En Irak, l'activité humaine et le changement climatique ont tué le lac Sawa

Les ruines des infrastructures hôtelières et touristiques rappellent que, dans les années 1990 encore, le lac et ses rives étaient très prisés des jeunes mariés et des familles qui venaient y nager et pique-niquer. (AFP)
Les ruines des infrastructures hôtelières et touristiques rappellent que, dans les années 1990 encore, le lac et ses rives étaient très prisés des jeunes mariés et des familles qui venaient y nager et pique-niquer. (AFP)
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Publié le Mardi 26 avril 2022

En Irak, l'activité humaine et le changement climatique ont tué le lac Sawa

  • Aujourd'hui, Sawa est entièrement asséché. Des bouteilles jonchent ses anciennes berges et des sacs plastique pendent à des arbustes brûlés par le soleil
  • Sur les terres sablées saupoudrées de sel blanc, seule subsiste une mare où nagent de minuscules poissons. C'est la source qui relie le lac à la nappe phréatique l'approvisionnant

LAC DE SAWA: "Pêche interdite": aux portes du désert irakien, plus rien ne témoigne de l'existence du lac Sawa, si ce n'est ce panneau surplombant des terres désormais arides. La main de l'Homme et le changement climatique ont asséché l'étendue d'eau salée.


Les ruines des infrastructures hôtelières et touristiques rappellent que, dans les années 1990 encore, le lac et ses rives étaient très prisés des jeunes mariés et des familles qui venaient y nager et pique-niquer.


Mais aujourd'hui, Sawa, dans le sud de l'Irak, est entièrement asséché. Des bouteilles jonchent ses anciennes berges et des sacs plastique pendent à des arbustes brûlés par le soleil. Deux pontons en fer sont livrés à la rouille.


"Cette année, pour la première fois, le lac a disparu", déplore le militant écologiste Husam Subhi. "Les années précédentes, la superficie de l'eau diminuait durant les saisons de sécheresse".


Sur les terres sablées saupoudrées de sel blanc, seule subsiste une mare où nagent de minuscules poissons. C'est la source qui relie le lac à la nappe phréatique l'approvisionnant.


L'assèchement du lac de 5 km2 a été constaté depuis 2014, indique Youssef Jabbar, directeur du département environnemental de la province de Muthana. 


En cause: "le changement climatique et la hausse des températures. Muthana est une province désertique, elle souffre de la sécheresse et de l'absence de précipitations", explique le responsable.


Mais il y a surtout "plus d'un millier de puits creusés illégalement" non loin pour l'agriculture, selon un communiqué du gouvernement publié vendredi.


Tout comme des usines de ciment et de sel des environs "ont drainé des quantités importantes d'eau depuis la nappe phréatique qui alimente le lac", explique M. Jabbar.

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L'assèchement du lac de 5 km2 a été constaté depuis 2014, indique Youssef Jabbar, directeur du département environnemental de la province de Muthana. (AFP)

«Espèces vulnérables»
Pour revivre, Sawa attend pas moins d'un miracle.


Il faudrait condamner les puits et, après trois années marquées par la sécheresse, espérer plusieurs saisons de fortes pluies en Irak, un des cinq pays au monde les plus touchés par le changement climatique et frappé de plein fouet par la désertification.


Toutefois, même ainsi "il sera difficile de ramener le lac à son état originel", admet Youssef Jabbar.


Depuis 2014, la zone est protégée par la Convention de Ramsar sur les zones humides et la pêche y est interdite.


Sur son site Internet, l'organisation souligne le caractère "unique" du lac, situé dans "une zone de sabkhas (cuvettes salées, NDLR)". "Le lac est formé sur des roches limoneuses et isolé par les barrières de gypse qui le cernent", est-il précisé dans le texte.


Positionné sur la route d'oiseaux migrateurs, il fut un temps où il accueillait "plusieurs espèces vulnérables au plan mondial, l'aigle impérial, l'outarde houbara et la sarcelle marbrée".


Sawa n'est pas le seul plan d'eau confronté aux affres de la sécheresse en Irak.


Régulièrement, les réseaux sociaux sont inondés de photos de zones asséchées au sol craquelé, comme dans les marais mésopotamiens inscrits à l'Unesco, à Howeiza (sud) ou encore le lac Razaza, à Kerbala (centre).

«Le lac est mort»
A Sawa, "la baisse brutale des précipitations" --qui ne représentent plus que 30% de ce qu'elles étaient autrefois dans la région-- signifie que la nappe phréatique n'est plus alimentée, tout en étant constamment drainée par les puits, explique Aoun Dhiab, haut conseiller du ministère irakien des Ressources hydriques.


Et la hausse des températures a accentué le phénomène d'évaporation, ajoute-t-il.


Il souligne cependant la récente décision des autorités d'interdire le creusement de nouveaux puits et les efforts en cours pour condamner les puits illégaux à travers le pays.


Latif Dibes vit entre sa ville natale de Samawa, près du lac, et son pays d'adoption, la Suède.


Cet ancien moniteur de conduite est mobilisé depuis dix ans pour sensibiliser Samawa à l'écologie. Il nettoie les bords de l'Euphrate et a transformé le vaste jardin luxuriant de sa maison en parc public.


"Si les autorités s'étaient intéressées à ce dossier, le lac n'aurait pas disparu à cette vitesse. Ce n'est pas croyable", déplore-t-il, se rappelant les sorties scolaires et jours de fête de son enfance, quand la famille allait nager au lac.


"J'ai 60 ans et j'ai grandi avec le lac. Je pensais disparaître avant lui, mais malheureusement il est mort avant moi".


Centre de coordination militaro-civile pour Gaza: beaucoup de discussions, peu de résultats

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  • "Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore" ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés
  • "Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix"

JERUSALEM: Lancé par les Etats-Unis dans le sillage du cessez-le-feu entre Israël et le Hamas pour surveiller la trêve et favoriser l'afflux d'aide humanitaire, le Centre de coordination militaro-civile (CMCC) pour Gaza peine à tenir ses promesses.

"Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix, il n'y a aucune autre initiative, c'est ça ou continuer à discuter dans le vent avec des Israéliens".

"Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore", ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés par la campagne militaire israélienne.

Le CMCC doit permettre d'amorcer la suite des étapes du plan de paix pour Gaza après plus de deux ans d'une guerre dévastatrice déclenchée le 7 octobre 2023 par l'attaque sans précédent du mouvement palestinien Hamas sur Israël.

"Lorsque nous l'avons ouvert, nous avons clairement indiqué qu'il se concentrait sur deux choses: faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire, logistique et sécuritaire vers Gaza et aider à surveiller en temps réel la mise en oeuvre de l'accord", insiste le capitaine Tim Hawkins, porte-parole du Commandement militaire central américain (Centcom), couvrant notamment le Moyen-Orient.

L'initiative a été présentée aux acteurs (ONG, agences des Nations unies, diplomates...) comme un générateur d'idées totalement inédites.

Frustrés par leurs difficultés avec les autorités israéliennes, de nombreux pays et acteurs humanitaires disent s'être jetés dans le projet, impatients d'avoir un nouvel interlocuteur se disant enclin à trouver des solutions: les Etats-Unis.

"Rien n'a changé" 

"Au début, les Américains nous ont dit qu'ils découvraient qu'Israël interdisaient l'entrée de tout un tas de choses dans Gaza, la fameuse liste des biens à double usage, ils avaient l'air choqués et on se disait qu'enfin on allait franchir cet obstacle", raconte un ingénieur humanitaire, "mais force est de constater que strictement rien n'a changé".

Deux mois après l'ouverture, nombre d'humanitaires et diplomates contactés par l'AFP jugent, sous couvert de l'anonymat, que la capacité ou la volonté américaines à contraindre Israël est limitée.

Les visiteurs réguliers ou occasionnels des lieux ont décrit à l'AFP le grand hangar occupé par le CMCC à Kiryat Gat (sud d'Israël), comme un entrepôt où de nombreux militaires, israéliens et américains principalement, rencontrent des humanitaires, diplomates, et consultants.

Le premier des trois étages du bâtiment est réservé aux Israéliens, et le dernier aux troupes américaines. Tous deux sont interdits d'accès aux visiteurs.

Le deuxième, recouvert de gazon artificiel, sert d'espace de rencontres avec le monde extérieur.

"On dirait un espace de coworking, mais avec des gens en uniforme", s'amuse une diplomate qui raconte y croiser des "GIs qui boivent de la bière" au milieu d'une sorte d'open-space, avec des panneaux récapitulant les principaux points du plan Trump.

Plusieurs personnes ont dit à l'AFP avoir vu un tableau blanc barré de l'inscription "What is Hamas?" ("Qu'est-ce que le Hamas?") en lettres capitales, sans éléments de réponse.

"Il y a des tables rondes sur des sujets qui vont de la distribution d'eau ou de nourriture à la sécurité", raconte un humanitaire, "en gros on nous écoute décrire ce qu'on veut faire, et quels problèmes on a rencontrés depuis deux ans".

"Boussole du droit" 

Mais "ce n'est pas là que les décisions sont prises", tranche un diplomate qui cite des canaux de discussions parallèles, notamment une équipe supervisée par Arieh Lighstone, un collaborateur de l'émissaire américain Steve Witkoff, à Tel-Aviv.

Plusieurs diplomates regrettent l'absence d'officiels palestiniens dans les murs.

Un autre problème réside dans l'émergence de concepts largement rejetés par la communauté internationale, notamment celui des "Alternative Safe Communities" (ASC), visant à regrouper des civils "vérifiés", non affiliés au Hamas, dans des communautés créées ex nihilo dans une zone de la bande de Gaza sous contrôle militaire israélien, et où les services de base seraient dispensés.

"On a perdu la boussole du droit", commente une diplomate.

Mais le reproche qui revient le plus souvent est le fait que les questions politiques (gouvernance, maintien de l'ordre...) sont évacuées au profit de questions techniques.

"Ils discutent d'où mettre les stations d'épuration, pas de qui les exploitera ni de qui paiera les employés", résume un autre.

Concédant "certaines frictions", sans plus de détail, le capitaine Hawkins, du Centcom, met en avant certaines avancées comme l'ouverture de nouveaux points de passage pour l'aide à destination de Gaza. "Nous progressons, assure-t-il, tout en reconnaissant pleinement qu'il reste encore beaucoup à faire."


Le Congrès américain approuve la levée définitive des sanctions contre la Syrie

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
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  • Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar
  • Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis

WASIHNGTON: Le Congrès américain a approuvé mercredi la levée définitive des sanctions imposées par les Etats-Unis contre la Syrie du temps de Bachar al-Assad, devant permettre le retour d'investissements dans ce pays ravagé par des années de guerre civile.

L'abrogation d'une loi dite "Caesar", adoptée en 2019 lors du premier mandat de Donald Trump et qui imposait ces sanctions, figure en effet dans le texte sur la stratégie de défense (NDAA), que le Sénat américain a approuvé mercredi par 77 voix pour et 20 contre.

La Chambre des représentants s'était déjà prononcée la semaine dernière et le texte attend désormais d'être promulgué par le président américain.

Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar. Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis.

Le chef de la diplomatie syrienne, Assaad al-Chaibani, a salué sur Telegram le vote du Sénat comme "ouvrant de nouveaux horizons pour la coopération et le partenariat entre notre pays et le reste du monde".

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars.

Bien que son application soit suspendue, de nombreux responsables américains jugeaient qu'elle pouvait nuire à la confiance des investisseurs tant qu'elle n'était pas abrogée.

Le dirigeant syrien Ahmad al-Chareh a été reçu le 10 novembre à la Maison Blanche par le président Trump, une première pour un chef d'Etat syrien depuis l'indépendance du pays en 1946 et une consécration pour l'ancien jihadiste qui, en moins d'un an au pouvoir, a sorti son pays de l'isolement.

Donald Trump l'avait déjà rencontré lors d'un voyage dans le Golfe en mai, annonçant alors la levée des sanctions américaines.

Après 13 ans de guerre civile, la Syrie cherche à garantir des fonds pour sa reconstruction, dont le coût pourrait dépasser 216 milliards de dollars, selon la Banque mondiale.

"L'abrogation aujourd'hui de la loi Caesar est une étape décisive pour donner au peuple syrien une véritable chance de se reconstruire après des décennies de souffrances inimaginables", s'est félicité la sénatrice démocrate Jeanne Shaheen.


Les principales villes du Soudan privées de courant après des frappes de drones sur une centrale

Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
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  • Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale
  • Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des FSR

PORT-SOUDAN: Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts, ont indiqué plusieurs témoins à l'AFP.

Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale.

Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

Le gouvernement de l’État du Nil a confirmé la mort des deux secouristes dans un communiqué officiel.

Cette station est un nœud stratégique du réseau électrique soudanais, recevant l’électricité produite par le barrage de Merowe — la plus grande source d'énergie hydroélectrique du pays — avant sa redistribution vers plusieurs régions.

Des témoins ont également indiqué qu’aux alentours de 02H00 (minuit GMT), les forces de l’armée régulière avaient activé leurs systèmes de défense antiaérienne, rapportant avoir vu des flammes et de la fumée s'élever au-dessus de la ville contrôlée par l'armée en guerre depuis avril 2023 contre les FSR.

Les coupures d’électricité se sont étendues à plusieurs États, notamment ceux du Nil, de la mer Rouge — où se trouve Port-Soudan, siège provisoire du gouvernement pro-armée — ainsi qu’à la capitale Khartoum, selon des témoins, l'incendie n'étant toujours pas maitrisé.

Les FSR n’ont jusqu'à présent pas commenté l'attaque.

Ces derniers mois, les FSR ont été accusées de lancer des attaques de drones sur de vastes zones contrôlées par l’armée, visant des infrastructures civiles et provoquant des coupures de courant affectant des millions de personnes.

La guerre, qui a éclaté en avril 2023, a fait plusieurs dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué "la pire crise humanitaire au monde", selon l'ONU.