Une femme à la tête d'un Parlement: la France longtemps à la traîne

Aux Etats-Unis, Nancy Pelosi préside la Chambre des Représentants de 2007 à 2011 et depuis 2019, tandis que le Sénat est dirigé par la vice-présidente, Kamala Harris. (AFP).
Aux Etats-Unis, Nancy Pelosi préside la Chambre des Représentants de 2007 à 2011 et depuis 2019, tandis que le Sénat est dirigé par la vice-présidente, Kamala Harris. (AFP).
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Publié le Lundi 27 juin 2022

Une femme à la tête d'un Parlement: la France longtemps à la traîne

  • Avant 1945, l'Autriche est le seul Etat où une femme ait été élue à la présidence d'une chambre (le Bundesrat): Olga Rudel-Zeynek en 1927
  • La Française Simone Veil est devenue en 1979 la première femme élue à la présidence du Parlement européen basé à Strasbourg

PARIS: L'accession prévue mardi d'une femme, Yaël Braun-Pivet, à la présidence de l'Assemblée nationale, sera une première en France, contrairement à nombre de pays où cette fonction s'est féminisée plus tôt.

Les débuts

Avant 1945, l'Autriche est le seul Etat où une femme ait été élue à la présidence d'une chambre (le Bundesrat): Olga Rudel-Zeynek en 1927.

Après guerre, ont suivi le Danemark en 1950, la Hongrie et l'Uruguay en 1963, puis l'Allemagne (1972), le Canada (1972), l'Argentine (1973), l'Islande (1974), la Suisse (1977), l'Italie (1979)... selon les données compilées par l'Union interparlementaire (UIP), l'organisation mondiale des parlements des États souverains, basée à Genève.

La Française Simone Veil est devenue en 1979 la première femme élue à la présidence du Parlement européen basé à Strasbourg.

Parmi les derniers pays ayant porté pour la première fois une femme à la présidence de leur Parlement ou d'une de ses Chambres, figurent l'Andorre, le Bélarus, l'Indonésie, la Kazakhstan, le Malawi, la République démocratique du Congo et le Togo en 2019, l'Azerbaïdjan et Kiribati en 2020, Chypre en 2021 ou encore la Slovénie en mai 2022.

Trois femmes au pouvoir, de Matignon à l'Assemblée, une donne historique

Fraîchement choisies par la majorité pour les plus hautes fonctions à l'Assemblée nationale, Aurore Bergé et Yaël Braun-Pivet forment, avec Elisabeth Borne à Matignon, un trio de femmes au pouvoir, un tel alignement constituant une première, encore à l'épreuve.

Bien que fragilisée après les législatives, Mme Borne, deuxième femme à la tête d'un gouvernement après Edith Cresson il y a trente ans, a été "confirmée" samedi par Emmanuel Macron "dans la durée".

Aurore Bergé, elle, a été élue mercredi dernier à 35 ans présidente des députés Renaissance (ex-LREM). C'est la première fois sous la Ve République qu'une femme devient patronne du groupe majoritaire à l'Assemblée.

Autre première: la présidence de l'institution doit revenir mardi à une femme également, Yaël Braun-Pivet, via un vote de l'ensemble des députés. Elle succèdera à Richard Ferrand, un proche d'Emmanuel Macron défait dans les urnes.

Novice en politique en 2017 et bombardée alors présidente de la commission des Lois au Palais Bourbon, l'élue de 51 ans ne sera restée qu'un mois ministre des Outre-Mer. Elle a quitté ce week-end le gouvernement en vue du perchoir.

Réélue députée des Yvelines le 19 juin, elle a profité d'une fenêtre d'opportunité pour se présenter mercredi à une primaire interne pour la présidence de l'Assemblée, l'emportant sur un autre ex-président de commission LREM, Roland Lescure.

Une observatrice des deux scrutins constate au sein de la majorité "un vrai élan" assez irrépressible en faveur des femmes, dans un Palais Bourbon qui a accueilli en 2016 pour la première fois une statue de personnage historique féminin, au milieu des figures d'hommes et allégories. Il s'agit d'un buste d'Olympe de Gouges, féministe guillotinée sous la Terreur.

Laurence Rossignol, ancienne ministre socialiste des Droits des femmes, reprend Simone de Beauvoir: "il suffira donc d’une crise... pour qu’on laisse les femmes monter au feu".

Pour la députée sortante de la majorité Valérie Petit également, il s'agit du "Glass Cliff Effect" ou effet "falaise de verre", soit "la surreprésentation des femmes dans les postes de pouvoir en période de crise aigüe". "Ceux qui d'habitude ignorent leur talent se disent +On a tout essayé, faisons quelque chose qu’on n'aurait jamais imaginé: nommons une femme+", a-t-elle relevé sur Twitter.

Revanche

Ces victoires ont aussi l'allure d'une revanche sur les procès en incompétence ou le sexisme ambiant à l'Assemblée. "Certains députés ont pu me dire +Ne faites pas votre maîtresse d'école+, ou +Merci pour vos réflexions quasi maternelles+", rapportait en 2019 dans Elle Mme Braun-Pivet, avocate de profession et mère de famille nombreuse.

La féminisation de l'Assemblée, avec un record de quelque 39% de députés femmes en 2017, a cependant eu "beaucoup d’effets", relevait-elle auprès de l'AFP il y a quelques semaines. "De facto, certains comportements sexistes ont disparu et les femmes prennent davantage la parole".

Or la proportion de députées a légèrement reflué avec les dernières élections législatives, passant à 37%.

"La faute à la fois au RN qui a présenté beaucoup de femmes dans des circonscriptions perdues d’avance, et à LR dont le féminisme n’a jamais été la tasse de thé", pointe à l'AFP la politologue Mariette Sineau, co-autrice de "Femmes et République". Et la poussée de LFI, qui avait investi légèrement plus de femmes que d'hommes, "n'a pas suffi" à inverser la tendance.

"Ce recul du nombre des femmes à l’Assemblée, ça fait mal", lâche la chercheure Marlène Coulomb-Gully. Selon cette spécialiste des questions de genre, "quelque chose doit radicalement changer si l'on veut rendre l'engagement politique désirable pour les femmes", notamment les horaires de travail.

Elle espère toutefois que "l'ordre du jour, la priorité du type des questions" - le "care", l'enfance, les seniors, plutôt que le régalien - puissent "être infléchis par une assemblée où le nombre de femmes est relativement élevé même s’il est en baisse, et où des femmes occupent des postes décisionnels".

Deux autres femmes président des groupes d'opposition, Mathilde Panot (LFI) et Marine Le Pen (RN). Cyrielle Chatelain codirige le groupe écologiste. La majorité espère atteindre cette semaine la parité à d'autres postes clés au Palais Bourbon.

22% de femmes à la tête d'un Parlement

Globalement, au 1er janvier 2022, les femmes représentaient environ 22% des présidents de parlement, contre 20,9% il y a un an, d'après l'UIP.

Aux Etats-Unis, Nancy Pelosi préside la Chambre des Représentants de 2007 à 2011 et depuis 2019, tandis que le Sénat est dirigé par la vice-présidente, Kamala Harris.

Du côté de l'Europe, nombre d'assemblées parlementaires sont dirigées par des femmes. En Belgique, les deux chambres sont présidées par Eliane Tilieux et Stéphanie D'Hose.

L'Italie a placé Maria Elisabetta Alberti Casellati à la tête du Sénat. En Allemagne, Bärbel Bas préside le Bundestag, en Espagne Meritxell Batet est à la tête du Congrès des députés.

Aux Pays-Bas, Vera Bergkamp dirige la Chambre des Représentants, tandis qu'en Autriche Christine Schwarz-Fuchs préside le Conseil fédéral.

En Russie, Valentina Matvienko, considérée comme proche du président Vladimir Poutine, préside le Conseil de la Fédération (équivalent au Sénat en France) depuis septembre 2011.

Au sein de l'Union européenne, outre la France, seule la Slovaquie n'a jamais porté une femme à la tête de son parlement.

Le Parlement européen est également présidé par une femme, la Maltaise Roberta Metsola.

Le cas particulier du Rwanda

Au Rwanda, Donatille Mukabalisa est, depuis 2013, à la tête de la chambre la plus féminisée au monde, avec plus de 61% de députées, selon les données de l'UIP.

Dans la période suivant le génocide des Tutsi au Rwanda en 1994, la population était composée en grande majorité de femmes et en 2003 le gouvernement a décidé de leur donner une plus grande place dans la vie politique du pays, en instaurant des quotas.

En 2008, le Rwanda est devenu le premier pays au monde à avoir un parlement à majorité féminine, choisissant une femme à la tête de la chambre des députés: Rose Mukantabana, à laquelle a succédé Donatille Mukabalisa.

La France loin de la parité

En France, la nouvelle Assemblée nationale issue des élections de juin est encore loin de la parité, avec 37% de femmes députés, soit 215 femmes, contre 224 élues en 2017.

C'est au sein de l'alliance LR/UDI que les femmes sont proportionnellement les moins présentes (28%) tandis qu'elles sont les plus nombreuses au sein de la Nupes (43%).

La France arrive désormais 7e sur 27 pour la part de femmes députées en Europe et, 31 ans après Edith Cresson, une deuxième femme, Elisabeth Borne, y est devenue Première ministre en mai dernier.

Le Sénat n'a jamais été présidé par une femme.


Gérald Darmanin a rendu visite à Nicolas Sarkozy mercredi soir à la prison de la Santé

Le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, a rendu visite mercredi soir à Nicolas Sarkozy à la prison parisienne de la Santé, a indiqué jeudi à l'AFP une source proche du dossier. (AFP)
Le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, a rendu visite mercredi soir à Nicolas Sarkozy à la prison parisienne de la Santé, a indiqué jeudi à l'AFP une source proche du dossier. (AFP)
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  • L'entrevue, qui s'est déroulée en présence du directeur de l'établissement, a eu lieu entre 19H00 et 19H45
  • L'ancien président de la République bénéficie de la protection de deux officiers de sécurité, une mesure exceptionnelle prise "eu égard à son statut et aux menaces qui pèsent sur lui"

PARIS: Le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, a rendu visite mercredi soir à Nicolas Sarkozy à la prison parisienne de la Santé, a indiqué jeudi à l'AFP une source proche du dossier.

L'entrevue, qui s'est déroulée en présence du directeur de l'établissement, a eu lieu entre 19H00 et 19H45, a poursuivi cette même source, avant un échange entre le garde des Sceaux et les agents pénitentiaires sur la sécurité de l'ex-chef de l'Etat.

Condamné le 25 septembre à cinq ans d'emprisonnement dans le dossier libyen pour association de malfaiteurs, Nicolas Sarkozy a été incarcéré le 21 octobre à la Santé. Cette détention d'un ancien président est une première dans l'histoire de la République.

Il a depuis déposé une demande de remise en liberté, que la justice doit examiner dans les prochaines semaines.

L'ancien président de la République bénéficie de la protection de deux officiers de sécurité, une mesure exceptionnelle prise "eu égard à son statut et aux menaces qui pèsent sur lui", avait expliqué le ministre de l'Intérieur, Laurent Nuñez.

Gérald Darmanin avait dit avant l'incarcération de l'ex-président son intention d'aller le visiter, afin de "s'assurer que les conditions de sécurité sont bonnes pour ce détenu au statut hors du commun", avait expliqué son entourage.


Nouveau coup de filet dans l'enquête sur le cambriolage du Louvre

Les "perquisitions qui ont eu lieu au cours de la soirée et de la nuit ne nous ont pas permis de retrouver le butin de ce cambriolage", a souligné la procureure. (AFP)
Les "perquisitions qui ont eu lieu au cours de la soirée et de la nuit ne nous ont pas permis de retrouver le butin de ce cambriolage", a souligné la procureure. (AFP)
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  • Ces nouvelles interpellations s'ajoutent à celles de deux hommes, arrêtés samedi et qui sont soupçonnés d'avoir fait partie du commando de quatre hommes sur place
  • Ils ont été inculpés et placés en détention provisoire mercredi soir. Les cinq nouveaux interpellés sont en garde à vue

PARIS: La procureure de Paris Laure Beccuau a annoncé jeudi cinq nouvelles interpellations liées au casse du musée du Louvre, dont un principal suspect, mais les joyaux de la couronne de France, estimés à 88 millions d'euros, restent introuvables.

Ces nouvelles interpellations s'ajoutent à celles de deux hommes, arrêtés samedi et qui sont soupçonnés d'avoir fait partie du commando de quatre hommes sur place. Ils ont été inculpés et placés en détention provisoire mercredi soir. Les cinq nouveaux interpellés sont en garde à vue.

Parmi eux se trouve un des cambrioleurs présumés, qui "était effectivement un des objectifs des enquêteurs, on l'avait dans le viseur", a précisé la procureure de Paris sur la radio RTL.

"Des traces ADN" lient ce principal suspect "au vol qui a été commis", a ajouté Laure Beccuau, suggérant qu'il faisait partie du commando des quatre hommes qui ont commis le vol du 19 octobre en moins de huit minutes, une affaire qui a fait le tour de la planète.

"Quant aux autres personnes qui sont placées en garde à vue, ce sont des personnes qui peuvent éventuellement nous renseigner sur le déroulement de ces faits", a expliqué la procureure de Paris, sans vouloir en dire plus sur leur profil, "il est trop tôt".

Ces cinq nouvelles interpellations ont eu lieu à Paris et dans son agglomération, notamment en Seine-Saint-Denis (dans le nord de la région parisienne), a-t-elle indiqué.

"Déterminée" 

Les "perquisitions qui ont eu lieu au cours de la soirée et de la nuit ne nous ont pas permis de retrouver le butin de ce cambriolage", a souligné la procureure.

"Je dirais que comme toute enquête, cette enquête, c'est comme un fil d'Ariane", a comparé Laure Beccuau, insistant: "mon rôle n'est pas d'être inquiète (sur le sort des bijoux) mais d'être déterminée".

Et de lancer un message: "ce que je souhaite très clairement dire à ceux qui détiendraient les bijoux aujourd'hui, c'est que évidemment la justice saura tenir compte de l'absence de préjudice de ce cambriolage". "La coopération dans l'enquête, on en tient compte pour la peine évidemment", a-t-elle formulé plus explicitement.

Ces nouvelles interpellations "n'ont pas été du tout liées aux déclarations" des deux mis en examen, mais "à d'autres éléments dont nous disposons au dossier", les traces ADN, la vidéosurveillance ou encore l'examen de la téléphonie.

Les deux inculpés - un arrêté à l'aéroport de Roissy alors qu'il tentait de rejoindre l'Algérie, l'autre à Aubervilliers (région parisienne au nord) -  "n'ont pas souhaité s'exprimer" devant le magistrat instructeur mercredi soir, a-t-elle confié.

Auparavant, les deux trentenaires "se sont livrés à des déclarations, que côté enquêteurs et côté magistrats du parquet, nous estimons minimalistes par rapport à ce qui nous paraît être démontré par le dossier", a mis en avant Laure Beccuau.

"Marchés parallèles" 

"Si on analyse leur casier, on ne peut pas effectivement considérer qu'ils font partie du haut du spectre de la criminalité organisée", a-t-elle décrypté à leur sujet.

La procureure insiste sur l'idée de sortir "d'une image d'une criminalité organisée, type mafieux, avec le patron et tout un tas d'équipes qui gravitent autour de lui parce que ce sont des connaissances".

La criminalité organisée peut aussi se nourrir selon elle de "personnes recrutées sur les réseaux sociaux, n'ayant aucun casier judiciaire" et susceptibles de commettre des méfaits graves pour "des sommes qui nous sidèrent", sous-entendu modiques.

La procureure de Paris s'est en outre attardée sur le rôle de l'Office central de lutte contre le trafic des biens culturels (OCBC), qui explore "un certain nombre de marchés parallèles" car ce n'est sans doute pas sur le marché légal des oeuvres d'art que surgiront les bijoux.

Parmi les hypothèses des enquêteurs, il y a celle "que ces bijoux pourraient être une marchandise de blanchiment, voire de négociation dans le milieu", a enfin pointé la procureure.

 

 


Budget: Lecornu fragilisé par une alliance gauche-RN sur la fiscalité des multinationales

Les députés votent en levant la main lors du débat et de l'examen du budget de l'État 2026 à l'Assemblée nationale française, la chambre basse du parlement français, à Paris, le 29 octobre 2025. (AFP)
Les députés votent en levant la main lors du débat et de l'examen du budget de l'État 2026 à l'Assemblée nationale française, la chambre basse du parlement français, à Paris, le 29 octobre 2025. (AFP)
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  • Alliance gauche–RN : Les députés ont adopté plusieurs taxes sur les grandes entreprises, défiant le gouvernement
  • Crise budgétaire : Le budget 2026 est fragilisé, avec un risque de passage en force par ordonnances

PARIS: Les députés ont voté mercredi de nouvelles taxes visant les grandes entreprises, dans une alliance de circonstance entre la gauche et l'extrême droite, rendant plus difficile l'adoption du budget par le camp gouvernemental qui dénonce une "folie fiscale".

Sébastien Lecornu se retrouve face à une équation politique de plus en plus impossible, alors même que les mesures les plus sensibles – notamment sur la taxation des hauts patrimoines, condition posée par les socialistes à leur non-censure – n'ont pas encore été examinées.

Jeudi, les députés feront une pause dans les débats budgétaires, avec une journée réservée à l'examen de textes proposés par le Rassemblement national.

Mais ils reprendront vendredi, avec l'examen prioritaire dès 09H00 de l'article 3 du projet de loi de Finances instaurant une taxe sur les holdings, suivi des amendements de la gauche pour créer une taxe Zucman.

Dans ce contexte déjà tendu, le gouvernement avait haussé le ton dès mercredi matin. "La justice fiscale a laissé place à la surenchère fiscale", a mis en garde mercredi le ministre de l'Economie Roland Lescure. Le Premier ministre s'est lui inquiété devant les sénateurs d'une déconnexion entre le débat fiscal et "la question économique générale et globale".

Dans leur ligne de mire, le vote mardi par une alliance de la gauche et du RN d'un "impôt universel" sur les multinationales, pour lutter contre l'évasion et l'optimisation fiscale.

Une mesure censée rapporter 26 milliards d'euros, selon ses défenseurs, mais jugée inopérante, contraire à la législation et néfaste pour l'économie française, par le gouvernement.

- "Pas honteux" -

Marine Le Pen, pointée du doigt par la droite pour son soutien, a défendu la mesure. "Il s'agit juste de faire respecter la loi", selon elle.

"Pour l'instant, ce qui a été voté" à l'Assemblée dans le cadre de l'examen du budget de l'Etat n'est "pas honteux, contrairement aux hurlements du gouvernement", a enfoncé la cheffe des députés RN.

Mais les mises en garde du camp gouvernemental n'ont pas freiné les députés dans leur lancée, au contraire.

Dans l'après-midi, ils ont continué d'adopter des mesures visant les grands groupes.

Là encore, ce sont les votes réunis de la gauche et du RN qui ont permis l'adoption d'une mesure portée par LFI visant à élargir le champ d'application de l'impôt minimum de 15% sur les bénéfices des multinationales.

C'est "une autoroute vers le contentieux", qui fragiliserait les efforts coordonnés avec l'OCDE pour lutter contre l'évasion fiscale, a fustigé dans l'hémicycle le ministre de la Fonction publique, David Amiel.

"On assume à 100%" ce vote, a martelé le député RN Jean-Philippe Tanguy.

Dans la foulée, le gouvernement a essuyé deux nouveaux revers: le RN a réussi à faire adopter de justesse un amendement pour alourdir la taxation sur les rachats d'actions, afin de lutter contre la spéculation. Les députés de gauche se sont pour la plupart abstenus. Puis c'est la France Insoumise qui a réussi à faire adopter, lors d'un vote très serré, un amendement instaurant une taxe exceptionnelle sur les superdividendes.

Ces derniers votes ne devraient pas faciliter la tâche de Sébastien Lecornu.

Mercredi matin, le président de LR Bruno Retailleau avait dénoncé une "folie fiscale", et "le coût de la stabilité politique exorbitant". Le chef des députés MoDem Marc Fesneau estime aussi que le texte "devient totalement invotable".

- Amendement de compromis ? -

A l'issue du Conseil des ministres, la porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, avait relativisé les votes de la veille, rappelant qu'on n'est "qu'au tout début du processus parlementaire".

M. Retailleau pense d'ailleurs que la première partie du budget sur les recettes "sera refusée par l'Assemblée" et donc que ce sera le Sénat "qui devra reprendre la copie".

Sous couvert d'anonymat, plusieurs cadres de la coalition gouvernementale disent s'attendre à ce qu'il n'y ait "pas de budget" et que le gouvernement doive se contenter d'une "loi spéciale", qui lui permet de reconduire en 2026 les impôts et dépenses de 2025.

Autre option: l'adoption d'un budget par ordonnances, comme l'autorise la Constitution si les délais d'examen du texte sont dépassés, et comme s'en inquiète le RN.

Les groupes politiques ont accepté de retirer une partie de leurs amendements afin d'accélérer les débats.

La fiscalité va continuer d'alimenter les tensions dès la reprise vendredi matin.

Du fait de l'opposition résolue du bloc central, de la droite et du RN, la taxe Zucman n'a guère de chance d'être votée, que ce soit dans sa forme initiale (un impôt minimum de 2% sur les patrimoines de plus de 100 millions d'euros) ou modifiée (3% à partir de 10 millions d'euros, mais en excluant les entreprises innovantes et familiales).

Un amendement de compromis pourrait donc être encore présenté par le gouvernement au moment des débats. "Il y a encore du travail", a reconnu Mme Bregeon.