses", ajoute M. Capoul.

Les dirigeants disent également majorer les heures de nuit et mieux rémunérer le travail le dimanche, respectant ainsi les conventions collectives.

Néanmoins, les travailleurs "sont éclatés sur (les conventions collectives de) l'épicerie-marché, la vente à distance ou la logistique par exemple, moins protectrices que l'accord de la grande distribution", regrette pourtant Carole Desiano (FO).

"Le temps de travail est payé, c'est un premier pas", tempère Ludovic Rioux (CGT). "Mais les conditions de travail sont assez contrastées et la question des cadences se pose".

"Ces boîtes se lancent, elles naviguent à vue",  ajoute-t-il en regrettant l'existence chez certaines de clauses de mobilité qui permettraient à l'employeur de rompre unilatéralement les contrats.

Dans la société qui l'emploie, Mehdi a dû accepter de renoncer au paiement majoré des heures de nuit. Ce livreur anonyme, qui s'estime menacé pour son activité syndicale, regrette en outre d'avoir été embauché comme livreur alors qu'il exerce comme "agent polyvalent". "On est donc moins payés".

"Le matériel n'est pas en bon état", critique pour sa part Karim, préparateur de commandes qui reproche à Getir de privilégier l'ouverture de nouveaux magasins. 

"Ca marchait les premiers mois mais tous les véhicules ont maintenant un problème", assure-t-il devant un scooter au pneu crevé.


Macron fustige les «bourgeois des centres-villes» qui financent «parfois» le narcotrafic

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  • Emmanuel Macron a également insisté sur "la nécessité d'avoir une approche interministérielle du très local à l'international"
  • La question est au centre du débat public depuis l'assassinat jeudi à Marseille de Mehdi Kessaci, le frère d'un militant engagé contre le narcotrafic

PARIS: Le président Emmanuel Macron a estimé mercredi lors du Conseil des ministres que ce sont "parfois les bourgeois des centres-villes qui financent les narcotrafiquants", selon des propos rapportés par la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon lors de son compte-rendu.

Le chef de l'État a appuyé "l'importance d'une politique de prévention et de sensibilisation puisque, je reprends ses mots, +c'est parfois les bourgeois des centres-villes qui financent les narcotrafiquants+", a précisé Maud Bregeon, ajoutant: "on ne peut pas déplorer d'un côté les morts et de l'autre continuer à consommer le soir en rentrant du travail".

Emmanuel Macron a également insisté sur "la nécessité d'avoir une approche interministérielle du très local à l'international". La question est au centre du débat public depuis l'assassinat jeudi à Marseille de Mehdi Kessaci, le frère d'un militant engagé contre le narcotrafic.

 


Amiante dans les écoles: plus de 50 personnes et sept syndicats portent plainte à Marseille

Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire. (AFP)
Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire. (AFP)
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  • "La grande majorité des établissements scolaires en France, construits avant son interdiction en 1997, présentent encore à ce jour de l’amiante dans de nombreux éléments du bâti", rappelle dans un communiqué l'avocate Julie Andreu
  • Or, la vétusté de certains d'entre eux aggrave l'exposition à l'amiante et selon l'avocate, "les responsables concernés (collectivités locales) n’ont pas pris les mesures qui s’imposent"

MARSEILLE: Ils sont parents d'élèves, enseignants, agents municipaux: une cinquantaine de personnes, toutes exposées à l'amiante dans des écoles des Bouches-du-Rhône, vont déposer mercredi à Marseille une plainte contre X pour "mise en danger délibérée de la vie d'autrui".

Sept syndicats et trois associations de victimes de l'amiante sont aussi plaignants dans ce dossier, qui concerne 12 établissements scolaires, la plupart à Marseille.

"La grande majorité des établissements scolaires en France, construits avant son interdiction en 1997, présentent encore à ce jour de l’amiante dans de nombreux éléments du bâti", rappelle dans un communiqué l'avocate Julie Andreu, qui représente ces plaignants d'une douzaine d'établissements scolaires et dont la plainte va être déposée à 14h.

Or, la vétusté de certains d'entre eux aggrave l'exposition à l'amiante et selon l'avocate, "les responsables concernés (collectivités locales) n’ont pas pris les mesures qui s’imposent".

Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire.

"Une collègue est décédée en avril 2024 des suites d’un cancer lié à l’amiante, reconnu comme maladie professionnelle", a expliqué dans un dossier de presse le collectif stop amiante éducation, dans lequel sont réunis les syndicats et associations plaignants.

Le collectif dénonce "de nombreuses défaillances", notamment une absence d'information sur l'amiante, malgré les obligations réglementaires, ou encore une absence de protection pendant les travaux.

En mars, les syndicats enseignants avaient révélé que plus de 80% des bâtiments scolaires en France étaient potentiellement concernés par la présence d'amiante.

Un rapport du Haut Conseil de la Santé Publique publié en 2014, prévoit que d’ici 2050, 50.000 à 75.000 décès par cancer du poumon dus à l’amiante aient lieu, auxquels s’ajoutent jusqu'à 25.000 décès par mésothéliome (un autre type de cancer).

 


Assassinat de Mehdi Kessaci: «Non, je ne me tairai pas» face au narcotrafic, dit son frère dans une tribune au Monde

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  • "Je dirai et répéterai que mon frère Mehdi est mort pour rien. Je dirai la violence du narcotrafic"
  • "On me parle de crime d’avertissement. Mais un crime n'est jamais un avertissement"

PARIS: "Non, je ne me tairai pas" face au narcotrafic, a déclaré mercredi dans une tribune publiée dans le journal Le Monde Amine Kessaci, le frère de Mehdi, abattu jeudi à Marseille par deux personnes à moto.

"Je dirai et répéterai que mon frère Mehdi est mort pour rien. Je dirai la violence du narcotrafic", a également écrit le militant écologiste de 22 ans, engagé dans la lutte contre le narcobanditisme. En 2020, cette famille de six enfants avait déjà été endeuillée par l'assassinat d'un autre de ses frères, Brahim, 22 ans, dont le corps avait été retrouvé carbonisé dans un véhicule.

"On me parle de crime d’avertissement. Mais un crime n'est jamais un avertissement", a encore déclaré Amine Kessaci, qui a enterré mardi son frère Mehdi. "Voici ce que font les trafiquants : ils tentent d’annihiler toute résistance, de briser toute volonté, de tuer dans l’œuf tout embryon de révolte pour étendre leur pouvoir sur nos vies", a-t-il ajouté.

La protection policière qui lui a été accordée ne l'a pas été à ses proches, a souligné le militant écologiste de 22 ans. "Pourtant, qui ignorait que ma famille avait déjà payé un tribut de sang? Comment ne pas savoir que ma famille pouvait être touchée ?", s'est-il interrogé.

"Face à un tel ennemi, l’Etat doit prendre la mesure de ce qu'il se passe et comprendre qu'une lutte à mort est engagée", a-t-il encore prévenu.

"Il est temps d’agir, par exemple de faire revenir les services publics dans les quartiers, de lutter contre l’échec scolaire qui fournit aux trafiquants une main-d’œuvre soumise, de doter les enquêteurs et les forces de police des moyens dont ils ont besoin, de renforcer, de soutenir réellement les familles de victimes du narcotrafic. Nous comptons nos morts, mais que fait l’Etat ?"

Medhi Kessaci, 20 ans, a été assassiné jeudi à Marseille près d'une salle de concert par deux hommes à moto, activement recherchées, un "crime d'intimidation" et "un assassinat d'avertissement" pour les autorités.