Enfants placés: le Sénat se penche à son tour sur un texte très attendu

Adrien Taquet, ministre délégué à la protection de l'enfance, s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale française à Paris, le 25 février 2020.(AFP)
Adrien Taquet, ministre délégué à la protection de l'enfance, s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale française à Paris, le 25 février 2020.(AFP)
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Publié le Mardi 14 décembre 2021

Enfants placés: le Sénat se penche à son tour sur un texte très attendu

  • Voté à l'unanimité en première lecture par l'Assemblée nationale en juillet, le projet de loi est très attendu par les sénateurs, même s'ils le considèrent « assez limité »
  • Des défaillances sont régulièrement pointées dans l'accueil et le suivi des quelque 350.000 enfants et jeunes bénéficiant d’un suivi de la protection de l'enfance

PARIS : Interdiction des placements à l'hôtel, meilleure rémunération des familles d'accueil, accompagnement des 18-21 ans... Le Sénat se penche mardi et mercredi sur le sort des enfants confiés à l'Aide sociale à l'enfance, dans l'objectif d'une adoption définitive du texte en début d'année.

Pour le secrétaire d'Etat chargé de l'Enfance Adrien Taquet, il "vise tout d'abord à améliorer la sécurité des enfants, qu'elle soit affective, matérielle ou physique".

Des défaillances sont régulièrement pointées dans l'accueil et le suivi des quelque 350.000 enfants et jeunes bénéficiant d’un suivi de la protection de l'enfance, dont environ la moitié sont placés en institution ou en familles d'accueil.

Des drames qu'illustre le téléfilm choc "l'enfant de personne" d'Akim Isker, tiré du livre "l'enfer des foyers" où Lyes Louffok raconte son parcours chaotique qu'il a commenté lors d'une soirée spéciale le 15 novembre sur France 2.

Voté à l'unanimité en première lecture par l'Assemblée nationale en juillet, le projet de loi est très attendu par les sénateurs, même s'ils le considèrent "assez limité".

Parmi les "frémissements qui vont dans le bon sens", la centriste Nadia Sollogoub relève le fait que soit systématiquement recherchée la possibilité de confier l'enfant à un membre de sa famille ou à un "tiers digne de confiance". La consécration du "parrainage" des enfants pris en charge par l'ASE par des bénévoles. Ou encore le principe de prévoir la prise en charge des fratries dans un même lieu d'accueil. 

Le projet de loi a été adopté en commission par les sénateurs le 20 octobre. "On a essayé de faire un peu avancer les choses, de le compléter", a indiqué à l'AFP le rapporteur LR Bernard Bonne qui espère pouvoir trouver un terrain d'entente avec les députés. 

Parmi les principales modifications apportées en commission, les sénateurs ont prévu une interdiction totale d'hébergement des mineurs protégés dans des hôtels. Les députés avaient gardé la possibilité d'y recourir "à titre exceptionnel" pour deux mois maximum, afin de répondre à des situations d'urgence. Cette interdiction serait applicable dans un délai de deux ans. Ne seraient autorisés que les accueils en urgence dans des structures "jeunesse et sport". 

« Point crucial »

S'agissant des jeunes majeurs, dont le texte renforce l'accompagnement vers l'autonomie, ils ont explicitement inscrit le principe d'un "droit au retour" à l'Aide sociale à l'enfance (ASE) jusqu'à 21 ans. Un ajout que soutiendra le gouvernement.

Il a aussi été salué comme "un point crucial" par le Collectif Cause Majeur, qui réunit une vingtaine d'associations de protection de l’enfance. Le Collectif estime néanmoins "nécessaire d’aller plus loin".

Le gouvernement proposera dans l'hémicycle un amendement pour en "clarifier" la rédaction.

L'association SOS Villages d'Enfants demande en outre le rétablissement de l'article ajoutant les jeunes majeurs suivis par l'ASE au public prioritaire pour l'attribution d'un logement social, supprimé par les sénateurs en commission.

La grande solitude des enfants placés devenus majeurs

"Quand à 18 ans, vous sortez de la protection de l'enfance, vous vous retrouvez très seul, avec très peu de repères. Je n'avais plus de contact avec mes deux familles d'accueil successives, l'une maltraitante, l'autre Témoins de Jehovah", explique Joana Manciaux.

"Heureusement j'ai eu la chance d'avoir un contrat jeune majeur, accordé assez facilement dans les Ardennes, et j'ai pu ainsi financer mes études, mon loyer, mes transports. Sinon je me serais retrouvée SDF", affirme cette formatrice professionnelle de 35 ans, présidente de l'association Repairs Ardennes, une communauté d'entraide pour enfants placés.

23.000 enfants de l'Aide sociale à l'enfance (ASE, ex-Ddass) deviennent majeurs chaque année et beaucoup sont livrés à eux-mêmes. 

36% seulement d'entre eux ont été pris en charge en 2018 en Accueil provisoire jeune majeur (APJM), contre 56% en 2013, et pour des périodes de plus en plus courtes (3 à 6 mois), selon le Collectif Cause Majeur! qui rassemble une vingtaine d'associations.

Un taux variable selon les départements qui, face aux restrictions budgétaires, ont pour certains réduit les dépenses non obligatoires, selon les associations.

Leur sort pourrait être amélioré par le projet de loi sur la protection de l'enfance porté par le secrétaire d'Etat à l'Enfance Adrien Taquet, adopté en juillet par l'Assemblée nationale et discuté mardi au Sénat.

Couperet des 18 ans 

Les associations demandent que ces jeunes soient accompagnés, de façon systématique, jusqu'à 21 voire 25 ans. Elles veulent qu'ils puissent cumuler l'accompagnement vers l'emploi ou la formation de la Garantie Jeunes et l'aide éducative, sociale voire financière de l'APJM.

Le gouvernement affirme vouloir que ces jeunes soient accompagnés jusqu'à leurs 21 ans s'ils "ne bénéficient pas de ressources ou d'un soutien familial suffisants" et a déposé un amendement dans ce sens.

"Notre objectif est qu'il n'y ait plus aucune sortie sans solution, on met fin au couperet des 18 ans", indique-t-on au cabinet d'Adrien Taquet. "Et cet accompagnement ne peut pas être de trois mois, il a vocation à s'inscrire dans la durée", jusqu'aux 21 ans de l'enfant au besoin.

40% des SDF de moins de 25 ans nés en France sont issus de l'ASE, selon Cause Majeur.

 

Aujourd’hui, "un quart des personnes sans domicile nées en France sont d’anciens enfants placés auprès de l'ASE", relève le Collectif, un chiffre qui atteint 40% pour les moins de 25 ans.

Les sénateurs proposent encore la création, à titre expérimental, et pour les départements qui le souhaitent, d'un comité départemental pour la protection de l'enfance, coprésidé par le président du département et par le préfet, afin que "tout le monde travaille ensemble", selon le rapporteur.

Ils ont approuvé en commission une revalorisation de la rémunération des assistants familiaux, qui accueillent chez eux des enfants placés. Et ils ont prévu qu'ils soient associés "effectivement" à l'élaboration et au suivi du projet pour l'enfant.

Les sénateurs ont encore précisé les modalités de contrôle des antécédents judiciaires des intervenants en protection de l'enfance, notamment en matière d'infractions sexuelles.

La gauche va s'opposer à l'article rendant obligatoire le recours au fichier national AEM ("appui à l'évaluation de la minorité"), afin de mieux repérer les jeunes étrangers ayant déposé des demandes de protection dans plusieurs départements.

Plus de 300 amendements ont été déposés sur ce texte, dont une vingtaine par le gouvernement. L'un d'eux vise à inscrire l’accompagnement des enfants victimes de prostitution parmi les missions de l’Aide sociale à l'enfance.

Certains ne cachent pas leur amertume d'avoir vu le texte doublé par la proposition de loi contre la maltraitance animale.


La France rapatrie treize femmes et enfants depuis les camps en Syrie, une première depuis deux ans

La Française Emilie Konig marche dans le camp Al-Roj, dans le nord-est de la Syrie, le 28 mars 2021, où elle est détenue avec d'autres personnes soupçonnées d'être des proches de membres présumés du groupe Daesh. (AFP)
La Française Emilie Konig marche dans le camp Al-Roj, dans le nord-est de la Syrie, le 28 mars 2021, où elle est détenue avec d'autres personnes soupçonnées d'être des proches de membres présumés du groupe Daesh. (AFP)
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  • La France a rapatrié dix enfants et trois femmes détenus dans des camps jihadistes en Syrie, marquant la première opération du genre depuis deux ans
  • Deux femmes ont été placées en garde à vue, et une troisième présentée à un juge antiterroriste

PARIS: La France a rapatrié tôt mardi matin dix enfants et trois femmes âgées de 18 à 34 ans qui étaient détenus dans des camps de prisonniers jihadistes dans le nord-est de la Syrie, une première depuis deux ans.

Parmi les femmes, "deux ont été placées en garde à vue, sur commission rogatoire du juge d'instruction", a annoncé le Parquet national antiterroriste (Pnat) dans un communiqué.

"Une autre femme, faisant l'objet d'un mandat d'arrêt, sera présentée à un juge d'instruction dans la journée" en vue d'une possible mise en examen, a-t-il ajouté.

"Les mineurs sont pris en charge dans le cadre de procédures d'assistance éducative sous la responsabilité du parquet" de Versailles, a indiqué le Pnat, qui "assurera le suivi centralisé des mineurs concernés, en lien avec les parquets territoriaux".

"La France remercie les autorités syriennes de transition ainsi que l'administration locale du Nord-Est syrien qui a rendu possible cette opération", a déclaré de son coté le porte-parole du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères.

Cette opération est une première depuis juillet 2023 en France, où ces retours restent une question sensible, dix ans après la vague d'attentats jihadistes sur le sol national.

Au total, 179 enfants et 60 femmes adultes ont été rapatriées depuis 2019, précise une source diplomatique.

Mais ces opérations avaient cessé à l'été 2023, faute de volontaires selon les autorités, et ce malgré des condamnations internationales dont celle de la Cour européenne des droits de l'Homme en 2022.

- "Arbitraire" -

"Pour les familles qui attendaient leurs petits-enfants, neveux et nièces depuis plus de six ans, c'est un immense et indescriptible soulagement", a déclaré l'avocate des femmes rapatriées, Marie Dosé, dans un communiqué transmis à l'AFP.

Mais "la France laisse derrière elle 110 autres enfants français, toujours détenus dans le camp Roj", l'un des camps contrôlés comme d'autres centres et prisons par les forces kurdes, depuis plus de six ans, dénonce-t-elle.

Des dizaines de milliers de personnes, d'une cinquantaine de nationalités et soupçonnées de liens avec l'organisation jihadiste État islamique, sont retenues dans ces camps.

En juin, quelque 120 enfants et une cinquantaine de femmes françaises y étaient encore retenus, selon le Collectif des Familles unies, qui rassemble leurs proches.

Après ce rapatriement nocturne, ce collectif a rediffusé sur X mardi matin son message habituel dénonçant la détention sur place d'enfants "coupables de rien" dans "des conditions indignes".

Car pour ces familles, rien n'est encore réglé. "Une nouvelle fois, la France fait le choix de l'arbitraire", regrette Marie Dosé.

"La France, qui refusait de rapatrier des enfants tant que leurs mères n'avaient pas donné leur accord, refuse aujourd'hui leur retour alors qu'ils sont devenus majeurs. Ce faisant et plus que jamais, la France décide donc de faire payer à ces enfants le choix de leurs parents", estime-t-elle aussi.

Elle dénonce également le sort de femmes sans enfant ou dont les enfants sont décédés, et que la France refuse désormais de rapatrier, ainsi que d'enfants nés en France et "conduits de force en Syrie" avant de pouvoir acquérir la nationalité, ou de jeunes majeurs enfermés dans d'autres lieux de détention syriens.

Pour Matthieu Bagard, responsable du pôle expertise Syrie de l'ONG Avocats sans frontières France, "ce rapatriement démontre une nouvelle fois que la France a la possibilité d'organiser ces opérations". Mais il déplore lui aussi la situation des femmes et jeunes majeurs toujours "illégalement détenus".

En février, l'administration kurde a annoncé, en coordination avec l'ONU, son intention de vider d'ici fin 2025 les camps du nord-est de la Syrie des déplacés syriens et irakiens, y compris les proches présumés de jihadistes.


Après «Bloquons tout» et les promesses de «rupture», les syndicats dans la rue jeudi

"Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées. (AFP)
"Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées. (AFP)
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  • Après sa rencontre avec Sébastien Lecornu lundi, la cheffe de file de la CGT, Sophie Binet, se montrait plus que jamais déterminée, malgré l'abandon de la suppression de deux jours fériés samedi
  • Dès son arrivée à Matignon, Sébastien Lecornu avait promis des "ruptures sur le fond" et "pas que sur la forme"

PARIS: "Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées.

Après sa rencontre avec Sébastien Lecornu lundi, la cheffe de file de la CGT, Sophie Binet, se montrait plus que jamais déterminée, malgré l'abandon de la suppression de deux jours fériés samedi. "(Il) ne s'est engagé à rien du tout. Aucune des mesures catastrophiques du musée des horreurs de M. Bayrou n'est enterrée !", a-t-elle lancé.

Dès son arrivée à Matignon, Sébastien Lecornu avait promis des "ruptures sur le fond" et "pas que sur la forme". Depuis vendredi, il reçoit les syndicats représentatifs - à l'exception de Frédéric Souillot (FO) qui souhaite le rencontrer après le 18. Mais ces derniers maintiennent leur appel à la mobilisation du 18, espérant peser de tout leur poids sur les futures orientations budgétaires.

CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, FSU et Solidaires seront ainsi unis jeudi dans la rue, pour la première fois depuis le 6 juin 2023 - date de la dernière mobilisation contre la réforme des retraites.

Les mesures avancées cet été sont "d'une brutalité sans précédent", dénonçaient-ils fin août dans un communiqué commun, regrettant que l'ancien gouvernement choisisse "encore une fois de faire payer les travailleuses et les travailleurs, les précaires, les retraité·es, les malades".

Ils pointent "des coupes dans les services publics, (...), une énième réforme de l'assurance chômage, le gel des prestations sociales et celui des salaires des fonctionnaires comme des contractuel·les, la désindexation des pensions de retraites, le doublement des franchises médicales, la remise en cause de la 5ème semaine de congés payés…".

L'abandon de la suppression de deux jours fériés, unanimement décriée par le monde syndical, constitue "une première victoire", qui "confirme que nous sommes en position de force", a estimé Sophie Binet.

Même la CFDT, pourtant peu rompue aux cortèges syndicaux, maintient sa participation: vendredi, Marylise Léon a réaffirmé que son syndicat était "plus que jamais motivé pour aller dans la rue", à l'issue de son entrevue avec Sébastien Lecornu.

"Le budget tel qu'il a commencé à être construit n'est pas compatible avec la justice sociale, fiscale et environnementale donc il y a vraiment besoin de le revoir de fond en comble", a-t-elle estimé lundi sur France Inter.

Sur la durée ? 

Sur la taxation des hauts patrimoines, revenue au cœur du débat, Mme Léon a pourtant apprécié que le Premier ministre dise être conscient de la nécessité de "faire quelque chose".

"Le budget, il va se décider dans la rue", insiste Mme Binet. Ainsi, "il faut faire une démonstration de force jeudi prochain et après", laissant entrevoir une mobilisation dans la durée.

Lundi, la CGT annonçait déjà plus de 220 manifestations, un chiffre encore amené à évoluer.

Les organisations syndicales parviendront-elles à dépasser l'affluence du mouvement citoyen "Bloquons tout" - qui a rassemblé près de 200.000 personnes le 10 septembre selon le ministère de l'Intérieur, sans toutefois parvenir à paralyser le pays ? Les manifestants du 10, parfois méfiants vis-à-vis des syndicats, participeront-ils à cette nouvelle journée ?

Aucune inquiétude côté syndical: "Nous avons déjà d'excellents retours sur la mobilisation de jeudi", assure Frédéric Souillot (FO).

"Nous avons l'objectif d'avoir un million de personnes avec nous", avance de son côté Cyril Chabanier (CFTC).

"La colère sociale est toujours là", abonde Julie Ferrua, co-déléguée générale de Solidaires.

De leur côté, les autorités s'attendent à une mobilisation plus importante que le 10 septembre et craignent la présence de plusieurs centaines de manifestants radicaux dans des cortèges. Une cellule de crise sera ouverte dès mardi au ministère de l'Intérieur.

Après le 18, ce sera le tour des agriculteurs de la FNSEA, le 26 septembre, de mener "une grande journée d'actions" autour des échanges internationaux de produits agricoles.


Lecornu va mettre fin aux "avantages à vie" des ex-ministres dès 2026

Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu participe à une réunion alors qu'il visite le centre de santé départemental à Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025. (AFP)
Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu participe à une réunion alors qu'il visite le centre de santé départemental à Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025. (AFP)
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  • Le Premier ministre Sébastien Lecornu concrétise une promesse phare pour réduire le « décalage » entre les élites politiques et la réalité des Français, dans un contexte de forte défiance envers sa nomination

PARIS: Fini le chauffeur et la voiture de fonction "à vie" pour les anciens de Matignon: les avantages octroyés aux ex-Premiers ministres seront "supprimés" dès 2026, a annoncé lundi Sébastien Lecornu, concrétisant l'une de ses premières promesses, très symbolique pour l'opinion.

Il n'est "pas concevable" que les anciens ministres "puissent bénéficier d'avantages à vie en raison d'un statut temporaire", a écrit le locataire de Matignon sur X, confirmant la mise en place de cette réforme dès le 1er janvier 2026.

"La protection policière ne sera accordée aux anciens Premiers ministres et ministres de l'Intérieur que pour une durée limitée, et reconduite en fonction de la réalité du risque. Tous les autres moyens mis à disposition des anciens Premiers ministres à vie le seront dorénavant pour une durée limitée", a expliqué M. Lecornu sur ce réseau social.

Sollicité par l'AFP, Matignon a expliqué que le gouvernement avait préparé une "instruction" à destination du Secrétariat général du gouvernement, en vue de revoir le décret du 20 septembre 2019, qui avait déjà restreint les privilèges accordés aux anciens Premiers ministres.

Ces derniers peuvent actuellement se voir octroyer "sur leur demande, un véhicule de fonction et un conducteur automobile", à la charge de l'Etat. Ils peuvent aussi bénéficier d'un "agent pour leur secrétariat particulier" pendant dix ans à compter de la fin de leurs fonctions et au plus tard jusqu'à ce qu'ils atteignent l'âge de 67 ans.

Des avantages qui ne s'appliquent pas pour les "ex" de Matignon lorsque ces derniers disposent déjà de ces privilèges via leur mandat (parlementaire ou local) ou leur fonction publique.

- "Mettre fin aux derniers privilèges" -

Une autre instruction du chef du gouvernement à l'attention de la Direction générale de la police nationale (DGPN) permettra de créer "un cadre" relatif à la "protection policière" des anciens Premiers ministres et ministres de l'Intérieur, a détaillé Matignon.

"On ne peut pas demander aux Français de faire des efforts si ceux qui sont à la tête de l'État n'en font pas. La réforme, ce n'est pas toujours +pour les autres+, cela crée la suspicion", avait lancé Sébastien Lecornu dans un entretien donné à plusieurs titres de la presse régionale durant le week-end.

"Beaucoup de choses ont été réglées pour les anciens présidents de la République. Je vais donc mettre fin aux derniers privilèges", avait-il encore promis, quelques jours seulement après sa prise de fonctions à Matignon, durant laquelle il s'était inquiété du "décalage" observé entre la vie politique et la vie "réelle" des Français.

Le Premier ministre, nommé mardi par Emmanuel Macron après la chute de François Bayrou, met ainsi en musique l'une de ses premières promesses, alors qu'il consulte en parallèle les forces politiques, syndicales et patronales en vue de former un gouvernement susceptible de survivre aux menaces de censure des oppositions.

Il doit aussi batailler contre une opinion publique très défiante vis-à-vis de sa nomination, même si les chiffres de confiance des Français à son égard varient selon les instituts de sondage.

Son prédécesseur, François Bayrou, avait déjà annoncé vouloir passer au crible ces privilèges ministériels: il avait confié fin août une mission à l'ex-député socialiste René Dosière pour identifier les "avantages indus, excessifs, inacceptables" dans un contexte de dérapage des finances publiques.

En réalité, l'économie à espérer de ces annonces est dérisoire par rapport aux dizaines de milliards d'euros recherchées par les gouvernements successifs. Les privilèges accordés au titre du décret de 2019 (chauffeur, secrétariat, véhicule) ont coûté 1,58 million d'euros à l'Etat en 2024, selon le gouvernement.

Un montant auquel il faut ajouter les dépenses de protection policière, évaluées à 2,8 millions d'euros par an dans un rapport parlementaire de 2019.