Au procès du 13-Novembre, les «signes de radicalisation» des frères Abdeslam

Ce croquis d'audience réalisé le 2 novembre 2021 montre Salah Abdeslam (C), principal suspect des attentats de Paris du 13 novembre 2015, lors du procès qui se déroule dans une salle d'audience provisoire aménagée au Palais de Justice de Paris. (AFP)
Ce croquis d'audience réalisé le 2 novembre 2021 montre Salah Abdeslam (C), principal suspect des attentats de Paris du 13 novembre 2015, lors du procès qui se déroule dans une salle d'audience provisoire aménagée au Palais de Justice de Paris. (AFP)
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Publié le Vendredi 04 février 2022

Au procès du 13-Novembre, les «signes de radicalisation» des frères Abdeslam

  • La cour insiste: «vous dites "j'ai rien vu". Qu'est-ce qu'ils auraient pu faire ou dire pour que vous voyiez une radicalisation ?»
  • Appelés l'un après l'autre à la barre de la cour d'assises spéciale de Paris, Hamza Attou et Ali Oulkadi sont deux des trois accusés qui comparaissent depuis le 8 septembre libres sous contrôle judiciaire

 

PARIS: L'un dit n'avoir "rien vu", l'autre a pensé à "un délire passager": au procès des attentats du 13-Novembre, les débats se sont attardés jeudi sur les "signes de radicalisation" des frères Abdeslam qui auraient pu permettre d'anticiper un passage à l'acte. 


Appelés l'un après l'autre à la barre de la cour d'assises spéciale de Paris, Hamza Attou et Ali Oulkadi sont deux des trois accusés qui comparaissent depuis le 8 septembre libres sous contrôle judiciaire.  


Il leur est reproché d'avoir aidé le seul membre des commandos encore en vie, Salah Abdeslam, dans sa cavale après les attentats. Le premier est allé le récupérer en région parisienne dans la nuit du 13 au 14 novembre 2015, le second l'a caché à Bruxelles. 


Ces faits ne seront abordés par la cour qu'à la fin mars. Dans un premier temps, ses interrogations sont ailleurs: quelle "perception" avaient-ils de la radicalisation des frères Abdeslam ? 


Début 2015, Ali Oulkadi, client régulier du café "Les Béguines" de Brahim Abdeslam, dans la commune bruxelloise de Molenbeek, note les premiers "propos radicaux" chez le futur tueur des terrasses, décédé le 13-Novembre après avoir fait exploser sa ceinture explosive. 


Il l'entend notamment dire qu'un musulman ne peut pas pratiquer sa religion en Belgique, visionne avec lui quelques vidéos "d'exactions et de propagande" du groupe Etat islamique. 


Mais Ali Oulkadi, 37 ans aujourd'hui, ne le prend "pas au sérieux": "à chaque fois que Brahim (Abdeslam) tenait ce genre de propos, il n'avait pas d'arguments et se contredisait après: il mettait la dernière chanson à la mode".


"Pour moi, il était dans un délire passager. Ses actes contredisaient ses paroles", affirme l'accusé, la voix un peu tremblante à la barre.


De "signe", Hamza Attou n'en a vu lui "aucun". Tout au plus, le plus jeune des accusés, âgé de 21 ans au moment des attentats, a vu Brahim Abdeslam "regarder des vidéos de l'Etat islamique", mais sans y "prêter attention".


"Ça m'intéressait pas", assure d'un ton poli et catégorique, les mains accrochées au pupitre, Hamza Attou, qui était "tous les jours" aux Béguines où il revendait du cannabis pour son "ami" et "patron" Brahim Abdeslam.

«Avec le recul»
Fin janvier 2015, Ali Oulkadi et Hamza Attou accompagnent Brahim Abdeslam à l'aéroport de Zaventem, près de Bruxelles. Pour lui dire "adieu" avant son départ en Syrie, comme l'affirme le quatrième homme du voyage, entendu comme témoin mi-décembre ? 


"C'est faux !", clament les deux accusés pour qui Brahim Abdeslam "partait en vacances en Turquie".


"Tout seul, pendant quinze jours, sans que cela ne les étonne?", s'interroge le président de la cour, Jean-Louis Périès.  


A son retour, "il m'a dit qu'il était dans un hôtel avec une grande piscine, qu'il en avait bien profité", répond Ali Oulkadi. Ce dernier demande quand même à voir "des photos", mais Brahim Abdeslam lui assure qu'il a "donné son téléphone". "Je lui faisais confiance", explique l'accusé. 


Avec Hamza Attou, Brahim Abdeslam et son frère cadet Salah assistent alors au concert d'un chanteur de rap de passage à Bruxelles. 


"Ils ont bien masqué leur jeu. C'est avec le recul, en 2022, que je vous dis ça", lâche l'accusé au visage poupin, les cheveux noirs coiffés en brosse.


La cour insiste: "vous dites +j'ai rien vu+. Qu'est-ce qu'ils auraient pu faire ou dire pour que vous voyiez une radicalisation ?"


"Ben qu'ils soient une menace pour la société, qu'ils aient des propos menaçants envers un innocent", tente Hamza Attou, qui répète n'avoir "rien entendu" de tel.


Aurait-il pu "déceler, identifier" cette radicalisation ? 


Après l'accusé, l'ancien "monsieur prévention de la radicalisation" de la commune de Molenbeek, cité comme témoin par la défense, livre son analyse: "c'est extrêmement compliqué d'identifier un processus de basculement, de poser un diagnostic sur un processus avéré de radicalisation, tant il y a de biais". 


Grève nationale : les syndicats unis contre le budget du futur gouvernement

Des policiers attendent l'arrivée du ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau à la Porte d'Orléans à Paris, le 18 septembre 2025, avant une journée de grèves et de protestations à l'échelle nationale à l'appel des syndicats sur le budget national de la France. (AFP)
Des policiers attendent l'arrivée du ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau à la Porte d'Orléans à Paris, le 18 septembre 2025, avant une journée de grèves et de protestations à l'échelle nationale à l'appel des syndicats sur le budget national de la France. (AFP)
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  • Journée de grève nationale ce jeudi à l’appel des 8 principaux syndicats français, unis contre les mesures budgétaires jugées « brutales »
  • Les autorités redoutent des débordements à Paris, avec jusqu’à 100 000 manifestants attendus et la présence annoncée de casseurs. 900 000 personnes pourraient se mobiliser dans toute la France

Les syndicats français ont promis une "journée noire" de manifestations et de grèves jeudi pour peser sur les choix budgétaires du prochain gouvernement, en pleine crise politique dans la deuxième économie de l'UE.

A Paris, le préfet de police s'est dit "très inquiet" de la présence de nombreux casseurs venant pour "en découdre" dans la manifestation prévue dans la capitale, qui pourrait selon lui rassembler 50.000 à 100.000 personnes.

Les autorités s'attendent à une mobilisation massive, avec plus de 250 cortèges annoncés qui pourraient réunir jusqu'à 900.000 personnes à travers le pays, soit cinq fois plus que lors du mouvement "Bloquons tout" du 10 septembre lancé sur les réseaux sociaux, hors de tout cadre syndical.

Cette mobilisation lancée par les huit syndicats français, unis pour la première fois depuis le 6 juin 2023, vise les mesures budgétaires "brutales" préconisées cet été par le Premier ministre François Bayrou pour réduire le déficit de la France (coupes dans le service public, réforme de l'assurance chômage, gel des prestations sociales notamment).

Son gouvernement alliant le centre droit et la droite, minoritaire à l'Assemblée nationale, a été renversé par les députés le 8 septembre.

Nommé le lendemain, son successeur Sébastien Lecornu - troisième Premier ministre d'Emmanuel Macron depuis juin 2024, le cinquième depuis sa réélection en 2022 - s'est lui aussi engagé à réduire le déficit qui plombe les comptes de la nation (114% du PIB), tout en promettant des "ruptures sur le fond" en matière budgétaire.

Ce fidèle du président a entamé une série de consultations avec les partis politiques avant de composer un gouvernement et présenter son programme, en vue de boucler dès que possible un projet de budget pour 2026.

Il a également reçu quasiment tous les syndicats, qui n'en ont pas moins maintenu leur mot d'ordre, espérant une mobilisation similaire à celles de 2023 contre la réforme des retraites qui avaient régulièrement réuni un million de manifestants, dont un pic à 1,4 million.

- "Démonstration de force" -

"Aucune des mesures catastrophiques du musée des horreurs de M. Bayrou n'est enterrée !", s'est indignée lundi la leader de la CGT, Sophie Binet, après avoir rencontré le nouveau Premier ministre.

L'abandon par Sébastien Lecornu de la très controversée suppression de deux jours fériés voulue par François Bayrou est "une première victoire", qui "confirme que nous sommes en position de force", a-t-elle estimé.

Même la CFDT, syndicat réputé plus apte au compromis, est "plus que jamais motivée pour aller dans la rue", a fait savoir sa responsable Marylise Léon qui attend "des faits et des preuves" du nouveau chef de gouvernement, et notamment un "besoin d’efforts partagés".

Elle a apprécié à cet égard que le successeur de François Bayrou se dise selon elle conscient de la nécessité de "faire quelque chose" au sujet de la taxation des hauts patrimoines, revenue au cœur du débat.

"Le budget va se décider dans la rue", estime Mme Binet, qui évoque une "démonstration de force" et laisse entrevoir une mobilisation dans la durée.

Côté transports, le trafic sera "perturbé" voire "très perturbé" dans la capitale, ainsi que pour les trains interurbains.

Ce sera moins le cas pour les trains régionaux et les TGV. Un service proche de la normale est attendu dans les aéroports, le principal syndicat de contrôleurs aériens ayant reporté sa grève.

A l'école, un tiers des enseignants du premier degré (écoles maternelles et élémentaires) seront grévistes. L'ampleur du mouvement dans la fonction publique en générale reste encore à préciser.


Le PDG de CMA CGM assure «ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale» des médias qu'il possède

Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
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  • "Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media
  • Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique"

PARIS: Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC.

"Les journaux ou chaînes de télévision qu'on a rachetés ont une indépendance, ce sont des journaux qui sont nuancés, qui offrent le pluralisme. Je ne m'immisce pas dans la ligne éditoriale de ces journaux", a-t-il déclaré lors d'une audition devant la commission des affaires économiques de l'Assemblée.

Il répondait au député France insoumise René Pilato qui suggérait une "grande loi de séparation des entreprises et des médias".

"Si des investisseurs comme le groupe CMA CGM ne viennent pas, ces médias malheureusement tombent", a ajouté M. Saadé, rappelant que le secteur des médias est "très sinistré".

"Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media.

Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique".

"Dans un monde traversé par les +fake news+, je crois que les industriels ont un rôle à jouer pour défendre le pluralisme, l'indépendance et la qualité de l'information. Si nous voulons continuer à produire de l'information en France et résister à la domination des grandes plateformes, nous devons garantir des groupes de médias solides capables de créer des contenus de qualité et de les diffuser sur tous les supports", a-t-il défendu.

Outre BFMTV, RMC, et désormais Brut, CMA Media possède les journaux La Tribune et La Tribune Dimanche, La Provence et Corse Matin. Le groupe vient également de racheter la chaîne télé Chérie 25 (NRJ Group).

Vendredi, les Sociétés des journalistes (SDJ) de BFMTV, RMC et La Tribune avaient déploré qu'"une prise de position de Rodolphe Saadé sur l'actualité politique et sociale du pays (ait) été diffusée à l'antenne de BFMTV" jeudi.

Il s'agissait d'extraits écrits tirés d'une tribune publiée dans La Provence après le mouvement "Bloquons tout" du 10 septembre. "Les entreprises ne sont pas des adversaires, elles sont des partenaires de la Nation", y écrivait notamment M. Saadé.

 


Faure «sur sa faim» après son entretien avec Lecornu, resté «très flou» sur ses intentions

Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
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  • Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu
  • Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland

PARIS: Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions".

"Pour l'instant, nous sommes restés sur notre faim et nous verrons bien ce qu'il a à nous dire dans les prochains jours", a déclaré le premier secrétaire du PS, à l'issue de sa première rencontre à Matignon, qui a duré près de deux heures.

Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu à la veille d'une importante journée de mobilisation syndicale.

Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland.

A propos de la journée d'actions de jeudi, il a expliqué que ces manifestations seraient "aussi un élément du rapport de force que nous devons installer avec un exécutif qui, jusqu'ici, n'a pas fait la démonstration de sa capacité à comprendre la colère et même l'exaspération des Français".

Olivier Faure a également dit qu'il ne souhaitait pas "voir revenir sur la table une loi immigration", estimant que le Premier ministre macroniste était "tiraillé par une droite qui lorgne de plus en plus vers l'extrême droite" et avait  "beaucoup de problèmes dans son propre socle commun".

"Nous ne cherchons pas la censure, nous ne cherchons pas la dissolution, nous ne cherchons pas la destitution. Nous cherchons à ce que les Français soient entendus", a-t-il plaidé, en citant un sondage Ifop commandé par le parti montrant que les Français, quelles que soient leurs sensibilités, plébiscitent les mesures poussées par le PS.

"Il y a des mesures qui sont très majoritaires dans le pays, pour la taxe Zucman" sur les hauts patrimoines, "pour en finir" avec la réforme des retraites, pour "rendre du pouvoir d'achat", notamment à travers "un taux différentiel de CSG", a-t-il détaillé.