Darmanin en visite dans une Corse sous tension, attendu de pied ferme par les nationalistes

A Bastia, un graffiti qui se lit comme «Liberté» avec les formes des trois hommes impliqués dans le commando du préfet Erignac, Yvan Colonna (G), Alain Ferrandi (C) et Pierre Alessandri (D), le 14 mars 2022. (AFP)
A Bastia, un graffiti qui se lit comme «Liberté» avec les formes des trois hommes impliqués dans le commando du préfet Erignac, Yvan Colonna (G), Alain Ferrandi (C) et Pierre Alessandri (D), le 14 mars 2022. (AFP)
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Publié le Mercredi 16 mars 2022

Darmanin en visite dans une Corse sous tension, attendu de pied ferme par les nationalistes

  • A moins d'un mois du premier tour de l'élection présidentielle, Darmanin voit atterrir sur son bureau un dossier explosif, après le départ la «Madame Corse» du gouvernement
  • L'agression d'Yvan Colonna a suscité plusieurs manifestations violentes, dont celle de dimanche à Bastia qui a fait 102 blessés dont 77 parmi les forces de l’ordre, selon le parquet

PARIS: Gérald Darmanin, en visite mercredi et jeudi dans une Corse en proie aux violences depuis l'agression en prison d'Yvan Colonna, est attendu au tournant par les élus nationalistes qui mettent la pression sur l'Etat pour obtenir une "véritable solution politique" sur l'avenir de l’île.

A moins d'un mois du premier tour de l'élection présidentielle, le ministre de l'Intérieur voit atterrir sur son bureau un dossier explosif, après le départ la "Madame Corse" du gouvernement, Jacqueline Gourault.

La violente agression d'Yvan Colonna le 2 mars à la prison d'Arles (Bouches-du-Rhône), où il purgeait une peine de prison à perpétuité pour sa participation à l'assassinat du préfet Erignac en 1998 à Ajaccio, a fait ressurgir les tensions entre l'Etat et les nationalistes, frustrés que leurs victoires dans les urnes n'aient pas permis de faire aboutir leurs revendications pendant le quinquennat.


Envoyé en pompier de service sur une île où les divergences entre autonomistes et indépendantistes ont refait surface à la faveur de la crise, Gérald Darmanin a promis le début d'un "cycle sans précédent de discussions" avec les élus, dont le président autonomiste du Conseil exécutif de Corse Gilles Simeoni.

"Nous sommes prêts à aller jusqu'à l'autonomie. Voilà, le mot est dit", annonce le ministre dans un entretien à Corse Matin publié mercredi.  

Mais, prévient-il, "il ne peut pas y avoir de dialogue dans la violence. Le retour au calme est une condition sine qua non".

L'agression d'Yvan Colonna a suscité plusieurs manifestations violentes, dont celle de dimanche à Bastia qui a fait 102 blessés dont 77 parmi les forces de l’ordre, selon le parquet.

Une agression qualifiée par M. Darmanin d'"acte manifestement terroriste" et "dont l'objet aurait été le blasphème", a-t-il précisé, en faisant référence à Samuel Paty, enseignant décapité en 2020 en région parisienne pour avoir montré des caricatures de Mahomet à ses élèves.

Interrogé sur la raison de cette comparaison, le ministre a expliqué avoir trouvé "excessifs, pour ne pas dire insupportables, les mots de crime d'Etat" renvoyés dans cette affaire Colonna, "alors que nous sommes devant un acte terroriste".

L'agression d'Yvan Colonna, «un acte manifestement terroriste»

AJJACIO: L'agression dont a été victime Yvan Colonna, dans la prison où il purgeait une peine à perpétuité pour sa participation à l'assassinat du préfet Erignac, "est un acte manifestement terroriste", a affirmé le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin au quotidien Corse-Matin.


"De ce que j'ai compris, (...), c'est un acte manifestement terroriste (...), comme nous en connaissons sur le territoire national", a insisté le ministre dans un entretien publié mercredi matin par le journal corse, à quelques heures de son arrivée dans l'île, après deux semaines de tension et de violence autour de l'agression du militant indépendantiste à la maison centrale d'Arles (Bouches-du-Rhône), par un autre détenu, qui purgeait une peine de prison pour terrorisme. 


Un acte "dont l'objet aurait été le blasphème" a précisé M. Darmanin, en faisant référence à Samuel Paty, cet enseignant décapité en 2020 en région parisienne pour avoir montré des caricatures de Mahomet en cours à ses élèves.


Interrogé sur la raison de cette comparaison, le ministre a expliqué avoir trouvé "excessifs, pour ne pas dire insupportables, les mots de crime d'Etat" renvoyés dans cette affaire Colonna, "alors que nous sommes devant un acte terroriste".


"Lorsque Samuel Paty est assassiné, on ne qualifie pas cette attaque de crime d'Etat", a insisté Gérald Darmanin: "l'idée que l'Etat serait derrière, à organiser la mort d'Yvan Colonna, est insultante et profondément contraire à la vérité", même si tout cela "ne veut absolument pas dire qu'il n'y a pas eu des dysfonctionnements inacceptables".


Reconnaissant que la levée du statut de "détenu particulièrement signalé" de Colonna, alors qu'il est dans le coma depuis son agression, "a été perçue comme une provocation", le locataire de la place Beauvau a maintenu qu'il s'agissait d'"une mesure d'humanité", destinée notamment à faciliter les visites de ses proches à l'hôpital marseillais où il est suivi: "il fallait expliquer davantage, dont acte, mea culpa".


Pas question non plus pour le ministre d'admettre que ce sont les manifestations et la tension en Corse qui auraient poussé le gouvernement à lever le statut DPS de Pierre Alessandri et Alain Ferrandi, deux autres membres du "commando Erignac": "je crois que c'est faux, (c'était) dans l'ordre des choses", et leur rapprochement dans une prison corse "avait déjà été acté, la question était uniquement celle du timing", a-t-il assuré.


Pour le rapprochement de ces deux détenus en Corse, M. Darmanin a insisté sur "un préalable, qui est le retour au calme": "ce ne peut pas être la rue qui commande", a-t-il martelé.

Réforme abandonnée 
Après sa visite aux élus mercredi à Ajaccio, Gérald Darmanin ira jeudi à la brigade de gendarmerie de Porto-Vecchio, prise pour cible vendredi par des manifestants.

"On imagine que ça va bouger mercredi et jeudi, mais on manque encore de visibilité", souligne une source policière à l'AFP. Pour l'heure, seul un rassemblement devant la gendarmerie de Ghisonaccia (Haute-Corse) est annoncé.

Lundi, une soixantaine de policiers de la "CRS 8", une unité spéciale de maintien de l'ordre capable de se déplacer rapidement, sont arrivés en renfort dans l'Ile de Beauté, selon cette source.

Le signe d'apaisement envoyé la semaine dernière par le Premier ministre Jean Castex, avec la levée du statut de "détenu particulièrement signalé" (DPS) d'Yvan Colonna et des deux autres membres du "commando Erignac", Pierre Alessandri et Alain Ferrandi, n'a pas eu les effets escomptés.

Leur rapprochement "effectif" au centre pénitentiaire de Borgo (Haute-Corse) est désormais attendu par les nationalistes, qui étendent cette demande à tous les prisonniers dits "politiques" corses.

Plus largement, la visite de Gérald Darmanin doit permettre de trouver une "véritable solution politique", selon Gilles Simeoni.

"En sept ans, rien n'a avancé, et en sept jours de violences, les choses ont bougé. La violence est nécessaire", justifiait Antoine Negretti, 29 ans, lors de la manifestation dimanche à Bastia.

Si elle voit dans le déplacement du ministre "un bon début", la présidente nationaliste de l'assemblée de Corse Marie-Antoinette Maupertuis attend "des signes forts avant d'y croire", échaudée par les occasions manquées depuis 2017.

Reportée une première fois à l'été 2018 en raison de l'affaire Benalla, la réforme des institutions, qui devait entériner le statut particulier de la collectivité de Corse créée en 2015, avait de nouveau été présentée par le gouvernement un an plus tard sous une nouvelle mouture mais sans jamais être examinée depuis.

"C'est la mauvaise gestion du dossier corse par le gouvernement qui a créé la situation extrêmement tendue dans laquelle nous nous trouvons", selon Mme Maupertuis.

Yvan Colonna se trouvait toujours mardi dans un état "gravissime", selon son avocat Patrice Spinosi.

Ses conseils ont annoncé leur décision de demander une suspension de peine pour le berger corse, son pronostic vital étant engagé.


Explosion d'une bonbonne de gaz près de Lyon: un mort, 150 évacués

Environ 150 personnes ont été évacuées et regroupées dans un centre communal mis à disposition par la Ville de Vénissieux. (AFP)
Environ 150 personnes ont été évacuées et regroupées dans un centre communal mis à disposition par la Ville de Vénissieux. (AFP)
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  • L'explosion a eu lieu vers 03H30 dans la nuit de dimanche à lundi, dans un immeuble de sept étages, a précisé la préfecture du Rhône. Il s'agit d'une copropriété, a précisé le cabinet de la mairie de Vénissieux
  • Un corps a été retrouvé dans l'appartement du 4e étage où a eu lieu l'explosion d'une bonbonne de gaz, qui serait d'origine accidentelle, selon une source policière. La victime est l'occupant de l'appartement, un homme d'environ 70 ans

LYON: Un homme est mort lundi après l'explosion d'une bonbonne de gaz qui a provoqué un incendie dans un immeuble du quartier des Minguettes à Vénissieux (Rhône), dans la banlieue sud de Lyon, a-t-on appris de sources concordantes.

L'explosion a eu lieu vers 03H30 dans la nuit de dimanche à lundi, dans un immeuble de sept étages, a précisé la préfecture du Rhône. Il s'agit d'une copropriété, a précisé le cabinet de la mairie de Vénissieux.

Un corps a été retrouvé dans l'appartement du 4e étage où a eu lieu l'explosion d'une bonbonne de gaz, qui serait d'origine accidentelle, selon une source policière. La victime est l'occupant de l'appartement, un homme d'environ 70 ans, selon la préfecture.

Les circonstances devront être confirmées par l'enquête.

Neuf personnes ont été transportées à l'hôpital pour des examens.

Environ 150 personnes ont été évacuées et regroupées dans un centre communal mis à disposition par la Ville de Vénissieux.

"On reste mobilisés en cas de besoin", indique le cabinet de la mairie.

Un important dispositif a été déployé: 90 sapeurs-pompiers et 40 engins ont été mobilisés au plus fort de l'intervention des secours. Le préfet délégué pour la défense et la sécurité s'est rendu sur place lundi matin.

"Après avoir procédé à des vérifications, afin de s'assurer de la solidité de l'édifice, la moitié des occupants de l'immeuble vont pouvoir réintégrer leur logement dans la journée. Une opération de relogement est en cours par la commune de Vénissieux, pour le reste des résidents", a indiqué la préfecture.


«Tout bloquer» le 10 septembre: sur les réseaux, une mobilisation à plusieurs inconnues

Sur de nombreux comptes (TikTok, Facebook, X, Telegram), déjà établis ou spécialement créés, les messages de ce mouvement à l'état gazeux peuvent mentionner le RIC (referendum d'initiative citoyenne), réclamer des hausses de salaires et des retraites ou appeler à la "résistance", au confinement volontaire ou la grève générale. (AFP)
Sur de nombreux comptes (TikTok, Facebook, X, Telegram), déjà établis ou spécialement créés, les messages de ce mouvement à l'état gazeux peuvent mentionner le RIC (referendum d'initiative citoyenne), réclamer des hausses de salaires et des retraites ou appeler à la "résistance", au confinement volontaire ou la grève générale. (AFP)
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  • Des appels à "tout bloquer" en France le 10 septembre, venus d'horizons très divers, se multiplient sur les réseaux sociaux, en se cristallisant autour des coupes budgétaires voulues par François Bayrou
  • Les premières références à cette date, dont le choix ne semble pas avoir de justification particulière, remontent à mai, au moins

PARIS: Des appels à "tout bloquer" en France le 10 septembre, venus d'horizons très divers, se multiplient sur les réseaux sociaux, en se cristallisant autour des coupes budgétaires voulues par François Bayrou. Leur possible concrétisation dans la rue reste une inconnue.

Les premières références à cette date, dont le choix ne semble pas avoir de justification particulière, remontent à mai, au moins. Mais c'est en juillet, à la faveur des mesures d'économies annoncées par le Premier ministre, qu'elles ont gagné en visibilité.

Lancé à l'origine par une chaîne Telegram plutôt confidentielle, décliné sur un site nommé "Les essentiels France", ce mot d'ordre est relayé par divers groupes de discussion. Avec un canal principal d'organisation, "Indignons-nous", réunissant plusieurs milliers d'internautes.

Sur de nombreux comptes (TikTok, Facebook, X, Telegram), déjà établis ou spécialement créés, les messages de ce mouvement à l'état gazeux peuvent mentionner le RIC (referendum d'initiative citoyenne), réclamer des hausses de salaires et des retraites ou appeler à la "résistance", au confinement volontaire ou la grève générale.

Près de sept ans après le mouvement des Gilets jaunes, qui avait interpellé par son ampleur, "les ingrédients de la colère (sentiment de déclassement du bas de la classe moyenne, fin de mois difficiles pour les catégories populaires et ras-le-bol fiscal généralisé) n'ont pas disparu", relève le directeur du département Opinion à l'Ifop Jérôme Fourquet dans Le Point.

"Allume-feu" 

"Et c'est sur ces braises encore rougeoyantes que le gouvernement a versé un bidon d'essence avec son plan de rigueur (...), l'allume-feu étant, pour filer la métaphore du barbecue, la suppression de deux jours fériés", selon lui.

"Depuis les Gilets jaunes, il apparaît désormais envisageable de construire des mobilisations hors champ politique ou syndical traditionnel, en faisant usage des réseaux sociaux", observe pour l'AFP l'historien Stéphane Sirot.

Ce spécialiste des mouvements sociaux note toutefois que le 10 septembre tombe un mercredi, alors que les Gilets jaunes manifestaient le samedi, jour chômé pour la majorité des salariés.

Les actions prévues sont tantôt classiques, de "type grève", et "moins classiques, comme ne vous servez plus de votre carte bancaire à partir du 10 septembre" ou "n'allez plus faire vos courses dans les supermarchés", relève M. Sirot.

Sur le terrain, fin juillet, quelques dizaines de personnes se sont réunies pour débattre dans des parcs, à Paris ou Strasbourg, selon Franceinfo et Mediapart.

Comment ce mouvement peut-il résonner ou pas avec la stratégie des syndicats? Les confédérations ont rendez-vous le 1er septembre pour discuter des actions à mener, après avoir dénoncé notamment le projet de suppression de deux jours fériés.

Sans attendre, plusieurs unions départementales et fédérations de la CGT, dont celles de la chimie et du commerce, ont d'ores et déjà prévu de mobiliser le 10 septembre.

"Il y a de quoi être en colère, il faut des mobilisations, elles seront nombreuses comme celle du 10 septembre, et il y en aura d'autres", a déclaré à l'AFP Thomas Vacheron, secrétaire confédéral du syndicat.

"Début de la lutte" 

La fédération Mines-Energies de la CGT appelle elle à faire grève à partir du 2 septembre.

Contre les mesures budgétaires, Force ouvrière a aussi annoncé un préavis de grève à compter du 1er septembre et une grève est envisagée dans les hôpitaux parisiens.

Quelques responsables politiques soutiennent l'appel du 10 septembre, comme les députés Clémentine Autain et Alexis Corbiere, ex-LFI siégeant dans le groupe Ecologiste. Ils sont signataires d'une tribune publiée par la revue Regards appelant à faire de cette date "le début de la lutte" pour "une vie digne et heureuse".

Le leader de La France Insoumise Jean-Luc Mélenchon a assuré sur son blog se reconnaître dans les "motifs de cette action", tout en soulignant l'importance de son "indépendance" comme "condition de son succès".

"On suit, on regarde ce qui se passe sur les réseaux, on est vigilants", indique à l'AFP le député PS Arthur Delaporte. "Quand on appelle à rejoindre un mouvement, c'est dans le cadre d'une intersyndicale, là ce n’est pas le cas."

Même réserve, à l'extrême-droite, chez la députée RN Edwige Diaz. Son parti "par principe ne s'improvise pas instigateur de manifestations", a-t-elle souligné sur France Inter, tout en "compren(ant) la détresse de ces Français".

"Je n’ai pas l’impression que ça marche très fort", confie pour sa part une source gouvernementale à l'AFP. Tout en restant prudente: "On peut se tromper, il y avait beaucoup qui ne ressentaient pas les Gilets jaunes et ils sont arrivés..."


Les migrants inquiets de l'accord franco-britannique, mais les traversées continuent

Des migrants à bord d'un bateau de passeurs naviguent dans les eaux françaises pour tenter de traverser la Manche au large de la plage d'Hardelot à Neufchatel-Hardelot, dans le nord de la France, le 13 août 2025. (AFP)
Des migrants à bord d'un bateau de passeurs naviguent dans les eaux françaises pour tenter de traverser la Manche au large de la plage d'Hardelot à Neufchatel-Hardelot, dans le nord de la France, le 13 août 2025. (AFP)
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  • Une semaine après son entrée en vigueur, l'accord migratoire franco-britannique tourmente les candidats à l'exil amassés sur les côtes du nord de la France
  • L'accord franco-britannique prévoit le renvoi en France de migrants arrivés au Royaume-Uni en traversant la Manche par "small boats"

CALAIS: Une semaine après son entrée en vigueur, l'accord migratoire franco-britannique tourmente les candidats à l'exil amassés sur les côtes du nord de la France, mais sans enrayer pour l'heure les traversées clandestines de la Manche.

Trentenaire égyptien arrivé à Calais il y a deux jours, Adnan (prénom modifié) pianote sur son téléphone, à quelques mètres du campement de quelques tentes où il dort en plein centre-ville. Il essaie de contacter un passeur, explique-t-il, concentré.

"Moi, je vais tenter" la traversée, "le plus vite possible!", dit-il dans un sourire blanc immaculé. "Avant qu'ils commencent à arrêter et renvoyer des gens".

L'accord franco-britannique prévoit le renvoi en France de migrants arrivés au Royaume-Uni en traversant la Manche par "small boats", ces embarcations de fortune qu'ils utilisent.

Pour chaque migrant renvoyé en France, Londres s'est engagé à accepter une personne se trouvant dans l'Hexagone et ayant fait une demande sur une plateforme en ligne.

Les détails sont encore flous, y compris pour les associations qui servent de relais avec les migrants: "C'est une nouvelle politique absurde, une bureaucratie vraiment compliquée qu'on essaie encore de comprendre", dénonce Gloria Ciaccio, coordinatrice pour Channel Info Project, un projet de L'Auberge des migrants à Calais.

A chaque nouveau texte de ce type, "les gens entrent dans un état de panique", assure-t-elle.

- "Pas d'autre choix" -

Londres a annoncé la semaine dernière avoir commencé à placer en détention des migrants arrivés par "small boats".

"Je connais quelqu'un qui est arrivé en Angleterre il y a deux jours" et qui a été placé en hôtel, de ceux où sont accueillis les demandeurs d'asile à leur arrivée au Royaume-Uni, affirme pourtant Adnan.

S'il apprenait que des gens sont renvoyés du Royaume-Uni vers la France, il hésiterait à dépenser une grosse somme d'argent pour la traversée et demanderait peut-être l'asile en France, admet-il.

Un ami à lui, Walid (prénom modifié), a quant à lui "changé d'avis" après une semaine en France: il veut rentrer en Egypte. "C'est trop dur, vivre ici, dans la rue, est trop dur", dit-il.

Leur voisin de tente, Mohammad Jawwad, 45 ans, aimerait profiter de l'accord pour rejoindre le Royaume-Uni légalement. Mais le processus "va être long", craint-il. Et sans l'aide d'un avocat, il se fait peu d'espoir.

Parti de Syrie en raison de problèmes de santé, il n'a qu'une chose en tête: se faire soigner, ce qu'il aimerait faire en France. Mais s'il demande l'asile, il risque d'être renvoyé en Slovénie, le pays par lequel il est entré dans l'Union européenne.

"Les gens continuent de prévoir de traverser parce que, pour certains, il n'y a vraiment pas d'autre choix", résume Gloria Ciaccio.

- Flux ininterrompu -

"Tous les migrants arrivant par +small boats+, à l'exception des mineurs non accompagnés demandeurs d'asile, risquent d'être placés en détention", souligne l'association britannique Refugee Action. "Mais en pratique, cela dépend de facteurs opérationnels dont les capacités des centres de rétention, les places pour être renvoyé (en France, NDLR), et la vitesse du processus".

Mercredi à l'aube, un buggy de la gendarmerie remonte à pleine vitesse la plage de Hardelot (Pas-de-Calais). En mer, un canot de la gendarmerie maritime et une vedette de la Marine nationale s'activent. Un "small boat" vient de partir, avec une cinquantaine de passagers, dont moins de la moitié portent des gilets de sauvetage.

Durant près de deux heures, l'embarcation longe la plage au ralenti, ballottée par les vagues et le vent. Après avoir déposé quatre migrants ayant jeté l'éponge, le bateau finit par prendre la direction de l'Angleterre, dans une brume épaisse.

Ces tentatives sont très dangereuses: entre lundi et mardi, près de 300 migrants au total ont été secourus dans les eaux françaises. Et une Somalienne est morte près de Dunkerque  en tentant de rejoindre l'Angleterre en début de semaine, le 19e décès de ce type à la frontière franco-britannique depuis le début de l'année.

Mais beaucoup d'autres parviennent à leurs fins. Depuis l'entrée en vigueur de l'accord entre Paris et Londres, plus de 2.000 migrants ont franchi la Manche à bord de "small boats", selon les derniers chiffres officiels britanniques.