Guerre nucléaire: une véritable menace alors que les efforts de non-prolifération s'amenuisent

Les experts pensent que le risque d’une guerre nucléaire est plus élevé que jamais, l’horloge de l’apocalypse a été réglée à 100 secondes avant minuit (Photo, AFP).
Les experts pensent que le risque d’une guerre nucléaire est plus élevé que jamais, l’horloge de l’apocalypse a été réglée à 100 secondes avant minuit (Photo, AFP).
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Publié le Mardi 11 janvier 2022

Guerre nucléaire: une véritable menace alors que les efforts de non-prolifération s'amenuisent

  • Le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires engage les États à réduire leurs arsenaux, en vue de les éliminer complètement
  • Le 3 janvier, le P5, groupe des cinq États, a publié une déclaration affirmant qu’ «une guerre nucléaire ne peut jamais être gagnée et ne doit donc jamais être livrée»

NEW YORK: Bien que le monde soit naturellement préoccupé par la pandémie du coronavirus, le réchauffement climatique et les conflits régionaux, il serait erroné de croire que la menace d’une guerre nucléaire s’est estompée. En effet, le risque d’anéantissement nucléaire demeure dangereusement élevé.
Au début de l’année, la pandémie a engendré une nouvelle victime, la 10e conférence d’examen des parties au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, initialement prévue le 4 janvier.
Le report de la réunion à août est passé inaperçu, comme si la menace posée par les armes nucléaires avait perdu de son ampleur au cours des dernières décennies.
Cependant, ce report survient alors que les tensions se sont aggravées entre les pays occidentaux et la Russie au sujet de l’Ukraine et entre les États-Unis et la Chine concernant Taïwan.
Le Traité de non-prolifération (ou TNP) a été signé en 1968 puis est entré en vigueur en 1970. C’est l’unique moyen dont les 191 États parties disposent pour prévenir toute nouvelle prolifération et pour conduire le monde vers un désarmement total.
Le pacte sur lequel repose le TNP est assez simple : les États nucléaires qui adhèrent au Traité s’engagent à réduire leurs arsenaux dans le but ultime de les éliminer complètement, et les États non nucléaires respectent leurs engagements inscrits dans le Traité : ne pas se doter d’armes nucléaires.
Tous les États ne s’y sont pas conformés. L’Inde, le Pakistan, Israël et la Corée du Nord n'en font pas partie. Toutefois, l’Iran, bien que signataire du TNP, procède à l’enrichissement de son uranium et se trouve engagé dans une bataille avec l’Occident au sujet de son programme nucléaire.
C’est la seconde fois que la 10e conférence d’examen est reportée à cause de la pandémie. La conférence de 2020, qui aurait coïncidé avec le 50e anniversaire du TNP, avait aussi été remise à plus tard, faisant ainsi échouer l’espoir de remettre en selle le TNP et de redonner vie au contrôle des armes et au processus de désarmement.

L’Iran, bien que signataire du TNP, procède à l’enrichissement de l’uranium et se trouve engagé dans une bataille avec l’Occident au sujet de son programme nucléaire. (Photo, AFP).

Les trois piliers du TNP – la non-prolifération, le désarmement et l’utilisation pacifique des technologies nucléaires – ont connu un succès variable.
Alors que les États non nucléaires ont respecté leurs engagements et se sont conformés au Traité (à quelques exceptions près), les États nucléaires se sont montrés moins fidèles. Ils ne se sont pas acquittés de leur obligation, comme le stipule l’article 6 du TNP, de débarrasser le monde des armes nucléaires. Cela a donné lieu à des tensions et a mis en péril le régime de non-prolifération.
Les États non nucléaires, à la recherche d’une alternative, ont oeuvré à l’adoption par l’Assemblée générale des Nations Unies du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, qui est entré en vigueur le 22 janvier 2021.
Toutefois, le report de la conférence est survenu au pire moment, à l’heure où les inquiétudes montent face au problème du contrôle des armements.
Les experts pensent que le risque d’une guerre nucléaire est plus élevé que jamais. Le «Bulletin des scientifiques atomiques» a avancé l’aiguille de l’horloge de l’apocalypse à minuit moins cent secondes – l’heure la plus proche de la «fin» depuis plus de 70 ans d’existence.

En BREF

*Le TNP, qui compte 191 signataires, est l’accord sur le contrôle des armes nucléaires le plus largement ratifié au monde.
* La conférence d’examen du TNP devait commencer le 4 janvier, au siège de l’ONU.
* Les conférences d’examen doivent avoir lieu chaque cinq ans pour évaluer le respect des engagements et prendre de nouvelles mesures.
* La 10e conférence d’examen qui a été reportée devait commencer en avril 2020.

En 2020, à l’occasion du 50e anniversaire du TNP, l’ancien sénateur américain Sam Nunn a prononcé un discours à travers lequel il a exposé le danger en termes clairs.
 «Nous entrons dans une ère de risque nucléaire accru», a-t-il déclaré. C’est le résultat de «la stagnation des progrès en ce qui concerne la Corée du Nord, le futur incertain de l’accord iranien et du programme nucléaire, l’échec continu de mettre en vigueur le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) et la frustration compréhensible des États non nucléaires face à la lenteur du désarmement.»
Aujourd’hui, à l’heure où la pandémie fait rage, les États nucléaires continuent de moderniser et d’améliorer leurs arsenaux. Selon la Campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires, les neuf États nucléaires du monde ont dépensé $72,6 milliards pour moderniser leurs arsenaux en 2020 – soit $1,4 milliard de plus qu’en 2019. En faisant cela, plusieurs de ces États ont enfreint le TNP.
L’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm estime que les États nucléaires du monde possédaient, ensemble, environ 13 080 armes nucléaires en janvier 2021, ce qui représente une baisse légère par rapport à l'estimation de 2020 (13 400).
Néanmoins, cela a été compensé par l'augmentation du nombre d'armes nucléaires déployées au sein des forces opérationnelles, passant de 3 720 en 2020 à 3 825 en 2021. Parmi celles-ci, environ 2 000 ont été «maintenues en état d'alerte opérationnelle élevé», indique l'Institut dans son rapport de 2021.
Tout cela s’est produit en l’absence d’une procédure crédible de contrôle des armements à cause des tensions croissantes entre les États-Unis et le Russie au sujet de l’Ukraine, ainsi que l’Amérique et la Chine au sujet de Taïwan, de Hong Kong et de l’espace indopacifique.
Bien qu’ils aient été déçus du report de la conférence, les États non nucléaires ont été rassurés le 3 janvier, lorsque les États-Unis, la Russie, la Chine, la France et le Royaume-Uni – groupe de puissances connu sous le nom du P5 – ont publié une déclaration commune selon laquelle ils «envisagent d’éviter la guerre entre les États dotés d’armes nucléaires et de réduire les risques stratégiques.»
 «Nous affirmons qu’une guerre nucléaire ne peut jamais être gagnée et qu’elle ne doit donc jamais être livrée. Étant donné que l’utilisation du nucléaire peut engendrer de lourdes conséquences, nous affirmons également que les armes nucléaires – tant qu’elles existeront – devraient servir à des fins défensives, prévenir les agressions et empêcher la guerre. Nous sommes fermement convaincus que la propagation de ces armes doit cesser.»

Le 11 janvier 2003, plus d’un million de personnes se sont rassemblées sur la place Kim II-Sung à Pyongyang pour écouter les dirigeants politiques acclamer la décision de la Corée du Nord de se retirer du TNP. (Photo, AFP)

Ils se sont même engagés à «maintenir et à renforcer davantage [leurs] mesures nationales pour prévenir l’utilisation illicite ou involontaire des armes nucléaires.»
Le plus important est sans doute qu’ils ont réaffirmé leur engagement «aux obligations du TNP, y compris l’article 6 selon lequel il faudrait poursuivre les négociations, en toute bonne foi, pour aboutir à des moyens concrets qui permettraient la cessation de la course aux armes nucléaires et le désarmement nucléaire total, sous un contrôle international rigoureux et efficace.»
Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a précisé qu’il était «encouragé» par l’engagement des États nucléaires à «adopter des mesures pour empêcher la guerre». «La seule façon d’éliminer tout risque nucléaire est d’éliminer toutes les armes nucléaires», a-t-il ajouté.
Les groupes et les experts de la non-prolifération se sont également félicités de la déclaration, mais ils veulent voir les puissances nucléaires agir concrètement.

La secrétaire d’État américaine Hillary Clinton prend la parole pendant la conférence d’examen de haut niveau des parties au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, au siège de l’ONU, à New York, en 2010. (Photo, AFP)

Du point de vue des pays arabes, il manquait cependant un élément important dans la déclaration commune. La résolution de 1995 du TNP introduite par les États-Unis, le Royaume-Uni et la Russie, qui vise à rendre le Moyen-Orient exempt de toutes armes de destruction massive, n’a en effet pas été évoquée.
On espérait que la 10e conférence d’examen serait une opportunité pour reconnaître les progrès réalisés à cet égard. La première Conférence sur la création au Moyen-Orient d’une zone exempte d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive a eu lieu au siège des Nations Unies à New York en 2019, sous la présidence de la Jordanie, puis en 2021, sous la présidence du Koweït.
Israël, le seul État du Moyen-Orient censé posséder des armes nucléaires, n'a assisté à aucune des sessions. Les États-Unis n’y ont pas assisté non plus, bien qu’ils soient l’un des principaux parrains de la résolution de 1995.
Les partisans du contrôle des armements n'ont plus qu’à attendre le mois d'août pour voir si le P5 appuiera sa déclaration par des gestes concrets et aboutira à une «issue positive» qui préservera l'intégrité du TNP.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Les ministres du Groupe E3 condamnent les frappes israéliennes à Doha

Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
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  • Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza
  • Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas

PARIS: Les ministres des Affaires étrangères de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni ont condamné, dans une déclaration conjointe, les frappes israéliennes ayant visé Doha le 9 septembre. Ils estiment que ces attaques constituent une violation de la souveraineté du Qatar et représentent un risque d’escalade supplémentaire dans la région.

Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza. « Nous appelons toutes les parties à intensifier leurs efforts pour parvenir à un cessez-le-feu immédiat », ont-ils insisté.

Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas. Ils appellent les parties à « faire preuve de retenue » et à saisir l’opportunité de rétablir la paix.

Les ministres ont réaffirmé que la priorité devait rester la mise en place d’un cessez-le-feu permanent, la libération des otages et l’acheminement massif d’aide humanitaire à Gaza pour enrayer la famine. Ils demandent l’arrêt immédiat des opérations militaires israéliennes dans la ville de Gaza, dénonçant les déplacements massifs de civils, les pertes humaines et la destruction d’infrastructures vitales.

Ils exhortent par ailleurs à garantir aux Nations unies et aux ONG humanitaires un accès sûr et sans entrave à l’ensemble de la bande de Gaza, y compris dans le Nord.

Enfin, le Groupe E3 a rappelé sa condamnation « sans équivoque » des crimes commis par le Hamas, qualifié de mouvement terroriste, qui doit, selon eux, « libérer immédiatement et sans condition les otages, être désarmé et écarté définitivement de la gouvernance de la bande de Gaza ».


L’ONU adopte une résolution franco-saoudienne pour la paix israélo-palestinienne sans le Hamas

L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
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  • Résolution adoptée par 142 voix pour, 10 contre — dont Israël et les États-Unis
  • Le vote précède un sommet de haut niveau co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre

​​​​​​NEW YORK : L’Assemblée générale des Nations unies a voté massivement vendredi en faveur de l’adoption de la « Déclaration de New York », une résolution visant à relancer la solution à deux États entre Israël et la Palestine, sans impliquer le Hamas.

Le texte a été approuvé par 142 pays, contre 10 votes négatifs — dont Israël et les États-Unis — et 12 abstentions. Il condamne fermement les attaques du Hamas du 7 octobre 2023, exige le désarmement du groupe, la libération de tous les otages, et appelle à une action internationale collective pour mettre fin à la guerre à Gaza.

Intitulée officiellement « Déclaration de New York sur le règlement pacifique de la question de Palestine et la mise en œuvre de la solution à deux États », la résolution a été présentée conjointement par l’Arabie saoudite et la France, avec le soutien préalable de la Ligue arabe et de 17 États membres de l’ONU.

Le texte souligne la nécessité de mettre fin à l’autorité du Hamas à Gaza, avec un transfert des armes à l’Autorité palestinienne, sous supervision internationale, dans le cadre d’une feuille de route vers une paix durable. Celle-ci inclut un cessez-le-feu, la création d’un État palestinien, le désarmement du Hamas, et une normalisation des relations entre Israël et les pays arabes.

L’ambassadeur de France, Jérôme Bonnafont, qui a présenté la résolution, l’a qualifiée de « feuille de route unique pour concrétiser la solution à deux États », soulignant l’engagement de l’Autorité palestinienne et des pays arabes en faveur de la paix et de la sécurité. Il a aussi insisté sur l’urgence d’un cessez-le-feu immédiat et de la libération des otages.

Ce vote intervient à quelques jours d’un sommet de haut niveau de l’ONU, co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre, où le président Emmanuel Macron s’est engagé à reconnaître officiellement un État palestinien.

La représentante américaine, Morgan Ortagus, s’est vivement opposée à la résolution, la qualifiant de « coup de communication malvenu et malavisé » qui récompenserait le Hamas et nuirait aux efforts diplomatiques authentiques.

Elle a dénoncé la mention du « droit au retour » dans le texte, estimant qu’il menace le caractère juif de l’État d’Israël.

« Cette résolution est un cadeau au Hamas,» a déclaré Mme Ortagus, ajoutant que le désarmement du Hamas et la libération des otages étaient la clé de la fin de la guerre. Elle a exhorté les autres nations à se joindre aux États-Unis pour s'opposer à la déclaration.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Frappes ukrainiennes sur les raffineries et forte demande: en Russie, l'essence devient chère

Début septembre, le prix de la tonne d'AI-95, l'un des carburants sans-plomb les plus populaires en Russie, s'est envolé pour atteindre plus de 82.000 roubles (environ 826 euros), tutoyant des records, selon les données de la bourse de Saint-Pétersbourg. (AFP)
Début septembre, le prix de la tonne d'AI-95, l'un des carburants sans-plomb les plus populaires en Russie, s'est envolé pour atteindre plus de 82.000 roubles (environ 826 euros), tutoyant des records, selon les données de la bourse de Saint-Pétersbourg. (AFP)
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  • Mercredi, le média Izvestia évoquait des "interruptions d'approvisionnement" dans "plus de dix régions" de Russie, l'un des principaux producteurs de pétrole au monde
  • A Moscou, vitrine de la Russie, pas de pénurie mais une hausse qui a propulsé le litre de sans-plomb 95 à plus de 66 roubles (0,67 euro)

MOSCOU: "Doucement mais sûrement": Oleg fait le plein d'essence à Moscou et vitupère contre la hausse des prix nourrie par une demande accrue et les frappes ukrainiennes contre les infrastructures pétrolières, secteur clé de l'économie russe que les Occidentaux veulent sanctionner.

"Tout le monde l'a remarqué", tonne Oleg, retraité de 62 ans: les prix des carburants vont crescendo à la pompe. Au 1er septembre, l'essence au détail coûtait 6,7% de plus que fin 2024, selon Rosstat, l'agence nationale des statistiques.

Ce renchérissement s'inscrit dans un contexte de hausse générale des prix, avec une inflation annuelle qui a été de 8,14% en août, à l'heure où la Russie intensifie l'offensive qu'elle a lancée en 2022 en Ukraine.

Début septembre, le prix de la tonne d'AI-95, l'un des carburants sans-plomb les plus populaires en Russie, s'est envolé pour atteindre plus de 82.000 roubles (environ 826 euros), tutoyant des records, selon les données de la bourse de Saint-Pétersbourg.

Et depuis le début de l'été, les réseaux sociaux sont saturés de vidéos montrant des files d'attente devant les stations-service de l'Extrême-Orient russe, en Crimée - région que la Russie a annexée au détriment de Kiev en 2014 -, et dans certaines régions du sud proches de l'Ukraine, pour cause de pénurie.

Mercredi, le média Izvestia évoquait des "interruptions d'approvisionnement" dans "plus de dix régions" de Russie, l'un des principaux producteurs de pétrole au monde.

Raffineries frappées 

A Moscou, vitrine de la Russie, pas de pénurie mais une hausse qui a propulsé le litre de sans-plomb 95 à plus de 66 roubles (0,67 euro). Ce prix, qui reste bien inférieur à ceux affichés dans de nombreux pays européens, surprend le consommateur russe, habitué à ne pas payer cher l'essence et au revenu moyen moindre.

Artiom, un Moscovite qui ne souhaite pas donner son nom de famille, observe cette augmentation "depuis le début de l'année". "Pour des personnes ordinaires, 300 ou 400 roubles en plus par plein (3 à 4 euros, ndlr), cela commence à être sensible", dit-il.

Sur le site Gazeta.ru, Igor Iouchkov, analyste au Fonds national de sécurité énergétique, met en avant l'augmentation d'"environ 16%" du droit d'accise (impôt indirect) depuis le 1er janvier et la baisse de subsides versés aux compagnies pétrolières.

Car, comme l'explique à l'AFP Sergueï Teriochkine, expert en questions énergétiques, "plus les subventions sont faibles, plus la rentabilité est faible", ce qui pousse les pétroliers à "répercuter" ces pertes sur les prix au détail.

La demande a, elle, été dopée par les départs en vacances et les engins agricoles.

Restent - surtout - les frappes contre les raffineries et dépôts de pétrole que l'Ukraine a multipliées afin de toucher Moscou au portefeuille et d'entraver sa capacité à financer son offensive.

"Les frappes ont ciblé de grandes raffineries dans la partie européenne de la Russie", notamment dans les régions de Samara, Riazan, Volgograd et Rostov, énumère Alexandre Kots, journaliste russe spécialiste des questions militaires, sur Telegram.

"Ce n'est rien!" 

L'une de ces attaques, à la mi-août, a touché la raffinerie de Syzran, dans la région de Samara, selon l'état-major ukrainien. Le complexe se trouve à plus de 800 km de la frontière ukrainienne. Il est présenté par Kiev comme le "plus important du système Rosneft", géant russe des hydrocarbures.

Moscou n'a pas quantifié l'impact de ces frappes, mais dans le journal Kommersant, l'analyste Maxime Diatchenko parle d'une baisse de la production "de près de 10%" depuis le début de l'année.

"C'est rien!", assure Alexandre, un homme d'affaires moscovite, après avoir rempli le réservoir de sa berline allemande. "Une frappe, deux frappes, trois frappes, ça n'est rien pour le marché en général ou pour les prix".

"Le pays a besoin d'argent. L'augmentation du prix de l'essence, c'est une façon d'augmenter le revenu de l'Etat", estime de son côté Vladimir, un Moscovite de 50 ans.

Pour tenter de stabiliser la situation, Moscou a prolongé une interdiction d'"exporter de l’essence pour les automobiles" jusque fin octobre.

La Russie reste par ailleurs un exportateur majeur de pétrole brut, des exportations que les Occidentaux entendent étouffer pour tarir une des principales sources de financement de l'offensive russe en Ukraine, pays qui compte l'Union européenne comme principale alliée.