La mort d’un employé de l’ambassade américaine détenu par les Houthis suscite l’indignation

Des miliciens houthis passent devant l’ambassade des États-Unis à Sanaa, au Yémen. (Reuters)
Des miliciens houthis passent devant l’ambassade des États-Unis à Sanaa, au Yémen. (Reuters)
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Publié le Vendredi 27 mai 2022

La mort d’un employé de l’ambassade américaine détenu par les Houthis suscite l’indignation

Des miliciens houthis passent devant l’ambassade des États-Unis à Sanaa, au Yémen. (Reuters)
  • L’ambassade des États-Unis à Sanaa a annoncé jeudi qu’Abdelhamid al-Ajami, membre de son personnel dans la capitale yéménite, qui avait été enlevé par les Houthis à la fin de l’année dernière, était mort dans les geôles des Houthis
  • M. Al-Ajami faisait partie d’une dizaine d’employés yéménites de l’ambassade et de l’USAID qui ont été enlevés et ont ensuite été portés disparus

AL-MUKALLA: Les Houthis, soutenus par l’Iran, ont de nouveau été critiqués pour le mauvais traitement qu’ils infligent aux prisonniers après la mort d’un employé d’une organisation humanitaire américaine au Yémen alors qu’il était détenu par le groupe.

L’ambassade des États-Unis à Sanaa a annoncé jeudi qu’Abdelhamid al-Ajami, membre de son personnel dans la capitale yéménite qui avait été enlevé par les Houthis à la fin de l’année dernière, était mort dans les geôles des Houthis.

Dans un communiqué, appelant également à la libération des autres employés détenus par les Houthis, l’ambassade écrit : «Nous pleurons la mort d’Abdelhamid al-Ajami, employé retraité de l’USAID (Agence des États-Unis pour le développement international), qui est mort alors qu’il était détenu par les Houthis.

«C’était un grand-père innocent qui n’aurait jamais dû mourir loin de sa famille, un fier Yéménite qui se consacrait à l’éducation des enfants de son pays.»

«Nous présentons nos condoléances à ses proches et appelons les Houthis à mettre fin à cette injustice et à libérer dès maintenant chaque employé actuel et ancien de l’ambassade américaine.»

M. Al-Ajami faisait partie d’une dizaine d’employés yéménites de l’ambassade et de l’USAID qui ont été enlevés et ont ensuite été portés disparus après que la milice a pris d’assaut le complexe de l’ambassade.

Selon des militants yéménites et des médias locaux, M. Al-Ajami aurait été brutalement torturé par les Houthis et se serait vu refuser la médiation qui aurait pu lui sauver la vie. C’est cette décision-là qui a mené à sa mort.

La mort de M. Al-Ajami est survenue alors que les amis de Bassam al-Mardahi, un autre employé de l’ambassade américaine enlevé par les Houthis, ont prévenu qu’il pourrait mourir lui aussi, car il se trouvait dans un état critique en raison des actes de torture infligés par ses ravisseurs.

Des représentants du gouvernement yéménite, des militants des droits de l’homme et d’anciennes personnes enlevées ont fermement condamné les Houthis pour les mauvais traitements infligés aux prisonniers, déclarant que la mort d’Abdelhamid al-Ajami était une preuve supplémentaire de l’utilisation par le groupe de méthodes de torture contre des milliers de prisonniers.

Le ministre yéménite de l’Information, Mouammar al-Eryani, a présenté ses condoléances à la famille de M. Al-Ajami et a appelé à une action internationale pour contraindre les Houthis à cesser de maltraiter les prisonniers et à les libérer immédiatement.

Il a exprimé sa ferme condamnation de la «torture psychologique et physique» infligée par le groupe à M. Al-Ajami, traitement qui, selon le ministre, aurait entraîné sa mort huit mois après son enlèvement, ajoutant qu’il avait été privé «de ses droits les plus fondamentaux, y compris des médicaments».

L’ambassade de France au Yémen a également dénoncé ce décès et demandé aux Houthis de relâcher les employés américains et onusiens encore en détention.

«Elle réitère sa demande de libération de tous les recrutés locaux américains et onusiens détenus arbitrairement par les Houthis depuis plusieurs mois», indique l’ambassade dans un tweet.

Les Houthis détiennent toujours deux Yéménites travaillant pour l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture et le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme à Sanaa, qui ont été enlevés dans cette ville en novembre. Les deux employés n’ont pas été jugés et les Houthis les ont empêchés de contacter leurs familles, a indiqué l'ONU.

De même, des militants yéménites des droits humains ont affirmé que la torture était monnaie courante dans les prisons des Houthis et que des dizaines de civils enlevés par le groupe étaient morts en détention.

Fouad al-Mansouri, un militant yéménite des droits de l’homme, a expliqué à Arab News que si les Houthis ne sont pas contraints de cesser de maltraiter les prisonniers, de nombreux détenus dans les prisons des Houthis connaîtront le même sort que M. Al-Ajami.

«La mort de M. Al-Ajami est une preuve très grave des mauvais traitements infligés aux détenus dans les prisons de la milice houthie. Ce n’est pas le premier incident et ce ne sera pas le dernier», a lancé M. Al-Mansouri.

Amat al-Salam al-Hajj, présidente de l’Abductees’ Mothers Association, organisation qui regroupe les mères de milliers de prisonniers de guerre, a révélé à Arab News que les Houthis avaient interdit aux proches des employés de l’ambassade américaine détenus de s’adresser à l’organisation ou aux médias, exhortant l’envoyé de l’ONU pour le Yémen à œuvrer à la libération de milliers de détenus.

«Dans les prisons des Houthis, la dignité de l’être humain yéménite est insultée. Le dossier des personnes enlevées est une véritable crise humanitaire qui doit être résolue», a-t-elle souligné.

Abdallah al-Munifi, journaliste yéménite et ancien détenu libéré d’une prison houthie en 2018, a raconté à Arab News qu’il était fouetté avec des câbles électriques, suspendu par les bras, privé de sommeil et de toilettes, électrocuté et maintenu à l’isolement pendant des mois.

«J’aimerais mourir de torture. Parfois, ils infligent des blessures au corps et mettent du sel sur les plaies», a confié M. Al-Munifi.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Centre de coordination militaro-civile pour Gaza: beaucoup de discussions, peu de résultats

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  • "Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore" ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés
  • "Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix"

JERUSALEM: Lancé par les Etats-Unis dans le sillage du cessez-le-feu entre Israël et le Hamas pour surveiller la trêve et favoriser l'afflux d'aide humanitaire, le Centre de coordination militaro-civile (CMCC) pour Gaza peine à tenir ses promesses.

"Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix, il n'y a aucune autre initiative, c'est ça ou continuer à discuter dans le vent avec des Israéliens".

"Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore", ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés par la campagne militaire israélienne.

Le CMCC doit permettre d'amorcer la suite des étapes du plan de paix pour Gaza après plus de deux ans d'une guerre dévastatrice déclenchée le 7 octobre 2023 par l'attaque sans précédent du mouvement palestinien Hamas sur Israël.

"Lorsque nous l'avons ouvert, nous avons clairement indiqué qu'il se concentrait sur deux choses: faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire, logistique et sécuritaire vers Gaza et aider à surveiller en temps réel la mise en oeuvre de l'accord", insiste le capitaine Tim Hawkins, porte-parole du Commandement militaire central américain (Centcom), couvrant notamment le Moyen-Orient.

L'initiative a été présentée aux acteurs (ONG, agences des Nations unies, diplomates...) comme un générateur d'idées totalement inédites.

Frustrés par leurs difficultés avec les autorités israéliennes, de nombreux pays et acteurs humanitaires disent s'être jetés dans le projet, impatients d'avoir un nouvel interlocuteur se disant enclin à trouver des solutions: les Etats-Unis.

"Rien n'a changé" 

"Au début, les Américains nous ont dit qu'ils découvraient qu'Israël interdisaient l'entrée de tout un tas de choses dans Gaza, la fameuse liste des biens à double usage, ils avaient l'air choqués et on se disait qu'enfin on allait franchir cet obstacle", raconte un ingénieur humanitaire, "mais force est de constater que strictement rien n'a changé".

Deux mois après l'ouverture, nombre d'humanitaires et diplomates contactés par l'AFP jugent, sous couvert de l'anonymat, que la capacité ou la volonté américaines à contraindre Israël est limitée.

Les visiteurs réguliers ou occasionnels des lieux ont décrit à l'AFP le grand hangar occupé par le CMCC à Kiryat Gat (sud d'Israël), comme un entrepôt où de nombreux militaires, israéliens et américains principalement, rencontrent des humanitaires, diplomates, et consultants.

Le premier des trois étages du bâtiment est réservé aux Israéliens, et le dernier aux troupes américaines. Tous deux sont interdits d'accès aux visiteurs.

Le deuxième, recouvert de gazon artificiel, sert d'espace de rencontres avec le monde extérieur.

"On dirait un espace de coworking, mais avec des gens en uniforme", s'amuse une diplomate qui raconte y croiser des "GIs qui boivent de la bière" au milieu d'une sorte d'open-space, avec des panneaux récapitulant les principaux points du plan Trump.

Plusieurs personnes ont dit à l'AFP avoir vu un tableau blanc barré de l'inscription "What is Hamas?" ("Qu'est-ce que le Hamas?") en lettres capitales, sans éléments de réponse.

"Il y a des tables rondes sur des sujets qui vont de la distribution d'eau ou de nourriture à la sécurité", raconte un humanitaire, "en gros on nous écoute décrire ce qu'on veut faire, et quels problèmes on a rencontrés depuis deux ans".

"Boussole du droit" 

Mais "ce n'est pas là que les décisions sont prises", tranche un diplomate qui cite des canaux de discussions parallèles, notamment une équipe supervisée par Arieh Lighstone, un collaborateur de l'émissaire américain Steve Witkoff, à Tel-Aviv.

Plusieurs diplomates regrettent l'absence d'officiels palestiniens dans les murs.

Un autre problème réside dans l'émergence de concepts largement rejetés par la communauté internationale, notamment celui des "Alternative Safe Communities" (ASC), visant à regrouper des civils "vérifiés", non affiliés au Hamas, dans des communautés créées ex nihilo dans une zone de la bande de Gaza sous contrôle militaire israélien, et où les services de base seraient dispensés.

"On a perdu la boussole du droit", commente une diplomate.

Mais le reproche qui revient le plus souvent est le fait que les questions politiques (gouvernance, maintien de l'ordre...) sont évacuées au profit de questions techniques.

"Ils discutent d'où mettre les stations d'épuration, pas de qui les exploitera ni de qui paiera les employés", résume un autre.

Concédant "certaines frictions", sans plus de détail, le capitaine Hawkins, du Centcom, met en avant certaines avancées comme l'ouverture de nouveaux points de passage pour l'aide à destination de Gaza. "Nous progressons, assure-t-il, tout en reconnaissant pleinement qu'il reste encore beaucoup à faire."


Le Congrès américain approuve la levée définitive des sanctions contre la Syrie

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
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  • Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar
  • Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis

WASIHNGTON: Le Congrès américain a approuvé mercredi la levée définitive des sanctions imposées par les Etats-Unis contre la Syrie du temps de Bachar al-Assad, devant permettre le retour d'investissements dans ce pays ravagé par des années de guerre civile.

L'abrogation d'une loi dite "Caesar", adoptée en 2019 lors du premier mandat de Donald Trump et qui imposait ces sanctions, figure en effet dans le texte sur la stratégie de défense (NDAA), que le Sénat américain a approuvé mercredi par 77 voix pour et 20 contre.

La Chambre des représentants s'était déjà prononcée la semaine dernière et le texte attend désormais d'être promulgué par le président américain.

Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar. Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis.

Le chef de la diplomatie syrienne, Assaad al-Chaibani, a salué sur Telegram le vote du Sénat comme "ouvrant de nouveaux horizons pour la coopération et le partenariat entre notre pays et le reste du monde".

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars.

Bien que son application soit suspendue, de nombreux responsables américains jugeaient qu'elle pouvait nuire à la confiance des investisseurs tant qu'elle n'était pas abrogée.

Le dirigeant syrien Ahmad al-Chareh a été reçu le 10 novembre à la Maison Blanche par le président Trump, une première pour un chef d'Etat syrien depuis l'indépendance du pays en 1946 et une consécration pour l'ancien jihadiste qui, en moins d'un an au pouvoir, a sorti son pays de l'isolement.

Donald Trump l'avait déjà rencontré lors d'un voyage dans le Golfe en mai, annonçant alors la levée des sanctions américaines.

Après 13 ans de guerre civile, la Syrie cherche à garantir des fonds pour sa reconstruction, dont le coût pourrait dépasser 216 milliards de dollars, selon la Banque mondiale.

"L'abrogation aujourd'hui de la loi Caesar est une étape décisive pour donner au peuple syrien une véritable chance de se reconstruire après des décennies de souffrances inimaginables", s'est félicité la sénatrice démocrate Jeanne Shaheen.


Les principales villes du Soudan privées de courant après des frappes de drones sur une centrale

Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
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  • Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale
  • Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des FSR

PORT-SOUDAN: Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts, ont indiqué plusieurs témoins à l'AFP.

Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale.

Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

Le gouvernement de l’État du Nil a confirmé la mort des deux secouristes dans un communiqué officiel.

Cette station est un nœud stratégique du réseau électrique soudanais, recevant l’électricité produite par le barrage de Merowe — la plus grande source d'énergie hydroélectrique du pays — avant sa redistribution vers plusieurs régions.

Des témoins ont également indiqué qu’aux alentours de 02H00 (minuit GMT), les forces de l’armée régulière avaient activé leurs systèmes de défense antiaérienne, rapportant avoir vu des flammes et de la fumée s'élever au-dessus de la ville contrôlée par l'armée en guerre depuis avril 2023 contre les FSR.

Les coupures d’électricité se sont étendues à plusieurs États, notamment ceux du Nil, de la mer Rouge — où se trouve Port-Soudan, siège provisoire du gouvernement pro-armée — ainsi qu’à la capitale Khartoum, selon des témoins, l'incendie n'étant toujours pas maitrisé.

Les FSR n’ont jusqu'à présent pas commenté l'attaque.

Ces derniers mois, les FSR ont été accusées de lancer des attaques de drones sur de vastes zones contrôlées par l’armée, visant des infrastructures civiles et provoquant des coupures de courant affectant des millions de personnes.

La guerre, qui a éclaté en avril 2023, a fait plusieurs dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué "la pire crise humanitaire au monde", selon l'ONU.