La diplomatie barbare des otages est contre-productive pour le régime iranien

Nazanin Zaghari-Ratcliffe, et Anoosheh Ashoori, qui ont été libérés à Mascate, Oman, le 16 mars 2022 (Photo, Oman News Agency via l’AP).
Nazanin Zaghari-Ratcliffe, et Anoosheh Ashoori, qui ont été libérés à Mascate, Oman, le 16 mars 2022 (Photo, Oman News Agency via l’AP).
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Publié le Dimanche 20 mars 2022

La diplomatie barbare des otages est contre-productive pour le régime iranien

La diplomatie barbare des otages est contre-productive pour le régime iranien
  • La ministre britannique des Affaires étrangères, a confirmé que Londres avait payé 400 millions de livres sterling à Téhéran
  • Nous continuons à espérer et à travailler pour la paix. Mais la diplomatie des otages, telle que pratiquée par Téhéran, est barbare

Tout un chacun s'en réjouit, la ressortissante britannique Nazanin Zaghari-Ratcliffe, a finalement été libérée après six ans de détention en Iran, pour de fausses accusations. La ministre britannique des Affaires étrangères, Liz Truss, a confirmé mercredi que Londres avait payé 400 millions de livres sterling (1 € = 0.83 £) de «dette légitime» à Téhéran et a reçu l'assurance qu'elle ne serait utilisée qu'à des fins humanitaires. Cette dette remonte aux années 1970, lorsque le Shah d'Iran a acheté 1 500 chars britanniques mais, avant de pouvoir en prendre possession, il a été renversé par le régime actuel, qui est devenu l'exportateur en chef de la terreur, tant à l'échelle régionale que mondiale.

Le gouvernement britannique avait, à juste titre, décidé que la livraison d'équipements militaires de pointe à un tel régime n'était pas un acte responsable. Mais les mollahs n'ont jamais renoncé à demander leur remboursement en utilisant leur stratégie bien connue de tous, la diplomatie des otages. La prise d'otages fait partie de l'arsenal «diplomatique» de la République islamique depuis sa fondation en 1979, à commencer par la fameuse crise des otages en Iran, qui a vu le nouveau régime de Téhéran prendre en otage des dizaines de membres du personnel diplomatique américain pendant plus d'un an.

De nos jours, les citoyens étrangers ne sont pas les victimes collatérale des attaques visant les ambassades. Ils sont plutôt arrêtés individuellement sous de fausses accusations d'espionnage, ou d'autres menaces contre le régime et condamnés lors de procès arbitraires et à visée politique. Ils sont ensuite utilisés comme monnaie d'échange pour mener des négociations avec les pays d'origine de ces malheureux civils.

Cependant, 40 ans après que Téhéran a été le pionnier de cette pratique, il est surprenant qu'elle soit toujours efficace. Le peuple britannique était, dans son ensemble, au courant du cas de Zaghari-Ratcliffe. Les Britanniques savait bien qu'elle était victime d'une parodie de justice. Nous avons tous exigé que le gouvernement britannique obtienne la libération de Zaghari-Ratcliffe, mais aucun d'entre nous ne croyait que l'injustice originelle n'ait été perpétrée par une entité autre que le gouvernement iranien. Nous étions conscients de la pression exercée sur le gouvernement britannique pour qu'il cède aux caprices ou aux injonctions de Téhéran sur tel ou tel dossier.

« Tout ce que l'affaire Zaghari-Ratcliffe aura apporté, c'est de la colère, de la consternation, de la confiance brisée et généralement plus d'hostilité envers Téhéran »

Dr Azeem Ibrahim

Ainsi, quelle que soit la pression exercée par cette situation de crise à Londres, le but n'est pas d'aller dans le sens des objectifs du régime de Téhéran. Nous avons, tout au contraire, l'objectif inverse. Même ceux d'entre nous qui connaissent l'histoire vraiment sombre de l'implication britannique dans les affaires iraniennes, comme la destitution du gouvernement démocratique de Mohammed Mosaddegh en 1953 et le soutien britannique ultérieur au régime autocratique brutal de Shah Reza Pahlavi. Au simple énoncé de ces faits, Londres perd instantanément sa sympathie pour le régime iranien lorsqu'il traite des civils innocents tels que Zaghari-Ratcliffe, qui ne sont pas seulement britanniques mais qui sont nés et ont grandi en Iran, par ce genre de traitement inhumain. Lorsque nous demandons notre à gouvernement de «faire quelque chose» pour Zaghari-Ratcliffe ou Kylie Moore-Gilbert, nous ne demandons pas qu'ils cèdent quoi que ce soit, en particulier ce qui peut être favorable au régime actuel de Téhéran.

La plupart des Européens croyaient que Téhéran était la partie lésée lorsque Washington l’a retiré de l'accord nucléaire du Plan d'action global conjoint (JCPOA) sous l'administration Trump. Par cet accord, l'administration Obama avait mis en place un régime de conformité plus robuste pour s'assurer que Téhéran respecte sa part de l'accord. Pour autant que nous le sachions, il a effectivement honoré ses engagements. C'est pour cette raison que la Grande-Bretagne, avec ses alliés européens, est restée ferme en faveur au sujet de l'accord et c'est pourquoi nous aurions, en réalité défendu Téhéran dans les négociations dans le but de relancer l'accord sous l'administration Biden.

Londres n'avait besoin d'aucun encouragement ou de pression supplémentaire. Et pourtant, l'Iran a tenté d’exercer une influence sur le gouvernement britannique en prenant en otage des citoyens innocents. Tout ce que le régime iranien a gagné, c'est de la colère, de la consternation, la confiance brisée et plus d'hostilité envers Téhéran d’une manière générale. Tout cela est contre-productif et choquant.

L'accord nucléaire du Plan d'action global conjoint (JCPOA) a été un premier pas apprécié qui peut conduire à la normalisation des relations entre l'Iran et l'Occident, et un pas prometteur vers une paix durable. Nous continuons à espérer et à travailler pour la paix. Mais la diplomatie des otages, telle que pratiquée par Téhéran, est barbare et inhumaine. Cela rend même les artisans occidentaux de la paix hostiles au régime, tout en donnant plus d'appuie à l'option des faucons de guerre.