Ukraine: à Boutcha, Guterres appelle Moscou à coopérer avec la CPI

Le secrétaire général de l'ONU est arrivé mercredi soir en Ukraine après une visite mardi à Moscou (Photo, AFP).
Le secrétaire général de l'ONU est arrivé mercredi soir en Ukraine après une visite mardi à Moscou (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 28 avril 2022

Ukraine: à Boutcha, Guterres appelle Moscou à coopérer avec la CPI

  • Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé jeudi Moscou à coopérer avec l'enquête de la Cour pénale internationale sur de possibles crimes de guerre
  • A Borodianka, autre commune proche de Kiev, M. Guterres a qualifié la guerre d'«absurdité au XXIe siècle»

BOUTCHA: Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé jeudi Moscou à coopérer avec l'enquête de la Cour pénale internationale sur de possibles crimes de guerre, lors d'une visite dans des banlieues de Kiev théâtres d'exactions imputées par les Ukrainiens aux forces russes.

"Quand nous voyons ce site horrible, je vois combien il est important d'avoir une enquête complète et d'établir les responsabilités", a déclaré M. Guterres à Boutcha. "J'appelle la Russie à accepter de coopérer avec la CPI", a-t-il ajouté.

Le 2 avril, à Boutcha, des journalistes de l'AFP ont découvert une rue jonchée de cadavres. Et l'ONU a documenté le "meurtre, y compris certains par exécution sommaire", de 50 civils, après une mission dans la ville le 9 avril.

A Borodianka, autre commune proche de Kiev, M. Guterres a qualifié la guerre d'"absurdité au XXIe siècle", devant des habitations en ruines.

"J'imagine ma famille dans une de ces maisons aujourd'hui détruites et noircies, je vois mes petites-filles courir en panique", a-t-il lancé, avant d'ajouter: "aucune guerre n'est acceptable au XXIe siècle". 

M. Guterres effectue sa première visite en Ukraine depuis le début du conflit, et devait rencontrer le président Volodymyr Zelensky dans l'après-midi.

Pompiers sur tous les fronts 

Cette visite intervient deux jours après sa visite à Moscou, où il a rencontré le président Vladimir Poutine et demandé à la Russie de collaborer avec l'ONU pour permettre l'évacuation des civils des zones bombardées.

Ces régions, le sud et l'est, où se concentre à présent l'offensive russe, subissaient jeudi un feu nourri de bombes.

"L’ennemi intensifie son offensive. Les occupants effectuent des frappes pratiquement dans toutes les directions, avec une activité particulièrement intense dans les régions de Kharkiv et le Donbass, a indiqué l'état-major ukrainien dans sa note matinale.

Selon lui, l'armée russe tente d'empêcher le transfert de forces ukrainiennes du nord vers l'est. 

Le ministère russe de la Défense a de son côté indiqué avoir détruit dans la nuit avec des "missiles de haute précision" deux dépôts d’armements et de munitions dans la région de Kharkiv, et effectué des frappes aériennes sur 67 sites militaires ukrainiens.

Il a accusé les forces ukrainiennes d'avoir mercredi soir frappé "avec des missiles balistiques Totchka-U et des roquettes (…) des quartiers d'habitation du centre de Kherson", dans le sud de l'Ukraine. 

L'administration locale russe a dit jeudi vouloir introduire dans cette ville côtière - la seule dont les Russes aient pris le contrôle complet - le rouble à la place de la hryvnia ukrainienne à partir du 1er mai.

Dans les villes bombardées, les pompiers ukrainiens foncent d'un incendie à l'autre, comme à Kharkiv où plus de 2.000 bâtiments ont été endommagés ou détruits par le feu, selon Ievguen Vassylenko, porte-parole régional des services d'urgence ukrainiens.

"Et ça continue comme ça tous les jours. Les gars n'ont pas assez de temps pour se reposer, c'est le plus difficile. C'est épuisant", explique à l'AFP Roman Katchanov à la tête de la caserne numéro 11 de la deuxième ville d'Ukraine. 

Ukraine: dans Kharkiv bombardée, l'épuisant travail des pompiers

"Le danger on s'en fout!": chaque jour ils arpentent Kharkiv pour éteindre des incendies causés par des bombardements russes. Après plus de deux mois de conflit, l'épuisement guette les pompiers de la deuxième ville d'Ukraine.

Les chiffres sont terribles: plus de 1 000 incendies dans la région de Kharkiv, plus de 2 000 bâtiments endommagés ou détruits par le feu uniquement dans la ville et plus de 140 civils morts dans les décombres, selon Ievguen Vassylenko, porte-parole régional du Service d'urgence de l'Ukraine.

Chaque jour des roquettes russes visent principalement les quartiers Nord-Est et Est, les plus proches de la ligne de front. Des habitants y vivent toujours. Des frappes aléatoires, espacées, à toute heure du jour ou de la nuit, parfois meurtrières.

Mercredi, en fin de journée, deux bombardements ont encore fait un mort et deux blessés. Mardi le bilan était de trois tués.

"En temps de paix, il pouvait n'y avoir qu'un seul incendie majeur, mais pendant la guerre, il peut y en avoir en même temps une dizaine", explique Roman Katchanov, carrure de judoka catégorie poids-lourd, à la tête de la caserne N.11.

"Il y a deux semaines, c'était un gros bombardement", raconte l'homme au débit de mitraillette.

"56 camions de pompiers sont intervenus dans différents quartiers du centre-ville. Un bâtiment, puis un autre, et encore un autre... Et puis ils ont commencé à bombarder Saltivka", le quartier au Nord-Est, le plus ciblé, poursuit le responsable.

"Et ça continue comme ça tous les jours. Les gars n'ont pas assez de temps pour se reposer, c'est le plus difficile. C'est épuisant", ajoute-il.

Mercredi, après l'intervention sur un garage parti en fumée, un pompier est resté longuement assis, le visage en partie noirci, ruisselant de sueur, les traits tirés, le regard dans le vide. 

Cette semaine, les soldats du feu ont reçu la visite d'un petit groupe de collègues américains. Ils sont venus livrer du matériel et donner des cours de secourisme.

Derrière le hangar de la caserne où stationnent d'inépuisables vieux camions de pompiers datant de l'ère soviétique, au côté d'autres plus récents, Roman Katchanov montre à ses hôtes un impressionnant tas de squelettes de roquettes de toutes tailles, témoignage des multiples frappes sur la ville.

Interrogé sur les risques encourus par ses hommes, alors que souvent les Russes bombardent deux fois le même endroit à 10 ou 15 mn d'intervalle, la réponse fuse.

"On s'en fout du danger! Il faut y aller, on n'y fait même plus attention, pour nous c'est juste faire notre boulot", lâche-t-il.

Cibles militaires en Russie 

Jeudi, le commandant des forces aériennes ukrainiennes a estimé que les lance-missiles fournis par les Occidentaux avaient une portée insuffisante pour "atteindre les avions de l’occupant, qui larguent des bombes sur nos villes à 8 km d'altitude et plus".

"Il nous faut des systèmes anti-aériens de moyenne et longue portée" et des "chasseurs modernes", a déclaré Mykola Olechtchouk sur Telegram.

La Grande-Bretagne avait appelé mercredi les alliés de l'Ukraine à faire preuve de "courage" en augmentant leur aide militaire, arguant que la guerre en Ukraine était "notre guerre" et la victoire de Kiev un "impératif stratégique pour nous tous".

"Armes lourdes, chars, avions - creuser dans nos stocks, accélérer la production, nous devons faire tout ça", a lancé mercredi soir dans un discours à Londres la cheffe de la diplomatie britannique Liz Truss.

Les livraisons d'armes à l'Ukraine "menacent la sécurité" européenne, a estimé jeudi le Kremlin. La veille, Vladimir Poutine avait à nouveau mis en garde contre toute intervention extérieure dans le conflit, promettant une riposte "rapide et foudroyante".

Un conseiller de la présidence ukrainienne a laissé entendre que Kiev pourrait attaquer des cibles militaires en Russie. 

"La Russie attaque l'Ukraine et tue les civils. L'Ukraine se défendra par tous les moyens, y compris avec des frappes sur des entrepôts et des bases des assassins russes. Le monde reconnaît ce droit", a écrit jeudi sur son compte Twitter Mykhaïlo Podoliak.

Energie: réunion européenne lundi 

Sur le terrain économique, le groupe russe Gazprom a annoncé mercredi avoir suspendu toutes ses livraisons de gaz à la Bulgarie et à la Pologne, assurant que ces deux pays n'avaient pas payé en roubles, comme l'exige depuis mars Vladimir Poutine.

La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a dénoncé un "chantage au gaz" et affirmé que ces deux pays membres de l'UE et de l'Otan, très dépendants du gaz russe, étaient désormais approvisionnés "par leurs voisins de l'Union européenne".

Les ministres européens chargés de l'énergie se réuniront le 2 mai en "session extraordinaire", selon la présidence française de l'Union européenne.

Pour soutenir l'économie ukrainienne, la Commission européenne a proposé mercredi de suspendre pendant un an tous les droits de douane sur les produits importés de ce pays dans l'UE. La proposition doit encore être approuvée par le Parlement européen et les 27 Etats membres.

Le président Volodymyr Zelensky a salué la proposition, accusant la Russie de "tenter de provoquer une crise mondiale des prix" et le "chaos" sur le marché alimentaire mondial.

Ukraine: Erdogan dit à Poutine être «prêt à prendre l'initiative» pour la paix

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a fait part jeudi à son homologue russe Vladimir Poutine de sa disposition à "prendre l'initiative" pour mettre fin à la guerre en Ukraine, au lendemain d'un échange de prisonniers entre Washington et Moscou sur le sol turc.

Lors d'un entretien téléphonique, M. Erdogan s'est dit "prêt à prendre l'initiative pour mettre fin à la guerre entre la Russie et l'Ukraine et à servir de médiateur sur la voie de la paix", a précisé la présidence turque dans un communiqué.

M. Erdogan "a exprimé sa volonté d'établir une paix durable dans la région dès que possible en accentuant l'élan pris durant les pourparlers d'Istanbul", selon la présidence.

La présidence turque a ajouté que M. Poutine avait "remercié" M. Erdogan pour l'échange de prisonniers entre Washington et Moscou annoncé mercredi et qui "a eu lieu en Turquie sous la coordination et la supervision" des services de renseignement turcs (MIT).

L'ex-Marine américain Trevor Reed, condamné à neuf ans de prison en Russie pour violences, avait été échangé contre Konstantin Iarochenko, un pilote russe incarcéré aux Etats-Unis depuis 2010.

Membre de l'Otan et alliée de l'Ukraine, la Turquie s'efforce depuis le début de la guerre en Ukraine de faciliter une médiation entre Moscou et Kiev, et a refusé jusqu'ici de se joindre aux sanctions occidentales contre la Russie, soucieuse de garder une ligne ouverte avec le Kremlin.

La Turquie a ainsi accueilli par deux fois des négociations directes entre les deux parties, le 10 mars au niveau ministériel à Antalya (sud) et le 29 mars à Istanbul.

M. Erdogan a depuis affirmé à plusieurs reprises vouloir accueillir à Istanbul une rencontre entre M. Poutine et son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky.


L'aide américaine n'est pas une «baguette magique» pour l'Ukraine

Des militants brandissent des drapeaux ukrainiens devant le Capitole américain à Washington, DC, le 23 avril 2024. (AFP)
Des militants brandissent des drapeaux ukrainiens devant le Capitole américain à Washington, DC, le 23 avril 2024. (AFP)
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  • «Cela a été un parcours difficile. Cela aurait dû être plus facile. Cela aurait dû arriver plus vite», a reconnu Joe Biden mercredi
  • Jake Sullivan a averti qu'il était "possible que la Russie réalise des avancées tactiques supplémentaires dans les semaines à venir", alors que Kiev s'attend à une nouvelle offensive russe prochaine

WASHINGTON: Un soutien massif, pas une "baguette magique": l'aide américaine à l'Ukraine ne résoudra pas tous les problèmes sur les fronts, et les Etats-Unis sont les premiers à le reconnaître.

"Cela a été un parcours difficile. Cela aurait dû être plus facile. Cela aurait dû arriver plus vite", a reconnu Joe Biden mercredi.

Il venait de promulguer une loi, âprement débattue pendant des mois au Congrès américain, qui prévoit 61 milliards de dollars d'aide militaire et économique pour Kiev.

"C'est un montant important", mais "ce délai a coûté cher", souligne Garret Martin, chercheur à l'American University de Washington.

Le conseiller à la sécurité nationale de la Maison Blanche, Jake Sullivan, en a convenu lui-même.

"Il va falloir du temps pour sortir du fossé creusé par les six mois d'attente" au Congrès, a-t-il dit lors d'une conférence de presse.

Il a averti qu'il était "possible que la Russie réalise des avancées tactiques supplémentaires dans les semaines à venir", alors que Kiev s'attend à une nouvelle offensive russe prochaine.

"Le chemin qui est devant nous n'est pas facile", mais "nous pensons que l'Ukraine peut, et va, gagner", a encore indiqué" Jake Sullivan, en se gardant bien toutefois de définir ce que serait une "victoire" ukrainienne.

Au-delà du montant très conséquent voté par le Congrès, les Etats-Unis ont aussi décidé d'aller plus loin dans la nature des armes fournies.

Ils ont ainsi commencé, discrètement, à livrer aux Ukrainiens des missiles longue portée de type "ATACMS", et vont continuer à le faire.

Mobilisation

L'Ukraine avait utilisé pour la première fois en octobre contre la Russie des missiles américains ATACMS, mais ceux dont il est question désormais peuvent frapper plus loin, jusqu'à 300 km de distance.

"Cela aura un impact", mais "ce n'est pas un seul équipement qui résoudra tout", a dit le conseiller à la sécurité nationale.

Par ailleurs, "il y a une chose que cette aide ne peut pas faire, à savoir résoudre le problème du manque de combattants" de Kiev, souligne Garret Martin, même s'il estime que le vote du Congrès américain pourrait doper le moral des troupes ukrainiennes.

Ce sujet de la mobilisation a fait l'objet de discussions entre Joe Biden et son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, selon la Maison Blanche.

L'Ukraine est confrontée à une pénurie de soldats volontaires, après plus de deux ans de guerre contre l'envahisseur russe, qui ont fait des dizaines de milliers de morts.

Kiev vient d'élargir la mobilisation, abaissant l'âge des Ukrainiens pouvant être appelés de 27 à 25 ans.

Le pays, qui cherche à faire revenir sur son territoire ses citoyens en âge de combattre, ne délivrera par ailleurs plus de passeports à l'étranger aux hommes âgés de 18 à 60 ans, selon un texte publié par le gouvernement mercredi.

Max Bergmann, Directeur au Centre des études stratégiques et internationales (CSIS), souligne lui que l'impact de l'aide américaine dépendra aussi, en partie, de l'attitude des Européens.

Ces derniers "doivent doper dès maintenant la production" d'armement, écrit-il dans une note récente, avec pour "objectif de pouvoir combler la lacune que laisseraient les Etats-Unis" si le financement américain devait s'arrêter pour de bon, par exemple en cas de victoire du républicain Donald Trump à la présidentielle de novembre.

Pour l'expert, l'Ukraine devra s'attacher en 2024 à "tenir ses positions, fatiguer les forces russes, reconstruire et restaurer ses propres forces et ses capacités de défense civile", avant, éventuellement, de repartir "à l'offensive" l'an prochain.


Pakistan: Malala critiquée pour une comédie musicale produite avec Hillary Clinton

La Pakistanaise Malala Yousafzai, prix Nobel de la paix, est sous le feu des critiques dans son pays natal après une publicité réalisée pour une comédie musicale sur les suffragettes qu'elle produit avec Hillary Clinton. (AFP).
La Pakistanaise Malala Yousafzai, prix Nobel de la paix, est sous le feu des critiques dans son pays natal après une publicité réalisée pour une comédie musicale sur les suffragettes qu'elle produit avec Hillary Clinton. (AFP).
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  • Sur X, anonymes et commentateurs lui reprochent d'être apparue à Broadway aux côtés de l'ex-secrétaire d'Etat américaine -sous le mandat de laquelle des frappes de drones ont tué des civils au Pakistan- et de ne pas se prononcer sur la guerre à Gaza
  • Si Malala Yousafzai, 26 ans, est une militante obstinée des droits des femmes louée à travers le monde, les cercles islamistes et une partie importante de l'opinion publique pakistanaise voient en elle un "agent des Etats-Unis"

LAHORE: La Pakistanaise Malala Yousafzai, prix Nobel de la paix, est sous le feu des critiques dans son pays natal après une publicité réalisée pour une comédie musicale sur les suffragettes qu'elle produit avec Hillary Clinton.

Sur X, anonymes et commentateurs lui reprochent d'être apparue à Broadway aux côtés de l'ex-secrétaire d'Etat américaine -sous le mandat de laquelle des frappes de drones ont tué des civils au Pakistan- et de ne pas se prononcer sur la guerre à Gaza, y voyant un "deux poids, deux mesures".

Si Malala Yousafzai, 26 ans, est une militante obstinée des droits des femmes louée à travers le monde, les cercles islamistes et une partie importante de l'opinion publique pakistanaise voient en elle un "agent des Etats-Unis" créé pour corrompre la jeunesse.

Après la première représentation de "Suffs", le cercle des critiques semble s'être élargi à des figures du féminisme au Pakistan.

"J'ai défendu bec et ongle Malala toutes ces années mais, là, je ne la suis pas. C'est vraiment difficile de la défendre depuis six mois", écrit ainsi la militante Leena Ghani, en référence à la guerre lancée par Israël à Gaza en réponse à l'attaque meurtrière du Hamas sur son sol le 7 octobre.

"J'admire Malala depuis 2011", affirme l'éditorialiste Mehr Tarar sur X, mais "sa collaboration théâtrale avec Hillary Clinton -qui défend le soutien infaillible de l'Amérique au génocide des Palestiniens- est un vrai coup à sa crédibilité comme défenseuse des droits humains".

« Tu nous as laissés tomber »

Mme Clinton a dit soutenir la guerre contre le Hamas et rejeté des appels au cessez-le-feu à Gaza. Elle a aussi réclamé la protection des civils dans le petit territoire contrôlé par le mouvement islamiste depuis 2007.

"Quelle déception Malala, tu nous as laissés tomber", écrit de son côté la professeure et militante féministe Nida Kirmani.

De nombreuses voix au Pakistan ont accusé Malala Yousafzai de ne pas avoir exprimé sa solidarité avec les Palestiniens. La jeune femme avait pourtant précédemment publiquement condamné la mort de civils à Gaza et réclamé un cessez-le-feu.

Le New York Times rapporte qu'elle portait un pin's rouge et noir pour la première représentation de "Suffs", un signe de soutien au cessez-le-feu.

Après ces critiques, la jeune femme a affirmé mardi sur le réseau social X son soutien aux habitants de Gaza et condamné la guerre menée par Israël.

"Je veux qu'il n'y ait aucune confusion quant à mon soutien à la population de Gaza", a écrit Malala Yousafzai.

"Nous n'avons pas besoin de voir davantage de cadavres, d'écoles bombardées et d'enfants affamés pour comprendre qu'un cessez-le-feu est urgent et nécessaire".

"J'ai condamné et je continuerai à condamner le gouvernement israélien pour ses violations du droit international et ses crimes de guerre", a-t-elle ajouté.

La jeune fille originaire de la verdoyante vallée de Swat, dans le nord-ouest du Pakistan, avait été blessée par balle au visage en 2012 par des islamistes.

Soignée en urgence en Grande-Bretagne, elle est ensuite devenue un symbole mondial de résistance à l'extrémisme religieux et la porte-voix des filles privées d'instruction, puis en 2014 la plus jeune prix Nobel de la Paix de l'histoire.

Depuis qu'elle a été attaquée, elle n'est revenue que deux fois dans son pays.


Gaza: montée des tensions entre étudiants et la police sur les campus américains

La colère d'étudiants américains pro-palestiniens contre la guerre que mène Israël contre le Hamas dans la bande de Gaza a grossi mercredi aux Etats-Unis, avec des face-à-face tendus avec la police au Texas, à New York, en Nouvelle-Angleterre et en Californie. (AFP).
La colère d'étudiants américains pro-palestiniens contre la guerre que mène Israël contre le Hamas dans la bande de Gaza a grossi mercredi aux Etats-Unis, avec des face-à-face tendus avec la police au Texas, à New York, en Nouvelle-Angleterre et en Californie. (AFP).
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  • "Si la situation n'est pas maîtrisée rapidement et si les menaces et intimidations ne cessent pas, il sera alors temps de faire appel à la Garde nationale"
  • Depuis le regain de tensions la semaine dernière à Columbia, le mouvement s'est étendu à d'autres campus

AUSTIN: La colère d'étudiants américains pro-palestiniens contre la guerre que mène Israël contre le Hamas dans la bande de Gaza a grossi mercredi aux Etats-Unis, avec des face-à-face tendus avec la police au Texas, à New York, en Nouvelle-Angleterre et en Californie.

En visite à l'université Columbia à Manhattan -- d'où est parti cette dernière vague de manifestations étudiantes commencées en octobre -- le président républicain de la Chambre des représentants du Congrès, Mike Johnson, a menacé: "si la situation n'est pas maîtrisée rapidement et si les menaces et intimidations ne cessent pas, il sera alors temps de faire appel à la Garde nationale".

Pour "rétablir l'ordre sur ces campus", a martelé le dirigeant conservateur.

Un avertissement qui résonne douloureusement aux Etats-Unis: le 4 mai 1970, la Garde nationale de l'Ohio avait ouvert le feu à l'université d'Etat de Kent sur des manifestants étudiants pacifiques, dont quatre avaient été tués.

M. Johnson, proche de l'ex-président républicain Donald Trump candidat à sa réélection, a averti qu'il exigerait du président démocrate Joe Biden d'"agir" et jugé que les manifestations pro-palestiniennes "mettaient une cible sur le dos d'étudiants juifs aux Etats-Unis", qui comptent le plus de juifs au monde (quelque six millions) après Israël.

« Liberté d'expression »

Depuis le début du conflit à Gaza en octobre, les universités américaines sont secouées par des débats parfois violents sur la liberté d'expression et des accusations d'antisémitisme et d'antisionisme qui ont coûté leurs postes cet hiver aux présidentes de Harvard et de l'université de Pennsylvanie.

"Profitez de votre liberté d'expression", a lancé, provocateur, M. Johnson, hué par des centaines d'étudiants de Columbia vent debout contre la guerre d'Israël contre le Hamas qui a tué quelque 34.200 personnes, la plupart des civils, selon le ministère de la Santé du mouvement islamiste palestinien.

L'attaque sans précédent du 7 octobre 2023 menée par le Hamas a fait 1.170 morts, essentiellement civils, selon un bilan de l'AFP établi à partir de données officielles.

Mercredi, la Maison Blanche a réaffirmé que le président Biden, qui espère être réélu en novembre, "soutenait la liberté d'expression, le débat et la non discrimination" dans les universités.

Depuis le regain de tensions la semaine dernière à Columbia, le mouvement s'est étendu à d'autres campus.

Alliance Etats-Unis-Israël 

Notamment dans les Etats de la Nouvelle-Angleterre, dans le nord-est, où des prestigieuses universités ont demandé à la police d'interpeller des manifestants étudiants qui dénoncent l'alliance militaire, diplomatique et économique des Etats-Unis avec Israël et critiquent les conditions actuelles des Palestiniens.

"En tant que Palestinien, est-ce de ma responsabilité d'être là et de montrer ma solidarité avec la population de Gaza? Absolument!", a répondu à l'AFP Yazen, un Américain de 23 ans d'origine palestinienne qui campe depuis quelques jours dans des tentes montées sur le campus de Columbia.

La présidence de l'université a salué "des progrès importants" dans les discussions avec des étudiants pour évacuer ce campement d'ici vendredi.

Dans la nuit de lundi à mardi, 120 personnes avaient été brièvement interpellées devant l'université de New York (NYU), au coeur de Manhattan. A Yale, dans le Connecticut, une cinquantaine de manifestants ont aussi été interpellés.

Sa concurrente Harvard, la plus ancienne des Etats-Unis, en banlieue de la cité historique de Boston, a vu aussi mercredi se monter sur son campus arboré un campement.

Police anti-émeute 

A l'autre bout du pays, l'université du Texas à Austin a été le théâtre d'un face-à-face, finalement bon enfant, entre des centaines d'étudiants pro-palestiniens et la police, dont nombre d'officiers à cheval et en tenue anti-émeute.

Certains brandissaient des drapeaux palestiniens et portaient le keffieh, d'autres, encadrés par des policiers, s'étaient enveloppés dans des drapeaux d'Israël.

Et à l’université de Californie du sud (USC), plusieurs centaines d’étudiants ont manifesté aux cris de "libérez la Palestine", "révolution par l'intifada".

Dans la foule très diverse, certains agitaient des drapeaux palestiniens, d'autres portaient des keffiehs et des pancartes appelant à "arrêter le génocide" et à un  "cessez-le-feu".

Des centaines de manifestants s'étaient rassemblés mardi soir à Brooklyn, le plus grand arrondissement de New York, à l'appel de Jewish Voice for Peace, un groupe d'Américains juifs de gauche pro-palestiniens, à l'occasion du séder, le rituel de la Pâque juive. Nombre d'entre eux ont été interpellés.

"Nous sommes (les Américains) les instigateurs d'une telle violence, d'une telle haine, c'est terrible", a tonné sur place Rebecca Lurie.