Ukraine: Poutine dit Marioupol «libérée», Biden augmente son aide militaire à Kiev

Alors que Marioupol est dévastée, l'Ukraine dénonce les bombardements qui ont rasé ce qui restait de l'aciérie tentaculaire d'Azovstal (Photo, AFP).
Alors que Marioupol est dévastée, l'Ukraine dénonce les bombardements qui ont rasé ce qui restait de l'aciérie tentaculaire d'Azovstal (Photo, AFP).
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Publié le Vendredi 22 avril 2022

Ukraine: Poutine dit Marioupol «libérée», Biden augmente son aide militaire à Kiev

  • Vladimir Poutine a dit avoir ordonné à ses troupes de ne pas lancer l'assaut final sur Marioupol
  • Si la bataille de Marioupol semble toucher à sa fin, celle qui a pour enjeu le contrôle du Donbass s'annonce longue

ZAPORIJJIA: Le président russe Vladimir Poutine a déclaré jeudi que les forces russes avaient "libéré" le port stratégique ukrainien de Marioupol, une affirmation jugée "contestable" par son homologue américain Joe Biden, qui a annoncé 800 millions de dollars d'aide militaire supplémentaire à Kiev.   

La chute définitive de Marioupol, un grand port industriel sur la mer d'Azov devenu ville-martyre et champ de ruines après bientôt deux mois de pilonnage et de siège russes, constituerait une victoire importante pour Moscou, dont l'armée a accumulé les revers depuis le début de son invasion de l'Ukraine le 24 février.

Mais, malgré un nouvel appel à la reddition jeudi, les combattants ukrainiens encore retranchés dans l'immense complexe métallurgique Azovstal et ses kilomètres de galeries souterraines, refusent de déposer les armes. 

Vladimir Poutine a dit avoir ordonné à ses troupes de ne pas lancer d'assaut, mais de bloquer la zone "de sorte que pas une mouche ne passe", au cours d'une réunion avec son ministre de la Défense Sergueï Choïgou montrée à la télévision russe.

Joe Biden a de son côté jugé "contestable" l'annonce de la prise de cette ville par l'armée russe. Vladimir Poutine "ne réussira jamais à dominer et occuper toute l'Ukraine", a-t-il ajouté.

Le ministère ukrainien des Affaires étrangères a réclamé jeudi, dans un tweet, l'instauration d'"un couloir humanitaire d'urgence" avec des "garanties" de sécurité pour évacuer les civils encore "présents en grand nombre" dans l'aciérie, selon lui.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky affirmait mercredi qu'il y avait encore un millier de civils, "femmes et enfants" et des "centaines de blessés" à cet endroit. Jeudi, le maire de Marioupol Vadim Boïtchenko a parlé de "300 à 1.000 civils". 

Le ministre russe Choïgou a quant à lui donné le nombre de 2.000 combattants encore dans l'aciérie. Il n'a pas évoqué la présence de civils. Ces chiffres sont invérifiables de source indépendante. 

Ukraine: des corps exhumés au centre d'enquêtes sur des atrocités

Les sépultures de fortune découvertes à proximité d'un hôpital de la ville dévastée de Borodianka, près de Kiev, ont livré leurs secrets aux experts enquêtant sur les accusations de crimes de guerre portées contre les troupes russes.

Les autorités ont déclaré que neuf cadavres de civils, dont beaucoup ont été abattus, avaient été exhumés de ces tombes.

Les enquêteurs ont rassemblé plus de 1.000 corps de civils dans des rues, des cours ou des sépultures improvisées dans les environs de la capitale ukrainienne, dont certains avaient les mains et les pieds liés ou des blessures par balle dans la nuque, ont expliqué jeudi des responsables. 

Cette enquête s'inscrit dans le cadre de la documentation de ce qu'Oleksandre Pavliouk, chef de l'administration militaire régionale de Kiev, a qualifié d'"atrocités" commises à la suite de l'invasion des troupes russes, qui ont par le suite été contraintes de se retirer de la région.

Quelques évacuations

Les autorités locales redoutent que plus de 20.000 personnes ne soient mortes à Marioupol, qui comptait quelque 450.000 habitants avant la guerre, en raison des combats mais aussi de l'absence de nourriture, d'eau et d'électricité. 

Depuis des jours déjà, les Russes contrôlent une grande partie de cette ville, où il reste selon eux quelque 250.000 habitants, ayant même emmené des journalistes occidentaux sur place.

Alors que les évacuations de civils ont été, tout au long du siège, rares et périlleuses à organiser, trois bus transportant des civils sont arrivés jeudi après-midi à Zaporijjia, à 200 km au nord-ouest de Marioupol. 

"Dès le premier jour, nous étions au sous-sol (...) Il faisait froid. Nous priions Dieu. Je lui demandais de nous protéger", a raconté Valentina Grintchouk, 73 ans, ajoutant cependant que de jeunes militaires russes "pas agressifs" l'avaient régulièrement ravitaillée en eau et nourriture.

D'autres ont fait état des bombardements, d'un char qui tire, des tireurs embusqués sur les toits et d'une opération organisée devant les caméras de la télévision russe. "Cette évacuation était un show", a dit Anastasia, 19 ans.

"De nombreuses personnes vivant dans les territoires occupés par les Russes veulent partir, mais il les en empêchent", a de son côté affirmé la vice-Première ministre ukrainienne Irina Verechtchouk, présente à Zaporijjia.

Les départs, étroitement contrôlés par les Russes, se font au compte-gouttes, selon le maire de Marioupol. La route est périlleuse avec beaucoup de points de contrôle à franchir dans cette région du sud-est de l'Ukraine où les combats continuent. 

L'administration régionale a affirmé que la ville de Zaporijjia même avait subi jeudi deux frappes russes. Elle a dit dans la soirée que huit civils avaient été blessés dans l'une d'elles.

Tirs sur toute la ligne de front

Dans le reste du Donbass et du sud de l'Ukraine, les forces russes "poursuivent leurs tirs d'artillerie sur toute la ligne de front", selon Kiev. Avec notamment des combats dans la région d'Izioum, des "bombardements incessants" à Popasna et Roubijné, dans la région de Lougansk, et de nouvelles frappes sur Mykolaïv, sur la route d'Odessa, qui ont fait un mort et deux blessés, selon son gouverneur Vitaly Kim.

Plus au nord, deux civils ont été tués et deux blessés dans des bombardements sur la région de Kharkiv, a annoncé le gouverneur régional Oleg Sinegoubov sur sa chaîne Telegram.

Le ministère russe de la Défense a quant à lui annoncé une série de frappes aériennes des forces russes, notamment sur la zone de Mykolaïv, et que celles-ci avaient visé à l'artillerie près de 60 "centres de commandement" ukrainiens dans l'est et le sud.  

Si les forces russes se sont retirées de la région de Kiev fin mars, à Borodianka, une des localités proches de la capitale qu'elles ont occupées, la police de Kiev a affirmé jeudi avoir déterré neuf nouveaux corps de civils "tués par les occupants russes", dont certaines avec "des traces de tortures".

Au total, "1.020 corps de civils", ont été retrouvés par les autorités ukrainiennes et transportés dans des morgues pour examens, a déclaré jeudi à l'AFP la vice-Première ministre ukrainienne Olga Stefanichyna. Kiev dénonce avec les Occidentaux des "crimes de guerre" perpétrés par les Russes, une accusation formellement rejetée par la Russie.

En visite dans la capitale ukrainienne avec son homologue danoise, le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez s'est dit "choqué de voir les horreurs et les atrocités de la guerre de Poutine dans les rues de Borodianka", après un passage dans cette localité. "Nous ne laisserons pas le peuple ukrainien seul", a-t-il ajouté.

Dans une autre localité au nord de Kiev, Mochtchoun, dévastée par les combats, ses habitants ne peuvent rentrer chez eux qu'après avoir signé une dérogation par laquelle ils acceptent le risque d'être tués ou blessés, en raison des mines et autres engins explosifs encore présents. 

"J'utilise une corde avec un crochet", a expliqué à l'AFP Vadim Jerdetskiï, le propriétaire d'une boulangerie. "Il faut le jeter et le faire traîner par terre. Si rien n'explose, tu peux avancer de cinq mètres".

La Russie sanctionne 29 Américains dont Mark Zuckerberg et Kamala Harris

61 personnalités canadiennes, pour la plupart des responsables gouvernementaux ou militaires, sont également visées par cette mesure.

Ces citoyens américains et canadiens "sont interdits d'entrée en Russie pour une durée indéterminée", a déclaré le ministère russe des Affaires étrangères dans deux communiqués listant les noms des personnes visées.

Côté américain, plusieurs responsables gouvernementaux, comme la vice-ministre de la Défense Kathleen Hicks, le porte-parole du Pentagone John Kirby ou encore le porte-parole de la diplomatie américaine Ned Price sont visés.

Une guerre longue

Si la bataille de Marioupol semble toucher à sa fin, celle qui a pour enjeu le contrôle de l'ensemble de la région du Donbass et une partie du sud de l'Ukraine s'annonce longue. 

D'un côté, la prise de Marioupol, en permettant aux Russes de faire la jonction complète entre leurs forces dans le nord de ce bassin minier et celles en provenance de Crimée, pourrait dégager des effectifs afin de renforcer leurs positions sur la ligne de front plus au nord. De l'autre, les Ukrainiens ont obtenu ces derniers jours une aide militaire plus substantielle tant des Américains que de certains de leurs alliés.

Ukraine: Marioupol continue de résister à l'offensive russe assure Kiev

Le port stratégique de Marioupol, que Moscou assure avoir "libéré", résiste encore aux forces russes, affirme Kiev selon qui des milliers de combattants ukrainiens continuent à se battre avec acharnement pour défendre l'immense complexe métallurgique Azovstal.

"Il n'y a pas un seul bâtiment non endommagé à Marioupol. Une ville littéralement brûlée", s'est indigné jeudi le président ukrainien Volodymyr Zelensky dans un discours prononcé devant le parlement du Portugal.

"Pendant plus d'un mois, les troupes russes ont assiégé Marioupol (...) Des centaines de milliers de civils étaient (coincés) là, sans nourriture, sans eau, sans médicaments. Sous des bombardements constants", a-t-il relaté.

Joe Biden a encore annoncé jeudi une nouvelle enveloppe de 800 millions de dollars comprenant "des armes d'artillerie lourde, des dizaines de (canons) Howitzer, 144.000 munitions ainsi que des drones", selon la Maison Blanche.

Pedro Sanchez a pour sa part annoncé de Kiev que Madrid allait livrer à l'Ukraine "200 tonnes" de matériel militaire, soit le double de l'aide fournie jusqu'ici dans ce domaine par l'Espagne. 

L'Ukraine va avoir besoin de "centaines de milliards de dollars" pour sa reconstruction, a d'ores et déjà averti le président Volodymyr Zelensky à l'intention des Occidentaux.

Le conflit a jeté sur les routes de l'exil plus de cinq millions d'Ukrainiens, selon l'ONU, et déplacé plus de 7,7 millions de personnes à l'intérieur de l'Ukraine, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM). 

En guise de contre-sanctions, Moscou a interdit jeudi d'entrée sur son territoire 29 personnalités américaines, dont Mark Zuckerberg, le patron de Meta, et la vice-présidente Kamala Harris, ainsi que 61 personnalités et journalistes canadiens.


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.