Financement du terrorisme et trafic d’œuvres d’art

Les forces irakiennes inspectent les dégâts à l'intérieur du musée détruit de Mossoul le 2 avril 2017 après l'avoir repris aux combattants du groupe État islamique (EI). Les forces irakiennes ont saisi le musée à l'EI le 7 mars alors qu'elles pénétraient dans l'ouest de Mossoul. (Ahmad Gharabli / AFP)
Les forces irakiennes inspectent les dégâts à l'intérieur du musée détruit de Mossoul le 2 avril 2017 après l'avoir repris aux combattants du groupe État islamique (EI). Les forces irakiennes ont saisi le musée à l'EI le 7 mars alors qu'elles pénétraient dans l'ouest de Mossoul. (Ahmad Gharabli / AFP)
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Publié le Samedi 26 mars 2022

Financement du terrorisme et trafic d’œuvres d’art

  • Des pièces auraient été maquillées avec l'aide d'intermédiaires sur place, l'origine et l'histoire de ces œuvres effacées pour les revendre ensuite légalement à des particuliers mais aussi à des musées
  • Le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté, le 12 février 2015, la résolution 2199, qui étend l’interdiction de faire commerce de biens culturels volés

Tous les spécialistes le savent, le trafic d’œuvres d’art peut contribuer au financement du terrorisme.

Et ce n’est pas parce que le sujet a été relégué aux oubliettes d’une actualité médiatique tristement fournie que la question ne se pose plus.

En décembre 2021, la justice new-yorkaise a conclu un accord pour contraindre le célèbre collectionneur Michael Steinhardt à restituer 70 millions de dollars d’œuvres provenant de pillages sur divers sites archéologiques du Moyen-Orient.

Juin 2020, des figures connues du monde des antiquités de Paris étaient soupçonnées d'avoir «blanchi» des antiquités et des œuvres d'art volées ou pillées dans plusieurs pays, profitant de l’instabilité politique et de la corruption: Égypte, Libye, Yémen ou Syrie. 

Des pièces auraient été maquillées avec l'aide d'intermédiaires sur place, l'origine et l'histoire de ces œuvres effacées pour les revendre ensuite légalement à des particuliers mais aussi à des musées, Le Louvre Abou Dhabi ou le Met de New York.

Pillage, blanchiment, usage des réseaux officiels et corruption, cupidité et absence de morale contribuent à financer les terroristes.

Durant les conflits récents en Irak et en Syrie, de nombreux musées et sites archéologiques, dont certains figurant sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco, ont fait l’objet de destructions, par dogmatisme, certes, dans le but d’effacer un pan d’histoire de la région, mais aussi par simple cupidité, par l’organisation de pillages purs et simples.

Selon Jean-Charles Brisard[1], président du Centre d'analyse du terrorisme (CAT), le trafic d’œuvres d’art a pris encore plus d’ampleur après 2014 suite à la chute des revenus pétroliers de Daech causée par les frappes militaires aériennes de la coalition internationale[2].

Daech a utilisé deux méthodes de financement[3]: la première a consisté à réaliser les fouilles directement sur les sites archéologiques contrôlés et à vendre les biens en direct.

La seconde a consisté en la délivrance «de permis de fouille à des trafiquants agréés» qui ont eux-mêmes procédé au pillage des sites archéologiques contrôlés et à la revente des biens.

La délivrance de permis de fouille était assortie d’une taxe[4] oscillant entre 20% et 50%[5].

Une fois les objets culturels extraits du sol irakien ou syrien, ceux-ci étaient acheminés vers les pays limitrophes pour être exportés vers les «marchés internationaux». Avant que ces objets ne soient vendus, les contrebandiers les stockaient «dans des ports francs[6]», «le temps que l’attention de la communauté internationale s’en détourne». Ainsi, la vente de ces biens culturels a souvent pris des années et leur provenance est impossible à tracer[7].

Daech aurait généré «environ 30 millions de dollars» grâce à ce trafic[8]. Pour 2015, c’est un chiffre moins important que ceux avancés par l’ambassadeur de la Russie à l’ONU, l’estimant, lui, à 200 millions de dollars[9].

Le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté, le 12 février 2015, la résolution 2199, qui étend l’interdiction de faire commerce de biens culturels volés[10]. En France, la loi no2016-731 du 3 juin 2016[11] relative au renforcement de la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement a créé une incrimination spécifique pour le trafic des biens culturels en provenance de zones d’opérations de groupements terroristes[12].

Un marchand d’art français peut, désormais, être mis en cause pour possession ou vente d’un bien culturel soustrait d’une zone d’opérations de groupes terroristes.

À défaut de pouvoir justifier de la licéité de l’origine du bien, le mis en cause encourra une peine de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 € d’amende[13].

L’augmentation rapide de la circulation des œuvres d’art sur Internet et des flux financiers correspondants génère des risques de blanchiment d’argent du financement du terrorisme élevés, du fait du caractère dématérialisé des transactions et du manque de traçabilité des œuvres comme des fonds.

En réalité, en Occident, le marché de ces œuvres d’art pillées est quasiment inexistant, en raison de leur traçabilité, et des pénalités qui freinent l’enthousiasme des acheteurs potentiels.

Celles-ci sont souvent acquises, par ceux-là même qui soutiennent la cause terroriste, directement ou non, notamment par des collectionneurs du Moyen-Orient adeptes ou non de l’utilisation de ports francs, des zones de non-droit dans lesquels s’exercent tous les trafics bien à l’abri des regards et avec la complicité des gouvernements et des organismes internationaux.

 

[1] Brisard Jean-Charles, Martinez Damien, «Le financement de l’État islamique», CAT, mai 2015, pp. 19-20.

[2] Du 24 septembre au 4 octobre 2014.

[3] «Pillage des sites archéologiques et trafic des biens culturels: un mode de financement du terrorisme», Centre français de recherche sur le renseignement (cf2r.org).

[4] Voir Taxes.

[5] S/2016/92 - F - S/2016/92 -Desktop (undocs.org)

[6] Voir Ports francs.a

[7] ibid

[8] Ibid p19

[9] Boulard Denis, Pilliu Fabien, L’argent de la terreur: enquête sur les trafics qui financent le terrorisme, First, Paris 2016, p. 150

[10] elle s’appliquait déjà à l’Irak depuis 2003

[11] 2016-731 du 3 juin 2016 relative au renforcement de la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement

[12] article 322-3-2 du code pénal

[13] RTA-tracfin-19-20 DEF.pdf (economie.gouv.fr)


France: la pleine puissance du nouveau réacteur nucléaire EPR repoussée à la fin de l'automne

Cette photographie prise le 25 avril 2024 montre la centrale nucléaire de Flamanville, dans le nord-ouest de la France, alors que la centrale nucléaire Flamanville 3 est prête à démarrer. (AFP)
Cette photographie prise le 25 avril 2024 montre la centrale nucléaire de Flamanville, dans le nord-ouest de la France, alors que la centrale nucléaire Flamanville 3 est prête à démarrer. (AFP)
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  • EDF prévoit désormais que son nouveau réacteur EPR de Flamanville, en Normandie dans l'ouest du pays, atteindra sa pleine puissance "avant la fin de l'automne"
  • Le redémarrage du réacteur est désormais prévu au 1er octobre, décalant de fait le passage à 100% de puissance du réacteur

PARIS: Electricité de France (EDF) prévoit désormais que son nouveau réacteur EPR de Flamanville, en Normandie dans l'ouest du pays, atteindra sa pleine puissance "avant la fin de l'automne", alors que le groupe espérait jusqu'à présent pouvoir franchir cette étape d'ici la fin de l'été.

La prolongation d'un arrêt "pour réaliser une opération de contrôle et de maintenance préventive sur une soupape de protection du circuit primaire principal" conduit à modifier "la date d'atteinte de la pleine puissance, désormais prévue avant la fin de l'automne", a indiqué l'électricien public français sur son site internet vendredi.

Alors que le réacteur à eau pressurisée de nouvelle génération était à l'arrêt depuis le 19 juin pour des opérations d'essais de mise en service, classiques pour de nouvelles installations nucléaires, EDF a décidé le 2 juillet de le maintenir à l'arrêt pour intervenir sur des soupapes.

EDF avait en effet constaté pendant les essais que deux des trois soupapes placées au sommet du pressuriseur qui permet de maintenir l'eau du circuit primaire à une pression de 155 bars "n'étaient pas complètement conformes" aux attendus en termes d'"étanchéité".

En raison de ces "aléas", EDF a décidé vendredi de prolonger cet arrêt pour mener une opération de maintenance préventive sur la 3e soupape.

"Les expertises menées sur les deux premières soupapes conduisent EDF, dans une démarche pro-active de sûreté, à étendre les vérifications à la troisième soupape en profitant de la logistique déjà en place et mobilisant les compétences disponibles", a expliqué le groupe.

Le redémarrage du réacteur est désormais prévu au 1er octobre, décalant de fait le passage à 100% de puissance du réacteur.

"Il y a 1.500 critères de sûreté qui sont testés lors d'un premier démarrage" de réacteur, a expliqué à l'AFP une porte-parole d'EDF. Lors de ces phases d'essais et de contrôle, il est parfois nécessaire de "refaire des réglages", selon elle.

Le réacteur de nouvelle génération a été raccordé au réseau électrique le 21 décembre 2024, avec douze ans de retard par rapport à la date prévue. Son coût a explosé par rapport au devis initial de 3,3 milliards d'euros: selon un rapport de la Cour des comptes française publié en,janvier, EDF l'estime aujourd'hui à 22,6 milliards d'euros aux conditions de 2023.


Engie confirme ses perspectives 2025 malgré un contexte "incertain et mouvant"

Cette photographie montre le parc éolien offshore de Yeu-Noirmoutier au large de l'Ile-d'Yeu, dans l'ouest de la France, le 23 juin 2025. (AFP)
Cette photographie montre le parc éolien offshore de Yeu-Noirmoutier au large de l'Ile-d'Yeu, dans l'ouest de la France, le 23 juin 2025. (AFP)
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  • Engie a confirmé vendredi ses perspectives pour 2025 malgré un contexte "incertain" et une baisse des prix qui a pesé sur ses résultats au premier semestre
  • L'énergéticien se dit confiant sur la suite et maintient ses prévisions pour 2025

PARIS: Engie a confirmé vendredi ses perspectives pour 2025 malgré un contexte "incertain" et une baisse des prix qui a pesé sur ses résultats au premier semestre, et se dit désormais plus confiant pour ses projets renouvelables aux Etats-Unis après une période d'incertitude.

Son résultat net récurrent a reculé de 19% à 3,1 milliards d’euros au cours des six premiers mois de l'année. Le résultat opérationnel (Ebit) hors nucléaire est ressorti à 5,1 milliards d'euros, en baisse de 9,4% en raison d'une base de comparaison élevée par rapport au premier semestre 2024 et "dans un contexte de baisse des prix".

Mais l'énergéticien se dit confiant sur la suite et maintient ses prévisions pour 2025.

"Nous abordons les prochains mois avec confiance et nous confirmons notre +guidance+ annuelle", a commenté Catherine MacGregor, sa directrice générale, citée dans le communiqué de résultats.

Elle a néanmoins insisté sur le contexte économique et géopolitique "assez incertain et mouvant", lors d'une conférence téléphonique.

A la Bourse de Paris, Engie cédait 2,45% à 10H53 (8H53 GMT) à 19,15 euros vendredi, après avoir lâché 5% à l'ouverture.

Interrogée sur les Etats-Unis, Catherine MacGregor s'est montrée plus confiante après une période d'incertitude qui a suivi l'entrée en fonction du gouvernement Trump.

"Avec la promulgation du +Big beautifull bill+ (la loi budgétaire de Donald Trump, ndlr) et une première clarification du cadre réglementaire et fiscal qui était attendue, nous nous apprêtons à lancer trois projets pour plus de 1,1 GW de capacité totale, éolien, solaire et batteries qui vont conforter notre croissance jusqu'en 2028", a-t-elle déclaré.

Engie a pour l'heure "juste en dessous de 9 GW en opération aux États-Unis", a-t-elle rappelé.

"Il y avait beaucoup, beaucoup d'incertitudes sur le traitement qui serait donné à ces projets", a-t-elle souligné, mais avec cette nouvelle loi, "on a beaucoup plus de clarté".

"Le marché aux États-Unis reste évidemment très, très porteur", a-t-elle poursuivi. "Les projections de demande d'électricité sont absolument massives et aujourd'hui, il n'y a pas de scénarios (...) sans une grande partie de projets renouvelables", notamment en raison du fort développement des centres de données dans le pays.

Le groupe table sur un résultat net récurrent - qui exclut des coûts de restructuration et la variation de la valeur de ses contrats de couverture - "entre 4,4 et 5,0 milliards d'euros" en 2025.

Engie vise par ailleurs un Ebit hors nucléaire "dans une fourchette indicative de 8,0 à 9,0 milliards d'euros" en 2025.

"Comme prévu, l'Ebit hors nucléaire va atteindre son point bas cette année et le second semestre 2025 sera en hausse par rapport à 2024", a indiqué Catherine MacGregor.

Le bénéfice net en données publiées s'établit à 2,9 milliards d'euros au premier semestre, en hausse de 50%, en raison d'un impact moindre de la variation de la valeur de ses contrats de couverture.

Le chiffre d'affaires a atteint 38,1 milliards d'euros au premier semestre, en croissance de 1,4%.

Engie disposait d'une capacité totale renouvelables et de stockage de 52,7 gigawatts (GW) à fin juin 2025, en hausse de 1,9 GW par rapport à fin 2024. A cela s'ajoutent 95 projets en cours de construction qui représentent une capacité totale de près de 8 GW.

Le groupe dispose d'un portefeuille de projets renouvelables et de batteries en croissance qui atteint 118 GW à fin juin 2025, soit 3 GW de plus qu'à fin décembre 2024.


ArcelorMittal: les taxes douanières américaines érodent la rentabilité au premier semestre

La cokerie d'ArcelorMittal Bremen sur le site de Bottrop est photographiée depuis la plate-forme d'observation Tetraeder à Bottrop, dans l'ouest de l'Allemagne, le 21 juillet 2025. (AFP)
La cokerie d'ArcelorMittal Bremen sur le site de Bottrop est photographiée depuis la plate-forme d'observation Tetraeder à Bottrop, dans l'ouest de l'Allemagne, le 21 juillet 2025. (AFP)
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  • ArcelorMittal a vu sa rentabilité érodée au premier semestre par les taxes douanières de Donald Trump sur les importations d'acier depuis le Canada ou le Mexiqu
  • ArcelorMittal espère la mise en place effective de mesures de soutien à l'acier en Europe d'ici à la fin de l'année

PARIS: ArcelorMittal, qui a vu sa rentabilité érodée au premier semestre par les taxes douanières de Donald Trump sur les importations d'acier depuis le Canada ou le Mexique, espère la mise en place effective de mesures de soutien à l'acier en Europe d'ici à la fin de l'année.

Malgré un résultat net en hausse de 39% au premier semestre 2025, à 2,6 milliards de dollars, le bénéfice avant intérêt, impôt, dépréciation et amortissement (Ebitda) du deuxième fabricant d'acier mondial a reculé de 10%, à 3,4 milliards de dollars, notamment après l'application de droits de douane de 50% sur l'acier importé aux Etats-Unis depuis le Canada et le Mexique à partir du 4 juin, a expliqué le groupe dans un communiqué jeudi.

Le chiffre d'affaires a aussi pâti du recul de 7,5% des prix moyens de l'acier dans le monde: les ventes se sont amoindries de 5,5%, à 30,72 milliards de dollars au premier semestre.

Jeudi à la Bourse de Paris, après ces annonces, le titre ArcelorMittal a terminé la séance en recul de 2,58%, à 27,52 euros.

Le directeur général du groupe, Aditya Mittal, s'est félicité de la reprise à 100% du site de Calvert aux Etats-Unis, qui devient un site d'acier bas carbone grâce à la construction d'un nouveau four à arc électrique.

En Europe, les tendances à l'accroissement des dépenses publiques sur la défense et les infrastructures "sont un encouragement pour l'industrie de l'acier", a jugé M. Mittal.

Néanmoins, alors que le plan d'action annoncé en mars par la Commission européenne a lancé des "signaux clairs" pour défendre la production européenne d'acier, "nous attendons toujours la concrétisation des mesures de sauvegarde (ou quotas sur les importations d'acier en Europe, NDLR) du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières et sur les prix de l'énergie", a-t-il souligné.

A condition que ces mesures soient mises en place, le groupe prévoit d'investir 1,2 milliard d'euros pour un four à arc électrique sur son site français de Dunkerque (Nord), a-t-il rappelé.

Au total, ArcelorMittal en exploite 29 dans le monde, pour une capacité de production de 21,5 millions de tonnes d'acier recyclé par an, qui augmentera à 23,4 millions de tonnes en 2026 après la mise en service des deux sites espagnols de Gijon et Sestao.