Le Liban et Israël concluent l'accord sur leur frontière maritime, le Hezbollah calme le jeu

Le président libanais Michel Aoun reçoit de l'envoyé américain aux affaires énergétiques Amos Hochstein, l'accord établissant une frontière maritime entre le Liban et Israël à Beyrouth, au Liban, le jeudi 27 octobre 2022. (AP)
Le président libanais Michel Aoun reçoit de l'envoyé américain aux affaires énergétiques Amos Hochstein, l'accord établissant une frontière maritime entre le Liban et Israël à Beyrouth, au Liban, le jeudi 27 octobre 2022. (AP)
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Publié le Vendredi 28 octobre 2022

Le Liban et Israël concluent l'accord sur leur frontière maritime, le Hezbollah calme le jeu

  • Le Hezbollah a salué une «très grande victoire pour le Liban» et annoncé qu'il mettait fin à ses mesures militaires «exceptionnelles» qui avaient laissé Israël sur le qui-vive
  • Le président américain Joe Biden a félicité jeudi Israël et le Liban pour «la conclusion officielle de leur accord visant à résoudre leur litige frontalier maritime de longue date»

NAQOURA: Le Liban et Israël ont conclu jeudi un accord délimitant leur frontière maritime, qui assure la répartition de précieux gisements gaziers offshore en Méditerranée orientale et réduit la tension dans la région. 

Le président américain Joe Biden a félicité les deux pays, techniquement en état de guerre, pour la "conclusion officielle" de cet accord après des mois de négociations ardues par l'entremise des Etats-Unis. 

Le Hezbollah pro-iranien a pour sa part salué une "très grande victoire pour le Liban" et annoncé qu'il mettait fin à ses mesures militaires "exceptionnelles" qui avaient laissé Israël sur le qui-vive. 

Le Premier ministre israélien Yaïr Lapid a affirmé que cet accord constituait une "reconnaissance" de fait de l'Etat hébreu par Beyrouth. 

Mais le président libanais Michel Aoun, allié du Hezbollah, a rétorqué que l'accord n'avait aucune "dimension politique", et le chef du Hezbollah Hassan Nasrallah a assuré que l'accord ne constituait pas "une reconnaissance" d'Israël. 

Yaïr Lapid et le président libanais ont chacun de leur côté signé l'accord jeudi. 

Puis, les deux pays ont procédé à un échange de lettres de manière séparée qui a marqué la conclusion formelle de l'accord, lors d'une cérémonie au siège de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul), dans la localité frontalière libanaise de Naqoura, en présence du médiateur américain Amos Hochstein et de la coordinatrice spéciale de l'ONU au Liban Joanna Wronecka. 

Mme Wronecka a indiqué avoir reçu les coordonnées maritimes signées par les deux pays, et devra les déposer au siège de l'ONU à New York. 

"Il s'agit d'un accomplissement politique, ce n'est pas tous les jours qu'un Etat ennemi reconnaît l'Etat d'Israël dans un accord écrit et ce, devant l'ensemble de la communauté internationale", a affirmé M. Lapid. 

Dans un tweet, le président Aoun a répondu qu'il s'agissait d'un accord purement "technique", sans aucune "dimension politique" ni "conséquences qui contredisent la politique étrangère du Liban". 

Beyrouth a tenu à ce que sa délégation évite tout contact officiel avec celle de l'Etat hébreu. 

Les médias n'ont pas eu accès au bâtiment, autour duquel des Casques bleus et l'armée libanaise étaient déployés, alors que des hélicoptères de la Finul survolaient le secteur, selon un photographe de l'AFP. 

Pour le Liban, englué dans une profonde crise économique, cet accord intervient à quelques jours de la fin du mandat du président Aoun, sans qu'un successeur lui soit trouvé. 

Il intervient aussi peu avant les élections législatives du 1er novembre en Israël, pour lesquelles M. Lapid est en campagne. 

« Echanges de lettres » 

L'accord sur la frontière maritime a pris la forme de deux échanges de lettres, l'un entre le Liban et les Etats-Unis et l'autre entre Israël et les Etats-Unis. 

L'accord, qui va permettre aux deux pays d'exploiter des gisements gaziers en Méditerranée orientale, a été conclu grâce à des années de médiation américaine. 

Ce gaz permettra, selon les autorités israéliennes, de réduire le coût de l'énergie du pays mais aussi de doper les exportations vers l'Europe, qui cherche à diversifier ses approvisionnements du fait de l'invasion de l'Ukraine par la Russie. 

En vertu de l'accord, le champ offshore de Karish se situe entièrement dans les eaux israéliennes. 

Le Liban pour sa part aura tous les droits d'exploration et d'exploitation du champ de Cana, situé plus au nord-est, dont une partie se situe dans les eaux territoriales d'Israël. Mais "Israël sera rémunéré" par la firme exploitant Cana "pour ses droits sur d'éventuels gisements", selon le texte. 

Amos Hochstein a estimé devant la presse à Beyrouth que l'accord permettait de "créer de l'espoir et des opportunités économiques" et d'instaurer "la stabilité" pour les deux parties. 

Sans même attendre la signature, le groupe énergétique Energean a lancé mercredi la production de gaz naturel sur le gisement de Karish, après avoir reçu le feu vert du gouvernement israélien. 

Le Liban a de son côté demandé à TotalEnergies d'entamer rapidement les travaux de prospection dans le champ de Cana. 

L'accord n'aurait pas pu être signé sans l'assentiment du puissant Hezbollah au Liban, qui avait menacé au cours de l'été d'attaquer Israël s'il entamait l'extraction du gaz du champ de Karish avant la conclusion d'un accord. 

"Avec la conclusion de l'accord (...) la mission de la Résistance est terminée", a annoncé dans un discours Hassan Nasrallah. 

"Toutes les mesures et dispositions, ainsi que les mobilisations exceptionnelles et spécifiques de la Résistance des derniers mois sont terminées", a-t-il ajouté. 

Karish, clé des exportations de gaz d'Israël vers l'Europe

Après d'intenses tractations diplomatiques pour délimiter sa frontière maritime avec le Liban voisin, Israël a activé cette semaine le gisement gazier offshore de Karish, étape clé dans son projet de doper ses exportations de gaz naturel vers l'Europe. 

Mercredi, à la veille de la signature de l'accord, la société Energean a entamé la production à Karish, en se félicitant de "renforcer" ainsi "la sécurité de l'approvisionnement énergétique en Méditerranée orientale". 

Ce gisement devrait alimenter le marché israélien mais aussi accroître les exportations des plateformes de Leviathan et Tamar, connectées à un gazoduc reliant le sud israélien au nord de l'Egypte, où ce gaz peut être liquéfié et acheminé par bateau vers les marchés mondiaux. 

Dans la foulée de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, l'Union européenne s'est adressée à différents pays producteurs de gaz, dont Israël, pour diversifier ses approvisionnements. Et l'Etat hébreu a répondu présent. 

Goodbye Gazprom? 

"Nous ferons partie des efforts pour remplacer le gaz russe en Europe", a affirmé récemment le Premier ministre Yaïr Lapid, ajoutant qu'Israël comptait fournir à l'Europe "10%" des apports russes avant l'invasion de l'Ukraine. 

Moscou avait fourni en 2021 quelque 155 milliards de m3 de gaz aux pays de l'UE. 

Israël livre déjà du gaz à ses voisins jordanien et égyptien, et a signé en juin un accord pour la liquéfaction de son gaz en Egypte en vue de son acheminement vers l'Europe. 

Les deux gisements offshore israéliens de Leviathan et Tamar produisent 23 milliards de m3 de gaz naturel par an. 

Mais la consommation intérieure israélienne est de 13 milliards de m3 et les accords avec la Jordanie et l'Egypte avoisinent 9,5 milliards de m3, laissant peu de gaz disponible, explique Gina Cohen, spécialiste du secteur gazier israélien. 

"Pour vendre plus à l'Europe, il faut une production stable du gisement de Karish", dont la capacité à court terme est de 6,5 milliards de m3 par an, dit-elle. 

En outre, pour qu'Israël s'impose comme un fournisseur majeur de gaz à l'Europe, une partie du gazoduc avec l'Egypte doit encore être élargie et la production des gisements de Tamar et Leviathan augmentée. 

La capacité de liquéfaction de l'Egypte n'est pas non plus infinie et Israël devra trouver à moyen terme d'autres voies pour acheminer son gaz à l'Europe comme un gazoduc Israël-Chypre-Turquie ou Israël-Chypre-Grèce, voire développer ses propres terminaux de gaz liquéfié, estiment des analystes. 

Cana 

L'accord frontalier Israël/Liban reconnaît les droits israéliens sur Karish et ceux du Liban sur les gisements de Cana, avec la précision que l'Etat hébreu touchera sa quote-part, environ 17% selon le Premier ministre Yaïr Lapid, de l'exploitation de ce réservoir qui traverse en partie ses eaux maritimes. 

Mais Cana est loin d'être prêt à entrer en production. Une étude sismique réalisée en 2012 sur une zone limitée par la société britannique Spectrum a estimé les réserves de gaz récupérables au Liban à environ 720 milliards de mètres cubes. 

Ce mois-ci, le Premier ministre libanais Najib Mikati "a demandé aux représentants" de la société française TotalEnergies, à la tête d'un consortium qui a reçu une licence d'exploitation pour Cana en 2018, d'"entamer immédiatement" "le forage d'exploration dans les eaux libanaises". 

Pour passer de l'exploration à l'exploitation, le Liban pourrait donc devoir attendre plusieurs années. 


«Gaza brûle», déclare le ministre israélien de la Défense après des frappes intenses

Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza. (AFP)
Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza. (AFP)
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  • "Gaza brûle. Tsahal frappe d'une main de fer les infrastructures terroristes, et les soldats de Tsahal se battent vaillamment pour créer les conditions nécessaires à la libération des otages et à la défaite du Hamas"
  • "Nous ne céderons pas et ne reculerons pas jusqu'à ce que la mission soit achevée"

JERUSALEM: Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza.

"Gaza brûle. Tsahal frappe d'une main de fer les infrastructures terroristes, et les soldats de Tsahal se battent vaillamment pour créer les conditions nécessaires à la libération des otages et à la défaite du Hamas", a déclaré M. Katz sur X.

"Nous ne céderons pas et ne reculerons pas jusqu'à ce que la mission soit achevée", a-t-il ajouté.

 


Le Qatar est le seul pays capable d'être un médiateur concernant Gaza, souligne Rubio

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  • Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a estimé mardi que le Qatar était le seul pays capable de jouer le rôle de médiateur pour Gaza
  • "Evidemment, ils doivent décider s'ils veulent le faire après la semaine dernière ou non, mais nous voulons qu'ils sachent que, s'il existe un pays dans le monde qui pourrait aider à mettre fin à cela par une négociation, c'est le Qatar"

TEL-AVIV: Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a estimé mardi que le Qatar était le seul pays capable de jouer le rôle de médiateur pour Gaza, malgré une frappe israélienne ciblant des dirigeants du Hamas dans l'émirat.

"Evidemment, ils doivent décider s'ils veulent le faire après la semaine dernière ou non, mais nous voulons qu'ils sachent que, s'il existe un pays dans le monde qui pourrait aider à mettre fin à cela par une négociation, c'est le Qatar," a déclaré M. Rubio aux journalistes alors qu'il se rendait à Doha depuis Israël.

 

 


Forts bombardements sur la ville de Gaza après le soutien de Rubio à Israël

La ville de Gaza a été touchée par des bombardements forts et soutenus dans la nuit de lundi à mardi, ont indiqué plusieurs témoins à l'AFP, au lendemain d'une visite à Jérusalem du secrétaire d'Etat américain qui a réitéré l'appui des Etats-Unis à Israël. (AFP)
La ville de Gaza a été touchée par des bombardements forts et soutenus dans la nuit de lundi à mardi, ont indiqué plusieurs témoins à l'AFP, au lendemain d'une visite à Jérusalem du secrétaire d'Etat américain qui a réitéré l'appui des Etats-Unis à Israël. (AFP)
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  • Marco Rubio a promis lundi au gouvernement de Benjamin Netanyahu le "soutien indéfectible" des Etats-Unis à Israël pour éliminer le mouvement islamiste palestinien Hamas dans la bande de Gaza
  • Quelques heures plus tard, de très fortes frappes se sont fait entendre dans la bande de Gaza, assiégée et affamée, selon des témoins

GAZA: La ville de Gaza a été touchée par des bombardements forts et soutenus dans la nuit de lundi à mardi, ont indiqué plusieurs témoins à l'AFP, au lendemain d'une visite à Jérusalem du secrétaire d'Etat américain qui a réitéré l'appui des Etats-Unis à Israël.

Marco Rubio a promis lundi au gouvernement de Benjamin Netanyahu le "soutien indéfectible" des Etats-Unis à Israël pour éliminer le mouvement islamiste palestinien Hamas dans la bande de Gaza.

Quelques heures plus tard, de très fortes frappes se sont fait entendre dans la bande de Gaza, assiégée et affamée, selon des témoins.

"Il y a des bombardements massifs et incessants sur la ville de Gaza et le danger ne cesse d'augmenter", a déclaré à l'AFP Ahmed Ghazal, un habitant de cette zone.

Cet homme de 25 ans a décrit une "explosion qui a violemment secoué le sol du quartier" peu après 01H00 locale mardi (22H00 GMT lundi).

"J'ai couru dans la rue, sur le site de la frappe", "trois maisons" d'un bloc résidentiel "ont été complètement rasées". "De nombreuses personnes sont emprisonnées sous les débris et on peut entendre leurs cris."

Le porte-parole de la Défense civile de la bande de Gaza, Mahmoud Bassal, a déclaré à l'AFP que "les bombardements se (poursuivaient) intensément dans toute la ville de Gaza", précisant que "le nombre de morts et de blessés (continuait) d'augmenter".

"Il y a des morts, des blessés et des personnes disparues sous les décombres suite à des frappes aériennes israéliennes visant un bloc résidentiel près de la place Al-Shawa dans la ville de Gaza", a-t-il détaillé, évoquant "un massacre majeur".

La Défense civile avait fait état de 49 Palestiniens tués lundi, dont plus de la moitié à Gaza-ville, où l'armée a intensifié ses attaques avec l'objectif de s'en emparer.

Compte tenu des restrictions imposées aux médias à Gaza et des difficultés d'accès sur le terrain, l'AFP n'est pas en mesure de vérifier de manière indépendante les informations des différentes parties.

Le déplacement de M. Rubio dans la région intervient après une attaque israélienne inédite le 9 septembre au Qatar contre des chefs du Hamas.

Rassurer Doha 

Après Jérusalem, M. Rubio se rend mardi à Doha, où il devrait rencontrer le cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, afin de "réaffirmer le soutien total des Etats-Unis à la sécurité et la souveraineté du Qatar après l'attaque israélienne", selon le département d'Etat.

La frappe aérienne au Qatar, pays médiateur entre Israël et le Hamas et qui abrite la plus grande base aérienne américaine de la région, avait provoqué de rares critiques de Donald Trump contre Israël.

Le président américain a assuré lundi à des journalistes dans le Bureau ovale qu'Israël "ne frappera pas au Qatar".

Réunis lundi à Doha après l'attaque israélienne, les dirigeants arabes et musulmans ont appelé à "revoir les relations diplomatiques et économiques avec Israël et à engager des poursuites à son encontre".

Le secrétaire d'Etat américain s'est montré pessimiste quant à la possibilité d'une solution "diplomatique" à Gaza, qualifiant le Hamas d'"animaux barbares".

L'offensive israélienne à Gaza a suivi l'attaque du 7-Octobre qui a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts à Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire. L'ONU y a déclaré la famine, ce qu'Israël dément.

M. Rubio a aussi affiché la solidarité des Etats-Unis avec Israël avant un sommet coprésidé par la France et l'Arabie saoudite le 22 septembre à l'ONU, destiné à promouvoir la reconnaissance d'un Etat de Palestine, au côté d'Israël.

Une initiative largement symbolique dans la mesure où Israël s'oppose fermement à la création d'un tel Etat auquel aspirent les Palestiniens.

En soirée, le secrétaire d'Etat a rencontré à Jérusalem des familles d'otages, selon un responsable du département d'Etat. Sur les 251 personnes enlevées durant l'attaque du 7-Octobre, 47 sont encore retenues à Gaza, dont 25 décédées selon l'armée israélienne.