La proposition de cessez-le-feu des Houthis «vise à faire échouer les négociations de Riyad»

L’année dernière, les Houthis ont rejeté une initiative de paix saoudienne visant à mettre fin à la guerre et ont également ignoré les appels locaux et internationaux à cesser leur offensive meurtrière sur la ville de Marib. (AFP)
L’année dernière, les Houthis ont rejeté une initiative de paix saoudienne visant à mettre fin à la guerre et ont également ignoré les appels locaux et internationaux à cesser leur offensive meurtrière sur la ville de Marib. (AFP)
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Publié le Mardi 29 mars 2022

La proposition de cessez-le-feu des Houthis «vise à faire échouer les négociations de Riyad»

L’année dernière, les Houthis ont rejeté une initiative de paix saoudienne visant à mettre fin à la guerre et ont également ignoré les appels locaux et internationaux à cesser leur offensive meurtrière sur la ville de Marib. (AFP)
  • La proposition a été conçue pour donner l’impression que les Houthis sont les seuls représentants du peuple yéménite
  • Cette trêve est également «destinée à entraver les consultations entre les partis yéménites» prévues à Riyad

RIYAD: La dernière proposition de cessez-le-feu faite par les Houthis, soutenus par l’Iran, est une tentative de faire échouer les pourparlers de paix qui se déroulent cette semaine à Riyad sous l’égide du Conseil de coopération du Golfe (CCG), ont déclaré dimanche des experts yéménites. 

La milice n’a pas manifesté sa volonté d’instaurer une trêve permanente au Yémen, ont ajouté les experts. 

Mahdi al-Mashat, chef du Conseil politique suprême des Houthis, a annoncé samedi l’arrêt unilatéral des attaques de missiles et de drones contre l’Arabie saoudite, ainsi que la suspension des opérations militaires au Yémen, principalement dans la province centrale de Marib, pendant trois jours. 

Dans le cadre d’une proposition d’accord de paix, le chef de la milice yéménite a promis d’étendre la courte trêve à un cessez-le-feu permanent à condition que l’Arabie saoudite rende la pareille en levant les restrictions sur l’aéroport de Sanaa et sur les ports maritimes de Hodeïda. 

Cependant, les Yéménites ont exprimé des doutes quant à la volonté des Houthis de faire la paix, citant les antécédents du mouvement en matière de rupture d’accords. 

«Ils ont violé plus de 70 accords depuis leur première guerre avec le gouvernement yéménite», a indiqué le journaliste yéménite Hassan Ghaleb à Arab News. 

Selon lui, l’initiative des Houthis vise à contrecarrer les opérations de représailles de l’Arabie saoudite menées à la suite de frappes de drones et de missiles sur le Royaume. 

Cette trêve est également destinée à entraver les consultations entre les partis yéménites à Riyad cette semaine, estime M. Ghaleb. 

«Il s’agit d’une manœuvre et non d’une initiative. Depuis que le CCG a proposé de servir de médiateur entre les Yéménites, les Houthis ont tenté par tous les moyens de faire échouer les pourparlers. Lorsque ces derniers ont échoué, ils ont lancé leur proposition», a-t-il précisé. 

La guerre au Yémen a commencé fin 2014 lorsque les Houthis ont pris le pouvoir et forcé le président yéménite Abed Rabbo Mansour Hadi à fuir vers la ville d’Aden, dans le sud du pays. Des dizaines de milliers de Yéménites sont morts dans le conflit et des millions d’autres sont au bord de la famine. 

Les opérations militaires menées par la Coalition pour restaurer la légitimité au Yémen ont freiné les avancées des Houthis et aidé les forces gouvernementales à libérer de nombreuses provinces, dont Aden. 

L’année dernière, la milice a rejeté une initiative de paix saoudienne visant à mettre fin à la guerre et a également ignoré les appels locaux et internationaux à cesser son offensive meurtrière sur la ville de Marib. 

EN BREF

De violents combats entre les forces gouvernementales yéménites et la milice houthie ont éclaté dimanche sur les principaux champs de bataille des provinces de Marib et de Jouf. 

Ali al-Dahab, chercheur et analyste militaire, a expliqué que les Houthis ont conçu leur proposition pour donner l’impression qu’ils sont les seuls représentants du peuple yéménite dans le but de réclamer des pourparlers directs avec l’Arabie saoudite. 

«L’initiative de paix des Houthis correspond, en fait, à une fausse description selon laquelle la guerre oppose l’Arabie saoudite à leur État», écrit M. Al-Dahab sur Twitter, prédisant que l’Arabie saoudite n’accepterait pas l’initiative des Houthis. 

«Toute initiative qui n’inclut pas une référence au gouvernement légitime en tant que partie opposée au groupe putschiste houthi doit être rejetée», ajoute-t-il. 

D’autres hommes politiques yéménites, comme Abdelmalik al-Mekhlafi, ancien vice-Premier ministre du Yémen et conseiller du président du pays, estiment que les Houthis traitent les Yéménites comme des suiveurs qui n’ont pas le droit de participer aux pourparlers visant à mettre fin au conflit. 

«Après sept ans de guerre, les Houthis ne se soucient pas des conséquences de la catastrophe qu’ils ont causée au Yémen et aux Yéménites. Ils ne pensent qu’à la manière de rendre leur crime légitime», a tweeté M. Al-Mekhlafi.  

Par ailleurs, de violents combats entre les forces gouvernementales yéménites et la milice houthie ont éclaté dimanche sur les principaux champs de bataille des provinces de Marib et de Jouf. 

Selon les médias locaux, l’armée a abattu deux drones chargés d’explosifs tirés par les Houthis dans la province septentrionale de Marib. Des combats ont également éclaté autour de la base militaire stratégique d’Um Rish, au sud de Marib, et entre les troupes gouvernementales et les Houthis dans le district de Hareb, dans la province. 

La proposition de paix des Houthis intervient alors que l’envoyé spécial de l’ONU pour le Yémen, Hans Grundberg, a annoncé dimanche qu’il menait des pourparlers directs avec toutes les factions belligérantes dans le but de parvenir à une trêve humanitaire pendant le ramadan. 

«L’envoyé spécial de l’ONU s’entretient avec toutes les parties et poursuit ses efforts en vue de parvenir à une trêve pendant le ramadan. Il réitère son appel à la désescalade et salue toutes les mesures prises par les parties dans ce sens», indique le bureau de M. Grundberg dans un communiqué. 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com 


Centre de coordination militaro-civile pour Gaza: beaucoup de discussions, peu de résultats

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  • "Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore" ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés
  • "Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix"

JERUSALEM: Lancé par les Etats-Unis dans le sillage du cessez-le-feu entre Israël et le Hamas pour surveiller la trêve et favoriser l'afflux d'aide humanitaire, le Centre de coordination militaro-civile (CMCC) pour Gaza peine à tenir ses promesses.

"Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix, il n'y a aucune autre initiative, c'est ça ou continuer à discuter dans le vent avec des Israéliens".

"Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore", ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés par la campagne militaire israélienne.

Le CMCC doit permettre d'amorcer la suite des étapes du plan de paix pour Gaza après plus de deux ans d'une guerre dévastatrice déclenchée le 7 octobre 2023 par l'attaque sans précédent du mouvement palestinien Hamas sur Israël.

"Lorsque nous l'avons ouvert, nous avons clairement indiqué qu'il se concentrait sur deux choses: faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire, logistique et sécuritaire vers Gaza et aider à surveiller en temps réel la mise en oeuvre de l'accord", insiste le capitaine Tim Hawkins, porte-parole du Commandement militaire central américain (Centcom), couvrant notamment le Moyen-Orient.

L'initiative a été présentée aux acteurs (ONG, agences des Nations unies, diplomates...) comme un générateur d'idées totalement inédites.

Frustrés par leurs difficultés avec les autorités israéliennes, de nombreux pays et acteurs humanitaires disent s'être jetés dans le projet, impatients d'avoir un nouvel interlocuteur se disant enclin à trouver des solutions: les Etats-Unis.

"Rien n'a changé" 

"Au début, les Américains nous ont dit qu'ils découvraient qu'Israël interdisaient l'entrée de tout un tas de choses dans Gaza, la fameuse liste des biens à double usage, ils avaient l'air choqués et on se disait qu'enfin on allait franchir cet obstacle", raconte un ingénieur humanitaire, "mais force est de constater que strictement rien n'a changé".

Deux mois après l'ouverture, nombre d'humanitaires et diplomates contactés par l'AFP jugent, sous couvert de l'anonymat, que la capacité ou la volonté américaines à contraindre Israël est limitée.

Les visiteurs réguliers ou occasionnels des lieux ont décrit à l'AFP le grand hangar occupé par le CMCC à Kiryat Gat (sud d'Israël), comme un entrepôt où de nombreux militaires, israéliens et américains principalement, rencontrent des humanitaires, diplomates, et consultants.

Le premier des trois étages du bâtiment est réservé aux Israéliens, et le dernier aux troupes américaines. Tous deux sont interdits d'accès aux visiteurs.

Le deuxième, recouvert de gazon artificiel, sert d'espace de rencontres avec le monde extérieur.

"On dirait un espace de coworking, mais avec des gens en uniforme", s'amuse une diplomate qui raconte y croiser des "GIs qui boivent de la bière" au milieu d'une sorte d'open-space, avec des panneaux récapitulant les principaux points du plan Trump.

Plusieurs personnes ont dit à l'AFP avoir vu un tableau blanc barré de l'inscription "What is Hamas?" ("Qu'est-ce que le Hamas?") en lettres capitales, sans éléments de réponse.

"Il y a des tables rondes sur des sujets qui vont de la distribution d'eau ou de nourriture à la sécurité", raconte un humanitaire, "en gros on nous écoute décrire ce qu'on veut faire, et quels problèmes on a rencontrés depuis deux ans".

"Boussole du droit" 

Mais "ce n'est pas là que les décisions sont prises", tranche un diplomate qui cite des canaux de discussions parallèles, notamment une équipe supervisée par Arieh Lighstone, un collaborateur de l'émissaire américain Steve Witkoff, à Tel-Aviv.

Plusieurs diplomates regrettent l'absence d'officiels palestiniens dans les murs.

Un autre problème réside dans l'émergence de concepts largement rejetés par la communauté internationale, notamment celui des "Alternative Safe Communities" (ASC), visant à regrouper des civils "vérifiés", non affiliés au Hamas, dans des communautés créées ex nihilo dans une zone de la bande de Gaza sous contrôle militaire israélien, et où les services de base seraient dispensés.

"On a perdu la boussole du droit", commente une diplomate.

Mais le reproche qui revient le plus souvent est le fait que les questions politiques (gouvernance, maintien de l'ordre...) sont évacuées au profit de questions techniques.

"Ils discutent d'où mettre les stations d'épuration, pas de qui les exploitera ni de qui paiera les employés", résume un autre.

Concédant "certaines frictions", sans plus de détail, le capitaine Hawkins, du Centcom, met en avant certaines avancées comme l'ouverture de nouveaux points de passage pour l'aide à destination de Gaza. "Nous progressons, assure-t-il, tout en reconnaissant pleinement qu'il reste encore beaucoup à faire."


Le Congrès américain approuve la levée définitive des sanctions contre la Syrie

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
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  • Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar
  • Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis

WASIHNGTON: Le Congrès américain a approuvé mercredi la levée définitive des sanctions imposées par les Etats-Unis contre la Syrie du temps de Bachar al-Assad, devant permettre le retour d'investissements dans ce pays ravagé par des années de guerre civile.

L'abrogation d'une loi dite "Caesar", adoptée en 2019 lors du premier mandat de Donald Trump et qui imposait ces sanctions, figure en effet dans le texte sur la stratégie de défense (NDAA), que le Sénat américain a approuvé mercredi par 77 voix pour et 20 contre.

La Chambre des représentants s'était déjà prononcée la semaine dernière et le texte attend désormais d'être promulgué par le président américain.

Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar. Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis.

Le chef de la diplomatie syrienne, Assaad al-Chaibani, a salué sur Telegram le vote du Sénat comme "ouvrant de nouveaux horizons pour la coopération et le partenariat entre notre pays et le reste du monde".

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars.

Bien que son application soit suspendue, de nombreux responsables américains jugeaient qu'elle pouvait nuire à la confiance des investisseurs tant qu'elle n'était pas abrogée.

Le dirigeant syrien Ahmad al-Chareh a été reçu le 10 novembre à la Maison Blanche par le président Trump, une première pour un chef d'Etat syrien depuis l'indépendance du pays en 1946 et une consécration pour l'ancien jihadiste qui, en moins d'un an au pouvoir, a sorti son pays de l'isolement.

Donald Trump l'avait déjà rencontré lors d'un voyage dans le Golfe en mai, annonçant alors la levée des sanctions américaines.

Après 13 ans de guerre civile, la Syrie cherche à garantir des fonds pour sa reconstruction, dont le coût pourrait dépasser 216 milliards de dollars, selon la Banque mondiale.

"L'abrogation aujourd'hui de la loi Caesar est une étape décisive pour donner au peuple syrien une véritable chance de se reconstruire après des décennies de souffrances inimaginables", s'est félicité la sénatrice démocrate Jeanne Shaheen.


Les principales villes du Soudan privées de courant après des frappes de drones sur une centrale

Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
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  • Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale
  • Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des FSR

PORT-SOUDAN: Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts, ont indiqué plusieurs témoins à l'AFP.

Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale.

Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

Le gouvernement de l’État du Nil a confirmé la mort des deux secouristes dans un communiqué officiel.

Cette station est un nœud stratégique du réseau électrique soudanais, recevant l’électricité produite par le barrage de Merowe — la plus grande source d'énergie hydroélectrique du pays — avant sa redistribution vers plusieurs régions.

Des témoins ont également indiqué qu’aux alentours de 02H00 (minuit GMT), les forces de l’armée régulière avaient activé leurs systèmes de défense antiaérienne, rapportant avoir vu des flammes et de la fumée s'élever au-dessus de la ville contrôlée par l'armée en guerre depuis avril 2023 contre les FSR.

Les coupures d’électricité se sont étendues à plusieurs États, notamment ceux du Nil, de la mer Rouge — où se trouve Port-Soudan, siège provisoire du gouvernement pro-armée — ainsi qu’à la capitale Khartoum, selon des témoins, l'incendie n'étant toujours pas maitrisé.

Les FSR n’ont jusqu'à présent pas commenté l'attaque.

Ces derniers mois, les FSR ont été accusées de lancer des attaques de drones sur de vastes zones contrôlées par l’armée, visant des infrastructures civiles et provoquant des coupures de courant affectant des millions de personnes.

La guerre, qui a éclaté en avril 2023, a fait plusieurs dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué "la pire crise humanitaire au monde", selon l'ONU.