La Tunisie doit mener des «réformes très profondes» selon le FMI

Le sceau du Fonds monétaire international près du siège de la Banque mondiale à Washington, DC, le 10 janvier 2022. (Photo, AFP)
Le sceau du Fonds monétaire international près du siège de la Banque mondiale à Washington, DC, le 10 janvier 2022. (Photo, AFP)
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Publié le Dimanche 16 janvier 2022

La Tunisie doit mener des «réformes très profondes» selon le FMI

  • Après une chute de quasi 9% du PIB en 2020, la croissance est revenue à un peu plus de 3% en 2021 avec autant de prévu pour 2022
  • Et par chance, la Tunisie ne fera pas face à de grosses échéances de remboursement de sa dette à court terme

TUNIS : En quête de financements internationaux, la Tunisie doit mener "des réformes très profondes", notamment pour réduire le poids de la fonction publique qui atteint l'un des niveaux "les plus élevés au monde", estime Jérôme Vacher, représentant du FMI en Tunisie.

Au terme de son mandat de trois ans, M. Vacher rappelle dans une interview à l'AFP que la Tunisie a connu à cause du Covid-19 "sa plus grave récession depuis l'indépendance" (en 1956). Il souligne cependant que "les maux du pays étaient préexistants, en particulier les déficits budgétaires et une dette publique (près de 100% du PIB fin 2021) qui se sont aggravés".

Après une chute de quasi 9% du PIB en 2020, la croissance est revenue à un peu plus de 3% en 2021 avec autant de prévu pour 2022.

Elle reste toutefois "faible et très largement insuffisante" pour résorber un taux de chômage qui dépasse les 18%, et est "élevé aussi parmi les jeunes diplômés", estime M. Vacher. Il observe toutefois qu'"une main-d'oeuvre qualifiée, un capital humain de très bonne qualité et une localisation géographique favorable" sont des atouts pour le pays.

Dès sa formation en octobre -- plus de deux mois après le coup de force du président Kais Saied qui s'est arrogé les pleins pouvoirs le 25 juillet --, le gouvernement de Najla Bouden a demandé au Fonds monétaire international (FMI) un nouveau programme d'aide.

Les autorités tunisiennes se disent optimistes sur la possibilité d'un accord du FMI avant la fin du premier trimestre 2022.

Mais selon M. Vacher, les discussions n'en sont qu'à un stade préliminaire et le FMI veut d'abord "comprendre quelles sont leurs intentions en matière de réformes économiques" car "il y a un besoin de réformes très profondes, structurelles".

Il faut "un programme solide et crédible (..) sur le moyen terme et communiqué à la population, même si cela implique d'expliquer les difficultés", dit-il.

Néanmoins, "dans la mesure où il y a déjà un effort technique qui est engagé" par le gouvernement et qu'il y a "une compréhension des principaux défis et des principaux problèmes, c'est déjà une bonne base pour préparer et s'engager sur un programme de réformes".

Parmi les urgences, M. Vacher mentionne le "poids important" de la fonction publique (16% du PIB), les salaires des 650.000 fonctionnaires absorbant plus de la moitié des dépenses annuelles de l'Etat, "sans compter les collectivités locales et les entreprises publiques".

«Situation particulière»

Cette "situation particulière" de la Tunisie, où "la masse salariale de la fonction publique est l'une des plus élevées au monde", même comparée à l'Egypte, au Maroc, au Liban ou à la Jordanie, empêche le pays d'augmenter "ses dépenses d'avenir, d'investissements, d'éducation et de santé", déplore M. Vacher.

Autre urgence: "une réforme profonde des entreprises publiques", présentes dans de multiples secteurs (télécoms, électricité, eau potable, transport aérien), souvent monopolistiques et qui emploient au moins 150 000 personnes.

Il y a aussi "un effort important d'efficacité à faire" par rapport "à ce qu'attend la population en matière de services publics", selon le représentant du FMI.

La "rigidité au niveau budgétaire est aggravée par le poids de certaines subventions" étatiques, note-t-il, soulignant notamment "le caractère inégalitaire des subventions sur l'essence".

Le FMI préconise d'ailleurs d'accompagner une refonte du système des subventions (carburants, produits de première nécessité) par des mécanismes de compensation à destination des populations plus défavorisées.

Par ailleurs, le FMI est conscient de "l'effet catalytique" de ses décisions pour les autres bailleurs de fonds, nationaux et étrangers, publics et privés, sachant que l'Union européenne et plusieurs grands pays ont conditionné toute nouvelle aide à un feu vert du Fonds.

C'est une responsabilité pour le FMI mais, pour M. Vacher, "la responsabilité la plus grande est au niveau des décideurs politiques, c'est à eux d'agir pour trouver des solutions".

D'après lui, on ne peut pas dire comme certains l'assurent que la Tunisie serait au bord de la faillite financière: "Il y a une gestion budgétaire qui se fait et s'adapte à la situation, pas forcément optimale mais gérable".

Et par chance, la Tunisie ne fera pas face à de grosses échéances de remboursement de sa dette à court terme.


Israël: le ministre de la Défense avertit qu'il n'y aura "pas de calme" au Liban sans sécurité pour son pays

Un an après le cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne maintient toujours cinq positions dans le sud du Liban, avec des fortifications et des voies d'accès élargies, selon des images satellites analysées par l'AFP. (AFP)
Un an après le cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne maintient toujours cinq positions dans le sud du Liban, avec des fortifications et des voies d'accès élargies, selon des images satellites analysées par l'AFP. (AFP)
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  • Israël avertit qu’aucun calme ne reviendra au Liban tant que sa propre sécurité ne sera pas garantie, intensifiant ses frappes malgré la trêve et affirmant vouloir désarmer le Hezbollah
  • L’Égypte tente de désamorcer les tensions, tandis que l’application du cessez-le-feu reste bloquée : l’armée libanaise dit vouloir démanteler les positions du Hezbollah, mais Israël et les États-Unis accusent Beyrouth de traîner

JERUSALEM: Le ministre de la Défense israélien a averti mercredi qu'il n'y aura "pas de calme" au Liban sans sécurité pour son pays, alors qu'Israël a intensifié ses opérations militaires au Liban ces dernières semaines, en dépit d'un accord de cessez-le-feu.

"Nous ne permettrons aucune menace contre les habitants du nord, et une pression maximale continuera à être exercée et même s'intensifiera", a déclaré Israël Katz lors d'une intervention devant le parlement israélien, avançant pour preuve "l'élimination" dimanche à Beyrouth du chef militaire du Hezbollah.

"Il n'y aura pas de calme à Beyrouth ni d'ordre et de stabilité au Liban tant que la sécurité de l'Etat d'Israël ne sera pas garantie", a ajouté M. Katz en affirmant que son pays allait désarmer le Hezbollah.

Le ministre égyptien des Affaires étrangères a déclaré mercredi que son pays oeuvrait à la désescalade des tensions entre Israël et le mouvement armé libanais soutenu par l'Iran.

"Nous craignons toute escalade et nous sommes inquiets pour la sécurité et la stabilité du Liban", a déclaré ce ministre, Badr Abdel Ati, après sa rencontre avec le président libanais Joseph Aoun à Beyrouth mercredi.

"Nous engageons des efforts considérables pour épargner au Liban tout risque, ou toute atteinte, concernant sa sécurité", a-t-il ajouté.

Israël a frappé le Liban à plusieurs reprises malgré la trêve, affirmant régulièrement cibler les membres et les infrastructures du Hezbollah pour empêcher le groupe de se réarmer, ce qu'il nie être en train de faire.

En vertu de l'accord de cessez-le-feu, l'armée libanaise doit démanteler la présence militaire du Hezbollah sur une bande d'une trentaine de kilomètres entre la frontière avec Israël et le fleuve Litani, plus au nord.

L'armée a soumis un plan au gouvernement, dans lequel elle s'engage à accomplir cette tâche titanesque, avant de procéder par étapes sur le reste du territoire libanais. Mais les Etats-Unis et Israël accusent les autorités libanaises de tarder, face à la ferme opposition du Hezbollah.

Ce dernier invoque notamment le maintien par Israël de cinq postes dans le sud du Liban, dont l'accord de cessez-le-feu stipule pourtant que l'armée israélienne doit se retirer.


Soudan: le chef de l'armée exhorte Trump à mettre fin à la guerre

Des filles soudanaises qui ont fui El-Fasher reçoivent une aide humanitaire au camp de déplacés d'Al-Afad, à Al-Dabba, dans le nord du Soudan, mardi. (AFP)
Des filles soudanaises qui ont fui El-Fasher reçoivent une aide humanitaire au camp de déplacés d'Al-Afad, à Al-Dabba, dans le nord du Soudan, mardi. (AFP)
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  • Abdel Fattah al-Burhane appelle Donald Trump à intervenir pour imposer la paix au Soudan
  • Alors que les violences s’intensifient, les initiatives internationales peinent à avancer

PORT-SOUDAN : Le chef de l’armée soudanaise, Abdel Fattah al-Burhane, en guerre depuis avril 2023 contre un groupe paramilitaire rival, a appelé mercredi le président américain Donald Trump à instaurer la paix.

« Le peuple soudanais se tourne désormais vers Washington pour la prochaine étape : s’appuyer sur l’honnêteté du président américain et travailler avec nous — ainsi qu’avec ceux dans la région qui recherchent sincèrement la paix — pour mettre fin à cette guerre », écrit le dirigeant de facto du Soudan dans une tribune publiée dans The Wall Street Journal.

Les tentatives de paix entre Burhane et son ancien adjoint, le chef des Forces de soutien rapide (FSR), Mohamed Hamdan Dagalo, ont échoué à maintes reprises au fil d’un conflit ayant fait des dizaines de milliers de morts, déplacé 12 millions de personnes et provoqué les pires crises de faim et de déplacement au monde.

Trump s’est intéressé pour la première fois à cette guerre la semaine dernière, promettant d’y mettre fin après avoir été exhorté à s’impliquer par le prince héritier saoudien, Mohammed ben Salmane.

« Le consensus parmi les Soudanais est que M. Trump est un dirigeant qui parle directement et agit avec détermination. Beaucoup estiment qu’il a la capacité de s’opposer aux acteurs étrangers qui prolongent notre souffrance », écrit Burhane.

Les États-Unis et les Émirats arabes unis, aux côtés de l’Arabie saoudite et de l’Égypte, tentent actuellement de négocier une trêve.

Dans son texte de 1 200 mots publié mercredi, Burhane affirme qu’il s’agit de choisir « entre un État souverain qui tente de protéger ses citoyens et une milice génocidaire déterminée à détruire des communautés ».

Le gouvernement de Burhan est reconnu au niveau international, et en janvier, les États-Unis ont déterminé que la RSF avait commis un génocide dans la région occidentale du Darfour.

Mais ses propres forces ont également été accusées d’exactions depuis le début de la guerre, notamment d’avoir visé des civils et bombardé sans discrimination des zones résidentielles.

Le militaire de carrière, qui avait collaboré avec Dagalo en 2021 pour écarter les civils d’un gouvernement de transition, écrit mercredi : « J’ai longtemps reconnu que les FSR étaient une poudrière. »

Le chef des FSR, Dagalo, dont les combattants avaient été initialement recrutés par Khartoum pour mener ses guerres dans les périphéries du Soudan, était devenu le bras droit de Burhane après le soulèvement de 2018-2019.

Un long conflit de pouvoir, resté latent, a finalement explosé en guerre ouverte le 15 avril 2023.


Tunisie: l'ambassadeur UE convoqué par le président Saied pour «non respect des règles du travail diplomatique» 

Le président tunisien Kais Saied a convoqué mardi Giuseppe Perrone, ambassadeur de l'Union européenne, pour "lui exprimer une protestation ferme concernant le non-respect des règles diplomatiques", selon un bref communiqué officiel diffusé mercredi à l'aube qui ne précise pas les faits reprochés. (AFP)
Le président tunisien Kais Saied a convoqué mardi Giuseppe Perrone, ambassadeur de l'Union européenne, pour "lui exprimer une protestation ferme concernant le non-respect des règles diplomatiques", selon un bref communiqué officiel diffusé mercredi à l'aube qui ne précise pas les faits reprochés. (AFP)
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  • Le président Saied a exprimé à son interlocuteur son rejet du "recours à des pratiques en dehors des cadres officiels reconnus par les usages diplomatiques"
  • L'UGTT, ancienne co-lauréate du Prix Nobel de la Paix en 2015 pour sa contribution à la phase de démocratisation de la Tunisie, après la révolution de 2011 et la chute du président Zine El Abidine Ben Ali, revendique plus de 700.000 adhérents

TUNISIE: Le président tunisien Kais Saied a convoqué mardi Giuseppe Perrone, ambassadeur de l'Union européenne, pour "lui exprimer une protestation ferme concernant le non-respect des règles diplomatiques", selon un bref communiqué officiel diffusé mercredi à l'aube qui ne précise pas les faits reprochés.

Le président Saied a également exprimé à son interlocuteur son rejet du "recours à des pratiques en dehors des cadres officiels reconnus par les usages diplomatiques".

Lundi, M. Perrone avait reçu Noureddine Taboubi, chef du principal syndicat tunisien UGTT -- qui a récemment menacé de déclencher une grève générale pour obtenir des hausses salariales -- et avait salué "le rôle important" de l'organisation "en faveur du dialogue social et du développement économique" en Tunisie, selon un communiqué de la délégation européenne à Tunis.

L'UGTT, ancienne co-lauréate du Prix Nobel de la Paix en 2015 pour sa contribution à la phase de démocratisation de la Tunisie, après la révolution de 2011 et la chute du président Zine El Abidine Ben Ali, revendique plus de 700.000 adhérents.

Le diplomate européen avait "réaffirmé sa volonté de poursuivre le dialogue avec l'UGTT et de continuer à soutenir la Tunisie sur les plans social et économique, dans divers secteurs", selon la même source. De son côté, le secrétaire général de l'UGTT avait appelé à renforcer et développer la coopération entre la Tunisie et l'Union européenne.

La semaine passée, M. Taboubi a présidé une réunion de l'UGTT où il a apporté son soutien à différents mouvements de grève en cours dans le secteur privé pour réclamer des augmentations de salaires. Il a salué le succès d'une grève générale ayant eu lieu dans la grande ville de Sfax (centre-est) et menacé d'organiser prochainement une grande grève au niveau national.

"L'organisation se dirige vers une grève générale pour défendre les acquis matériels et sociaux des travailleurs face aux difficultés quotidiennes".

M. Taboubi a dénoncé "une baisse du pouvoir d'achat" des Tunisiens face à "des conditions de vie précaires sur le plan des transports, de la santé et de la maladie", défendant "leur droit syndical à se défendre" afin d'obtenir "un salaire décent qui leur fait défaut actuellement".

Le salaire minimum en Tunisie est d'environ 520 dinars (150 euros) pour 48 heures par semaine. Le taux d'inflation reste très élevé notamment pour les produits alimentaires. Il est récemment revenu à environ 5% après avoir atteint un pic de 10% en 2023.