Présidentielle: tour d'horizon des factchecks sur le climat et l'énergie

Une photo prise le 14 mars 2022 montre une éolienne à Boulogne-sur-Mer. (AFP)
Une photo prise le 14 mars 2022 montre une éolienne à Boulogne-sur-Mer. (AFP)
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Publié le Lundi 04 avril 2022

Présidentielle: tour d'horizon des factchecks sur le climat et l'énergie

  • Une affirmation trompeuse de Marine Le Pen: «Emmanuel Macron a doublé la production de charbon, ce qui n'est pas un très grand progrès sur le plan environnemental»
  • «On n'a jamais utilisé autant de pesticides que sous le quinquennat Macron», a affirmé Jadot, mais les données disponibles, qui ne s'étendent que jusqu'à 2020, contredisent cette affirmation

PARIS: Contre-vérités flagrantes, imprécisions ou données sorties de leur contexte: depuis le début de la campagne et toutes tendances confondues, les candidats à la présidentielle et leurs soutiens ont parfois pris quelques libertés avec les faits. 

Petit tour d'horizon d'infox politiques liées au climat et à l'énergie.

Le nucléaire, une énergie «sans aléas», selon Emmanuel Macron

Pour défendre son choix de construire de nouveaux réacteurs nucléaires, Emmanuel Macron a affirmé le 14 mars que l'énergie nucléaire n'était "pas sujet à des aléas", contrairement à l'éolien au solaire. 


Experts et institutions, dont le lobby nucléaire lui-même ou l'Institut de radioprotection nucléaire (IRSN), admettent toutefois qu'entre aléas techniques ou climatiques, l'atome peut connaître lui aussi des hauts et des bas. Dernière illustration en date: jusqu'à 15 des 56 réacteurs français ont dû être mis hors service pendant l'hiver en raison de problèmes de corrosion.

"Les aléas existent, c'est indéniable", souligne Ludovic Dupin, porte-parole de la Société française de l'énergie nucléaire (Sfen) - une des structures représentant la filière en France - tout en minimisant leur impact et en rejetant tout risque de black out.

Macron responsable d'un doublement de l'électricité au charbon, selon Marine Le Pen

"Emmanuel Macron a doublé la production de charbon, ce qui n'est pas un très grand progrès sur le plan environnemental": cette affirmation de Marine Le Pen le 14 mars est trompeuse. 

La production à base de charbon, la plus émettrice de CO2, a en réalité été divisée par 2,5 en France depuis l'élection d'Emmanuel Macron et ne pèse actuellement que 1% du mix électrique en France

Pendant cet hiver, le gouvernement a toutefois dû relever le plafond d'heures d'utilisation des deux dernières centrales françaises au charbon pendant deux mois, pour pallier les carences du nucléaire. La centrale à charbon de Saint-Avold (Moselle), dont la fermeture était prévue le 31 mars, pourrait d'ailleurs reprendre du service cet hiver, a récemment indiqué le ministère de la Transition écologique.

Le recours aux pesticides à un niveau record sous Macron, selon Yannick Jadot

"On n'a jamais utilisé autant de pesticides que sous le quinquennat Macron", a affirmé le candidat EELV le 22 mars. 

Les données disponibles, qui ne s'étendent que jusqu'à 2020, contredisent cette affirmation : elles font apparaître, depuis 2017, un net recul des ventes (-20%) comme de l'utilisation des pesticides (-9% en moyenne triennale) dans l'agriculture.

Au cours du quinquennat, l'exécutif a toutefois reculé sur deux dossiers emblématiques sur les pesticides : il a renoncé à sa promesse de 2017 d'interdire le glyphosate "au plus tard dans trois ans" et a partiellement réautorisé dans les cultures de betteraves des néonicotinoïdes, accusés de décimer les colonies d'abeilles.

Il n'y a pas de «lobby nucléaire», selon Bruno Le Maire

Excédé par les critiques des écologistes, le ministre de l'Economie avait assuré le 10 novembre que "le lobby nucléaire n'exist(ait) pas" et avait préféré parler, au sujet de cette filière, d'un "savoir-faire français". 

Cette déclaration ne cadre pas avec la réalité. A Paris ou Bruxelles, des entreprises et des organisations mènent bien des activités de lobbying ou de "plaidoyer" pour défendre et promouvoir cette énergie auprès des pouvoirs publics et combattre des orientations qui lui seraient défavorables, selon plusieurs acteurs de la filière interrogés par l'AFP.

"Bien sûr que nous faisons" du lobbying, avait ainsi indiqué Jessica Johnson, porte-parole de Foratom, structure représentant à Bruxelles les industriels du nucléaire de 15 pays.

Selon des données publiques, EDF emploie 9 salariés à plein temps à Bruxelles en charge de la promotion des intérêts du groupe et a dédié jusqu'à 1,2 million d'euros à cette activité en France en 2020.

Ce mode d'action n'est toutefois pas propre au nucléaire : de nombreux autres secteurs d'activités - dont les énergies renouvelables - mais aussi des ONG comme Greenpeace font eux aussi du lobbying auprès des décideurs même s'ils ne disposent pas tous des mêmes armes.


S&P dégrade la note de la France, avertissement au nouveau gouvernement

Cette photo d'illustration prise à Toulouse le 29 mars 2025 montre un écran affichant le logo de l'agence de notation Standard and Poor's. (AFP)
Cette photo d'illustration prise à Toulouse le 29 mars 2025 montre un écran affichant le logo de l'agence de notation Standard and Poor's. (AFP)
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  • L’agence S&P a abaissé la note de la France à A+, invoquant une incertitude persistante sur les finances publiques malgré la présentation du budget 2026 et un déficit prévu à 5,4 % du PIB en 2025

PARIS: L'une des plus grandes agences de notation a adressé un avertissement au nouveau gouvernement Lecornu en dégradant la note de la France vendredi, invoquant une incertitude "élevée" sur les finances publiques en dépit de la présentation d'un budget pour 2026.

Moins d'une semaine après la formation de la nouvelle équipe gouvernementale et trois jours après la publication d'un projet de loi de finances (PLF) pour l'année prochaine, S&P Global Ratings a annoncé abaisser d'un cran sa note de la France à A+.

"Malgré la présentation cette semaine du projet de budget 2026, l'incertitude sur les finances publiques françaises demeure élevée", a affirmé l'agence, qui figure parmi les trois plus influentes avec Moody's et Fitch.

Réagissant à cette deuxième dégradation par S&P (anciennement Standard & Poors) en un an et demi, le ministre de l'Economie Roland Lescure a dit "(prendre) acte" de cette décision.

"Le gouvernement confirme sa détermination à tenir l'objectif de déficit de 5,4% du PIB pour 2025", a ajouté son ministère dans une déclaration transmise à l'AFP.

Selon S&P, si cet "objectif de déficit public de 5,4% du PIB en 2025 sera atteint", "en l'absence de mesures supplémentaires significatives de réduction du déficit budgétaire, l'assainissement budgétaire sur (son) horizon de prévision sera plus lent que prévu".

L'agence prévoit que "la dette publique brute atteindra 121% du PIB en 2028, contre 112% du PIB à la fin de l'année dernière", a-t-elle poursuivi dans un communiqué.

"En conséquence, nous avons abaissé nos notes souveraines non sollicitées de la France de AA-/A-1+ à A+/A-1", écrit-elle. Les perspectives sont stables.

"Pour 2026, le gouvernement a déposé mardi 14 octobre un projet de budget qui vise à accélérer la réduction du déficit public à 4,7% du PIB tout en préservant la croissance", a répondu le ministère de l'Economie.

"Il s'agit d'une étape clef qui nous permettra de respecter l'engagement de la France à ramener le déficit public sous 3% du PIB en 2029", a ajouté Bercy.

"Il est désormais de la responsabilité collective du gouvernement et du Parlement de parvenir à l'adoption d'un budget qui s'inscrit dans ce cadre, avant la fin de l'année 2025", selon la même source.

- "Plus grave instabilité" depuis 1958 -

Mais le gouvernement qui, à peine entré en fonctions, a échappé de peu cette semaine à la censure après une concession aux socialistes sur la réforme des retraites, va devoir composer avec une Assemblée nationale sans majorité lors de débats budgétaires qui s'annoncent houleux, alors même que le Premier ministre Sébastien Lecornu s'est engagé à ne pas recourir à l'article 49.3 pour imposer son texte.

Cette nouvelle dégradation de la note de la France par S&P intervient avant une décision de Moody's attendue le 24 octobre. Elle a lieu un mois après que Fitch a elle aussi abaissé la note française à A+.

Les agences comme Fitch, Moody's et S&P Global Ratings classent la qualité de crédit des Etats - soit leur capacité à rembourser leur dette -, de AAA (la meilleure note) à D (défaut de paiement).

Les dégradations de note par les agences sont redoutées par les pays car elles peuvent se traduire par un alourdissement de leurs intérêts.

Ceux payés par la France sont estimés à environ 55 milliards d'euros en 2025, alors que depuis la dissolution de l'Assemblée nationale en juin 2024, la dette française se négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande.

"La France traverse sa plus grave instabilité politique depuis la fondation de la Cinquième République en 1958", a estimé S&P: "depuis mai 2022, le président Emmanuel Macron a dû composer avec deux Parlements sans majorité claire et une fragmentation politique de plus en plus forte".

Pour l'agence, "l'approche de l'élection présidentielle de 2027 jette un doute (...) sur la capacité réelle de la France à parvenir à son objectif de déficit budgétaire à 3% du PIB en 2029".

En tombant en A+ chez S&P, la France se retrouve au niveau de l'Espagne, du Japon, du Portugal et de la Chine.


France : l'ancien Premier ministre Philippe demande encore le départ anticipé de Macron

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  • Allié de M. Macron dont il fut le premier chef de gouvernement de mai 2017 à juillet 2020, Edouard Philippe avait lancé un pavé dans la mare la semaine dernière, après la démission éclair du premier gouvernement de Sébastien Lecornu
  • "Je n'ai pas pris cette position parce que je pensais que je serais populaire ou parce que j'espérais convaincre le président (Macron). Le président, il a envie d'aller au terme de son mandat, et je peux le comprendre"

PARIS: L'ancien Premier ministre français Edouard Philippe a à nouveau réclamé jeudi le départ anticipé du président Emmanuel Macron, pour lui "la seule décision digne qui permet d'éviter 18 mois" de "crise" politique avant la prochaine élection présidentielle prévue pour le printemps 2027.

Allié de M. Macron dont il fut le premier chef de gouvernement de mai 2017 à juillet 2020, Edouard Philippe avait lancé un pavé dans la mare la semaine dernière, après la démission éclair du premier gouvernement de Sébastien Lecornu - reconduit depuis -, en suggérant un départ anticipé et "ordonné" du chef de l'Etat, qui peine à trouver une majorité.

"Je n'ai pas pris cette position parce que je pensais que je serais populaire ou parce que j'espérais convaincre le président (Macron). Le président, il a envie d'aller au terme de son mandat, et je peux le comprendre. Je l'ai dit parce que c'est la seule décision digne qui permet d'éviter 18 mois d'indétermination et de crise, qui se terminera mal, je le crains", a déclaré l'ancien Premier ministre sur la chaîne de télévision France 2.

"Ca n'est pas simplement une crise politique à l'Assemblée nationale à laquelle nous assistons. C'est une crise très profonde sur l'autorité de l'Etat, sur la légitimité des institutions", a insisté M. Philippe.

"J'entends le président de la République dire qu'il est le garant de la stabilité. Mais, objectivement, qui a créé cette situation de très grande instabilité et pourquoi ? Il se trouve que c'est lui", a-t-il ajouté, déplorant "une Assemblée ingouvernable" depuis la dissolution de 2024, "des politiques publiques qui n'avancent plus, des réformes nécessaires qui ne sont pas faites".

"Je ne suis pas du tout pour qu'il démissionne demain matin, ce serait désastreux". Mais Emmanuel Macron "devrait peut-être, en prenant exemple sur des prédécesseurs et notamment le général De Gaulle, essayer d'organiser un départ qui nous évite pendant 18 mois de continuer à vivre dans cette situation de blocage, d'instabilité, d'indétermination", a-t-il poursuivi.

Edouard Philippe, qui s'est déclaré candidat à la prochaine présidentielle, assure ne pas avoir de "querelle" avec Emmanuel Macron. "Il est venu me chercher (en 2017), je ne me suis pas roulé par terre pour qu'il me nomme" à la tête du gouvernement et après avoir été "congédié" en 2020, "je ne me suis pas roulé par terre pour rester".


Motion de censure: Le Pen attend la dissolution avec une «impatience croissante»

 Marine Le Pen a dénoncé jeudi à l'Assemblée nationale l'"année noire fiscale" que représentera pour les Français "l'année blanche" inscrite dans le budget du gouvernement, disant attendre "la dissolution avec une impatience croissante". (AFP)
Marine Le Pen a dénoncé jeudi à l'Assemblée nationale l'"année noire fiscale" que représentera pour les Français "l'année blanche" inscrite dans le budget du gouvernement, disant attendre "la dissolution avec une impatience croissante". (AFP)
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  • Ce budget est "l'acte ultime, nous l'espérons, d'un système politique à bout de souffle", a affirmé la présidente des députés Rassemblement national en défendant la motion de censure de son parti contre le gouvernement de Sébastien Lecornu
  • Elle a dénoncé au passage l'"insondable sottise des postures" qui pourrait le "sauver"

PARIS: Marine Le Pen a dénoncé jeudi à l'Assemblée nationale l'"année noire fiscale" que représentera pour les Français "l'année blanche" inscrite dans le budget du gouvernement, disant attendre "la dissolution avec une impatience croissante".

Ce budget est "l'acte ultime, nous l'espérons, d'un système politique à bout de souffle", a affirmé la présidente des députés Rassemblement national en défendant la motion de censure de son parti contre le gouvernement de Sébastien Lecornu. Elle a dénoncé au passage l'"insondable sottise des postures" qui pourrait le "sauver".

"Poursuite du matraquage fiscal" avec 19 milliards d'impôts supplémentaires, "gel du barème" de l'impôt sur le revenu qui va rendre imposables "200.000 foyers" supplémentaires, "poursuite de la gabegie des dépenses publiques", "absence totale d'efforts sur l'immigration" ou sur "l'aide médicale d'Etat", ce budget "est un véritable musée de toutes les horreurs coincées depuis des années dans les tiroirs de Bercy", a-t-elle estimé.

Raillant le premier secrétaire du PS Olivier Faure, qui a accepté d'épargner le gouvernement en échange de la suspension de la réforme des retraites sans savoir par "quel véhicule juridique" et sans assurance que cela aboutisse, elle s'en est pris aussi à Laurent Wauquiez, le chef des députés LR, qui préfère "se dissoudre dans le socialisme" plutôt que de censurer.

"Désormais, ils sont tous d'accord pour concourir à éviter la tenue d'élections", "unis par la terreur de l'élection", a-t-elle dit.