Crevasses et éboulements: le Mont Blanc de plus en plus difficile d'accès

Des randonneurs sont vus en silhouette marchant à côté du glacier de Fee (en allemand : Feegletscher) au-dessus de la station alpine suisse de Saas-Fee, le 30 juillet 2022. (Photo de Fabrice Coffrini / AFP)
Des randonneurs sont vus en silhouette marchant à côté du glacier de Fee (en allemand : Feegletscher) au-dessus de la station alpine suisse de Saas-Fee, le 30 juillet 2022. (Photo de Fabrice Coffrini / AFP)
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Publié le Dimanche 31 juillet 2022

Crevasses et éboulements: le Mont Blanc de plus en plus difficile d'accès

  • Les conditions d'accès en cette fin juillet sont si dégradées que seuls les grimpeurs les plus expérimentés sont encore capables d'y parvenir
  • La chaleur a provoqué la fonte des fragiles ponts de neige qui permettent de franchir les crevasses et entrainé des éboulements

CHAMONIX, France : Crevasses béantes, chutes de pierres grosses «comme des frigos». En cette année marquée par la sécheresse et la canicule, l'accès au sommet du Mont Blanc devient particulièrement difficile et périlleux, au grand dam des alpinistes amateurs qui rêvent de fouler le toit des Alpes.

Officiellement, aucune des sept voies menant à la cime, à 4.807 mètres, n'est fermée mais les conditions d'accès en cette fin juillet sont si dégradées que seuls les grimpeurs les plus expérimentés sont encore capables d'y parvenir, selon les spécialistes de la montagne.

En cause, le déficit de neige au cours de l'hiver, qui en altitude laisse en de nombreux endroits apparaître de vastes portions de glaciers nus grisâtres - voire jaunâtres là où se sont accumulées pendant l'hiver des poussières de sable en provenance du Sahara - et hérissés de fractures.

La chaleur a fait le reste, provoquant la fonte des fragiles ponts de neige qui permettent de franchir les crevasses et entrainant des éboulements.

A Chamonix, au pied du géant blanc, la saison bat toutefois son plein et les touristes se pressent au sommet de l'Aiguille du Midi (3.842 mètres) où ils arrivent chaque jour par milliers par la magie du téléphérique.

Mais là-haut, dans la petite grotte taillée à même la glace qui sert de vestiaire et de point de départ aux alpinistes pour de nombreuses courses en montagne - dont la traversée de la Vallée Blanche ou le Mont Blanc via la voie des «trois Monts» -, ils sont plutôt peu nombreux à chausser/déchausser les crampons en cette fin juillet.

Parmi eux l'Ecossais Evan Warden et son fils de 14 ans, David, sont venus faire un tour sur le glacier en contrebas de l'Aiguille. Ils y ont découvert des conditions «affreuses»: «partout où nous marchions, il y avait des chutes de pierres constantes et des crevasses s'ouvraient en permanence», explique le jeune garçon formé à la montagne en Ecosse, en première visite dans les Alpes.

Tous deux espéraient initialement gravir le Mont Blanc mais ont renoncé à ce projet, «trop risqué». «Peut-être l'année prochaine... Il sera là demain, il sera là le mois prochain et l'année prochaine. Il ne bougera pas», philosophe le père en enroulant lestement sa corde autour de ses épaules.

- «On le fera plus tard» -

Monica et Marten Antheun, un couple de quadragénaires norvégiens se faisaient eux aussi une fête de se frotter au mythique géant après «trois ans d'attente»: ils avaient réservé pour «aujourd'hui ou demain» auprès de la Compagnie des Guides de Chamonix, se désole Marten.

«Le guide nous a envoyé un email et la course au Mont Blanc a été annulée à cause de la météo. Je pense que les guides connaissent la zone et les conditions. C'est ok pour nous, nous pourrons le faire plus tard», tempère son épouse.

Les Compagnies des guides de Chamonix et de Saint-Gervais ont annoncé à la mi-juillet la suspension provisoire des ascensions au Mont Blanc par la voie «normale» du Goûter en raison des chutes de pierres qui dévalent le couloir du Goûter, aussi connu sous le nom de «couloir de la mort». L'accès reste ouvert aux guides indépendants.

Les températures très élevées ces derniers temps déstabilisent la montagne, relève Noé Vérité, gardien du refuge des Cosmiques, situé sur une autre voie, celle des Trois Monts.

Il dit avoir récemment relevé 6 degrés en pleine nuit à son refuge, à 3.613 mètres d'altitude. L'absence de regel cette nuit-là a contraint tous les candidats à l'ascension partis des Cosmiques à faire demi-tour, explique-t-il par téléphone à l'AFP.

«On voit les conditions se dégrader de jour en jour», constate-t-il. Pour lui, juillet est habituellement le pic de la saison, mais les annulations s'accumulent.

La voie normale subit des chutes de pierres grosses «comme des frigos». D'autres comme «l'Innominata» sont encore pratiquées mais restent réservées à une archi-minorité du fait de leur difficulté, souligne-t-il.

Actuellement, seule une «douzaine ou une vingtaine de personnes par jour, plutôt des spécialistes», accèdent au sommet du Mont Blanc, contre 100 à 120 personnes en temps normal, estime Olivier Grébert, président de la Compagnie des guides de Chamonix.

Les courses annulées sont reportées, remboursées ou réorientées sur d'autres itinéraires et la Compagnie en profite au passage pour faire un peu de pédagogie pour ceux qui, par exemple, veulent gravir le sommet «pour leurs 40 ans».

«Cette ascension doit s'inscrire dans une carrière d'alpiniste», explique M. Grébert: «le Mont Blanc a quelquefois la réputation d’être une ascension facile mais ce n'est pas le cas, cette année plus particulièrement encore».

Des itinéraires mythiques des Alpes font les frais de la canicule

Des itinéraires de montagne parmi les plus mythiques des Alpes sont devenus impraticables cet été, la canicule et la fonte des glaciers les ayant rendus trop dangereux.

Chaque été, randonneurs et touristes se jettent habituellement avec ferveur sur les sentiers alpins dans l'espoir d'atteindre certains des plus beaux sommets d'Europe.

Mais la fonte des glaciers et le dégel du permafrost, des phénomènes qui selon les scientifiques sont dus au changement climatique, ont rendu des itinéraires trop dangereux, avec notamment des chutes de pierres répétées.

«Actuellement dans les Alpes, il y a des mises en garde pour environ une dizaine de sommets, dont les sommets emblématiques comme le Mont Cervin et le Mont Blanc», a déclaré le secrétaire général de l'Association suisse des guides de montagne, Pierre Mathey.

«Normalement c'est des fermetures que l'on voit plutôt au mois d'août. Et là elles ont eu lieu fin juin, début juillet», a-t-il dit.

- «Report» -

Les guides qui acheminent habituellement chaque année des milliers de passionnés vers les plus hauts sommets d'Europe ont décidé de ne plus emprunter certains itinéraires pour l'ascension du Mont Blanc.

Une décision «pas facile à prendre» mais nécessaire face aux «conditions particulièrement délicates de ces dernières semaines dues à la hausse significative des températures», ont expliqué les guides alpins italiens sur leur page Facebook cette semaine.

En Suisse aussi, les guides ont renoncé à l'ascension de la célèbre Jungfrau. Ils ont également déconseillé de suivre les itinéraires situés sur les versants italien et suisse du Cervin, montagne helvétique emblématique.

Ces mesures sont un coup dur après deux saisons difficiles marquées par la pandémie de Covid-19, a expliqué le président de l'association des guides de la vallée d'Aoste en Italie, Ezio Marlier.

«Ce n'est pas simple après deux saisons presque totalement vides de prendre la décision d'arrêter le travail», a-t-il dit .

Mais il déplore que de trop nombreuses personnes annulent leur séjour alors que certains itinéraires restent praticables. «On a la possibilité de faire plein d'autres choses, mais normalement les gens qui veulent le Mont Blanc, ils veulent le Mont Blanc».

- Glaciers dangereux -

L'accès aux glaciers qui ont fondu à un rythme accéléré cette année comporte également des risques.

«Les glaciers sont actuellement dans l'état qu'ils connaissent habituellement à la fin de l'été, voire plus tard», a expliqué  Andreas Linsbauer, glaciologue à l'université de Zurich: «il est certain que nous allons battre un record».

Selon cet expert, cet été «vraiment extrême» pour les glaciers est dû à une combinaison de facteurs. Les chutes de neige exceptionnellement faibles l'hiver dernier ont amenuisé le manteau neigeux protégeant les glaciers de la chaleur. Et le sable venu du Sahara plus tôt dans l'année a assombri la neige, ce qui la fait fondre plus rapidement.

Les vagues de chaleur successives qui ont frappé l'Europe depuis mai ont enfin accéléré la fonte des glaciers, les rendant instables.

Comme en Italie, où un énorme bloc du glacier de la Marmolada s'est effondré en juillet, une tragédie ayant fait onze morts.

Le glacier avait été fragilisé par le réchauffement climatique ainsi que par des températures record enregistrées cette année en Italie, 10°C au sommet de la Marmolada la veille de la catastrophe. Les fortes chaleurs ont accéléré sa fonte et l'eau s'est accumulée sous la calotte glaciaire, la rendant instable.

- «Un danger supplémentaire» -

Pour Mylène Jacquemart, spécialiste des glaciers à l'Ecole polytechnique fédérale de Zurich, l'effondrement de l'énorme bloc du glacier de la Marmolada comporte encore des inconnues. «Mais de façon générale, plus les eaux fondent et plus la situation se complique et devient dangereuse», a-t-elle dit à l'AFP.

Pierre Mathey a souligné lui aussi que «ces poches d'eau, dans des périodes de grand beau temps avec des températures très chaudes, sont un danger supplémentaire, parce que ça n'est pas visible».

Mais il reste confiant, estimant que les guides trouveront des itinéraires alternatifs: «La résilience est vraiment l'ADN du guide de montagne... et l'adaptabilité».

«C'est la montagne qui décide. Pas l'humain», a-t-il dit.

 


Retraite: Bayrou se donne encore du temps pour arracher un accord

Le gouvernement essaie vendredi de pousser syndicats et patronat à négocier encore jusqu'à la mi-juillet un accord sur les retraites, en particulier la délicate question de la pénibilité, dans l'espoir d'en tirer bénéfice lors du débat budgétaire de l'automne. (AFP)
Le gouvernement essaie vendredi de pousser syndicats et patronat à négocier encore jusqu'à la mi-juillet un accord sur les retraites, en particulier la délicate question de la pénibilité, dans l'espoir d'en tirer bénéfice lors du débat budgétaire de l'automne. (AFP)
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  • "S'il faut 24 heures de plus, peut-être qu'il faudra trois jours de moins, mais il faut aller au bout de cet accord", a expliqué la porte-parole du gouvernement Sophie Primas
  • "A la mi-juillet, nous avons tous bon espoir que nous arrivions" à un accord sur les points d'aménagement de la réforme des retraites de 2023 sur lesquels les partenaires sociaux achoppent toujours: la pénibilité et le financement des mesures

PARIS: Le gouvernement essaie vendredi de pousser syndicats et patronat à négocier encore jusqu'à la mi-juillet un accord sur les retraites, en particulier la délicate question de la pénibilité, dans l'espoir d'en tirer bénéfice lors du débat budgétaire de l'automne.

Ils devaient arrêter les négociations le 26 mai mais avaient reporté leur dernière séance à lundi. Les partenaires sociaux, constatant un désaccord, ont vu alors les concertations reprendre par l'entremise de Matignon. Quatre jours plus tard, le gouvernement leur a donné jusqu'à "la mi-juillet" pour aboutir.

"S'il faut 24 heures de plus, peut-être qu'il faudra trois jours de moins, mais il faut aller au bout de cet accord", a expliqué la porte-parole du gouvernement Sophie Primas.

"A la mi-juillet, nous avons tous bon espoir que nous arrivions" à un accord sur les points d'aménagement de la réforme des retraites de 2023 sur lesquels les partenaires sociaux achoppent toujours: la pénibilité et le financement des mesures, a-t-elle affirmé.

Jeudi devant la presse, le Premier ministre François Bayrou avait défendu des "avancées" déjà actées, comme une amélioration du calcul de la retraite pour les femmes ayant eu des enfants ou un abaissement de l'âge de départ sans décote, à 66 ans et demi contre 67 ans actuellement.

Évoquant le travail du conclave "remarquablement utile", il a jugé un compromis final "à portée de main" sur la prise en compte de la pénibilité. Mais il n'a pas défini de cadre pour ces nouvelles discussions.

"Efforts" 

Patronat (Medef, CPME) et syndicats (CFDT, CFTC, CFE-CGC) encore dans les négociations parviendront-ils à s'accorder en deux semaines sur le compromis qu'ils n'ont pas trouvé en quatre mois ?

Dans l'immédiat, chacun se montre prudent. Tout en promettant de faire "ses meilleurs efforts", le président du Medef, Patrick Martin, a observé que "les points de désaccords qui subsistent seront évidemment les plus difficiles à régler".

Patronat et syndicats sont "sur deux idées complètement différentes" sur la question cruciale de la pénibilité, a abondé Eric Chevée, négociateur de la CPME (Petites et moyennes entreprises).

Quant à la CFDT, qui réunit son bureau national vendredi, elle devrait définir sa position. Dans l'immédiat, elle a salué le fait que M. Bayrou a repris ses "revendications" sur les femmes mais a rappelé que "la pénibilité et l'équilibre financier ne sont pas deux mesures parmi d'autres, c'est le cœur du problème depuis le départ".

Mais M. Bayrou ne lâche rien. En chute abyssale dans les sondages, en sursis jusqu'à la discussion budgétaire de l'automne, où le Rassemblement national notamment menace de le censurer, il est prêt à promettre de traduire dans la loi toute "disposition de compromis".

Une manière d'assurer à la CFDT, premier syndicat, proche des socialistes, que chaque pas vers le patronat sera utile, ce dernier étant encouragé par ailleurs à assouplir ses positions.

"Les syndicats ont fait preuve d'une grande responsabilité. J'attends du Medef qu'il y ait une part d'effort qui soit faite!", a ainsi tancé vendredi sur Sud Radio Marc Fesneau, le chef des députés Modem et très proche du Premier ministre.

Une manière aussi de prendre à revers les socialistes, qui ont annoncé maintenir leur motion de censure déposée après l'échec du conclave.

"Je n'imagine pas que le parti de Jacques Delors et de Michel Rocard puisse considérer" que les compromis trouvés soient "un objet de censure", a sermonné jeudi M. Bayrou.

"Je trouve assez curieux (...) que le parti socialiste dépose une motion de censure sur une question sociale", a fait mine de s'étonner Mme Primas.

De fait, le RN ayant répété qu'il ne voterait pas cette motion, le Premier ministre sait qu'il gardera son poste à Matignon encore au moins jusqu'à l'automne.

 


Au lendemain de la guerre de douze jours, Paris voit une défaite stratégique de l’Iran

La diplomatie française mise d’abord sur le cessez-le-feu, qu’il faut désormais consolider pour poser les bases d’un retour au dialogue.   C’est probablement dans cet esprit que le président Emmanuel Macron a reçu mercredi soir, à l’Élysée, le directeur général de l’AIEA. (AFP)
La diplomatie française mise d’abord sur le cessez-le-feu, qu’il faut désormais consolider pour poser les bases d’un retour au dialogue.  C’est probablement dans cet esprit que le président Emmanuel Macron a reçu mercredi soir, à l’Élysée, le directeur général de l’AIEA. (AFP)
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  • Concernant l’avenir du régime iranien, Paris reconnaît que celui-ci  est aujourd’hui fragilisé et secoué. Mais la France reste opposée à toute tentative de changement de régime imposée de l’extérieur
  • Pour cause, aucun mouvement d’opposition significatif n’a pour l’heure émergé dans les rues, mais Paris rappelle que les Iraniens ont su, ces trois dernières années, exprimer leur colère lorsqu’ils l’ont cru nécessaire

PARIS: Le cessez-le-feu proclamé par le président américain Donald Trump à l’issue de ce que l’on qualifie désormais de « guerre de douze jours » semble tenir.

Même si le ton des déclarations israéliennes et iraniennes demeure martial, et les menaces continuent de fuser de part et d’autre, il est désormais clair que, depuis que le président américain a sifflé la fin du match, ni la partie israélienne ni la partie iranienne n’ose véritablement prendre le risque de contrarier sa volonté.

La guerre à laquelle les États-Unis ont fini par se joindre dans une opération coordonnée contre les sites nucléaires de Natanz, Fordow et Ispahan dans la nuit du 21 au 22 juillet, ne pouvait se poursuivre sans embraser la région, voire le monde.

Mais les interrogations demeurent quant à l’efficacité réelle de ces frappes. Les milieux diplomatiques et les médias se partagent entre évaluations contradictoires et spéculations sur l’impact réel des destructions infligées au programme nucléaire iranien.

Paris, pour sa part, estime prématuré de tirer des conclusions sans disposer d’informations fiables.

La diplomatie française mise d’abord sur le cessez-le-feu, qu’il faut désormais consolider pour poser les bases d’un retour au dialogue. 

C’est probablement dans cet esprit que le président Emmanuel Macron a reçu mercredi soir, à l’Élysée, le directeur général de l’AIEA.

Toutefois, Paris considère que cette crise, culminant avec les frappes américaines, s’est conclue sur une victoire stratégique d’Israël.

Les incertitudes restent nombreuses

L’Iran n’a pas été en capacité de riposter efficacement aux attaques, qui ont infligé des dommages significatifs à son programme nucléaire, à son arsenal balistique et à la hiérarchie de ses structures militaires et sécuritaires.

Cette défaite s'inscrit dans une séquence plus large : l’affaiblissement du Hezbollah au Liban l’année passée, et la chute du régime de Bachar al-Assad en Syrie, constituent autant de revers pour l’Iran et ses alliés dans ce que Téhéran nomme « l’axe de la résistance ».

Vue de Paris, il s’agit là d’un épisode militaire de grande ampleur, porteur de conséquences régionales durables.

Mais les incertitudes restent nombreuses : d’une part sur le degré réel de destruction du programme nucléaire iranien ; d’autre part, sur la situation politique intérieure en Iran, au lendemain de cette crise.

Forte de son expérience diplomatique, la France se dit prête à jouer un rôle actif dans une relance des négociations, tant sur le programme nucléaire que sur les capacités balistiques iraniennes.

L’objectif est de parvenir à un encadrement clair, garant d’une stabilité durable, et de prévenir une dangereuse course à l’arme nucléaire dans la région.

Mais pour cela, encore faut-il que l’Iran accepte de s’engager de bonne foi dans ce processus, en fournissant les garanties nécessaires à la communauté internationale.

Concernant l’avenir du régime iranien, Paris reconnaît que celui-ci  est aujourd’hui fragilisé et secoué. Mais la France reste opposée à toute tentative de changement de régime imposée de l’extérieur.

Pour cause, aucun mouvement d’opposition significatif n’a pour l’heure émergé dans les rues, mais Paris rappelle que les Iraniens ont su, ces trois dernières années, exprimer leur colère lorsqu’ils l’ont cru nécessaire.

S’ils ne le font pas aujourd’hui, c’est par prudence : la répression est féroce, et les forces de sécurité mènent une véritable traque à la « cinquième colonne ».

À moyen terme, il est probable que le régime devra rendre des comptes. Son échec est patent: l’économie iranienne est à genoux, et les perspectives d’avenir sont sombres.

C’est pourquoi la France estime essentiel de rester à l’écoute de la jeunesse iranienne et des forces vives de la société civile, qui aspirent à un autre futur.

Dans ce paysage instable, où les victoires militaires ne garantissent ni la paix ni la justice, seule une diplomatie patiente, attentive et résolue pourra éviter que les cendres du conflit ne nourrissent de nouveaux incendies. 

Forte de sa constance, la France estime qu’il est plus que jamais essentiel de miser et de croire à cette voie-là.


France: le Premier ministre cherche une issue sur le dossier sensible des retraites

Le chef du gouvernement avait lancé, après sa nomination il y a six mois, un cycle de négociations, baptisé conclave. (AFP)
Le chef du gouvernement avait lancé, après sa nomination il y a six mois, un cycle de négociations, baptisé conclave. (AFP)
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  • M. Bayrou avait prévenu que faute d'accord ce serait l'actuelle réforme des retraites qui s'appliquerait, au nom de l'équilibre financier du régime, alors que la dette du pays a continué de croître au premier trimestre pour s'établir à 114% du PIB
  • Lundi soir, le conclave s'est soldé par un échec et le Premier ministre a reçu les partenaires sociaux le lendemain, dans une tentative de trouver "une voie de passage"

PARIS: François Bayrou tient jeudi après-midi une conférence de presse sur la réforme des retraites de 2023, deux jours après avoir rencontré les organisations syndicales et patronales qui ont échoué à trouver un accord sur ce dossier sensible, fragilisant le Premier ministre français à la tête du gouvernement.

Le chef du gouvernement avait lancé, après sa nomination il y a six mois, un cycle de négociations, baptisé conclave.

L'idée de ce conclave était principalement de tenter de rendre moins impopulaire la réforme des retraites de 2023, qui porte progressivement de 62 à 64 ans l'âge légal de départ. Il vise également l'équilibre financier: le déficit du système s'annonce à hauteur de 6,6 milliards d'euros en 2030.

Cette réforme des retraites avait fait descendre dans la rue en 2023 des centaines de milliers de personnes dans toute la France.

M. Bayrou avait prévenu que faute d'accord ce serait l'actuelle réforme des retraites qui s'appliquerait, au nom de l'équilibre financier du régime, alors que la dette du pays a continué de croître au premier trimestre pour s'établir à 114% du PIB, selon l'Insee jeudi.

Lundi soir, le conclave s'est soldé par un échec et le Premier ministre a reçu les partenaires sociaux le lendemain, dans une tentative de trouver "une voie de passage".

Jeudi, il tient une conférence de presse à 17H00 (15H00 GMT) pour "tirer les conclusions" de ses échanges.

"Et s'il demeure des points de désaccord, le gouvernement les tranchera", a-t-il assuré mercredi devant le Sénat.

Ce grand défenseur de la démocratie sociale considère que les partenaires sociaux étaient "à quelques centimètres de la réussite du conclave" et que leur "travail ne sera pas oublié".

Lors de sa conférence de presse, il devrait notamment exposer les points de blocage et de consensus remontés par les partenaires sociaux.

Syndicats et organisations patronales s'opposent notamment sur la prise en compte de la pénibilité au travail, dans le moment du départ en retraite.

Le Premier ministre veut obtenir des accords sur les femmes ayant eu des enfants, qui pourraient voir leur pension calculée de manière plus favorable, ainsi que sur "l'âge de départ à plein droit à la retraite" qui pourrait être avancé à 66,5 ans au lieu de 67 actuellement, selon la porte-parole du gouvernement Sophie Primas.

Mais un éventuel accord sur ces points ne suffirait pas aux socialistes qui veulent pouvoir discuter de "tout" au Parlement, et en particulier de l'âge de départ fixé à 64 ans par la loi de 2023, ce que refuse le Premier ministre au nom de l'équilibre financier du régime.

François Bayrou avait lancé ces concertations sur cette réforme impopulaire en échange de la neutralité des socialistes à son égard, ce qui lui avait permis d'échapper à la censure sur le budget en février.

Mais sans attendre l'issue de ces discussions de la dernière chance, les socialistes ont annoncé mardi qu'ils allaient déposer une motion de censure contre le gouvernement, ce qu'ils ont fait officiellement jeudi.

Ce qui remet le parti d'extrême droite Rassemblement national (RN), qui dispose du plus gros groupe à l'Assemblée nationale, au centre du jeu, comme avec le prédécesseur de François Bayrou, Michel Barnier, tombé en décembre au bout de trois mois à la tête du gouvernement, sous les voix jointes du Parti socialiste, de La France insoumise (gauche radicale) et du RN.

Alors que son avenir ne tient qu'à un fil, une moitié des Français (52%) souhaitent la censure du gouvernement Bayrou, et 63% considèrent qu'il est le principal responsable de l'échec du conclave, selon un sondage Elabe paru mercredi.