Procès de l'attentat de Nice: témoigner de l'«atrocité» et rendre hommage «à la vie»

Sur cette photographie d'archive prise le 19 juillet 2016, une femme se tient devant le mémorial de fortune en hommage aux victimes de l'attentat meurtrier du 14 juillet sur la Promenade des Anglais à Nice. Valery HACHE / AFP
Sur cette photographie d'archive prise le 19 juillet 2016, une femme se tient devant le mémorial de fortune en hommage aux victimes de l'attentat meurtrier du 14 juillet sur la Promenade des Anglais à Nice. Valery HACHE / AFP
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Publié le Mardi 20 septembre 2022

Procès de l'attentat de Nice: témoigner de l'«atrocité» et rendre hommage «à la vie»

  • Depuis le 5 septembre, la cour d'assises spéciale de Paris juge huit accusés, membres de l'entourage de l'assaillant ou soupçonnés de trafic d'armes
  • Après avoir convoqué enquêteurs, experts techniques et spécialistes des traumatismes, la cour consacre cinq semaines à entendre les parties civiles qui le souhaitent, 288 à ce jour.

PARIS: Près de 300 parties civiles témoignent à partir de mardi à Paris au procès de l'attentat de Nice, l'occasion de dire à la cour l'"atrocité" de ce qu'elles ont vécu, de "tourner une page" ou de "rendre hommage" aux disparus.

"Je vais essayer de montrer qui était Camille, ce qu'elle avait fait dans sa courte vie. Ce sera un hymne à la vie", prévoit ainsi Anne Murris, qui évoquera le 29 septembre sa fille unique, tuée à 27 ans par le camion-bélier de Mohamed Lahouaiej-Bouhlel le 14 juillet 2016.

Ce Tunisien de 31 ans avait volontairement foncé sur la foule rassemblée sur la Promenade des Anglais pour la Fête nationale, faisant 86 morts et plus de 450 blessés.

Depuis le 5 septembre, la cour d'assises spéciale de Paris juge huit accusés, membres de l'entourage de l'assaillant ou soupçonnés de trafic d'armes.

Après avoir convoqué enquêteurs, experts techniques et spécialistes des traumatismes, la cour consacre cinq semaines à entendre les parties civiles qui le souhaitent, 288 à ce jour.

Certaines étaient présentes sur la Promenade des Anglais le soir de l'attaque et ont été blessées ou traumatisées, d'autres y ont perdu un ou plusieurs proches, parfois une famille entière.

«Atrocité des faits»

Ces dépositions vont permettre d'"avoir un point de vue plus humain sur ce qui s'est passé" le 14 juillet 2016, après la projection jeudi dernier des images de vidéosurveillance de l'attentat, observe Virginie Le Roy, avocate de 105 parties civiles, dont une quinzaine témoigneront.

"La parole des victimes dans un procès terroriste est essentielle pour se rendre compte de l'atrocité des faits", estime aussi Yves Hartemann, avocat d'environ 60 parties civiles.

"Je ne pense pas que je vais raconter la scène en détail", indique toutefois Sophie Desvergnes, musicienne qui jouait sur une estrade le soir de l'attaque. Elle entend "surtout parler de l'après", "dire aux juges, au public à quel point notre vie peut être transformée", même si "je n'ai perdu personne ce soir-là, je n'ai pas été blessée physiquement".

La contrebassiste éprouve une certaine "appréhension" avant sa venue à la barre, le 6 octobre, mais ne pense pas que cela ravivera son traumatisme. "Les choses, elles se sont jamais éteintes, elles sont là en permanence en moi".

Le témoignage est généralement "salvateur", en particulier pour les victimes atteintes de troubles de stress post-traumatique, souvent confrontées à l'incompréhension des proches, explique à l'AFP Héloïse Joly, neuropsychologue à Nice, qui a évalué de nombreuses victimes de l'attentat et a témoigné vendredi au procès.

Déposer à la barre, "c'est être reconnu dans le fait d'être traumatisé, et voir qu'on n'est pas le seul à vivre ça, comprendre que c'est quelque chose de normal. C'est très déculpabilisant", ajoute-t-elle.

L'enjeu est différent pour les "endeuillés", explique Anne Murris, c'est "un travail contre l'oubli", pour "rendre hommage" aux proches disparus "dans la solennité d'un tribunal".

«Un exercice redouté»

"C'est un exercice que je redoute", confie la présidente de Mémorial des anges, consciente qu'à la barre elle redeviendra "la maman de Camille Murris, replongée six ans en arrière, quand je cherchais mon enfant" après l'attentat.

Certains ont rédigé un texte au mot près, d'autres ont pour l'instant "des bulles d'idées" en tête, comme Stéphane Erbs, qui évoquera le 30 septembre - "le jour de mon anniversaire" - sa femme Rachel, une des premières victimes du parcours meurtrier de l'assaillant.

Le coprésident de Promenade des anges, qui prendra une seconde fois la parole au nom de ses 400 adhérents, entend "mettre en avant les belles choses qu'on fait dans l'association" - soutien scolaire, sorties, séances d'équithérapie et de shiatsu - "plutôt que se plaindre".

Il a aussi prévu de s'adresser aux accusés, notamment les trois poursuivis pour association de malfaiteurs terroristes, pour "leur dire qu'on n'est pas naïf, et que je ne crois pas à leur discours", affirmant qu'ils ne connaissaient pas les intentions de Mohamed Lahouaiej- Bouhlel.

A l'inverse, "je ne leur accorde aucun affect, aucune pensée. Je n'ai même pas de la colère à leur égard", explique Anne Murris.

"Même si le chauffeur avait été dans le box des accusés, pour moi ça n'est pas une vengeance, puisque ceux qui sont décédés ne reviendront pas", estime aussi Sophie Desvergnes.


Grève nationale : les syndicats unis contre le budget du futur gouvernement

Des policiers attendent l'arrivée du ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau à la Porte d'Orléans à Paris, le 18 septembre 2025, avant une journée de grèves et de protestations à l'échelle nationale à l'appel des syndicats sur le budget national de la France. (AFP)
Des policiers attendent l'arrivée du ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau à la Porte d'Orléans à Paris, le 18 septembre 2025, avant une journée de grèves et de protestations à l'échelle nationale à l'appel des syndicats sur le budget national de la France. (AFP)
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  • Journée de grève nationale ce jeudi à l’appel des 8 principaux syndicats français, unis contre les mesures budgétaires jugées « brutales »
  • Les autorités redoutent des débordements à Paris, avec jusqu’à 100 000 manifestants attendus et la présence annoncée de casseurs. 900 000 personnes pourraient se mobiliser dans toute la France

Les syndicats français ont promis une "journée noire" de manifestations et de grèves jeudi pour peser sur les choix budgétaires du prochain gouvernement, en pleine crise politique dans la deuxième économie de l'UE.

A Paris, le préfet de police s'est dit "très inquiet" de la présence de nombreux casseurs venant pour "en découdre" dans la manifestation prévue dans la capitale, qui pourrait selon lui rassembler 50.000 à 100.000 personnes.

Les autorités s'attendent à une mobilisation massive, avec plus de 250 cortèges annoncés qui pourraient réunir jusqu'à 900.000 personnes à travers le pays, soit cinq fois plus que lors du mouvement "Bloquons tout" du 10 septembre lancé sur les réseaux sociaux, hors de tout cadre syndical.

Cette mobilisation lancée par les huit syndicats français, unis pour la première fois depuis le 6 juin 2023, vise les mesures budgétaires "brutales" préconisées cet été par le Premier ministre François Bayrou pour réduire le déficit de la France (coupes dans le service public, réforme de l'assurance chômage, gel des prestations sociales notamment).

Son gouvernement alliant le centre droit et la droite, minoritaire à l'Assemblée nationale, a été renversé par les députés le 8 septembre.

Nommé le lendemain, son successeur Sébastien Lecornu - troisième Premier ministre d'Emmanuel Macron depuis juin 2024, le cinquième depuis sa réélection en 2022 - s'est lui aussi engagé à réduire le déficit qui plombe les comptes de la nation (114% du PIB), tout en promettant des "ruptures sur le fond" en matière budgétaire.

Ce fidèle du président a entamé une série de consultations avec les partis politiques avant de composer un gouvernement et présenter son programme, en vue de boucler dès que possible un projet de budget pour 2026.

Il a également reçu quasiment tous les syndicats, qui n'en ont pas moins maintenu leur mot d'ordre, espérant une mobilisation similaire à celles de 2023 contre la réforme des retraites qui avaient régulièrement réuni un million de manifestants, dont un pic à 1,4 million.

- "Démonstration de force" -

"Aucune des mesures catastrophiques du musée des horreurs de M. Bayrou n'est enterrée !", s'est indignée lundi la leader de la CGT, Sophie Binet, après avoir rencontré le nouveau Premier ministre.

L'abandon par Sébastien Lecornu de la très controversée suppression de deux jours fériés voulue par François Bayrou est "une première victoire", qui "confirme que nous sommes en position de force", a-t-elle estimé.

Même la CFDT, syndicat réputé plus apte au compromis, est "plus que jamais motivée pour aller dans la rue", a fait savoir sa responsable Marylise Léon qui attend "des faits et des preuves" du nouveau chef de gouvernement, et notamment un "besoin d’efforts partagés".

Elle a apprécié à cet égard que le successeur de François Bayrou se dise selon elle conscient de la nécessité de "faire quelque chose" au sujet de la taxation des hauts patrimoines, revenue au cœur du débat.

"Le budget va se décider dans la rue", estime Mme Binet, qui évoque une "démonstration de force" et laisse entrevoir une mobilisation dans la durée.

Côté transports, le trafic sera "perturbé" voire "très perturbé" dans la capitale, ainsi que pour les trains interurbains.

Ce sera moins le cas pour les trains régionaux et les TGV. Un service proche de la normale est attendu dans les aéroports, le principal syndicat de contrôleurs aériens ayant reporté sa grève.

A l'école, un tiers des enseignants du premier degré (écoles maternelles et élémentaires) seront grévistes. L'ampleur du mouvement dans la fonction publique en générale reste encore à préciser.


Le PDG de CMA CGM assure «ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale» des médias qu'il possède

Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
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  • "Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media
  • Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique"

PARIS: Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC.

"Les journaux ou chaînes de télévision qu'on a rachetés ont une indépendance, ce sont des journaux qui sont nuancés, qui offrent le pluralisme. Je ne m'immisce pas dans la ligne éditoriale de ces journaux", a-t-il déclaré lors d'une audition devant la commission des affaires économiques de l'Assemblée.

Il répondait au député France insoumise René Pilato qui suggérait une "grande loi de séparation des entreprises et des médias".

"Si des investisseurs comme le groupe CMA CGM ne viennent pas, ces médias malheureusement tombent", a ajouté M. Saadé, rappelant que le secteur des médias est "très sinistré".

"Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media.

Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique".

"Dans un monde traversé par les +fake news+, je crois que les industriels ont un rôle à jouer pour défendre le pluralisme, l'indépendance et la qualité de l'information. Si nous voulons continuer à produire de l'information en France et résister à la domination des grandes plateformes, nous devons garantir des groupes de médias solides capables de créer des contenus de qualité et de les diffuser sur tous les supports", a-t-il défendu.

Outre BFMTV, RMC, et désormais Brut, CMA Media possède les journaux La Tribune et La Tribune Dimanche, La Provence et Corse Matin. Le groupe vient également de racheter la chaîne télé Chérie 25 (NRJ Group).

Vendredi, les Sociétés des journalistes (SDJ) de BFMTV, RMC et La Tribune avaient déploré qu'"une prise de position de Rodolphe Saadé sur l'actualité politique et sociale du pays (ait) été diffusée à l'antenne de BFMTV" jeudi.

Il s'agissait d'extraits écrits tirés d'une tribune publiée dans La Provence après le mouvement "Bloquons tout" du 10 septembre. "Les entreprises ne sont pas des adversaires, elles sont des partenaires de la Nation", y écrivait notamment M. Saadé.

 


Faure «sur sa faim» après son entretien avec Lecornu, resté «très flou» sur ses intentions

Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
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  • Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu
  • Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland

PARIS: Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions".

"Pour l'instant, nous sommes restés sur notre faim et nous verrons bien ce qu'il a à nous dire dans les prochains jours", a déclaré le premier secrétaire du PS, à l'issue de sa première rencontre à Matignon, qui a duré près de deux heures.

Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu à la veille d'une importante journée de mobilisation syndicale.

Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland.

A propos de la journée d'actions de jeudi, il a expliqué que ces manifestations seraient "aussi un élément du rapport de force que nous devons installer avec un exécutif qui, jusqu'ici, n'a pas fait la démonstration de sa capacité à comprendre la colère et même l'exaspération des Français".

Olivier Faure a également dit qu'il ne souhaitait pas "voir revenir sur la table une loi immigration", estimant que le Premier ministre macroniste était "tiraillé par une droite qui lorgne de plus en plus vers l'extrême droite" et avait  "beaucoup de problèmes dans son propre socle commun".

"Nous ne cherchons pas la censure, nous ne cherchons pas la dissolution, nous ne cherchons pas la destitution. Nous cherchons à ce que les Français soient entendus", a-t-il plaidé, en citant un sondage Ifop commandé par le parti montrant que les Français, quelles que soient leurs sensibilités, plébiscitent les mesures poussées par le PS.

"Il y a des mesures qui sont très majoritaires dans le pays, pour la taxe Zucman" sur les hauts patrimoines, "pour en finir" avec la réforme des retraites, pour "rendre du pouvoir d'achat", notamment à travers "un taux différentiel de CSG", a-t-il détaillé.