Début de trois jours de réquisitions au procès des attentats du 13-Novembre

Olivia Ronen, l'avocate de Salah Abdeslam arrive pour le début du procès des accusés des attentats de novembre 2015 à Paris (Photo, AFP).
Olivia Ronen, l'avocate de Salah Abdeslam arrive pour le début du procès des accusés des attentats de novembre 2015 à Paris (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 08 juin 2022

Début de trois jours de réquisitions au procès des attentats du 13-Novembre

  • «À ce drame hors norme a répondu une enquête hors norme (...) avec la tache de répondre à des questions politiques, sociologiques, humaines», a admis l'avocate générale Camille Hennetier
  • Tour à tour et pendant trois jours, ils devront démontrer quelles sont, selon eux, les responsabilités de chacun des 20 accusés - six d'entre eux, dont cinq hauts cadres de l'organisation Etat islamique présumés morts en Syrie, sont jugés en leur absence

PARIS: « Un procès ‘normal’ pour des faits qui ne le sont pas »... Au procès des attentats 13-Novembre, le parquet national antiterroriste a commencé à prendre ses réquisitions mercredi, plus de six ans après cette nuit d'horreur qui « a fait irruption dans la vie de tous les Français ». 

« Que retiendra-t-on de cette audience ? Quelles images ? Quelles paroles resteront ? », a demandé l'avocate générale Camille Hennetier, l'une des trois représentantes du parquet antiterroriste (Pnat), dans son propos liminaire. 

« Votre verdict bien sûr. Le nom des disparus égrenés en septembre dernier. Les récits des victimes, enfin, incontestablement la cruauté des terroristes qui tirent au coup par coup et achèvent certaines personnes avec délectation », a-t-elle poursuivi d'un ton solennel. 

« Ce procès est chargé de symboles, d'espérance, d'attentes et de questions », a admis Mme Hennetier avant de rentrer dans le vif du dossier. 

« À ce drame hors norme a répondu une enquête hors norme (...) avec la tache de répondre à des questions politiques, sociologiques, humaines », a-t-elle poursuivi. 

Pour autant, « il reste des zones d'ombre. Sur les accusés. Sur les faits. Quelles étaient les cibles prévues pour Mohamed Abrini et Salah Abdeslam ? », a-t-elle demandé avant de souligner : « Toutes ces questions qui nous taraudent ont des réponses et ces réponse se trouvent dans le box. La plupart des accusés savent. Ils savent tout et n'ont jamais parlé et n'apporteront jamais sans doute de réponse ». 

Après neuf mois d'audience, « nous allons vous proposer des clés de lecture », a-t-elle assuré, avant de commencer à « reconstituer le puzzle » de ces attaques jihadistes. 

« Vérité »  

Concernant Salah Abdeslam, le seul membre encore en vie des commandos, « il ne s'est pas contenté d'aider, il a participé » aux attentats, cette « opération unique, coordonnée, dans laquelle tous les membres du groupe étaient interchangeables », a-t-elle affirmé avant de laisser la parole à son collègue Nicolas Braconnay. 

Il a commencé par aborder la « naissance du projet » terroriste en zone irako-syrienne, avec ce « rêve commun: attaquer la France ». Selon le plan des réquisitions annoncé par Camille Hennetier, les magistrats évoqueront ensuite l'organisation des attaques, « le cauchemar du 13-Novembre », puis enfin ses suites. 

Tour à tour et pendant trois jours, ils devront démontrer quelles sont, selon eux, les responsabilités de chacun des 20 accusés - six d'entre eux, dont cinq hauts cadres de l'organisation Etat islamique présumés morts en Syrie, sont jugés en leur absence. 

Ce n'est que vendredi qu'ils réclameront des peines à leur encontre. 

Douze accusés encourent la réclusion criminelle à perpétuité, dont Salah Abdeslam, unique membre encore en vie des commandos qui ont semé la mort au Stade de France, sur les terrasses parisiennes, et dans la salle de concert du Bataclan. 

Mutique pendant l'enquête, le Français de 32 ans a répondu aux questions pendant le procès, mais sa « vérité » a peiné à convaincre l'accusation. 

C'est « par humanité » et pas « par lâcheté », a-t-il expliqué, que lui-même n'a pas tué, renonçant à actionner sa ceinture explosive dans un bar du 18e arrondissement. 

« Tout seul »  

Celui qui s'était présenté comme un « combattant de l'Etat islamique » à l'ouverture du procès a finalement versé des larmes lors de sa dernière prise de parole quelques mois plus tard. « Je vous demande de me détester avec modération », a-t-il prié les rescapés et proches des victimes en demandant leur « pardon ». 

L'accusation, qui a toujours préféré la thèse d'un défaut de fonctionnement de sa ceinture, a mis Salah Abdeslam face à ses contradictions lors de ses interrogatoires. 

Difficile à croire enfin, alors que les commandos du Stade de France, des terrasses et du Bataclan étaient tous composés de trois hommes, que Salah Abdeslam opère « tout seul », lui qui contrairement aux autres n'était jamais allé s'entraîner en Syrie. 

Outre le principal accusé qui encourt la perpétuité incompressible - une sanction rarissime qui rend très difficile tout aménagement de peine - les avocats généraux requerront contre Mohamed Abrini, « l'homme au chapeau » des attentats de Bruxelles qui était aussi « prévu » pour le 13-Novembre, et les « bons copains » qui ont aidé Salah Abdeslam pendant sa cavale. 

Certains, comme les accusés Farid Kharkhach, qui a fabriqué des faux papiers « sans savoir » qu'ils étaient destinés à la cellule jihadiste, ou Yassine Atar, qui jure n'être lié au dossier que parce qu'il est le frère du commanditaire des attentats Oussama Atar, espèrent que les débats ont fait changer d'avis l'accusation. 

Après les réquisitions, la parole sera donnée à la défense à partir du 13 juin. Le verdict est attendu le 29 juin. 


Le PDG de CMA CGM assure «ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale» des médias qu'il possède

Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
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  • "Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media
  • Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique"

PARIS: Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC.

"Les journaux ou chaînes de télévision qu'on a rachetés ont une indépendance, ce sont des journaux qui sont nuancés, qui offrent le pluralisme. Je ne m'immisce pas dans la ligne éditoriale de ces journaux", a-t-il déclaré lors d'une audition devant la commission des affaires économiques de l'Assemblée.

Il répondait au député France insoumise René Pilato qui suggérait une "grande loi de séparation des entreprises et des médias".

"Si des investisseurs comme le groupe CMA CGM ne viennent pas, ces médias malheureusement tombent", a ajouté M. Saadé, rappelant que le secteur des médias est "très sinistré".

"Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media.

Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique".

"Dans un monde traversé par les +fake news+, je crois que les industriels ont un rôle à jouer pour défendre le pluralisme, l'indépendance et la qualité de l'information. Si nous voulons continuer à produire de l'information en France et résister à la domination des grandes plateformes, nous devons garantir des groupes de médias solides capables de créer des contenus de qualité et de les diffuser sur tous les supports", a-t-il défendu.

Outre BFMTV, RMC, et désormais Brut, CMA Media possède les journaux La Tribune et La Tribune Dimanche, La Provence et Corse Matin. Le groupe vient également de racheter la chaîne télé Chérie 25 (NRJ Group).

Vendredi, les Sociétés des journalistes (SDJ) de BFMTV, RMC et La Tribune avaient déploré qu'"une prise de position de Rodolphe Saadé sur l'actualité politique et sociale du pays (ait) été diffusée à l'antenne de BFMTV" jeudi.

Il s'agissait d'extraits écrits tirés d'une tribune publiée dans La Provence après le mouvement "Bloquons tout" du 10 septembre. "Les entreprises ne sont pas des adversaires, elles sont des partenaires de la Nation", y écrivait notamment M. Saadé.

 


Faure «sur sa faim» après son entretien avec Lecornu, resté «très flou» sur ses intentions

Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
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  • Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu
  • Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland

PARIS: Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions".

"Pour l'instant, nous sommes restés sur notre faim et nous verrons bien ce qu'il a à nous dire dans les prochains jours", a déclaré le premier secrétaire du PS, à l'issue de sa première rencontre à Matignon, qui a duré près de deux heures.

Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu à la veille d'une importante journée de mobilisation syndicale.

Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland.

A propos de la journée d'actions de jeudi, il a expliqué que ces manifestations seraient "aussi un élément du rapport de force que nous devons installer avec un exécutif qui, jusqu'ici, n'a pas fait la démonstration de sa capacité à comprendre la colère et même l'exaspération des Français".

Olivier Faure a également dit qu'il ne souhaitait pas "voir revenir sur la table une loi immigration", estimant que le Premier ministre macroniste était "tiraillé par une droite qui lorgne de plus en plus vers l'extrême droite" et avait  "beaucoup de problèmes dans son propre socle commun".

"Nous ne cherchons pas la censure, nous ne cherchons pas la dissolution, nous ne cherchons pas la destitution. Nous cherchons à ce que les Français soient entendus", a-t-il plaidé, en citant un sondage Ifop commandé par le parti montrant que les Français, quelles que soient leurs sensibilités, plébiscitent les mesures poussées par le PS.

"Il y a des mesures qui sont très majoritaires dans le pays, pour la taxe Zucman" sur les hauts patrimoines, "pour en finir" avec la réforme des retraites, pour "rendre du pouvoir d'achat", notamment à travers "un taux différentiel de CSG", a-t-il détaillé.


Des socialistes au RN, Lecornu reçoit ses opposants avant une grande journée d'action

Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu (C) participe à une réunion lors de sa visite au centre départemental de santé de Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025.  (AFP)
Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu (C) participe à une réunion lors de sa visite au centre départemental de santé de Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025. (AFP)
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  • Le Premier ministre Sébastien Lecornu entame une série de réunions avec les oppositions avant une grande journée de mobilisation, dans un climat tendu marqué par les revendications sociales et les divergences sur le plan de redressement budgétaire

PARIS: Sébastien Lecornu reçoit mercredi ses opposants politiques, à la veille d'une journée importante de mobilisation sociale, sans grande marge de manœuvre pour discuter, au vu des lignes rouges qu'ils posent et des menaces de censure.

Tous les dirigeants de gauche - à l'exception de La France insoumise qui a refusé l'invitation -  ainsi que ceux du Rassemblement national vont défiler dans le bureau du nouveau Premier ministre, à commencer par les socialistes à 09H30.

Sébastien Lecornu a déjà échangé la semaine dernière avec les responsables du "socle commun" de la droite et du centre, ainsi que les syndicats et le patronat.

"Le premier qui doit bouger, c'est le gouvernement", a estimé pour sa part le président du groupe des députés Liot Laurent Panifous, reçu mardi, ajoutant que "le sujet des retraites ne peut pas être renvoyé uniquement à 2027".

François Bayrou avait obtenu la mansuétude du PS sur le budget 2025 en ouvrant un "conclave" sur la réforme des retraites, qui s'est soldé par un échec. Puis il a présenté à la mi-juillet un sévère plan de redressement des finances publiques qui a fait hurler toutes les oppositions.

Mercredi, "ça va être un round d'observation. La veille des grosses manifs, on sera dur, exigeant. Ce qui se joue ce n'est pas au premier chef un sujet budgétaire", mais un "sujet démocratique" car ce sont les "battus qui gouvernent", anticipe un responsable socialiste.

- Gestes -

Ces entretiens ont lieu sous la pression de la rue, alors qu'une mobilisation massive est attendue jeudi, de l'ordre de celles contre la réforme des retraites en 2023. Les syndicats contestent notamment les mesures budgétaires "brutales" de François Bayrou.

Avant d'entamer les discussions, Sébastien Lecornu a fait plusieurs gestes en direction de la gauche et de l'opinion: retrait de la proposition impopulaire de supprimer deux jours fériés, et promesse de ne pas rouvrir le conclave sur les retraites.

Il a aussi consacré son premier déplacement samedi à l'accès aux soins, avant d'annoncer la suppression très symbolique, dès l'an prochain, des avantages restants octroyés aux ex-Premiers ministres.

Les socialistes ont eux posé leurs conditions dès dimanche face aux offres appuyées de dialogue du Premier ministre.

Ils considèrent que le plan Bayrou "ne doit pas servir de base de discussion", alors que Sébastien Lecornu a l'intention d'en faire un point de départ, puis de mettre les parlementaires devant leur responsabilité pour l'amender.

- "Rupture" -

Mercredi, les socialistes viendront avec en main un sondage Ifop commandé par le parti montrant que les Français, quelles que soient leurs sensibilités, plébiscitent les mesures poussées par le PS.

Parmi elles, la création d'une taxe de 2% sur les patrimoines supérieurs à 100 millions d'euros - la fameuse taxe Zucman, qui enflamme ce débat budgétaire - à laquelle 86% des sondés sont favorables, dont 92% des sympathisants Renaissance et 89% des sympathisants LR.

Le Premier ministre a cependant déjà fermé la porte à cette taxe, tout en reconnaissant que se posaient "des questions de justice fiscale".

La taxe Zucman, "c'est une connerie, mais ils vont la faire quand même parce que ça permet d'obtenir un accord de non-censure" avec la gauche, a de son côté prédit mardi Marine Le Pen, sans pour autant fermer la porte à une mise à contribution des plus fortunés.

"Si la rupture consiste à un retour aux sources socialistes du macronisme, c'est contraire à l'aspiration majoritaire du pays", a également mis en garde la cheffe des députés RN, attendue à 16H00 à Matignon avec Jordan Bardella.

Un avertissement auquel le patron des députés LR Laurent Wauquiez a fait écho mardi en dénonçant "la pression du PS", craignant qu'il "n'y ait plus rien sur l'immigration, la sécurité ou l'assistanat" dans le budget.

Autre point au cœur des discussions, le niveau de freinage des dépenses. La présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet a appelé dimanche à chercher un accord autour "de 35 à 36 milliards" d'euros d'économies, soit moins que les 44 milliards initialement prévus par François Bayrou, mais plus que les 21,7 milliards du PS.

"Les socialistes donnent l'air d'être déterminés et de poser des conditions mais c'est un moyen de rentrer dans les négociations", estime Manuel Bompard, coordinateur de LFI, grinçant sur la politique des "petits pas" du PS, au détriment des "grands soirs".