France: le nouveau gouvernement subit son premier revers à l'Assemblée

La Première ministre française Elisabeth Borne s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale à Paris, le 12 juillet 2022. (Photo, AFP)
La Première ministre française Elisabeth Borne s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale à Paris, le 12 juillet 2022. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 13 juillet 2022

France: le nouveau gouvernement subit son premier revers à l'Assemblée

La Première ministre française Elisabeth Borne s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale à Paris, le 12 juillet 2022. (Photo, AFP)
  • «L'heure est grave», a réagi dans la nuit la Première ministre Elisabeth Borne sur Twitter
  • «L'heure est simplement à la démocratie avec laquelle vous avez décidément un sérieux problème madame la Première ministre !», lui a répondu, sur Twitter, le coordinateur de LFI, Adrien Quatennens

PARIS: Le nouveau gouvernement français a subi son premier revers dans la nuit de mardi à mercredi à l'Assemblée nationale, où le camp du président Emmanuel Macron ne dispose plus de la majorité absolue, sur un éventuel retour du pass sanitaire. 

Cette déconvenue illustre le nouveau rapport de forces à la chambre basse du Parlement et les difficultés auxquelles le chef de l'Etat risque d'être confronté au cours des cinq prochaines années pour faire passer ses réformes phares, face à une opposition revigorée. 

À l'issue d'une séance houleuse, marquée par de nombreuses invectives, les députés ont adopté en première lecture le projet de loi sanitaire de l'exécutif mais l'ont amputé d'un article clé sur le possible retour d'un pass sanitaire pour les entrées sur le territoire en cas de remontée importante des cas de Covid-19. 

L'article 2 a été rejeté par 219 voix contre 195, grâce à une addition de votes du Rassemblement national (RN, extrême droite), des Républicains (LR, droite) et d'une large majorité de l'alliance de Nupes (gauche), dominée par le parti de la gauche radicale La France insoumise (LFI). 

« L'heure est grave », a réagi dans la nuit la Première ministre Elisabeth Borne sur Twitter. « En s'alliant pour voter contre les mesures de protection des Français face à la Covid LFI, les LR et le RN empêchent tout contrôle aux frontières face au virus ». 

« L'heure est simplement à la démocratie avec laquelle vous avez décidément un sérieux problème madame la Première ministre ! », lui a répondu, sur Twitter, le coordinateur de LFI, Adrien Quatennens. 

« L'heure oblige le gouvernement à écouter les oppositions, ce que pour l'instant ils ont un peu de mal à se résoudre à faire », a abondé le chef de file des LR, Olivier Marleix, au micro de Sud Radio mercredi matin. 

« Le Parlement a fait son boulot, l'opposition a fait son travail », a estimé pour sa part sur Franceinfo le député RN Sébastien Chenu, se réjouissant que le texte ait été « désossé ». 

Deuxième manche 

En dépit du rejet de l'article 2, le projet de loi de « veille et de sécurité sanitaire » a été adopté en première lecture par 221 voix contre 187 et 24 abstentions lors du vote final. 

L'exécutif mise désormais sur la deuxième manche qui doit se jouer au Sénat, la chambre haute du Parlement, où la droite est majoritaire. 

« Nous sommes confiants dans la possibilité de convaincre les sénateurs qui sont déjà convaincus de l'intérêt d'une telle mesure », a déclaré le porte-parole du gouvernement Olivier Véran mercredi à l'issue du conseil des ministres. 

Lors du premier quinquennat du président Macron, l'exécutif pouvait à l'inverse s'appuyer sur une confortable majorité de 346 députés (sur 577) pour une adoption globalement sans peine de ses réformes. La donne a désormais changé. Privé de majorité absolue depuis les élections législatives de juin, le dirigeant centriste-libéral doit composer avec une extrême droite renforcée, disposant de 89 sièges, et avec une gauche remontée à bloc, faisant feu de tout bois. 

Faute d'être parvenu à un accord de gouvernement, l'exécutif va donc être contraint, pour les cinq prochaines années, de nouer des alliances au cas par cas pour faire adopter les réformes annoncées. 

Pour autant, aussi mouvementée soit-elle, la situation politique actuelle, à ce stade, ne met pas en péril l'exécutif qui a réchappé la semaine dernière à une motion de censure déposée par la gauche, à laquelle les autres groupes de l'opposition n'ont pas adhéré. 

Emmanuel Macron pourrait revenir sur cette question jeudi midi sur TF1 et France 2 lors de sa première interview télévisée depuis sa réélection en avril. 

Le 25 juin, il avait confié que le projet présidentiel, tout comme celui de la majorité présidentielle, pourrait « être amendé ou enrichi », à condition toutefois que les modifications n'entraînent pas une hausse des impôts ou de la dette. 


Motion de censure: Le Pen attend la dissolution avec une «impatience croissante»

 Marine Le Pen a dénoncé jeudi à l'Assemblée nationale l'"année noire fiscale" que représentera pour les Français "l'année blanche" inscrite dans le budget du gouvernement, disant attendre "la dissolution avec une impatience croissante". (AFP)
Marine Le Pen a dénoncé jeudi à l'Assemblée nationale l'"année noire fiscale" que représentera pour les Français "l'année blanche" inscrite dans le budget du gouvernement, disant attendre "la dissolution avec une impatience croissante". (AFP)
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  • Ce budget est "l'acte ultime, nous l'espérons, d'un système politique à bout de souffle", a affirmé la présidente des députés Rassemblement national en défendant la motion de censure de son parti contre le gouvernement de Sébastien Lecornu
  • Elle a dénoncé au passage l'"insondable sottise des postures" qui pourrait le "sauver"

PARIS: Marine Le Pen a dénoncé jeudi à l'Assemblée nationale l'"année noire fiscale" que représentera pour les Français "l'année blanche" inscrite dans le budget du gouvernement, disant attendre "la dissolution avec une impatience croissante".

Ce budget est "l'acte ultime, nous l'espérons, d'un système politique à bout de souffle", a affirmé la présidente des députés Rassemblement national en défendant la motion de censure de son parti contre le gouvernement de Sébastien Lecornu. Elle a dénoncé au passage l'"insondable sottise des postures" qui pourrait le "sauver".

"Poursuite du matraquage fiscal" avec 19 milliards d'impôts supplémentaires, "gel du barème" de l'impôt sur le revenu qui va rendre imposables "200.000 foyers" supplémentaires, "poursuite de la gabegie des dépenses publiques", "absence totale d'efforts sur l'immigration" ou sur "l'aide médicale d'Etat", ce budget "est un véritable musée de toutes les horreurs coincées depuis des années dans les tiroirs de Bercy", a-t-elle estimé.

Raillant le premier secrétaire du PS Olivier Faure, qui a accepté d'épargner le gouvernement en échange de la suspension de la réforme des retraites sans savoir par "quel véhicule juridique" et sans assurance que cela aboutisse, elle s'en est pris aussi à Laurent Wauquiez, le chef des députés LR, qui préfère "se dissoudre dans le socialisme" plutôt que de censurer.

"Désormais, ils sont tous d'accord pour concourir à éviter la tenue d'élections", "unis par la terreur de l'élection", a-t-elle dit.


A peine installé, Lecornu affronte deux motions de censure

Si le gouvernement de Sébastien Lecornu survit, les débats autour du budget, dont le texte a été présenté en Conseil des ministres mardi, pourront enfin commencer à l'Assemblée. (AFP)
Si le gouvernement de Sébastien Lecornu survit, les débats autour du budget, dont le texte a été présenté en Conseil des ministres mardi, pourront enfin commencer à l'Assemblée. (AFP)
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  • Sans recours au 49.3, que M. Lecornu s'est engagé à ne pas utiliser, la bataille entre une gauche désunie, un socle commun fracturé et l'extrême droite s'annonce dantesque, dans des délais très contraints
  • Les socialistes se réservent d'ailleurs la possibilité de censurer le gouvernement au cours des discussions

PARIS: Un dernier obstacle avant d'entamer l'examen du budget: deux motions de censure contre le gouvernement de Sébastien Lecornu, l'une de LFI et l'autre du RN, seront débattues par les députés jeudi matin, et devraient être rejetées, dans un scrutin serré, faute de soutien du PS.

Le Parti socialiste a pris sa décision après avoir obtenu mardi satisfaction sur plusieurs revendications clés, dont l'annonce par le Premier ministre, dans sa déclaration de politique générale, de la suspension de la réforme des retraites.

Un débat commun aux deux motions débutera à 09H00 dans l'hémicycle jeudi, et devrait durer environ deux heures trente. Le scrutin sera ensuite ouvert pour trente minutes sur une motion, puis l'autre.

Si la gauche ne soutiendra pas la motion du RN, la motion insoumise devrait elle recueillir les voix de l'extrême droite ainsi que des députés écologistes et communistes.

Manqueraient alors environ une vingtaine de députés pour atteindre la majorité (289 voix) qui ferait tomber le gouvernement, tout juste nommé dimanche.

"Je pense qu'il manque une poignée de voix et que la sagesse peut revenir à certains", a estimé mardi Marine Le Pen, qui défendra la motion de son groupe et de ses alliés ciottistes. Leur texte défend la nécessité d'une dissolution pour "sortir" le pays "de l'impasse".

Combien de députés franchiront le pas en s'affranchissant de la consigne de leur parti?

Chez les LR "deux ou trois" devraient voter la censure, selon une source au groupe.

"Quelques votes pour" sont également possibles chez les indépendants Liot, selon une source au sein du groupe centriste.

Chez les socialistes, le patron du parti Olivier Faure et le chef des députés Boris Vallaud ont appelé leurs troupes à s'en tenir à la ligne décidée de façon "quasi-unanime".

Mais le député Paul Christophe a fait savoir qu'il censurerait malgré tout: "mon sujet c'est la justice fiscale et le pouvoir d'achat, il n'y a pas d'engagement du gouvernement sur ces sujets", a-t-il dit à l'AFP.

Cinq autres députés ultramarins du groupe PS ont également annoncé censurer.

"Un leurre" 

Le socialiste Pierrick Courbon dit lui hésiter. Il s'inquiète que la suspension de la réforme des retraites, qui passera selon M. Lecornu par un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale, implique que les socialistes soutiennent ce texte pour qu'il soit adopté. Or "le PLFSS du budget Macron" n'obtiendra "jamais ma voix", confie-t-il à l'AFP.

Un argument d'ailleurs repris en choeur par La France insoumise. "Vous vous apprêtez à commettre une monumentale erreur", a lancé lundi dans l'hémicycle le député Louis Boyard à l'adresse des socialistes.

"Le débat ouvert sur un éventuel décalage de la réforme des retraites est un leurre, comme l'a été avant lui le +conclave+ de François Bayrou", soutient la motion de censure insoumise, qui sera défendue jeudi par Aurélie Trouvé.

Lors de la première motion de censure contre le gouvernement Bayrou, qui n'avait pas abouti, huit socialistes avaient voté pour malgré la consigne de leur parti.

M. Bayrou avait finalement perdu un vote de confiance début septembre, devenant le deuxième Premier ministre à tomber depuis la dissolution de l'Assemblée en 2024, après la censure de Michel Barnier en décembre.

Si le gouvernement de Sébastien Lecornu survit, les débats autour du budget, dont le texte a été présenté en Conseil des ministres mardi, pourront enfin commencer à l'Assemblée.

La commission des Finances s'en emparera lundi, et il devrait arriver dans l'hémicycle vendredi.

Sans recours au 49.3, que M. Lecornu s'est engagé à ne pas utiliser, la bataille entre une gauche désunie, un socle commun fracturé et l'extrême droite s'annonce dantesque, dans des délais très contraints.

Les socialistes se réservent d'ailleurs la possibilité de censurer le gouvernement au cours des discussions.

Un député Horizons résume: "Je ne pense pas que le gouvernement sera censuré demain, mais il sera très fragile."


Darmanin veut mettre les victimes «au centre» du système judiciaire

"Les victimes sont les grands oubliés de l'action publique", a déclaré le ministre de la Justice dans un entretien diffusé mardi soir sur LCI. (AFP)
"Les victimes sont les grands oubliés de l'action publique", a déclaré le ministre de la Justice dans un entretien diffusé mardi soir sur LCI. (AFP)
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  • "Il y aura un tarif minimum, pour parler très populaire, d'un an de prison ferme pour tous ceux qui ont agressé physiquement un policier, un gendarme, un élu local (...) un magistrat, quelqu'un qui représente l'autorité de l'Etat"
  • "Aujourd'hui, le minimal, c'est zéro. Demain, le minimal ce sera, sans récidive, au premier fait, un an de prison ferme"

PARIS: Le garde des Sceaux Gérald Darmanin a annoncé mardi soir avoir donné instruction de placer les "victimes au centre" du système judiciaire et précisé son projet de loi prévoyant une "peine minimum" d'un an de prison pour toute agression d'une personne dépositaire de l'autorité publique.

"Les victimes sont les grands oubliés de l'action publique", a déclaré le ministre de la Justice dans un entretien diffusé mardi soir sur LCI.

Gérald Darmanin a assuré avoir pris une instruction ministérielle qui prendra effet "lundi prochain", exigeant que toute victime puisse être "reçue à (sa) demande" par les instances judiciaires ou encore qu'une notification lui soit adressée pour la prévenir "quand (son) agresseur sort de prison".

"Il est normal, si vous êtes victime de viol (...) que vous puissiez savoir quand la personne va sortir de prison", a illustré le garde des Sceaux.

"On va changer totalement le paradigme du ministère de la Justice. Au lieu de mettre l'accusé au centre, nous allons mettre la victime au centre", a encore souligné M. Darmanin.

Il a également précisé les contours d'un projet de loi pour instaurer une "peine minimum" d'un an de prison pour tout agresseur d'une personne dépositaire de l'autorité publique.

"Il y aura un tarif minimum, pour parler très populaire, d'un an de prison ferme pour tous ceux qui ont agressé physiquement un policier, un gendarme, un élu local (...) un magistrat, quelqu'un qui représente l'autorité de l'Etat", a-t-il affirmé.

"Aujourd'hui, le minimal, c'est zéro. Demain, le minimal ce sera, sans récidive, au premier fait, un an de prison ferme", a-t-il insisté, espérant une entrée en vigueur en "début d'année prochaine" après un vote au Parlement.

Gérald Darmanin veut aussi légiférer pour qu'une peine de sursis ne puisse être prononcée qu'une seule fois avant le prononcé d'une peine de prison ferme, pour lutter contre les multirécidivistes.

"Les gens auront un seul sursis. Et puis s'ils en ont un deuxième, c'est directement la case prison ou c'est directement l'application de la peine de sursis, par exemple le travail d'intérêt général", a-t-il prôné lors de cet entretien donné après le discours de politique générale de Sébastien Lecornu.

"Si nous ne corrigeons pas nos excès, si nous ne faisons pas preuve d'humilité, si nous ne disons pas que nous nous sommes trompés (...), je crois que nous courons le grand danger d'être éliminés totalement de la vie politique française et de laisser aux Français le choix entre l'extrême droite et l'extrême gauche" lors de la présidentielle de 2027, a-t-il ajouté.