Une nouvelle intifada silencieuse menace l'apartheid israélien

Des Palestiniens protestent contre la confiscation de terres par Israël à Hébron, en Cisjordanie, le 2 octobre 2021. (AFP)
Des Palestiniens protestent contre la confiscation de terres par Israël à Hébron, en Cisjordanie, le 2 octobre 2021. (AFP)
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Publié le Vendredi 27 mai 2022

Une nouvelle intifada silencieuse menace l'apartheid israélien

Une nouvelle intifada silencieuse menace l'apartheid israélien
  • L'armée israélienne s'attend à ce que la violence exercée à l'intérieur d'Israël par des citoyens palestiniens redouble et elle s'entraîne dans cette perspective
  • Si la prochaine intifada s'étend à l’intérieur d’Israël même, peut-être assisterons-nous enfin à un changement dans la dynamique dangereuse qui est le fondement de sa fausse démocratie

La violence entre Israéliens et Palestiniens a augmenté et menace de se propager en Israël, mais il semble que la plupart des grands médias et le gouvernement de Tel-Aviv minimisent la situation et espèrent qu'elle prendra fin.
Israël a beaucoup à craindre d'une éventuelle troisième intifada. Elle ne se produirait pas seulement dans les territoires occupés, où Israël continue de voler des terres palestiniennes pour construire des colonies exclusivement juives qui alimentent la violence croissante et compromettent la paix. L'armée israélienne s'attend également à ce que la violence exercée à l'intérieur d'Israël par des citoyens palestiniens redouble et elle s'entraîne dans cette perspective.
Alors que le gouvernement israélien voit l'intifada silencieuse se profiler à l'horizon, les Palestiniens agissent par nécessité de se protéger, tandis que Tel-Aviv ordonne des incursions plus violentes dans leurs villes et villages, apparemment pour cibler des militants. Le Premier ministre israélien, Naftali Bennett, a ordonné aux Forces de défense israéliennes (FDI) de débusquer les «terroristes» – un mot que le gouvernement utilise pour décrire toute personne qui réclame des droits humains et civils et la fin des politiques d'apartheid d'Israël.
L'apartheid israélien est unique en ce qu'il reflète une forme tempérée de racisme, dans laquelle la discrimination est «détournée» pour minimiser les critiques. À titre d’exemple, Israël censure les médias et se comporte de façon si tyrannique que la plupart des journalistes israéliens et les médias occidentaux qui les engagent se censurent. Dans les territoires occupés, en revanche, les journalistes palestiniens s'opposent à cette censure et ils tentent de rendre compte de la violence d'Israël de manière plus exhaustive.
C'est peut-être la raison pour laquelle un sniper israélien a assassiné ce mois-ci la journaliste palestinienne chrétienne Shireen Abu Akleh. Nous ne saurons peut-être jamais toute la vérité, car Israël utilise une technique typique de l'apartheid pour faire oublier la controverse, en traînant des pieds et en écartant les médias de toute enquête. Les Palestiniens, quant à eux, ont demandé à la Cour pénale internationale (CPI) d'enquêter sur cette fusillade en tant que crime de guerre.
L'apartheid d'Israël repose sur ses politiques de discrimination entre ses citoyens juifs et non juifs. Il existe plus de soixante-cinq lois, rarement explorées par les médias israéliens ou occidentaux, qui discriminent spécifiquement les Palestiniens chrétiens et musulmans.
Il existe de nombreuses raisons pour lesquelles les Palestiniens sont en colère et prêts à affronter les FDI lourdement armées et violentes ainsi que les colons israéliens armés qui deviennent de plus en plus agressifs, estimant qu'ils ne seront pas punis. À quand remonte la dernière fois où vous avez entendu parler d'un juif israélien poursuivi pour des actes de violence contre un Palestinien? Cela n'arrive que lorsque l'histoire ne peut être enterrée et que le tapage médiatique réveille une indignation justifiée, compte tenu des politiques répréhensibles d'Israël.
Il n'y a qu'un seul groupe qui peut empêcher cette nouvelle intifada silencieuse d'émerger pleinement, et ce sont les Israéliens eux-mêmes. À un moment donné, les juifs israéliens doivent se réveiller et réaliser qu'ils ne peuvent pas vivre dans un État aussi violent.
Pendant de nombreuses années, les Israéliens savaient que, si les FDI pouvaient contenir la violence de l'autre côté du mur de séparation – que le mouvement pro-israélien appelle la «clôture», terme moins offensant – ils pourraient profiter de leurs plages, de leurs maisons et de leur nourriture volées sans conséquence. Mais les répercussions de l'ignorance des injustices et du racisme du gouvernement s'accumulent. Bientôt, les Palestiniens craqueront, poussés à bout par les politiques discriminatoires auxquelles ils sont confrontés, et ils ne se soucieront plus de l'échec du processus de paix. Une fois que l'on cesse d'espérer la paix, la violence devient le seul moyen de mettre fin à l'oppression brutale d'Israël.
Le nombre de morts de chaque côté s’équilibre. Dans le passé, le nombre d'Israéliens tués par des Palestiniens était très faible par rapport au nombre de Palestiniens tués par des soldats israéliens et des colons extrémistes armés. Mais la situation évolue avec cette nouvelle intifada silencieuse. Les chiffres se rapprochent, et évidemment, les médias israéliens et occidentaux semblent généralement hurler contre la violence à l’égard des Israéliens tout en chuchotant concernant les faits de violence contre les Palestiniens.

Il n'y a qu'un seul groupe qui peut empêcher cette intifada d'émerger pleinement, et ce sont les Israéliens eux-mêmes.

Ray Hanania

Le pire est que les colons, dont le pouvoir s'accroît en raison de l'explosion démographique dans les territoires occupés, ont jeté leur dévolu sur Al-Haram al-Sharif (Esplanade des mosquées). Ils veulent mettre en œuvre leur vision extrémiste d'un nouveau temple sur le site de Jérusalem pour renforcer leur contrôle.
Israël est une poudrière prête à exploser. Et si la prochaine intifada s'étend à l’intérieur d’Israël même, peut-être assisterons-nous enfin à un changement dans la dynamique dangereuse qui est le fondement de sa fausse démocratie.
Les Israéliens craignent-ils cet avenir? Ou s'attendent-ils à ce que le système leur permette de devenir encore plus brutaux et d'infliger encore plus de violence aux victimes palestiniennes provoquées, afin de tenir à distance l'intifada silencieuse? Nous allons devoir attendre pour le découvrir.

Ray Hanania est un ancien journaliste politique et chroniqueur primé de la mairie de Chicago. Vous pouvez le joindre sur son site personnel à l'adresse www.Hanania.com. Twitter : @RayHanania
NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com